Effet Woodward
L'effet Woodward est une hypothÚse physique relative à la possibilité pour un corps de voir sa masse varier lorsque sa densité énergétique varie dans le temps alors qu'il est accéléré. Théorisé en 1990 par le physicien et historien des sciences James Woodward[1], l'effet repose sur une formulation du principe de Mach proposée en 1953 par Dennis Sciama. Woodward suggÚre que telle que formulée par Sciama, la théorie de l'absorbeur de Wheeler et Feynman rend compte de l'apparition instantanée des forces d'inertie sur un corps accéléré du fait de son interaction gravitationnelle avec l'ensemble des autres corps massifs présents à l'intérieur de l'horizon de causalité de l'Univers (principe de Mach[2]).
Application
Un dispositif propulsif basé sur ce principe de Mach analysé par Woodward, est appelé "Mach Effect Thruster (M.E.T)". Son principe consiste à coupler mécaniquement un objet de masse fixe à un objet de masse variable au sens de Mach/Woodward, puis à raccourcir la liaison mécanique lorsque la masse variable est minimale et à allonger cette liaison lorsque la masse variable est maximale.
Woodward et ses collaborateurs ont annoncĂ© avoir vĂ©rifiĂ© expĂ©rimentalement dans une chambre Ă vide, et aprĂšs avoir pris en compte les erreurs de mesure[3], l'existence de la poussĂ©e d'un dispositif M.E.T. Si cette vĂ©rification expĂ©rimentale Ă©tait confirmĂ©e par d'autres expĂ©riences dans l'espace, l'effet Woodward rĂ©volutionnerait les mĂ©thodes de transport interplanĂ©taires, car il pourrait ĂȘtre utilisĂ© pour mouvoir un vaisseau spatial sans que celui-ci ait Ă Ă©jecter de quantitĂ© de mouvement.
L'effet Woodward est trÚs contre-intuitif car il peut paraßtre contraire au principe de conservation de la quantité de mouvement. Un hypothétique vaisseau spatial utilisant l'effet Woodward voit en effet sa quantité de mouvement varier mais le point important est qu'il ne constitue pas un systÚme isolé. D'aprÚs le principe de Mach, le vaisseau doit son inertie à la présence des étoiles et autres objets célestes environnants. C'est donc à ces corps célestes qu'il emprunte une partie de leur quantité de mouvement, respectant ainsi le principe de conservation[4].
Ces prĂ©dictions trĂšs surprenantes, similaires Ă celles du dispositif EmDrive proposĂ© par Roger Shawyer, ne pourront ĂȘtre dĂ©finitivement acceptĂ©es qu'aprĂšs rĂ©plication des expĂ©riences de Woodward, d'une part au sol par d'autres Ă©quipes scientifiques puis en orbite autour de la Terre ou mieux dans l'espace interplanĂ©taire.
ĂnoncĂ©
Pour un systÚme sur lequel est appliqué une force ou un travail correspondant à une puissance , l'effet Woodward consiste en une variation de la masse propre :
oĂč :
- est la constante de gravitation ;
- est la vitesse de la lumiĂšre dans le vide ;
- est la densité propre de l'objet ;
- est le volume de l'objet.
Dans le terme de droite, l'expression peut ĂȘtre approximĂ©e au premier ordre en :
.
DĂ©monstration
Le raisonnement de Woodward s'appuie sur le principe de Mach et sur l'hypothÚse de Dennis Sciama[5] concernant la traduction du principe de Mach en une analogie entre la force de Gravitation et l'électromagnétisme.
En substance, le raisonnement part de l'hypothÚse qu'en plus du champ gravitationnel sous sa forme « statique »
s'ajoute un terme dynamique, analogue au potentiel vecteur de l'électromagnétisme :
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Le potentiel est supposĂ© ĂȘtre gĂ©nĂ©rĂ© par le mouvement de toutes les masses prĂ©sentes dans le reste de l'univers[6], selon une formule lĂ encore inspirĂ©e de l'Ă©lectromagnĂ©tisme :
.
Dans le cas simple oĂč on se place dans le rĂ©fĂ©rentiel d'une particule test et oĂč le reste de l'univers est supposĂ© constituer un bloc rigide, c'est l'univers entier qui est animĂ© d'une vitesse (Ă un signe moins prĂšs) qui peut ĂȘtre sortie de l'intĂ©grale :
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De telle sorte que le champ s'Ă©crit :
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Woodward montre alors, comme l'avait fait Sciama auparavant, que la composante dynamique peut rendre compte de la force de réaction lorsqu'une force extérieure est soumise au systÚme, et ainsi expliquer son inertie.
Application pour l'astronautique
Woodward explique de la façon suivante comment une oscillation de la masse d'un corps peut ĂȘtre utilisĂ©e pour produire une poussĂ©e[7] :
- « En faisant fluctuer la masse d'un objet on peut, du moins en principe, l'utiliser pour produire une force stationnaire sur l'objet, et ainsi générer une force propulsive sans avoir à éjecter du propergol. Il suffit simplement de pousser l'objet lorsqu'il est plus lourd, et de l'attirer lorsqu'il est plus léger.
- La force de rĂ©action pendant les deux parties du cycle ne sera alors pas la mĂȘme en raison de la fluctuation de masse, de telle sorte qu'une force positive sera produite en moyenne temporelle. Cela peut ressembler Ă une violation de la conservation de la quantitĂ© de mouvement. Mais l'invariance Lorentzienne de la thĂ©orie garantit qu'aucune loi de conservation n'est violĂ©e. La conservation locale de la quantitĂ© de mouvement est prĂ©servĂ©e par le flux d'impulsion dans le champ de gravitation qui est Ă©changĂ© avec l'essentiel de la matiĂšre distante de l'univers ».
Dans un rapport contracté par la NASA en 2004[8], John G. Cramer et son équipe mentionnent que Woodward a probablement commis une erreur dans sa modélisation d'un systÚme à masse variable. En effet, un tel systÚme subit une force due non seulement à l'accélération mais aussi à la variation de masse, et ce d'aprÚs la formule :
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Cramer suggĂšre que les deux composantes s'annulent et explique ainsi les rĂ©sultats expĂ©rimentaux nĂ©gatifs obtenus par Woodward jusqu'alors. Il propose alors et met en Ćuvre une autre mĂ©thode expĂ©rimentale, utilisant un oscillateur harmonique. Il obtient une rĂ©sonance dans le sens gravitationnel, confirmant l'effet, mais ne parvient pas Ă l'annuler en plaçant le dispositif en position horizontale. Il en conclut la prĂ©sence d'un effet parasite qui doit ĂȘtre supprimĂ© dans des expĂ©riences ultĂ©rieures.
La réfutation de l'argumentation de Cramer et son équipe consiste à observer que la formule classique de la mécanique Newtonienne de son article n'est valable que pour un systÚme physique fermé. Or le dispositif de Woodward, en interaction gravitationnelle avec l'ensemble du contenu matériel de l'Univers, n'est pas un systÚme fermé d'aprÚs la thÚse de Woodward.
Notes et références
- (en) A new experimental approach to Mach's principle and relativistic gravitation
- (en) James F. Woodward, « Gravity, Inertia, and Quantum Vacuum Zero Point Fields », Foundations of Physics, vol. 31, no 5,â , p. 819â835 (DOI 10.1023/A:1017500513005)
- Making Stargates and Starship (ISBN 978-1-4614-5622-3) publié chez Springer[1]
- John G. Cramer commentant les travaux de Woodward : NĂ©anmoins Woodward, en formulant sa version du principe de Mach, suppose que lâinteraction de l'objet isolĂ© avec les autres masses de l'univers est non locale, par analogie avec le caractĂšre non-local de la mĂ©canique quantique tel que dĂ©montrĂ© par les expĂ©riences Einstein-Podolsky-Rosen. Ainsi, l'effet Woodward suppose implicitement un transfert instantanĂ© de quantitĂ© de mouvement entre la variation de masse considĂ©rĂ©e et le reste de l'univers. C'est pourquoi la troisiĂšme loi de Newton est prĂ©servĂ©e, mais de façon plutĂŽt singuliĂšre. «However, Woodward, in formulating his version of Mach's Principle, assumes that the interaction of the isolated object with the other masses of the universe is nonlocal, in analogy with the nonlocal character of quantum mechanics as demonstrated by the Einstein-Podolsky-Rosen experiments. Thus, Woodward's effect implicitly assumes an immediate nonlocal momentum transfer between the varying mass of interest and the rest of the universe. Therefore Newton's 3rd Law is preserved, but in a rather peculiar way.»
- (en) On the origin of inertia, Sciama 1953.
- (en) Recent Results of an Investigation of Mach Effect Thrusters, James Woodward
- If we produce a fluctuating mass in an object, we can, at least in principle, use it to produce a stationary force on the object, thereby producing a propulsive force thereon without having to expel propellant from the object. We simply push on the object whose mass is fluctuating when it is more massive, and pull back when it is less massive. The reaction forces during the two parts of the cycle will not be the same due to the mass fluctuation, so a time-averaged net force will be produced. This may seem to be a violation of momentum conservation. But the Lorentz invariance of the theory guarantees that no conservation law is broken. Local momentum conservation is preserved by the flux of momentum in the gravity field that is exchanged with the chiefly distant matter in the universe.
- (en) Tests of Machâs Principle With a Mechanical Oscillator, John G. Cramer, Curran W. Fey et Damon V. Casissi, University of Washington, Seattle, Washington. Rapport contractuel de la NASA
Liens externes
- (en) Making the Universe Safe for Historians, James Woodward.