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Irina Anatolevna Flige

Irina Anatolevna Flige est une géographe et une activiste russe, présidente de la branche pétersbourgeoise de l'ONG Memorial[1].

Irina Anatolevna Flige
Portrait de Irina Anatolevna Flige
Biographie
Naissance
Saint-PĂ©tersbourg
Nationalité Russe
Conjoint Andrei Reiznikov (d) et Veniamin Iofe (d)
Thématique
Formation DiplÎmée du Département de géographie de l'Université d'Etat de Leningrad
Titres Directrice du Centre de recherche de Memorial, Saint-Pétesbourg depuis 2002, membre du Conseil d'administration de la branche pétersbourgoise de Memorial depuis 1998
Profession Militante pour les droits de la personne humaine
Approche Histoire de l' URSS, Mémoire des victimes du systÚme concentrationnaire soviétique

Enfance et dĂ©but d’engagement politique

NĂ©e le [2] dans une famille de l'intelligentsia pĂ©tersbourgeoise (mĂšre ingĂ©nieure et pĂšre directeur d'un Institut technique), Irina Flige adopte dĂšs son adolescence un certain recul vis-Ă -vis du discours officiel de l’État russe, comportement qu'elle qualifie de « marginalitĂ© Ă  la soviĂ©tique »[3]".

Cette tendance se confirme en 1976, lorsqu'Ă  l'Ăąge de 16 ans elle rencontre Andrei Reiznikov, un Ă©tudiant de physique « mi-hippie mi-dissident Â» et futur compagnon de cette derniĂšre, qui l'introduit dans un groupe de jeunes Ă©tudiants russes trĂšs critiques envers le rĂ©gime. Irina explique son engagement : « Je me prĂ©parais Ă  entrer Ă  la facultĂ© de mathĂ©matiques, je n'Ă©tais pas du tout "politisĂ©e"-on ne parlait jamais politique Ă  la maison. Ce qui m'a attirĂ©, c'Ă©tait la bravade contre l'hypocrisie et la pesanteur du systĂšme »[3]. Le groupe est trĂšs hĂ©tĂ©rogĂšne, certains visent Ă  rĂ©introduire les valeurs essentielles du marxisme qu'ils considĂšrent avoir Ă©tĂ© dĂ©voyĂ©es par le PCUS, d'autres prĂŽnent un rapprochement du pays avec l'Occident, enfin certains militent pour l'instauration d'une communautĂ© basĂ©e sur les idĂ©aux hippies (Peace and Love). Si les objectifs sont divers, tous les membres du groupe se rassemblent autour de la contestation du rĂ©gime. Cette derniĂšre s'organise Ă  travers diverses actions notamment le placardage d'affiches satiriques dans le mĂ©tro et la crĂ©ation du journal Perspectives, qui ne dĂ©passera pas le deuxiĂšme numĂ©ro.

AprĂšs quelques mois d'activitĂ©, le petit groupe est arrĂȘtĂ© par le KGB. Les plus ĂągĂ©s sont envoyĂ©s dans des camps pour « propagande anti-soviĂ©tique Â», Andrei Reiznikov est expĂ©diĂ© dans un hĂŽpital psychiatrique, et Irina renvoyĂ©e de sa facultĂ© de mathĂ©matiques.

Travail au sein de Memorial

DĂ©but d’intĂ©rĂȘt pour le Goulag

C'est en suivant son compagnon de l'Ă©poque, Andrei Reznikov, qui a obtenu grĂące au soutien d'amis gĂ©ologues un stage dans l'AltaĂŻ, qu'Irina commence Ă  s'intĂ©resser Ă  la thĂ©matique du Goulag. En effet, pendant environ un an, Irina baigne dans un environnement propice Ă  une sorte d’effervescence intellectuelle, processus renforcĂ© par ses lectures personnelles (Marx, la Bible, les samizdats et l’Archipel du Goulag d’Alexandre Soljenitsyne, l’un des ouvrages les plus emblĂ©matiques sur le systĂšme concentrationnaire soviĂ©tique) : « Les gens Ă©taient trĂšs disponibles, on lisait et discutait beaucoup, loin de toute emprise des institutions et du systĂšme en gĂ©nĂ©ral. »[3].

De retour Ă  Saint-PĂ©tersbourg (alors Leningrad), Irina s’inscrit Ă  la facultĂ© de gĂ©ographie. Elle se passionne pour la dendrologie, la gĂ©ographie et l’histoire du Grand Nord soviĂ©tique. GrĂące Ă  des expĂ©ditions de terrain organisĂ©es par sa facultĂ©, Irina dĂ©couvre les Ăźles Solovki, dans lesquelles elle se spĂ©cialise. Elle publie en 1989 une Ă©tude pionniĂšre selon Nicolas Werth, prĂ©sentĂ©e sous la forme d’un atlas gĂ©ographico-historique cartographiant l’emplacement de plus d’une dizaine de camps de travaux forcĂ©s.

Implication dans l’ONG Memorial

En 1989, Irina Flige rejoint l’association Memorial[4]. Dans le cadre de son Ă©tude des Ăźles Solovki, elle remarque que de nombreux dĂ©tenus Â« disparaissent Â» des registres Ă  partir de 1937. En effet, ces derniers ont Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©s dans le cadre des « opĂ©rations secrĂštes de masse Â» de 1937-1938 (correspondant aux Grandes Purges, qui trouveraient ses origines dans l’Ordre opĂ©rationnel n° 00447 du NKVD), inconnues Ă  l’époque. Irina se lance donc, avec Veniamin Ioffe (fondateur et premier prĂ©sident de la branche pĂ©tersbourgeoise de l’association Memorial) dans la recherche des noms des disparus et du lieu dans lequel ils ont Ă©tĂ© envoyĂ©s. GrĂące Ă  une Ă©mission de tĂ©lĂ©vision, Memorial lance un appel aux familles des disparus. ParallĂšlement, l’organisation fait pression sur le gouvernement pour accĂ©der aux archives de la SĂ©curitĂ© d’État de l’époque (1937-1938). AprĂšs trois ans de recherches, Irina constitue une liste nominale de 1825 dĂ©tenus[3] dĂ©portĂ©s par le NKVD vers Kem puis dans la prison de Medvejegorsk oĂč leurs traces disparaissent une fois encore. Il faut attendre quatre ans avant que Veniamin loffe et elle ne dĂ©couvrent le lieu des exĂ©cutions : le site de Sandarmokh.

En 2001, Irina Flige et Veniamin loffe dĂ©couvrent le site des exĂ©cutions de masse de la Terreur Rouge, Ă  quelques kilomĂštres de Saint-PĂ©tersbourg. Enfin, Ă  la mort de Veniamin Ioffe en 2002, Irina poursuit le projet qu’il portait, celui de la construction d’un mĂ©morial en mĂ©moire des victimes des rĂ©pressions soviĂ©tiques. Ainsi, elle supervise le dĂ©placement d’une immense pierre des Ăźles Solovki (prĂ©sente devant un escalier par lequel les dĂ©tenus Ă©taient prĂ©cipitĂ©s s’ils Ă©taient « coupables Â» d’un « grave manquement au rĂšglement») vers Saint-PĂ©tersbourg. Le mĂ©morial est Ă©rigĂ© sur la place de la TrinitĂ© de Saint-PĂ©tersbourg, et inaugurĂ© le .

Depuis plus d’une dizaine d’annĂ©e, Irina Flige se consacre Ă  la crĂ©ation d’un MusĂ©e virtuel du Goulag[5] en recueillant les tĂ©moignages des derniers ex-dĂ©tenus du Goulag, de leur famille, mais Ă©galement en cartographiant les sites des anciens camps, des lieux d’exĂ©cution et en faisant l’inventaire de tous les musĂ©es traitant du Goulag en Russie. Elle est, depuis 2002, la directrice de la branche pĂ©tersbourgeoise de Memorial.

En 2020 sort son livre Sandarmokh, la symphonie des sens (Les Belles lettres), au sujet du massacre de plusieurs milliers de personnes Ă  Sandarmokh en 1937-1938, lors des Grandes Purges[6].

Bibliographie

  • Irina Flige: Sandormokh. Le Livre noir d’un lieu de mĂ©moire. SociĂ©tĂ© d'Ă©dition Les Belles Lettres, Paris, 2021, 167 Seiten. (ISBN 978-2-251-45129-9). Traduit du russe par Nicolas Werth. PrĂ©face et Postface du traducteur. Titre original: Sandormokh, Dramaturgia smyslow.

Notes et références

  1. (en) Mary McAuley, Human Rights in Russia : Citizens and the State from Perestroika to Putin, I.B.Tauris, , 320 p. (ISBN 978-1-78453-125-6, lire en ligne)
  2. « ЀлОгД Đ˜Ń€ĐžĐœĐ° ĐĐœĐ°Ń‚ĐŸĐ»ŃŒĐ”ĐČĐœĐ° », sur old.memo.ru (consultĂ© le )
  3. Werth, Nicolas, (1950- ...)., La route de la Kolyma : voyage sur les traces du goulag, Paris, Belin, 221 p. (ISBN 978-2-7011-9801-9, OCLC 962734014, lire en ligne)
  4. « Musée virtuel du Goulag », sur associationdesamisdememorialenfrance.hautetfort.com (consulté le )
  5. « An interview with Irina Flige, director of the St. Petersburg Memorial Research Centre (Part One) - Rights in Russia », sur www.rightsinrussia.info (consulté le )
  6. Nicolas Werth et Irina Flige, « Sandarmokh, un charnier de la Grande Terreur », L'Histoire,‎ , p. 68-75 (lire en ligne)

Liens externes

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