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Convention entre actionnaires

Une convention entre actionnaires (ou pacte d'actionnaires) est un contrat de droit privé entre tout ou partie des associés d'une société par actions, qui a souvent un caractère confidentiel.

Généralités

En théorie, les relations des actionnaires avec la société et des actionnaires entre eux sont gouvernées par les statuts de la société. Toutefois, quand le nombre d'actionnaires est relativement faible, il est en pratique courant que les actionnaires complètent ces statuts officiels par un pacte. De nombreuses raisons peuvent les y pousser :

  • Les statuts d'une sociĂ©tĂ© sont un document public, alors qu'un pacte d'actionnaire, Ă©tant un contrat de droit privĂ©, peut rester confidentiel entre les parties.
  • Les pactes d'actionnaires sont gĂ©nĂ©ralement plus souples, que ce soit pour les Ă©tablir, les administrer, les rĂ©viser ou les abroger.
  • Les actionnaires peuvent souhaiter que d'Ă©ventuels conflits soient rĂ©solus par voie d'arbitrage, ou par un tribunal relevant d'un droit autre que celui de la sociĂ©tĂ©. Dans certains pays, le droit des sociĂ©tĂ©s ne permet pas d'introduire une telle clause arbitrale dans les statuts.
  • Dans certains pays, le droit des sociĂ©tĂ©s peut ne pas fournir une protection suffisante aux actionnaires minoritaires, lesquels peuvent vouloir protĂ©ger leurs intĂ©rĂŞts Ă  travers un pacte d'actionnaires. En particulier, un pacte d'actionnaire peut fournir un mĂ©canisme de sortie Ă  des actionnaires minoritaires sans avoir Ă  passer par la liquidation de l'entreprise.
  • Pour Ă©viter que des ventes d'actions ou une offre publique d'achat ne conduisent Ă  une perte de contrĂ´le, voire Ă  la liquidation de l'entreprise.

Inversement, un pacte d'actionnaires peut constituer un risque pour les parties prenantes :

  • Dans certaines lĂ©gislations, un pacte d'actionnaires peut constituer un partenariat, ce qui peut avoir des consĂ©quences fiscales, ou conduire Ă  une responsabilitĂ© financière en cas de banqueroute.
  • Quand le pacte d'actionnaires contrevient aux dispositions statutaires, l'efficacitĂ© de ses clauses peut ĂŞtre contestĂ©e.
  • Dans les pays oĂą les contrats sont soumis Ă  droit d'enregistrement quand ils dĂ©passent une certaine importance, le pacte peut ĂŞtre soumis Ă  des droits rĂ©dhibitoires, dont l'omission entraĂ®nerait la nullitĂ© du pacte.
  • Dans certains cas, l'existence d'un pacte d'actionnaires peut ĂŞtre retenue comme preuve d'une collusion et/ou de pratiques monopolistiques.
  • Un pacte d’actionnaire mis Ă  jour peut ĂŞtre qualifiĂ© par le conseil des marchĂ©s financiers d’action de concert[1]. Dès lors, « les personnes agissant de concert sont tenues solidairement aux obligations qui leur sont faites par la loi »[2]. De ce fait, les signataires d’un pacte dĂ©tenant plus du tiers des droits de vote d'une sociĂ©tĂ© cotĂ©e sur un marchĂ© rĂ©glementĂ© doivent en informer immĂ©diatement l'AutoritĂ© des marchĂ©s financiers et surtout sont tenus de dĂ©poser une OPA sur le reste du capital s'ils viennent Ă  franchir en hausse les seuils fixĂ©s par les clauses d'OPA .

Typologie des clauses

Les clauses d'un pacte d'actionnaires peuvent recouvrir différentes finalités réparties en trois grandes catégories :

  1. Relatives au capital social. Elles ont pour finalité de permettre à leurs signataires de maîtriser, voire de verrouiller la composition du capital. Elles constituent pour les actionnaires un moyen de se protéger contre une OPA. Une clause conférant en cas de cession de parts par un des signataires un droit de préemption aux autres appartient à cette catégorie, tout comme la clause d'agrément, qui nécessite l'accord des coactionnaires pour revendre ses parts ou titres à un tiers. Plus radicalement, la clause d'inaliénabilité interdit la cession des titres détenus, alors que celle de sortie forcée en impose la revente. Certaines clauses peuvent obliger des actionnaires à céder leurs parts sociales dans certains contextes.
  2. Relatives à l’exercice du droit de vote des signataires (appelées alors « conventions de vote »). Elles peuvent, par exemple, imposer à tous leurs membres une concertation préalable à chaque assemblée générale, notamment afin de coordonner les décisions votées. Une clause de collaboration exclusive avec la société appartient à cette catégorie.
  3. Relatives aux conditions dans lesquelles les signataires participent à l’organisation de la société ou à son fonctionnement. Ainsi, une clause de limitation de pouvoir soumet certaines décisions stratégiques à un accord préalable, appartient à cette catégorie. Ce type de clauses peut aussi prévoir un accès à l'information à une fréquence plus régulière que l'exigence légale, ou sur des points non couverts par la réglementation. De la même façon, il peut être prévu la marche à suivre en cas de conflit, ce qui généralement prive le signataire de ses recours légaux.

Pour gagner en efficacité, ces pactes prévoient souvent une clause pénale qui impose le paiement d'une somme souvent considérable en cas d'inexécution, indépendamment de tout dommage effectif qui constituerait en principe le fondement d'une action d'indemnisation.

Aspects juridiques

Droit français

Juridiquement un pacte d’actionnaire s’analyse comme un contrat plurilatéral en vue d’un objet commun, l’objet commun étant « la stabilisation de l’actionnariat » d’une société par action.

Un pacte est un contrat, en tant que tel ses dispositions ne pouvaient donner lieu à exécution forcée : elles n'ouvraient droit qu'à dommages-intérêts. Toutefois, depuis 2002, la jurisprudence en France évolue, et une telle exécution a été jugée possible, « l’article 1142 du Code civil n’interdit pas de recourir à l’exécution forcée lorsque, comme en l’espèce, aucune impossibilité matérielle, juridique, ni morale ne lui fait obstacle, le débiteur de l’obligation étant demeuré propriétaires des titres et Pour limiter le risque de violation, le pacte peut fixer une sanction pécuniaire en cas de non-respect »[3]. Par ailleurs, une telle clause pénale peut être révisée par un juge qui la trouverait léonine, parce qu'excessive.

Un contrat ne lie que ses parties. Un contrat est normalement inopposable aux tiers, c'est "l'effet relatif" des conventions. Cela signifie qu’ils ne produisent un effet qu’entre les souscripteurs, et non vis-à-vis des tiers: le non-respect du pacte correspond seulement à une rupture contractuelle vis-à-vis des autres parties, mais n'est pas opposable aux tiers. Par exemple, un vote en l’assemblée générale en infraction aux dispositions du pacte engagera la responsabilité contractuelle de celui qui a enfreint le pacte vis-à-vis des autres souscripteurs, mais n’entamera pas d’irrégularité sur la délibération. Le pacte d'actionnaire, occulte, n'était donc pas opposable à l’entreprise elle-même, qui n’est jamais partie prenante. C’était aussi le cas du nouvel actionnaire de la société qui n'était pas lié par le pacte qu'avait pu signer l'ancien actionnaire lui ayant cédé ses actions. Là aussi la jurisprudence a évolué, et depuis 2006, il est possible de prononcer une exécution forcée dès lors que le tiers à connaissance de ce pacte et s'en est prévalu[3].

Droit italien

En Italie, avant la loi du , les pactes d’actionnaires étaient une pratique courante, mais ils n'avaient pas de cadre juridique. Ils faisaient partie des instruments de contrôle des sociétés, mais n’y étaient attachés ni obligations de publicité et transparence, ni limite de durée. Une partie de la doctrine les croyait illicites. Depuis cette loi, ce mécanisme a été légitimé et régulé, d’abord pour les seules sociétés cotées, puis, après la réforme de 2003.

Notes et références

  1. "accord conclu en vue d'acquérir ou de céder des droits de vote ou en vue d'exercer des droits de vote pour mettre en œuvre une politique commune vis-à-vis de la société" article L 233-10 du Code de commerce
  2. mĂŞme source
  3. LBO : actualité jurisprudentielle sur les pactes d’actionnaires- sur la base de textes parus jusqu'en 2008 Yann Martin-Lavigne et Marie Coatrieux, Agorabiz

Voir aussi

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