Jean-Marie Curtil
Jean-Marie Curtil, dit Jean, nĂ© le Ă Lapeyrouse dans l'Ain[1] et dĂ©cĂ©dĂ© le Ă Marseille, Ă©bĂ©niste de formation, fut agent de liaison pour lâArmĂ©e secrĂšte Ă Polliat (Ain, France) de Ă . Le 12-, il effectue une mission de liaison pour le groupe LibĂ©ration-Sud par l'entremise de Roger Morandat. Ă la suite de cette mission, il fut arrĂȘtĂ© ainsi que nombre de camarades (dont Raymond Aubrac, Serge Ravanel[2], Maurice Kriegel-Valrimont, Raymond HĂ©go, François Morin-Forestier, Paulette et Roger Morandat, etc.)[3].
ĂlĂ©ments biographiques
Ces éléments sont principalement issus du Service historique de la Défense (cÎte GR 16 P /153247- CURTIL/DIR) et des archives privées Curtil :
- 1932 ou 1933 : la famille Curtil sâinstalle Ă Polliat (Ain) oĂč, Antoine Curtil (pĂšre) obtient le poste de garde barriĂšre. Il est Ă noter que la famille Morandat est issue du mĂȘme village.
- 1928-1934 : Ă©cole de Carriat Ă Bourg-en-Bresse oĂč Jean-Marie Curtil obtient les brevets de charron-menuisier-Ă©bĂ©niste.
- au : service militaire, chef de bataillon Warringen, 16e Bataillon des Chasseurs Ă pied.
- au [4] : 19e Bataillon des Chasseurs Ă Pied (campagne de NorvĂšge[5]).
- Entre et : ébéniste :
- Il enseigne son mĂ©tier Ă lâĂ©cole dite du Bacchu (EAS, place du , Lyon) ;
- ĂbĂ©niste Ă Lyon dans la maison de meubles dâun dĂ©nommĂ© Lambert (dâaprĂšs le rapport de la Section SpĂ©ciale de Lyon);
- Du au : agent de liaison pour lâA.S. Polliat (Ain) dont le chef Ă©tait alors Henri Morandat[6]. On lui reconnaĂźt les activitĂ©s suivantes[7] :
- Agent de liaison avec les groupes voisins ;
- Propagande et diffusion ;
- Instruction sur lâarmement ;
- Transport dâarmes.
Chronologie des Ă©vĂšnements ayant conduit Ă son arrestation
La chronologie est issue des fonds déposés aux Archives départementales du RhÎne[8] :
12 mars 1943
Jean-Marie Curtil est mis en contact par Roger Morandat avec deux rĂ©sistants, soit Serge Ravanel (alias Asher ou PressencĂ©) et Alfred Malleret Joinville[9]. Il a rendez-vous avec eux place Bellecour Ă Lyon. Ces derniers lui prĂ©sentent un dĂ©nommĂ© Gaillard avec lequel il devra se rendre Ă ChambĂ©ry. Il prend donc le Paris-Modane en compagnie Maurice Kriegel-Valrimont (alias Gaillard ou Gayet ou Maurice Fouquet) qui lui fournira une fausse carte dâidentitĂ© au nom de Destuel, non tamponnĂ©e et sans photo (Jean-Marie Curtil Ă©tant rĂ©fractaire au Service du travail obligatoire). Les deux hommes voyagent sĂ©parĂ©ment. Curtil profite d'un arrĂȘt pour coller une photographie sur sa nouvelle carte d'identitĂ©. ArrivĂ© Ă ChambĂ©ry, Maurice Kriegel Valrimont le conduit pour la nuit chez Stephens (architecte) qui le cache chez son employĂ©, Vidal. M. Kriegel-Valrimont, quant Ă lui, passe la nuit chez Stephens.
Le lendemain, les deux hommes ont rendez-vous dans une rue de ChambĂ©ry oĂč il est remis Ă Jean-Marie Curtil, une enveloppe avec 4 plis avec des adresses Ă©crites en clair. Il sâagit donc pour lui de les remettre dans les boĂźtes aux lettres indiquĂ©es Ă Lyon.
13 mars 1943
Jean-Marie Curtil reprend le Modane-Paris avec l'ordre de reprendre contact, à son arrivée, avec Roger Morandat[10].
Dans la nuit du 13 au , le Paris-Modane fait un arrĂȘt Ă Bourg-en-Bresse (23 h 35). Jean-Marie Curtil descend et sâinstalle dans la salle dâattente des 1re classe. A-t-il rendez-vous ? Veut-il Ă©viter dâarriver Ă Lyon de nuit pendant le couvre-feu, sachant que les contrĂŽles y sont plus sĂ©vĂšres ? Envisage-t-il donc de prendre un train plus tard pour Lyon (7 h) et de passer la nuit Ă Bourg ? D'aprĂšs le rapport du procureur de la RĂ©publique Ă Lyon, Ducasse, en date du , il avait reçu l'ordre de reprendre contact avec un « dĂ©nommĂ© Morandat ». La femme de Roger Morandat, a avouĂ©, lors de son arrestation, que « PrĂ©ssencĂ© » (pseudonyme de Serge Ravanel) Ă©tait venu, le , remettre, Ă son mari, une enveloppe portant comme seule mention « Ain » et avait demandĂ© Ă son mari de faire la liaison entre Bourg et Lyon[11].
14 mars 1943[12]
Quoi quâil en soit, il est contrĂŽlĂ© par deux gendarmes[13], Andrieu et Matray. Ceux-ci trouvant sa carte suspecte, lui mettent les menottes et le conduisent Ă la gendarmerie[14]. FouillĂ©, quatre plis sont alors dĂ©couverts dans ses chaussettes[15] ainsi qu'un rapport sur la situation en Savoie. Il est transfĂ©rĂ©, le lendemain, Ă Lyon.
15 mars 1943
Ă la suite de son arrestation, les descentes de police sâensuivent, le , aux adresses indiquĂ©es sur les enveloppes : Biard, 7 rue de l'HĂŽtel-de-Ville ; Billon, 7 rue des Feuillants ; Grollier, 64 rie Sala et Balzac, 59 rue de L'HĂŽtel-de-Ville.
12 octobre 1943[16]
Condamnation, par la Section SpĂ©ciale de Lyon, Ă 1 000 francs dâamende et 15 mois dâemprisonnement pour activitĂ©s antinationales, refus du S.T.O. et fabrication de fausses cartes dâidentitĂ©.
Détention et déportation[17]
- du au : prison de Saint-Paul, Lyon ;
- du au : centrale dâEysses[18] (matricule 2340) ;
- du au : Camp d'internement de Noé[19]
- du au : Prison de Saint-Michel (Toulouse)
- du au : Munich (Allemagne)
Notes et références
- « Fiche déporté : Jean-Marie CURTIL », sur www.memoire-deportation-ain.fr (consulté le )
- Alex boutin, MinistĂšre de l'IntĂ©rieur â DICOM, « Extrait du film "Sur les pas de Jean Moulin", Seconde arrestation le 15 mars 1943 Ă Lyon. TĂ©moignage filmĂ© de Serge Ravanel », sur http://museedelaresistanceenligne.org/media1179-Seconde-arrestation-le-15-mars-1943-A,
- François BĂ©darida, « « Chapitre deux : mars-mai 1943. La premiĂšre arrestation de Raymond Aubrac (premiĂšre partie) » », LibĂ©ration, no SpĂ©cial Aubrac,â (lire en ligne)
- Service historique de la DĂ©fense â dossiers administratifs de rĂ©sistants â Dossiers individuels RĂ©sistance - cĂŽte GR 16 P /153247- CURTIL (DIR).
- Le Lieutenant-colonel MONTAGNON (commandant le 19e BCP), Historique du 19e BCP, Landau, , 60 p. (lire en ligne), Les combats du Liger ont coûté, au 19e Bataillon des Chasseurs Portés, les deux tiers de son effectif.
- MERCIER Pierre, « Le S.O.E. Aide des Alliés AIN - Musée de la Résistance Ain - Jura », sur www.resistance-ain-jura.com (consulté le )
- cf. Attestation du 02/12/1961 signée par Henri Morandat, en qualité de chef de section de l'A.S. Polliat, confirmant les activités de résistant de Jean Curtil
- Archives départementales du RhÎne - Fonds «parquets» - cÎte 3U.2010
- cf. pseudonyme Jean-Claude
- Roger Morandat fut arrĂȘtĂ© le 15 mars 1943 Ă son domicile de Lyon. Il fut incarcĂ©rĂ© Ă la prison de Saint-Paul, puis transfĂ©rĂ© Ă Eysses le 08/12/1943 (matricule 2660). Il fut dĂ©portĂ© en Allemagne (Dachau-Auschwitz-Mauthausen, matricule 73776). Il est dĂ©cĂ©dĂ© en juin 1998. http://www.bddm.org/liv/details.php?id=I.229.#MORANDAT
- « Rapport du procureur de la République à Lyon, du 23 juillet 1943 », sur http://charles.delestraint.free.fr/an4-11.htm,
- L'Histoire, Numéros 206 à 211, p. 384, éd. Société d'éditions scientifiques, 1997
- Aubrac, p. 55, Ă©d. Albin Michel, 1997, (ISBN 2226088857)
- Serge Ravanel, Jean-Claude Raspiengeas, L'esprit de RĂ©sistance, p. 101, Ă©d. Seuil, 1995, (ISBN 2020190281)
- cf. procÚs-verbal du 14/03/1943, rédigé par le commissaire Maurice Philip (Lyon).
- cf. Greffe de la cour d'appel de Lyon en date du 19 janvier 1945 annulant la condamnation prononcée par la Section Spéciale de Lyon à l'encontre de Jean-Marie Curtil (archives nationales, cÎte BB/18/7065, 2 BL 4063/3, n0 99)
- Archives Bad Arolsen, PF/1WNo 89.914
- « Musée de la résistance (1940-1945) en ligne - liste des prisonniers, centrale d' Eysses », sur http://museedelaresistanceenligne.org/mediaseysses/Resistants_Eysses.pdf
- Malo Ăric, « « De Vichy Ă la QuatriĂšme RĂ©publique : le camp de NoĂ© (1943-1945)» », Annales du Midi : revue archĂ©ologique, historique et philologique de la France mĂ©ridionale, no Vol. 104, n0199,â , pp. 441-458. (lire en ligne)
Voir aussi
Sources
- Archives départementales du RhÎne, cote 3U 2010. Document téléaccessible à l'adresse http://charles.delestraint.free.fr/an4-11.htm (Rapport du procureur de la République de Lyon, du , adressé au procureur général à Lyon, concernant les faits établis à partir des arrestations de ).
- Alex BOUTIN, Extrait du film "Sur les pas de Jean Moulin", Seconde arrestation le Ă Lyon. TĂ©moignage filmĂ© de Serge Ravanel. , MinistĂšre de l'IntĂ©rieur â DICOM. Document tĂ©lĂ©accessible Ă lâadresse http://museedelaresistanceenligne.org/media1179-Seconde-arrestation-le-15-mars-1943-A.
- Lucie AUBRAC, Ils partiront dans lâivresse, Paris, Seuil, 1984, p. 9.
- archives nationales cĂŽte BB/18/7065, 2 BL 4063/3, n0 99
- François BĂDARIDA, « Chapitre deux : mars-. La premiĂšre arrestation de Raymond Aubrac (premiĂšre partie) ». LibĂ©ration, SpĂ©cial Aubrac. 09/07/1997. Article tĂ©lĂ©accessible Ă lâadresse suivante : http://www.liberation.fr/societe/1997/07/09/special-aubrac-chapitre-deux-mars-mai-1943_211253
- Service historique de la DĂ©fense â dossiers administratifs de rĂ©sistants â Dossiers individuels / RĂ©sistance - cĂŽte GR 16 P /153247- CURTIL (DIR).
- Archives privées Curtil
- Mémoire de la déportation dans l'Ain (1939-1945) - site téléaccessible à l'adresse suivante : http://www.memoire-deportation-ain.fr/la-r%C3%A9sistance-arm%C3%A9e.aspx
- Henri NOGUĂRES, Histoire de la RĂ©sistance en France de 1940 Ă 1945, T.III, GenĂšve, CrĂ©mille et Famot, 1982.
- Serge RAVANEL, Lâesprit de rĂ©sistance, Paris, Seuil, 1995, p. 101.
- Olivier WIEVIORKA, « Daniel Cordier, RĂ©sistant, biographe de Jean Moulin. âen tant que camarades des Aubrac, je souhaiterais quâils sâexpliquentâ», LibĂ©ration, le . Article tĂ©lĂ©accessible Ă lâadresse : http://next.liberation.fr/culture/1997/04/08/daniel-cordier-resistant-biographe-de-jean-moulinen-tant-que-camarade-des-aubrac-je-souhaiterais-qu-_203288
Bibliographie
- Jean-Pierre AZĂMA (dir.), Jean Moulin face Ă lâHistoire, Paris, Flammarion, 2000, 418 p.
- GĂ©rard CHAUVY, Aubrac-Lyon, 1943, Albin Michel, 1997, 456 p., p. 35, 44, 55 et 89.
- Laurent DOUZOU, La Désobéissance: histoire d'un mouvement et d'un journal clandestins, Libération-Sud, 1940-1944, Odile Jacob, 1995, 748 p., p. 218.
- François-Yves GUILLIN, Le général Delestraint, premier chef de l'Armée secrÚte, 388 p., Plon, 1995 (ISBN 978-2-259-00302-5)
- Ăric MALO, « De Vichy Ă la QuatriĂšme RĂ©publique : le camp de NoĂ© (1943-1945)», dans Annales du Midi : revue archĂ©ologique, historique et philologique de la France mĂ©ridionale, 1992, Vol. 104, n0199, p. 441-458.
- Antoine PROST (sous la direction). La rĂ©sistance, une histoire. Paris, Ăditions de lâAtelier, 1997.
- Musée de la résistance en ligne (1940-1945), http://www.museedelaresistanceenligne.org/expo.php?expo=19&theme=18&stheme=94
- http://www.memoire-deportation-ain.fr/KSearchEngine/FicheDeporte.aspx?pageid=-1&mid=-1&id_entree=1413
- http://museedelaresistanceenligne.org/expo.php?expo=90&theme=174