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Dix d'Hollywood

L’expression « Dix d’Hollywood » (en anglais Hollywood Ten) dĂ©signe dix producteurs, scĂ©naristes ou rĂ©alisateurs de cinĂ©ma qui furent convoquĂ©s en 1947 par la Commission sur les activitĂ©s anti-amĂ©ricaines (House Un-American Activities Committee, HUAC).

  1. Alvah Bessie, scénariste
  2. Herbert Biberman, scénariste, réalisateur
  3. Lester Cole, scénariste
  4. Edward Dmytryk, réalisateur
  5. Ring Lardner Jr, journaliste, scénariste
  6. John Howard Lawson, scénariste
  7. Albert Maltz, scénariste
  8. Samuel Ornitz, scénariste
  9. Adrian Scott, scénariste, producteur
  10. Dalton Trumbo, réalisateur, scénariste, romancier
« AmĂ©ricains..... n’achetez pas chez les rouges !!!! » Tract anticommuniste amĂ©ricain typique des annĂ©es 1950, spĂ©cifiquement destinĂ© Ă  l’industrie du divertissement.

Des Dix-neuf d’Hollywood aux Dix d’Hollywood

Au dĂ©but de l’annĂ©e 1947, la HUAC dĂ©cida d'enquĂȘter sur l'influence du communisme au sein de l'industrie du cinĂ©ma. Le , J. Parnell Thomas (en), sĂ©nateur du New Jersey et John Mac Dowell, sĂ©nateur de Pennsylvanie s'installĂšrent Ă  Los Angeles et commencĂšrent une sĂ©rie d'auditions Ă  huis clos, au Biltmore Hotel de Los Angeles. Ils entendirent une sĂ©rie de tĂ©moins (notamment les acteurs Robert Taylor et Adolphe Menjou, le rĂ©alisateur Leo McCarey, les scĂ©naristes Howard Emmett Rogers, James Kevin McGuinness, Rupert Hughes et la mĂšre de Ginger Rogers, Lela Rogers) prĂȘts Ă  leur fournir des renseignements sur les membres (ou supposĂ©s tels) du parti communiste travaillant Ă  Hollywood.

La somme d'informations ainsi rĂ©coltĂ©e s'avĂ©ra dĂ©cevante pour la HUAC. C’est le FBI qui, en fait, fournit Ă  la commission les renseignements sur les communistes travaillant Ă  Hollywood. Une liste de 19 membres du parti communiste, actuels ou anciens, fut donc Ă©tablie. Elle comprenait les scĂ©naristes Alvah Bessie, Lester Cole, Richard Collins, Gordon Kahn (en), Howard Koch, Ring Lardner Jr, John Howard Lawson, Albert Maltz, Samuel Ornitz, Waldo Salt et Dalton Trumbo, les rĂ©alisateurs Edward Dmytryk, Lewis Milestone et Irving Pichel, les scĂ©naristes et rĂ©alisateurs Herbert Biberman et Robert Rossen, le scĂ©nariste et producteur Robert Adrian Scott, le dramaturge Bertolt Brecht et un acteur, Larry Parks.

Le , la HUAC commença une nouvelle sĂ©rie d’auditions, cette fois-ci publiques, Ă  Washington. Elle devait entendre 24 tĂ©moins « amicaux » et les 19 de Hollywood considĂ©rĂ©s comme des tĂ©moins « inamicaux ». Les 19 de Hollywood (Ă  l’exception de Brecht, qui avait dĂ©jĂ  dĂ©cidĂ© de quitter les États-Unis) adoptĂšrent une dĂ©fense commune. Ils dĂ©cidĂšrent d’invoquer le Ier Amendement de la Constitution amĂ©ricaine. Un comitĂ© de soutien se forma, le Committee for the First Amendement, comprenant notamment John Huston, William Wyler, Humphrey Bogart, Lauren Bacall, Groucho Marx et Frank Sinatra.

Seuls onze des Dix-neuf de Hollywood furent finalement entendus par la commission ; ceux qui sont aujourd'hui connus comme les Dix de Hollywood et Bertolt Brecht. Aucun des Dix n'accepta de rĂ©pondre Ă  la question rĂ©currente posĂ©e par la commission : « Êtes-vous ou avez-vous Ă©tĂ© membre du Parti communiste amĂ©ricain ? » Brecht, quant Ă  lui, fut entendu par la HUAC le . Il dĂ©clara ne pas ĂȘtre membre du parti communiste, et quitta (pour toujours) les États-Unis le lendemain. Ce mĂȘme , le prĂ©sident de la Commission, Parnell Thomas, dĂ©clara les auditions closes. Le , le CongrĂšs procĂ©da Ă  l'inculpation des Dix pour outrage.

La réunion du Waldorf-Astoria

Le (le jour mĂȘme oĂč le CongrĂšs procĂ©dait Ă  l’inculpation des Dix pour outrage), cinquante-huit hauts dirigeants des studios de Hollywood se rĂ©unirent Ă  l’hĂŽtel Waldorf-Astoria de New York pour adopter une position commune Ă  l’égard des Dix. Ils se mirent d’accord sur un texte connu aujourd’hui comme le Waldorf Statement. Cet accord, considĂ©rĂ© comme l’acte de naissance des listes noires, stipulait que les Dix seraient congĂ©diĂ©s ou suspendus sans solde et que dĂ©sormais, plus aucun communiste ne serait employĂ© « sciemment » par les studios ; « Les membres de l'Association of Motion Picture Producers dĂ©plorent l’action des dix de Hollywood qui ont Ă©tĂ© citĂ©s Ă  comparaitre par la Chambre des ReprĂ©sentants. Nous ne souhaitons pas prĂ©juger de leurs droits lĂ©gaux, mais leurs actions ont desservi leurs employeurs et ont rĂ©duit leur utilitĂ© pour l’industrie. Nous congĂ©dions ou nous suspendons sur-le-champ sans aucune compensation ceux d’entre eux que nous employons, et nous ne rĂ©emploierons aucun des dix tant qu’ils n’auront pas Ă©tĂ© acquittĂ©s, ou qu’ils ne se seront pas disculpĂ©s et auront dĂ©clarĂ© sous serment qu’ils ne sont pas communistes [
] Nous n’emploierons sciemment aucun communiste ou membre d’un parti ou d’un groupe qui prĂ©conise le renversement du gouvernement des États-Unis par la force ou par des mĂ©thodes illĂ©gales ou inconstitutionnelles[1]. »

Seuls cinq des dix de Hollywood Ă©taient encore sous contrat avec un studio en 1947 : Dmytryk, Scott, Ring Lardner Jr, Dalton Trumbo et Lester Cole. Dmytryk et Scott furent convoquĂ©s par la RKO le . Ils refusĂšrent de se soumettre Ă  une des conditions posĂ©es par la compagnie ; signer un serment de loyautĂ© oĂč ils auraient affirmĂ© ne jamais avoir Ă©tĂ© membre du parti communiste. Ils furent donc immĂ©diatement licenciĂ©s. La Twentieth Century Fox rompit Ă  son tour le contrat de Ring Lardner Jr le . La MGM fit la mĂȘme chose avec Lester Cole, et suspendit le contrat de Dalton Trumbo.

Les condamnations

Le procĂšs des Dix commença au mois d'. Chacun d‘entre eux fut jugĂ© sĂ©parĂ©ment. John Howard Lawson puis Dalton Trumbo furent condamnĂ©s Ă  un an de prison et 1 000 dollars d‘amende. Les huit autres coaccusĂ©s, qui n’avaient pas encore Ă©tĂ© jugĂ©s, trouvĂšrent un accord (visant principalement Ă  rĂ©duire les frais de leur dĂ©fense) avec l’accusation ; les dĂ©cisions prises dans les diffĂ©rents recours dĂ©posĂ©s par Lawson et Trumbo vaudraient Ă©galement pour eux. L’appel de Lawson et Trumbo fut rejetĂ© le . Leur dernier recours Ă©tait la Cour suprĂȘme. Le , celle-ci refusa de revenir sur leur inculpation[2]. Tous deux commencĂšrent Ă  purger leur peine dans la prison fĂ©dĂ©rale d’Ashland, le . Le procĂšs de leurs huit autres compagnons eut lieu du 22 au . Herbert Biberman et Edward Dmytryk furent condamnĂ©s Ă  six mois de prison et 500 dollars d‘amende, Alvah Bessie, Lester Cole, Ring Lardner Jr, Albert Maltz, Samuel Ornitz et Adrian Scott Ă  un an de prison et 1 000 dollars d‘amende. Robert Adrian Scott purgea sa peine dans la prison fĂ©dĂ©rale d’Ashland, Lester Cole et Ring Lardner Jr dans celle de Danbury, Edward Dmytryk et Albert Maltz dans celle de Mill Point, Sam Ornitz dans celle de Springfield et Alvah Bessie et Herbert Biberman dans celle de Texarkana.

Le temps des listes noires

Edward Dmytryk fut le seul des Dix Ă  se rĂ©tracter. Il comparut Ă  nouveau devant la HUAC, le , et il donna 26 noms de personnalitĂ©s adhĂ©rant au parti ou Ă  l’idĂ©ologie communiste. Il put Ă  nouveau tourner, d’abord dans un film produit par les frĂšres King, Mutiny (1952) puis pour Stanley Kramer. Les autres neuf coaccusĂ©s essayĂšrent de continuer Ă  travailler Ă  Hollywood. Certains d’entre eux, scĂ©naristes, y parvinrent en utilisant des prĂȘte-noms (avec des salaires bien moindres qu'Ă  lâ€˜Ă©poque oĂč ils pouvaient travailler Ă  visage dĂ©couvert Ă  Hollywood). Herbert J. Biberman parvient Ă  tourner dans les annĂ©es 50, Le Sel de la terre, qui traite de la grĂšve de travailleurs mexicains, ainsi que de leurs Ă©pouses, dans une mine du Nouveau-Mexique. Ce film est quasiment boycottĂ© partout aux États-Unis, mais connaĂźtra un certain succĂšs en Europe. En 1956, l’Oscar du meilleur scĂ©nario fut dĂ©cernĂ© pour The Brave One Ă  un certain Robert Rich (qui Ă©tait le neveu d’un des producteurs). Rich Ă©tait en rĂ©alitĂ© le prĂȘte-nom de Dalton Trumbo. En 1960, Otto Preminger dĂ©cida, le premier, d’annoncer publiquement que Dalton Trumbo Ă©tait le scĂ©nariste d'Exodus. Stanley Kubrick dĂ©cida, Ă  son tour, de rĂ©vĂ©ler que Trumbo Ă©tait le scĂ©nariste de Spartacus. Cependant cela ne suffit pas Ă  arrĂȘter immĂ©diatement les listes noires ; Ring Lardner Jr dut attendre 1964 pour que son nom soit crĂ©ditĂ© officiellement (pour le livret de la comĂ©die musicale jouĂ©e Ă  Broadway, Foxy) et en 1965, Lester Cole ne pouvait toujours pas apparaĂźtre sous son propre nom au gĂ©nĂ©rique de Born Free.

Notes et références

  1. Le texte intégral du Waldorf Statement.
  2. Au cours de l’étĂ© 1949, deux des juges libĂ©raux qui siĂ©geaient Ă  la Cour SuprĂȘme, Frank Murphy et Wiley Rutledge, dĂ©cĂ©dĂšrent et furent remplacĂ©s par des juges conservateurs, Tom Clark et Sherman Minton. La majoritĂ© de la Cour SuprĂȘme bascula ainsi du camp libĂ©ral vers celui des conservateurs.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Bernard F. Dick, Radical Innocence: A Critical Study of the Hollywood Ten, University Press of Kentucky, 1989.
  • (en) Larry Ceplair, Steven Englund, The Inquisition in Hollywood : Politics in the Film Community, 1930-60, University of Illinois Press, 2003. (ISBN 9780252071416)
  • Victor Navasky, Les DĂ©lateurs, le cinĂ©ma amĂ©ricain et la chasse aux sorciĂšres, Ramsay Poche CinĂ©ma, 1982. (ISBN 2-7158-0384-2)

Articles connexes

Lien externe

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