Ehotilé
Les Ehotilé ou Bétibé ou encore Mekyibo sont un peuple de l'Afrique de l'Ouest vivant au sud-est de la CÎte d'Ivoire, dans le département d'Adiaké.
à travers les Sous-Préfectures d'Adiaké (Adiaké, Assomlan, Eplemlan, Etuessika, N'Galiwa, Mélékoukro, Adiaké-Kakoukro...) et d'Etuéboué (Abiaty, Akounougbé, Etuéboué, M'Braty, le littoral (Kakou-Lagune, Mama, Agboudjou, Ebouando, Egbéï...)...). On les rencontre également dans la Sous-Préfecture de Grand-Bassam dans la localité de Vitré (Vitré 1 et vitré 2). Ailleurs, on les retrouve chez d'autres peuples akan lagunaires qui sont passés par leur territoire en provenance de l'Est pour la migration vers l'Ouest. Sur les fondements de l'histoire, les Aïzi-kwa (ceux qui parlent le dialecte appÎrÎ) ont intégré le royaume bétibé en faisant allégeance au roi, l'Abakuaba N'GBANDJI AGNON. Plusieurs familles chez les peuples Abouré, Akyé, Adioukrou, Alladian, Avikam sont de souche Eotilé.
Ethnonymie
Le concept ''EotilĂ©'' a Ă©tĂ© attribuĂ© au peuple du mĂȘme nom par les Agua, peuple voisin qui vivait dans la localitĂ© d'AliĂ©kro (Aboisso). Ce concept est issu de la dĂ©formation du substantif ''aoci'' (aotchi) qui Ă©voque ''la tĂȘte''. L'appellation de tĂȘte Ă travers ''aoci'' qui a donnĂ© ''Ă©otilĂ©'' leur a Ă©tĂ© attribuĂ©e par leur voisin immĂ©diat pour rappeler leur antĂ©rioritĂ© dans l'occupation des terres qui sont bordĂ©es par les grandes lagunes ivoiriennes.
Les autres peuples de la CÎte d'Ivoire et l'administration ivoirienne les reconnaissent également sous le nom ''Ehotilé'' (administration) ou Eotilé (science).
Les EhotilĂ© se dĂ©nomment eux-mĂȘmes par le vocable de ''bĂ©tibĂ©''. Le concept ''bĂ©tibĂ©'' est un concept pluriel qui dĂ©signe tous les membres de la communautĂ©. Ainsi on dira, ''les BĂ©tibĂ©'' ou le ''peuple bĂ©tibĂ©" pour faire allusion Ă la communautĂ© mais on fera usage du concept ''bĂ©tini'' pour dĂ©signer un seul individu ou un membre de la communautĂ©. On aura ceci: ''un ou une BĂ©tini'' mais ''des BĂ©tibĂ©''. Depuis l'intronisation de leur roi en 2015, les BĂ©tibĂ© demandent que l'on fasse usage du concept ''bĂ©tibĂ©'' en remplacement de ''Ă©hotilĂ©'' qu'ils jugent dĂ©suet et inadaptĂ©. La langue parlĂ©e par les BĂ©tibĂ© est le ''bĂ©tinĂ©'' qui signifie la langue (nnĂ©) des BĂ©ti(bĂ©).
Historique du peuplement
Les BĂ©tibĂ© dans lâaire culturelle akan
Les BĂ©tibĂ© font frontiĂšre avec des peuples qui appartiennent tous Ă lâaire culturelle akan: Dans la rĂ©gion dâAdiakĂ©, les BĂ©tibĂ© ont pour voisins, au Nord, les Agni sanwi du DĂ©partement dâAboisso, Ă lâEst, les Nâzima adouvlais de la Sous-PrĂ©fecture de Tiapoum, au Sud, les Essouma dâAssinie-mafia et Ă lâOuest, les AbourĂ© de la Sous-PrĂ©fecture de Bonoua. Dans la rĂ©gion de Grand-Bassam, les BĂ©tibĂ© de VitrĂ© partagent une frontiĂšre commune au Nord et Ă lâOuest avec les EbriĂ©, au Nord-Est avec les Mâbatto, Ă lâEst avec les AbourĂ© et au Sud avec les Nâzima de Grand-Bassam.
Origine selon les sources orales
Les traditionnistes soutiennent que les BĂ©tibĂ© sont sortis dâAbondji et Mâbinhon, deux provinces localisĂ©es dans le fin fond de la lagune ÉbÉnÉn (le complexe lagunaire Aby-Ehi-Tendo).
Dans ces deux citĂ©s sub-aquatiques, les BĂ©tibĂ© ont dĂ©veloppĂ© une brillante activitĂ© commerciale basĂ©e sur le troc. NâGbandji NâGniman de la famille bÉĂŻnÉ, serait le premier ancĂȘtre Ă sortir des profondeurs de la lagune pour sâĂ©tablir sur la terre ferme. Les BÉĂŻnÉ auraient Ă©tĂ© suivis dans lâordre par les familles Bouayo, Bosseman, Bouatchiman et Bouakru.
Ces cinq familles ont constituĂ© depuis les origines, le socle de la sociĂ©tĂ© bĂ©tibĂ©. Chaque famille avait Ă sa tĂȘte, un dirigeant appelĂ© ââchef de siĂšgeââ.
AprĂšs leur migration sur la terre ferme, les BĂ©tibĂ© se sont Ă©tablis dans des localitĂ©s proches les unes des autres. Ces localitĂ©s Ă©taient essentiellement des Ăźles dont les principales Ă©taient BalouatĂ©, MÉnÉbaha, AsÉkÉ, Draman, Ehikomian, Assohoun, ÉsĂŽ, etc. Ils vĂ©curent sur la plupart de ces Ăźles en bĂątissant des sortes dâhabitation sur pilotis appelĂ©es communĂ©ment assanga. Les BĂ©tibĂ© vivaient principalement de la pĂȘche qui Ă©tait considĂ©rĂ©e comme la principale activitĂ© du peuple. Les produits de la pĂȘche Ă©taient destinĂ©s Ă la consommation directe ou servaient de matiĂšre dâĂ©change avec les peuples voisins (Agoua, AbourĂ©, etc.) dans le cadre des spĂ©culations commerciales qui se dĂ©roulaient sur le marchĂ© de Ngandan-Ngandan.
Cette organisation socio-Ă©conomique rigoureuse de la sociĂ©tĂ© bĂ©tibĂ© a prospĂ©rĂ© jusquâen 1754, date Ă laquelle le royaume de MÉnÉbaha fĂ»t attaquĂ© par les Aha (Agni brafĂš) vĂ©nus de la rĂ©gion de lâEbrosa quâils ont conquis auparavant. La volontĂ© de trouver de nouvelles terres pour faciliter les replis tactiques face Ă la menace ashanti, les motiva Ă conquĂ©rir la partie ouest (rĂ©gion actuelle du Sud-comoĂ©) de leur territoire. FortifiĂ©s par les diffĂ©rents succĂšs militaires dans la rĂ©gion, les Agni brafĂš prirent lâinitiative dâattaquer les Ăźles BĂ©tibĂ© sous la conduite de leur chef Aka Essoin.
Contournant la lagune ÉbÉnÉn, ils arrivĂšrent Ă lâemplacement actuel du village de NâGaliwa.
A lâaide de radeaux fabriquĂ©s sur place, les guerriers brafĂš dirigĂšrent une attaque nocturne et violente contre les Ăźles des BĂ©tibĂ© situĂ©es au large. Cette guerre est intervenue dans un contexte de crise au sommet de la royautĂ© bĂ©tibĂ©.
En effet, le roi WÉpou NigbĂ©ni ou lâAbakuaba et son demi-frĂšre WÉpou Siguin, le Chef militaire ou lâEfraon Ă©taient en dĂ©saccord pour des questions de leadership. Lorsque les Agni brafĂš ont attaquĂ© les positions du chef militaire (lâEfraon) Ă MÉnÉbaha, son frĂšre ainĂ©, le roi (Abakuaba) qui croyait trouver lâoccasion de sa vengeance aurait refusĂ© de lui porter secours dans la bataille. Sans surprise, lâEfraon fĂ»t vaincu Ă lâissue de la bataille. Les guerriers ennemis ont tirĂ© profit de la mauvaise stratĂ©gie militaire des BĂ©tibĂ©. AprĂšs la dĂ©faite de lâEfraon, les guerriers ennemis attaquĂšrent lâĂźle de BalouatĂ© oĂč rĂ©sidaient lâAbakuaba WÉpou Nigbeni et les membres de son Conseil, les Nigbe. LâAbakuaba qui a discernĂ© la fin de son rĂšgne, aurait plongĂ© dans les profondeurs de la lagune ÉbÉnÉn muni de son trĂ©sor pour rejoindre ses ancĂȘtres. Les guerres de MÉnÉbaha et de BalouatĂ© qui survinrent vers 1754 marquĂšrent la fin du royaume bĂ©tibĂ©.
Cette guerre fĂ»t suivie du grand exode des BĂ©tibĂ© vers des territoires plus quiets. Voulant Ă©viter lâextinction totale du peuple et de sa langue, des Chefs de fĂą ou Chefs de guerre entreprirent de conduire des groupements humains dans plusieurs localitĂ©s de la rĂ©gion et mĂȘme au-delĂ .
Plusieurs migrants prirent la direction de lâEst. Une partie de ces migrants se rĂ©fugia dans la localitĂ© dâÉÉ, une autre partie poursuivie son exode sous la houlette du Chef de fĂą, Takrika. Sur place, ils fondĂšrent plusieurs villages dont NâzulĂ©zo et Nâziambo localisĂ©s aujourdâhui en territoire ghanĂ©en.
Cependant, tous ne prirent pas la direction Est. Ainsi, sous la conduite dâautres Chefs de fĂą, une vague de BĂ©tibĂ© se dirigea vers lâOuest. Le Chef Ehi kadjĂš et son frĂšre cadet Yayo passĂšrent par Nâgandan-nâgandan pour sâĂ©tablir dans la localitĂ© de lâactuel Grand-Bassam.
Le Chef de fĂą, EffrÉ Ollo, est parti de la citĂ© de MÉnÉbaha avec les siens, bien avant lâattaque des Agni brafĂš.
En effet, anticipant sur les vellĂ©itĂ©s de dĂ©stabilisation du royaume et animĂ© par la volontĂ© de sauvegarder la langue ancestrale, le bĂ©ti nnĂ©, EffrÉ Ollo eu lâingĂ©nieuse idĂ©e de mettre une partie du peuple Ă lâabri, notamment les familles qui relevaient de sa responsabilitĂ© directe. A la tĂȘte dâune forte colonie dâenviron 900 personnes, il passa par le village de Samo pour joindre NâgbĂȘtĂ©bo. Ayant vĂ©cu de longues annĂ©es avec eux, ce groupe sâest incorporĂ© au peuple AbourĂ© de Bonoua dont certains matriclans (les AssĂŽkĂŽpouĂšâŠ) sont dâorigine bĂ©tibĂ©.
De Bonoua, Le Chef EffrÉ Ollo migra de nouveau avec son peuple dans la localitĂ© de NnantchuÉ, dans la rĂ©gion actuelle de Moossou. Pendant ce temps, les AbourĂ© de lâactuel Moossou dirigĂ©s par Veloumi Anga vivaient Ă GbamĂ©lĂ© dans la localitĂ© dâAzuretti. Les AbourĂ© formulĂšrent la demande auprĂšs dâEffrÉ Ollo de vivre avec les BĂ©tibĂ© Ă NnantchuÉfÉ. Le Chef bĂ©tibĂ© qui ne dĂ©celait aucun inconvĂ©nient, accepta la cohabitation avec le peuple frĂšre. AbourĂ© et BĂ©tibĂ© vĂ©curent en bonne intelligence Ă NnantchuÉfÉ (actuel Moossou) jusquâau jour oĂč survint la discorde nĂ©e de lâadultĂšre commis par le neveu du Chef abourĂ© avec lâune des trois Ă©pouses dâEffrÉ Ollo. Pour laver lâaffront, le Chef bĂ©tini prit la dĂ©cision de partir de NnantchuÉfÉ avec sa suite car il avait fait le vĆu de ne plus engager son peuple dans une guerre dĂ©vastatrice. Ce nouvel exode les mena sur lâĂźle de BĂ©tigbÉ. Mais ce nouveau site Ă©tait Ă la fois Ă©troit et inhospitalier Ă cause des nombreux marĂ©cages. Les BĂ©tibĂ© migrĂšrent de nouveau pour sâĂ©tablir sur lâĂźle proche dâOkobledji du cĂŽtĂ© de lâactuel Eloka. Câest sur cette Ăźle quâils furent attaquĂ©s par les EbriĂ© AkouĂš de la rĂ©gion de Bingerville. Cette attaque lĂąche fĂ»t menĂ©e au moment oĂč les hommes valides Ă©taient Ă la pĂȘche.
A la suite de ces Ă©vĂšnements malheureux, EffrÉ Ollo fit dĂ©placer le peuple sur lâĂźle proche de BĂ©timÉnÉ situĂ©e au large des cĂŽtes de Grand-Bassam.
Les EbriĂ© akouĂš menĂšrent une deuxiĂšme attaque contre les BĂ©tibĂ© sur le nouveau site de BĂ©timÉnÉ. Mais cette fois ci, ils furent mis en dĂ©route par EffrÉ Ollo et ses guerriers qui leur infligĂšrent une lourde dĂ©faite. PrĂšs de 500 guerriers akouĂš venus dans 17 pirogues furent masacrĂ©s y Compris le Chef de guerre.
AprĂšs la guerre, les deux peuples conclurent un pacte de non-agression Ă la baie dâAttopou (en Ă©briĂ©, la guerre est finie) pour sceller la paix dĂ©finitive. LâĂźle de bĂ©timÉnÉ Ă©tant sujette Ă de frĂ©quentes inondations, les Colons exhortĂšrent les BĂ©tibĂ© Ă migrer sur le continent du CĂŽtĂ© de Grand-Bassam. Le peuple bĂ©tibĂ© se dĂ©plaça en deux Ă©tapes pour se retrouver sur les sites actuels de VitrĂ©1 et VitrĂ© 2.
Les nombreuses migrations dans lâhistoire du peuple bĂ©tibĂ© ne sont pas seulement le fait de la guerre survenue 1754. Avant cette date, plusieurs mouvements de familles vers des contrĂ©es proches ou lointaines ont Ă©tĂ© notifiĂ©s par les sources orales.
En effet, le territoire des BĂ©tibĂ© fĂ»t Ă partir du XVIIe siĂšcle, une terre de transit pour de nombreux peuples (EbriĂ©, Avikam, AĂŻzi...) qui venaient du Ghana actuel en partance vers lâOuest. Ces populations qui ont sĂ©journĂ© sur le territoire bĂ©tibĂ© ont continuĂ© souvent leur exode avec des familles bĂ©tibĂ© qui ont acceptĂ© dĂ©libĂ©rĂ©ment dâeffectuer le voyage avec elles. Ainsi certains BĂ©tibĂ© sont partis loin de leur territoire dâorigine pour se mĂ©langer Ă dâautres peuples notamment les peuples installĂ©s sur le cordon littoral entre Assinie et San pĂ©dro.
La tradition opine que tous les peuples parsemĂ©s tout au long du cordon littoral depuis la riviĂšre TanoĂ© jusquâĂ Sans-PĂ©dro sont issus du rameau bĂ©tibĂ©. Ce sont des chefferies ou clans rĂ©fractaires, rebelles qui se sont segmentĂ©s, pour incompatibilitĂ© dâhumeur, pour des frustrations ou pour des raisons politiques diverses. A la recherche de plus de quiĂ©tude, revendiquant un peu plus de souverainetĂ©, certains sous-groupes bĂ©tibĂ© se sont Ă©loignĂ©s du noyau central pour ne plus jamais revenir. Plusieurs Ă©crits attestent que lâun des trois parlers AĂŻzi est dâorigine bĂ©tibĂ©. En effet lâon note une similitude entre la nomenclature de certains villages aĂŻzi et celle de quelques sites en pays bĂ©tibĂ©.
Câest le cas dâAsÉkÉ et TĂ©fredji par exemple. Plus loin encore, en pays kru dans le Sud-Ouest de la CĂŽte dâIvoire, nous pouvons citer lâexemple de Monogaga qui aux dires des dĂ©tenteurs de la tradition serait une dĂ©formation de MÉnÉbaha, la citĂ© Etat des BĂ©tibĂ©.
Les BĂ©tibĂ© installĂ©s autour de la lagune Aby de nos jours sont ceux qui prenant la direction de lâEst ont trouvĂ© refuge Ă ÉfiÉ aprĂšs lâinvasion des Aha. Dans cette localitĂ©, les BĂ©tibĂ© ne trouvĂšrent guĂšre le repos Ă cause des frĂ©quentes querelles qui les opposaient aux Nâzima de cette localitĂ©. Dans cette ambiance dĂ©lĂ©tĂšre, le Chef de fĂą Elloua NâDjomou prit la dĂ©cision de faire revenir les BĂ©tibĂ© sur leurs terres ancestrales passĂ©es sous le contrĂŽle des Aha qui ont pris le nom dâAgni.
Les BĂ©tibĂ© ont prĂ©fĂ©rĂ© le pacte avec les Agni brafĂš Ă la domination nâzima. Joignant lâacte Ă la parole, ils conclurent une alliance avec Amon Nâdouffou kpangni, le Roi brafĂš de lâĂ©poque.
Dans le souci de mieux les contrĂŽler, le Royaume sanwi exigea que les BĂ©tibĂ© abandonnent leurs Ăźles forteresses pour sâĂ©tablir sur le site dâEhi-ando (la bouche de la riviĂšre) ou Bianou Ă quelques distances de lâembouchure du fleuve Bia. Une fois sur ce site, ils furent incorporĂ©s Ă lâaile gauche de lâarmĂ©e sanwi oĂč ils reçurent la ferme instruction de dĂ©fendre le royaume en cas dâattaque extĂ©rieure. Pour contenir toute vellĂ©itĂ© de vengeance, le Roi Amon Nâdouffou entreprit de donner les filles des Nobles bĂ©tibĂ© en mariage aux Nobles agni et vice versa. Les BĂ©tibĂ© furent Ă©galement empĂȘchĂ©s de parler leur langue, le bĂ©ti-nnĂ© sous peine de mort.
Face Ă cette coercition, les enfants bĂ©tibĂ© finirent par oublier le bĂ©ti-nnĂ© et adoptĂšrent lâagni comme leur langue maternelle. Au fil des gĂ©nĂ©rations, la langue des BĂ©tibĂ© est devenue dĂ©suĂšte et inadaptĂ©e au besoin de communication. Câest cela qui explique la perte de vitalitĂ© du bĂ©ti-nnĂ© dans la rĂ©gion dâAdiakĂ©. Le site dâEhi-ando ou Bianou Ă©tait dans une position stratĂ©gique car depuis cette localitĂ©, les BĂ©tibĂ© pouvaient surveiller leurs Ăźles situĂ©es au large. Bianou se trouvant en bordure de lagune, ils pouvaient accĂ©der facilement Ă ces Ăźles et explorer dâautres contrĂ©es au moyen des pirogues.
Les BĂ©tibĂ© demeurĂšrent Ă Bianou jusquâen 1848 oĂč ils entreprirent de se soustraire du joug agni, aidĂ©s en cela par lâadministration coloniale. Partis de cette localitĂ©, ils rejoignirent le site dâEtuĂ©bouĂ© qui Ă©tait auparavant, un campement de pĂȘche. De cette localitĂ©, les BĂ©tibĂ© se dirigĂšrent vers dâautres hameaux autour de la lagune ÉbÉnÉn (Aby) Ă la recherche de nouvelles zones de pĂȘche. Ils crĂ©Ăšrent dans un premier temps, des campements de pĂȘche pour boucaner les produits halieutiques. Progressivement, ces campements se transformĂšrent en villages avec le dĂ©veloppement des activitĂ©s liĂ©es Ă la pĂȘche.
Ainsi furent crĂ©Ă©s les principaux villages ci-aprĂšs: AkounougbĂ©, Abiaty, Aby, Assomlan, EplĂ©mlan, EtuĂ©ssika, MĂ©lĂ©koukro, Mâbraty et NâGaliwa Ă la suite du village dâEtuĂ©bouĂ© considĂ©rĂ© aujourdâhui comme Chef-lieu du Royaume bĂ©tibĂ©.
Origine selon lâarchĂ©ologie
Les recherches sur le peuplement ancien en pays bĂ©tibĂ© effectuĂ©es par Jean Polet (1988) indiquent que dĂ©jĂ vers 6000 ans avant JĂ©sus Christ, des hommes fabriquaient des poteries et faisaient usage de perles en quartz sur lâĂźle de Nyamoan.
Des amas coquilliers servaient de résidences pour des hommes depuis 300 ans avant Jésus Christ, date à laquelle, le fer fit son apparition.
A Nyamoan, cela sâest produit au dĂ©but de lâĂšre chrĂ©tienne. Des hauts fourneaux et des scories de fer dĂ©couverts au nord de la lagune Aby tĂ©moignent de cette industrie mĂ©tallurgique florissante. Mais le travail du fer nâa fondamentalement pas influencĂ© le mode de vie des BĂ©tibĂ© qui avaient une tradition de pĂȘcheurs.
Entre le dĂ©but de lâĂšre chrĂ©tienne et le XIIe siĂšcle, lâon nâa trouvĂ© aucune trace de civilisation sur les Ăźles bĂ©tibĂ©.
A partir du XIIe siĂšcle, les fouilles rĂ©vĂšlent des restes dâhabitats sur pilotis et des cimetiĂšres dans les zones sĂšches. Les diffĂ©rents sites dâhabitat que lâon a trouvĂ©s concordent avec les cimetiĂšres qui se trouvaient sur les amas coquilliers les plus proches.
La plante dracena arborea guinĂ©ensis de la famille des plantes agavacĂ©es, connue des BĂ©tibĂ© sous le nom dâEbobia a servi de repĂšre pour retrouver les diffĂ©rentes nĂ©cropoles. Sur lâĂźle de Nyamoan, il yâa une coĂŻncidence entre lâaire de peuplement de cette plante et lâextension du cimetiĂšre.
Par ailleurs, les fouilles ont permis de dĂ©couvrir des perles de cornaline des rĂ©gions sahariennes en pays bĂ©tibĂ© mais contre toute attente, elles datent dâavant la prĂ©sence des Portugais sur la cĂŽte qui remonte au XVe siĂšcle. On a trouvĂ© dans les tombes, des pipes dont lâĂąge remonte au XVIe siĂšcle. Pour cette mĂȘme pĂ©riode, lâon dĂ©tient des traces de cuivre mais hors des tombes. Les traditionnistes tĂ©moignent que ce mĂ©tal Ă©tait utilisĂ© pour confectionner les bijoux qui servaient de parure aux morts.
Une autre dĂ©couverte intĂ©ressante a trait aux dĂ©pĂŽts de tĂȘtes funĂ©raires en terre cuite, associĂ©es Ă des offrandes.
Si les avis sont partagĂ©s sur le groupement humain qui a sĂ©journĂ© dans le pays bĂ©tibĂ©, de 6000 ans avant JĂ©sus Christ au dĂ©but de lâĂšre chrĂ©tienne, il nâen demeure pas moins que le second peuplement, celui du XIIe siĂšcle est scientifiquement attribuĂ© aux BĂ©tibĂ© eu Ă©gard aux nombreux vestiges rĂ©vĂ©lĂ©s par les fouilles archĂ©ologiques. En effet, les traces de cases sur pilotis sont attribuĂ©es aux BĂ©tibĂ© dont ce type de construction demeure une spĂ©cificitĂ© de leur architecture.
Par ailleurs, lâusage de la plante dracena arborea guinĂ©ensis (Ă©bobia en bĂ©tinĂ©) pour repĂ©rer les sĂ©pultures est une pratique ancestrale des BĂ©tibĂ©. La prĂ©sence des perles de cornaline (propre Ă la rĂ©gion du Sahara) sur les cĂŽtes avant lâarrivĂ©e des Portugais pourrait tĂ©moigner dâune origine nordique lointaine des BĂ©tibĂ©.
La cĂ©ramique funĂ©raire serait Ă©galement le rĂ©sultat de migrations venues de lâEst prĂ©cisĂ©ment de la cĂŽte de lâor. Selon les donnĂ©es archĂ©ologiques, les BĂ©tibĂ© occupent la rĂ©gion des lagunes Aby-Ehy-Tendo depuis au moins le XIIe siĂšcle de notre Ăšre.
Le peuple bĂ©tibĂ© nâest donc pas ââune gĂ©nĂ©ration spontanĂ©eââ. Il sâest constituĂ© en diachronie avec la fusion de communautĂ©s aux origines diverses qui ont migrĂ© Ă des Ă©poques diffĂ©rentes de lâhistoire.
Activités économiques
L'agriculture constitue la principale occupation de la majeure partie des Ehotilé. Les surfaces agricoles sont réduites à cause du complexe lagunaire qui représente 25,58 % de la superficie du Département. Les spéculations sont dominées par les cultures industrielles, surtout l'ananas et le palmier à huile. Les cultures vivriÚres et maraßchÚres sont représentées par le maïs, le manioc, la banane plantain et les aubergines.
La pĂȘche est la principale activitĂ© des EhotilĂ© exercĂ©e par tous (enfants, jeunes, adultes, hommes et femmes).
Quant au commerce, c'est une activité trÚs représentative dans la zone, avec la présence de plusieurs « maquis », d'hÎtels, de boutiques, de stations service, de pharmacie, de salons de coiffure et de couture, d'une boßte de nuit et surtout d'un marché tournant. Le mercredi est jour de marché dans la ville d'Adiaké. Néanmoins, il y a tous les jours ventes de légumes et poissons ou viande.
Parc national des Ăles EhotilĂ©
Les Ăźles EhotilĂ© ont Ă©tĂ© Ă©rigĂ©es en Parc National par le dĂ©cret N074-1 79 du sur l'initiative des CommunautĂ©s locales (cas unique en CĂŽte d'Ivoire et mĂȘme en Afrique de l'Ouest).
Le Parc National des Iles Ehotilé est un ensemble de 6 ßles (Assokomonobaha, Balouaté, Meha, Nyamouan, Elouamin et I'ßle sacrée Bosson Assoun) situées en domaine estuarien sur le littoral Est de la CÎte d'lvoire. Cet archipel couvre une superficie de 550 ha sans compter les innombrables chenaux et autres bras de lagune qui le bordent. Suivant l'influence marine l'on peut subdiviser les ßles Ehotilé en deux parties[1].
Notes et références
Voir aussi
Bibliographie
- PĂšre Godefroy Loyer, Relation du voyage du royaume d'Issyny, CĂŽte d'Or, paĂŻs de GuinĂ©e, en Afrique. La description du paĂŻs, les inclinations, les mĆurs & la religion des habitans : avec ce qui s'y est passĂ© de plus remarquable dans l'Ă©tablissement que les Français y ont fait, chez A. Seneuze et Jean-Raoul Morel, Paris, 1714 (lire en ligne)
- Claude-HĂ©lĂšne Perrot, Les ĂotilĂ© de CĂŽte d'Ivoire aux XVIIIe et XIXe siĂšcles : pouvoir lignager et religion, Publications de la Sorbonne, Paris, 2008, 256 p. (ISBN 978-2-85944-598-0) (compte-rendu en ligne )
- Antoine KAKOU Foba, La syntaxe de l'Ă©otilĂ©, langue kwa de CĂŽte dâIvoire, parler de VitrĂ©, thĂšse pour le Doctorat unique, Institut de Linguistique AppliquĂ©e (Univ. F. H. BOIGNY), Abidjan, 2009.
- G.L. Retord, le domaine linguistique Eotilé, Communication au neuviÚme congrÚs de la Société linguistique de l'Afrique occidentale, Freetown, 1970.
Filmographie
- Akwaba : les ĂotilĂ© Ă livre ouvert, film d'Anice ClĂ©ment et Jacques Merlaud, avec la participation de Claude-HĂ©lĂšne Perrot, L'Harmattan VidĂ©o, 2012, 53 min (DVD)