Faire
Faire est un verbe de la langue française. Il constitue un élément essentiel de la construction de la langue française par sa forte polysémie. « On peut en effet considérer le verbe faire comme implicitement contenu dans tous les autres au même titre que le verbe être »[1]. Bien que pouvant être utilisé pour exprimer de nombreuses actions ou idées, le verbe faire est en général remplacé par un verbe synonyme plus précis dans le langage soutenu.
Selon le dictionnaire Littré, le verbe faire est un « mot à signification très étendue qui, exprimant au sens actif ce que agir exprime au sens neutre, et au sens déterminé et appliqué à un objet ce que agir exprime au sens indéterminé et abstrait, dénote toute espèce d'opération qui donne être ou forme »[2]. Ce dictionnaire cite 83 emplois de ce verbe à la fin du XIXe siècle, sans compter les très nombreux emplois régionaux ou considérés comme incorrects[3].
Fonction d'opérateur
Parmi ces emplois, faire possède la fonction d'opérateur grâce à laquelle il peut être utilisé pour remplacer presque n'importe quel verbe[4]. Une construction
- nom1 + Verbe + nom2
peut souvent être remplacée par
- nom1 + fait le (ou la) + nom3 + de + nom2
oĂą Nom3 est un nom de sens proche de Verbe.
Exemple[3]
- Jean décrit la scène
possède la même signification que
- Jean fait la description de la scène.
Dans le cas de certains verbes « psychologiques », le sujet est passif, ce qui rend le verbe faire synonyme du verbe être[4] :
- Pierre Ă©tonne Paul.
- Pierre fait l'Ă©tonnement de Paul.
- Pierre est Ă©tonnant pour Paul.
Variations géographiques
L'usage de ce verbe peut varier suivant les régions ou les pays.
En français d'Afrique (notamment au Burundi et au Cameroun), l'usage du verbe faire s'est étendu à de nombreuses expressions, considérées comme incorrectes en français de France et non mentionnées dans les dictionnaires de référence. A contrario, le verbe faire en tant que semi-auxiliaire factitif est souvent omis[5] :
- Vous nous perdez le temps
au lieu de
- Vous nous faites perdre du temps.
Au Canada, le verbe faire vient en renfort de pourquoi, de façon analogue à est-ce que[6] : Exemple
- Pourquoi est-ce que le monde existe ? (français de France)
- Pourquoi c'est faire (que) le monde existe ? (français du Québec)
- Quoi faire le monde existe ? (français de Terre-Neuve, avec élision du pour de pourquoi)
Sources
- Peter Lauwers, La description du français entre la tradition grammaticale et la modernité linguistique : étude historiographique et épistémologique de la grammaire française entre 1907 et 1948, Leuven/Paris/Dudley, Ma., Peeters Publishers, , 777 p. (ISBN 90-429-1472-6, lire en ligne)
- Thierry Ponchon, Le verbe faire en français médiéval, vol. 211, Genève/Paris, Librairie Droz, coll. « Publications romanes et françaises », , 463 p. (ISBN 2-600-00047-X, lire en ligne)
- Claude Frey, « Variétés diatopiques et usages du verbe "faire" : un cheval de Troie dans l’approche différentielle ? », Le français en Afrique, Revue du Réseau des Observatoires du Français Contemporain en Afrique Noire, Nice, Institut de la langue française – CNRS, no 22,‎ , p. 83-106 (lire en ligne)
- Marie-Thérèse Vinet, D'un français à l'autre : la syntaxe de la microvariation, Les Editions Fides, , 194 p. (ISBN 2-7621-2210-4, lire en ligne)
- MarĂa Teresa GarcĂa-Castanyer, « Le verbe <FAIRE>, pro-verbe et verbe opĂ©rateur, dans quelques textes sur la langue française du XVIIe au XIXe siècles », Anales de filologia francesa, no 4,‎ , p. 43-55 (lire en ligne)
- « Faire », Dictionnaire Littré,‎ 1863-1877 (lire en ligne)
- Jacqueline Giry, « Remarques sur un emploi du verbe faire comme opérateur », Langue française, vol. 11, no 1. Syntaxe transformationnelle du français,‎ , p. 39-45 (lire en ligne, consulté le )
- Martin Riegel, Jean-Christophe Pellat et René Rioul, Grammaire méthodique du français, PUF, , 672 p. (ISBN 2-13-053959-9)
Références
- Cité par Lauwers 2004.
- Dictionnaire Littré.
- GarcĂa-Castanyer 1992.
- Giry 1971
- Frey 2007
- Vinet 2001, p. 17.