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Elasmotherium

Elasmotherium, aussi surnommé « licorne géante », est un genre éteint de rhinocérotidés qui a vécu en Asie et en Europe de la fin du PliocÚne jusque vers la fin du PléistocÚne, c'est-à-dire il y a environ entre -2,58 millions d'années et 39-36 000 ans avant notre Úre[1].

Elasmotherium
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Reconstitution graphique d'un Elasmotherium caucasicum.

Genre

† Elasmotherium
J. Fischer, 1808

Étymologie

Le mot « Elasmotherium » est formĂ© Ă  partir du grec Î­Î»Î±ÏƒÎŒÎżÏ‚, « lame », et ÎžÎ·ÏÎŻÎżÎœ, « bĂȘte sauvage », le premier terme renvoyant Ă  la forme des molaires de l'animal, par ailleurs dĂ©pourvu d'incisives et de canines.

Description

Reconstitution graphique de deux Elasmotherium sibiricum.

Elasmotherium mesurait 5 mĂštres de long, 2 mĂštres au garrot et pesait jusqu'Ă  4 tonnes.

Ses pattes étaient plus longues que celles des rhinocéros actuels, et étaient faites pour le galop, ce qui donnait à l'animal une allure semblable à celle du cheval.

Son crĂąne aurait Ă©tĂ© ornĂ© d'une Ă©norme corne haute de presque 2 mĂštres. Cependant, une Ă©quipe Russo-Ukrainienne, menĂ©e par Vadim Titov, de l’UniversitĂ© fĂ©dĂ©rale de Rostov-sur-le-Don (Russie), s’est attachĂ©e, fin 2021, Ă  rĂ©Ă©tudier de prĂšs l’anatomie crĂąnienne : ils ont exclu la prĂ©sence de cette corne gigantesque en raison du dĂŽme osseux relativement fragile qui ne pouvait probablement pas supporter le poids d’une corne de 2 mĂštres. Ils envisagent Ă©galement la prĂ©sence d’une petite zone kĂ©ratinisĂ©e en position nasale, ce qui confĂ©rerait Ă  Elasmotherium non pas une mais deux « pseudo-cornes » sur le crĂąne[1] - [2].

Les représentations, notamment dans les grottes du paléolithique sont donc totalement à reconsidérer.

Les scientifiques pensent que cet animal était un coureur trÚs rapide (bien plus rapide que le rhinocéros qui peut déjà courir jusqu'à 55 km/h), en dépit de sa taille.

Ses dents étaient semblables à celles des chevaux d'aujourd'hui, et indiquent probablement un régime à base d'herbes coriaces.

Évolution et diffusion

CrĂąne d' Elasmotherium sibiricum

On a retrouvé de nombreux fossiles appartenant à des espÚces diverses de cet animal : les restes les plus anciens ont été retrouvés en Chine orientale dans des terrains remontant au PliocÚne supérieur, et ils appartiennent aux espÚces Elasmotherium inexpectatum et Elasmotherium peii. Les origines de ces formes primitives semblent résider dans le genre Sinotherium, du MiocÚne supérieur. Les Elasmotherium primitifs ont disparu au cours du PléistocÚne inférieur, il y a environ 1,6 million d'années. D'autres espÚces d'Elasmotherium, comme Elasmotherium caucasicum, sont apparues en Russie il y a environ un million d'années. L'espÚce la plus grande et la plus évoluée, Elasmotherium sibiricum surnommée « licorne sibérienne », est apparue en Russie du Sud-Ouest au PléistocÚne moyen, et elle s'est répandue jusqu'en Sibérie[3]. Elasmotherium s'est répandu dans toute la Russie méridionale, en Ukraine, en Moldavie.

Habitat

Distribution des diffĂ©rentes espĂšces d’Elasmotherium durant le PlĂ©istocĂšne supĂ©rieur et moyen.

Les particularités morphologiques des Elasmotherium ont fait naßtre deux hypothÚses principales concernant leur aspect et les caractéristiques de leur habitat. La premiÚre, acceptée par la plupart des spécialistes, décrit les Elasmotherium comme de grands animaux à longs poils, avec une corne gigantesque sur le sommet du crùne, et qui habitaient les steppes ouvertes. Des restes de corne, cependant, n'ont jamais été retrouvés ; on a seulement une impressionnante structure osseuse qui faisait fonction de support.

L'autre hypothĂšse voit dans les Elasmotherium des animaux qui vivaient Ă  proximitĂ© des rives de fleuves. Cette thĂ©orie se fonde sur la morphologie dentaire et crĂąnienne : la combinaison de caractĂšres comme l'absence de canines et les mouvements latĂ©raux des mĂąchoires fortement dĂ©veloppĂ©es impliquent des mouvements latĂ©raux de la tĂȘte, vraisemblablement pour se nourrir d'herbe. Les prairies initiales Ă©taient formĂ©es d'espĂšces en C3, qui sont plus nutritives que les espĂšces en C4[4]. La denture hypsodonte indique la prĂ©sence de minĂ©raux dans l'alimentation ; une nourriture de ce type se trouve principalement sur les rives des cours d'eau. D'autre part, les pattes longues et sveltes pouvaient servir Ă  l'animal pour se dĂ©placer sur de vastes aires de pĂąture, comme les steppes. Il est au fond possible que les deux hypothĂšses soient correctes.

Disparition

Le genre s'est Ă©teint Ă  la fin du PlĂ©istocĂšne moyen, les derniers fossiles Ă©tant trouvĂ©s en SibĂ©rie occidentale et datant de 36–35 000 ans[5] (39 000 ans pour l'espĂšce Elasmotherium sibiricum[3]), c'est-Ă -dire pendant la grande Extinction du Quaternaire qui a vu la disparition de presque tous les animaux de plus de 45 kg.

AprĂšs avoir longtemps pensĂ© qu’Elasmotherium avait disparu avant l'apparition de l'HumanitĂ©, des dĂ©couvertes rĂ©centes amĂšne Ă  penser que des espĂšces du genre Elasmotherium aient croisĂ© la route des premiers hommes. Au Kazakhstan a Ă©tĂ© dĂ©couvert un spĂ©cimen d'Elasmotherium sibiricum datĂ© d'environ 26 000 ans[6]. Si l'hypothĂšse d'une disparition due Ă  la surchasse n'est pas Ă©cartĂ©e, c'est celle de la glaciation rĂ©duisant les herbages qui semble Ă  privilĂ©gier[7].

Possibles témoignages archéologiques et historiques

Possible représentation d'un Elasmotherium dans la grotte de Rouffignac (France) à moins que ce ne soit un Rhinocéros laineux.
Selon certains, ces animaux sur le chaudron de Gundestrup seraient des Elasmotherium bien qu'il soit couramment admis que ce soit des taureaux.

Il a Ă©tĂ© supposĂ© que la survie d’Elasmotherium pendant les temps protohistoriques pourrait ĂȘtre Ă  l'origine du mythe de la licorne. La reprĂ©sentation celtique sur le chaudron de Gundestrup de ce qui est identifiĂ© comme le sacrifice de trois taureaux, peut aussi Ă©voquer des Elasmotherium ; suivant cette hypothĂšse, les anciens celtes auraient cĂŽtoyĂ© cet animal, ou du moins en auraient gardĂ© le souvenir.

La description d’Elasmotherium semble correspondre Ă  celle d'une licorne karkadann en Perse, Ă  l'Indrik dans le folklore russe et Ă  la licorne zhi de la mythologie chinoise. Il est cependant plus probable que la source de toutes ces lĂ©gendes ne soit en fait tout simplement des rhinocĂ©ros. Enfin, selon l'encyclopĂ©die suĂ©doise Nordisk familjebok et le chercheur Willy Ley, l'animal pourrait ainsi avoir laissĂ© des traces dans les lĂ©gendes du peuple Evenk en Russie, sous la forme d'un Ă©norme taureau noir dotĂ© d'une corne unique au sommet de sa tĂȘte.

Il existe, en outre, ce qui pourrait ĂȘtre deux tĂ©moignages laissant Ă  penser que cet animal ait pu disparaitre bien plus rĂ©cemment. Tout d'abord une citation de Jules CĂ©sar dans la Guerre des Gaules, lors de sa description des animaux de la forĂȘt Hercynienne (Livre 6 - 26) :

« D’abord un bƓuf, ayant la forme d’un cerf, et portant au milieu du front, entre les oreilles, une corne unique plus haute et plus droite que celles qui nous sont connues ; Ă  son sommet elle s’épanouit en empaumures et en rameaux. MĂąle et femelle sont de mĂȘme type, ont des cornes de mĂȘme forme et de mĂȘme grandeur »

— Jules CĂ©sar

Cependant la terminaison en rameau des cornes de cet animal semble Ă©liminer la correspondance et cette description a peut-ĂȘtre Ă©tĂ© rapportĂ©e Ă  CĂ©sar, qui n'aurait donc jamais vu l'animal. Notons Ă©galement qu'il peut arriver chez les cervidĂ©s que les bois fusionnent Ă  leur base lorsqu'ils repoussent formant ainsi une corne unique qui se ramifie Ă  son extrĂ©mitĂ© comme dans la description de CĂ©sar.

Un autre tĂ©moignage supposĂ© serait celui du voyageur mĂ©diĂ©val Ibn Fadlan, gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ© comme une source fiable. Sa lecture indiquerait qu’Elasmotherium ait survĂ©cu jusqu'aux temps historiques dans le Nord-Est de l'Iran actuel :

« Aux confins d'une vaste steppe, habite, dit-on, un animal plus petit qu'un chameau mais plus grand qu'un taureau. Sa tĂȘte est la tĂȘte d'un mouton, et sa queue celle d'un taureau. Son corps est celui d'un mulet et ses sabots ressemblent Ă  ceux d'un taureau. Au milieu de la tĂȘte se trouve une corne, Ă©paisse et arrondie, et plus elle devient haute plus elle devient Ă©troite, pour ressembler Ă  la fin Ă  une pointe de lance. Quelques-unes de ces cornes croissent jusqu'Ă  trois ou cinq aunes, la moitiĂ© de la taille de l'animal. Il se nourrit de feuilles des arbres, qui sont une vĂ©gĂ©tation excellente. Chaque fois qu'il voit un cavalier il s'approche et, si le cavalier a un cheval rapide, le cheval essaie Ă©perdument de fuir ; si la bĂȘte les rejoint, elle fait tomber le cavalier de sa selle avec sa corne, le lance en air, et le frappe avec la pointe de la corne, et continue ainsi jusqu'Ă  ce que mort s'ensuive. Mais elle ne frappe ni ne blesse le cheval de quelque façon que ce soit. Les habitants du lieu poursuivent l'animal dans les steppes et dans la forĂȘt jusqu'Ă  ce qu'ils arrivent Ă  le tuer. Voici comment les choses se passent : ils grimpent sur des arbres Ă©levĂ©s entre lesquels passe l'animal. Quelques archers lui dĂ©cochent des flĂšches empoisonnĂ©es ; et lorsque la bĂȘte est au milieu d'eux, ils la frappent et la blessent jusqu'Ă  la mort. Moi-mĂȘme j'ai vu trois grandes coupes, qui ressemblaient Ă  des coquilles du YĂ©men, elles Ă©taient la propriĂ©tĂ© du roi, qui m'a dit qu'elles venaient de la corne de cet animal. »

— Ibn Fadlan

Cependant, il pourrait encore une fois tout simplement s'agir d'un rhinocĂ©ros car Ibn Fadlan avoue lui-mĂȘme ne pas l'avoir vu de ses propres yeux (« Aux confins d'une vaste steppe, habite, dit-on »), on peut donc plutĂŽt supposer qu'il subsistait des rhinocĂ©ros en Iran du temps d'Ibn Fadlan tout comme il y avait des lions en GrĂšce du temps d'HĂ©rodote.

Liste des espĂšces

Reconstitution d'Elasmotherium sibiricum.

Selon BioLib (1 janvier 2018)[8] :

  • Elasmotherium caucasicum Borissiak, 1914 †
  • Elasmotherium inexpectatum Chow, 1958 †
  • Elasmotherium pei †
  • Elasmotherium sibiricum (aussi surnommĂ© Licorne de SibĂ©rie) J. Fischer, 1808 †

Culture populaire

Dans la série documentaire Prehistoric Park, Nigel Marven sauve un Elasmotherium.

Annexes

Bibliographie

  • (en) N.G. Noskova, « Elasmotherians - evolution, distribution and ecology », The World of Elephants - International Congress, Rome 2001
  • (en) Pavel Kosintsev et al., « Evolution and extinction of the giant rhinoceros Elasmotherium sibiricum sheds light on late Quaternary megafaunal extinctions », Nature,‎ (DOI 10.1038/s41559-018-0722-0, lire en ligne).

Liens externes

  • Christophe Mallet, « Qui Ă©tait Elasmotherium, surnommĂ© la « licorne de SibĂ©rie » ? », The Conversation,‎ (lire en ligne)
  • Christophe Mallet, « La « licorne de SibĂ©rie » Ă©tait-elle vraiment une licorne ? », The Conversation,‎ 7 mars 2022, 21:13 cet (lire en ligne)

Références taxinomiques

Notes et références

  1. Christophe Mallet, « La « licorne de Sibérie » était-elle vraiment une licorne ? », 7 mars 2022, 21:13 cet (consulté le )
  2. (en) Vadim V. Titov*, Vera S. Baigusheva & Roman S. Uchytel’, « The experience in reconstructing of the head of Elasmotherium (Rhinocerotidae) », RUSSIAN JOURNAL OF THERIOLOGY, 2021,‎ (lire en ligne)
  3. (en) Pavel Kosintsev et al., « Evolution and extinction of the giant rhinoceros Elasmotherium sibiricum sheds light on late Quaternary megafaunal extinctions », Nature,‎ (DOI 10.1038/s41559-018-0722-0, lire en ligne).
  4. (en) Raymond V. Barbehenn, Zhong Chen, David N. Karowe et Angela Spickards, « C3 grasses have higher nutritional quality than C4 grasses under ambient and elevated atmospheric CO2 », Global Change Biology (en), vol. 10,‎ , p. 1565–1575 (DOI 10.1111/j.1365-2486.2004.00833.x, lire en ligne, consultĂ© le )
  5. P. Kosintsev, K. J. Mitchell, T. DeviĂšse, J. van der Plicht, M. Kuitems, E. Petrova, A. Tikhonov, T. Higham, D. Comeskey, C. Turney, A. Cooper, T. van Kolfschoten, A. J. Stuart et A. M. Lister, « Evolution and extinction of the giant rhinoceros Elasmotherium sibiricum sheds light on late Quaternary megafaunal extinctions », Nature Ecology & Evolution, vol. 3, no 1,‎ , p. 31–38 (PMID 30478308, DOI 10.1038/s41559-018-0722-0, hdl 11370/78889dd1-9d08-40f1-99a4-0e93c72fccf3 AccĂšs libre, S2CID 53726338, lire en ligne)
  6. « Une véritable licorne préhistorique découverte au Kazakhstan »,
  7. (en) « Unicorns Are More Legit Than You Think », sur Discover
  8. BioLib, consulté le 1 janvier 2018
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