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Focus groupe en ergonomie

Le focus group (ou focus groupe) est une méthode d’enquête permettant de recueillir l’opinion des utilisateurs sur un logiciel ou un site web. Cette méthode employée historiquement en marketing[1] peut s’appliquer aux produits informatiques afin de mieux recueillir des opinions, des motivations et attitudes des utilisateurs voire l’image qu’ils se font du produit, à partir des usages, pratiques et expériences vécues. Contrairement aux méthodes plus courantes d'ergonomie, le focus groupe se pratique avec plusieurs participants : utilisateurs ou futurs utilisateurs de l’application. Il permet uniquement de recueillir des éléments subjectifs, et non des données objectives sur l’usage de l’application comme le test utilisateur par exemple. En règle générale, on conseille de ne pas dépasser 7-8 utilisateurs par focus groupe. Au-delà certains utilisateurs, plus timides, risquent de ne pas s’exprimer[2].

En ergonomie informatique, le focus groupe fait partie de la démarche de conception centrée sur l'utilisateur. Il est particulièrement intéressant en phase d’analyse pour démarrer la conception d’une interface ou d’un nouveau site. En plus d'aborder les préférences, les attentes et les priorités des utilisateurs visés, il permet de recueillir des idées nouvelles partagées et approfondies en commun. Cette méthode peut également être utilisée en phase d’évaluation afin de recueillir les réactions des utilisateurs sur un prototype de l’interface, mais dans ce cas, elle ne sera pas aussi efficace qu’un test utilisateur car il ne s’appuie pas sur la mise en situation réelle des utilisateurs.

DĂ©roulement

En fonction des objectifs définis au préalable avec l’équipe projet, la trame du focus groupe est définie sur la base des différents thèmes (5 ou 6 en général) qui seront abordés lors de la séance. Chaque thème identifié fait l’objet soit d’une discussion de groupe, soit d’une activité spécifique. Le focus groupe peut s'étaler sur une durée de 2 heures avec au moins une pause.
Selon les besoins de l'enquête, il est préférable de procéder par questionnement pour identifier les motivations des utilisateurs ou les faire réagir sur un nouveau design. Par contre, s’il s’agit de concevoir une nouvelle interface, il peut être intéressant de demander aux participants de réaliser en petit groupe une maquette de l’interface « idéale » qu’ils présenteront ensuite aux autres personnes.
Afin de pouvoir analyser les résultats du focus groupe, il est utile d’enregistrer le déroulement de la séance, ou à défaut qu'une seconde personne puisse noter les réactions et idées des participants.

Un focus groupe se déroule en 3 temps :

  1. phase d'introduction
  2. phase de réalisation
  3. phase de clĂ´ture

1. Introduction

Au début de la séance, l'animateur doit préciser les "règles du jeu" en termes d'échanges et d'écoute (parler chacun son tour, chacun peut avoir une opinion différente, ne pas se censurer ou couper la parole, etc.). Il peut être utile selon l'ambiance de rendre ces règles visibles et disponible pendant la séance sur un paper-board par exemple.
Classiquement, la réunion commence par une animation destinée à "briser la glace" afin de renforcer la cohésion du groupe et donc stimuler les interactions ultérieures. Ceci permet aux participants de faire connaissance entre eux afin de s’exprimer ensuite plus facilement. Cet exercice peut durer au plus 10 minutes.
Selon le cas, il est possible de "briser la glace" en évoquant les règles du focus groupe ou bien d'utiliser un des thèmes du focus groupe et lancer les échanges par ce biais[3].

2. RĂ©alisation

Le rôle de l’animateur consiste à proposer des thèmes de discussion. Selon les questions abordées, il peut être préférable de proposer des exercices de difficulté croissante en commençant par des consignes simples, voire des associations d’idées, puis en se focalisant sur certains thèmes spécifiques du produit au fur et à mesure de l’avancement de la séance. Lorsqu'une interface graphique ou un prototype est évaluée par le groupe, l'animateur doit s'attacher à ce que les participants se représentent l'utilisation du produit en fonction de leurs propres besoins et exigences. Ces retours peuvent s'avérer utiles pour définir les critères d'utilisabilité qui seront appliqués lors de la conception proprement dite du produit. Pour chaque thème, l'animateur doit stimuler le débat, reformuler les réponses et recadrer lorsque le groupe s’éloigne de la consigne. Il veille à ce que chacun puisse s’exprimer. Un paper-board peut aider à retranscrire les idées émises, y compris à illustrer ou proposer des schémas d'interface. À la fin de chaque thème, l'animateur invite le groupe à synthétiser les idées échangées. Un support écrit tel un paper-board, peut faciliter la synthèse et l'échange. Cette retranscription servira en fin de séance pour réaliser une synthèse générale.

3. ClĂ´ture

En fin de séance, les différents thèmes sont repris et présentés aux participants. L'animateur sollicite la validation des idées et réactions exprimées par les participants. Cette dernière étape ne doit être négligée ni en temps ni en pertinence. En effet, de nouveaux points peuvent être évoqués à la lumière des thèmes abordés, de même que des réserves et nuances peuvent apparaitre.

Utilisation

Avantages

  • Un groupe de discussion gĂ©nère des idĂ©es et des arguments qui seraient moins susceptibles d'ĂŞtre rĂ©coltĂ©s sans interaction entre plusieurs personnes, en Ă©coutant les expĂ©riences des autres et stimulant ses propres expĂ©riences. Il s'agit d'un effet en cascade ou en chaine, oĂą ce qui est dit par l'un crĂ©e du sens chez un autre[4]
  • Les membres du groupe dĂ©veloppent un langage commun pour dĂ©crire des expĂ©riences similaires, favorisant l'Ă©change
  • Les groupes de discussion sont l'occasion pour tous les membres de pouvoir s'exprimer librement, dans un cadre de confiance. Ceci vaut surtout pour des thèmes touchant Ă  l'intimitĂ©[5]

Inconvénients

Contrairement à des observations ou entretiens individuels, l'animateur d'un focus groupe ne contrôle pas les échanges de la même manière, en particulier les digressions et les hors-sujets. Les idées échangées sont autant provoquées par les questions de l'animateur qu'en réaction aux arguments d'autres participants. Cette situation est proche du principe d'incertitude d'Heisenberg où "ce que nous observons n'est pas la réalité, mais une réalité exposée à notre méthode de questionnement". Nachmais et collaborateurs soulignent également que les focus groupes ne sont souvent réalisés qu'une seule fois par thème d'étude, ce qui ne permet pas de généraliser les résultats comme en sociologie où ce type de démarche est répété[6].

Douglas Rushkoff[7] souligne que les focus groupes sont susceptibles de générer des idées fausses sur ce que pensent vraiment les participants, car ils cherchent parfois à davantage faire plaisir à l'animateur et aux autres membres du groupe qu'à exprimer leurs propres opinions ou évaluations.

Articles connexes

Références

  1. (en) Michael T. Kaufman, « Robert K. Merton, Versatile Sociologist and Father of the Focus Group, Dies at 92 », The New York Times,‎ (lire en ligne)
  2. Baccino, T., et al. (2005). Mesure de l'Utilisabilité des Interfaces, Paris: Hermes
  3. Nogier, J-F. (2008), Ergonomie du logiciel et design web : Le manuel des interfaces utilisateur, 4e Ă©dition, Dunod
  4. Lindlof, T. R., & Taylor, B. C. (2002). Qualitative Communication Research Methods, 2nd Edition. Thousand Oaks, CA: Sage.
  5. Tracy, S. J., Lutgen-Sandvik, P., & Alberts, J. K. (2006). Nightmares, demons and slaves: Exploring the painful metaphors of workplace bullying. Management Communication Quarterly, 20, 148-185.
  6. Nachmais, Chava Frankfort; Nachmais, David. 2008. Research methods in the Social Sciences: Seventh Edition New York, NY: Worth Publishers
  7. Rushkoff, Douglas, Get back in the box : innovation from the inside out, New York : Collins, 2005

Voir aussi

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