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Chronique indiscrĂšte des mandarins

Rulin waishi (ou Julin waishi), la Chronique indiscrĂšte des mandarins (chinois : ć„’æž—ć€–ćČ ; pinyin : RĂș lĂ­n wĂ i shǐ) est un roman de Wu Jingzi (ćłæ•Źæą“, 1701-1754). Chef-d'Ɠuvre du genre satirique, il brosse un portrait fĂ©roce et vivant des lettrĂ©s chinois.

Chronique indiscrĂšte des mandarins
Auteur Wu Jingzi
Pays Chine
Genre roman satirique
Version originale
Langue chinois vernaculaire
Titre Rulin waishi
Version française
Traducteur Tchang Fou-jouei
Éditeur Gallimard
Collection Connaissance de l'Orient
Date de parution 1976

Dans le titre en chinois, Rulin waishi, rulin signifie « forĂȘt des lettrĂ©s », et waishi « histoire non officielle »[1].

Présentation

La plus ancienne Ă©dition connue de l'ouvrage date de 1803. Elle comporte cinquante-six chapitres. Le cinquante-sixiĂšme chapitre a plus tard Ă©tĂ© considĂ©rĂ© comme apocryphe, peut-ĂȘtre Ă  tort. Quoi qu'il en soit, une Ă©dition en cinquante-cinq chapitres a paru en 1955 pour cĂ©lĂ©brer le bicentenaire de la mort de l'auteur. C'est d'aprĂšs cette Ă©dition que s'est faite la traduction en français de Tchang Fou-jouei[2].

La Chronique indiscrĂšte des mandarins est Ă  mettre en relation avec le roman des Ming Au bord de l'eau, dont il est en quelque sorte le miroir. LĂ  oĂč Au bord de l'eau raconte l'histoire d'une bande de brigands rĂ©voltĂ©s contre l'injustice de la sociĂ©tĂ©, la Chronique est le tableau de cette sociĂ©tĂ© injuste. Certains Ă©pisodes du roman de Wu Jingzi semblent mĂȘme faire Ă©cho Ă  des passages du roman antĂ©rieur[3]. Cependant, dans l'histoire de la littĂ©rature chinoise, la Chronique indiscrĂšte des mandarins est le premier roman dont le sujet est une crĂ©ation de son auteur, alors que les romans prĂ©cĂ©dents Ă©taient la reprise de sujets historiques ou populaires antĂ©rieurs[4].

Le roman prĂ©sente toute une sĂ©rie de personnages, qui dĂ©filent les uns aprĂšs les autres tout au long des chapitres. Les critiques chinois du dĂ©but du xxe siĂšcle, jugeant Ă  l'aune des standards du roman europĂ©en, n'ont pas manquĂ© de lui reprocher un certain relĂąchement dans la composition. En rĂ©alitĂ© l'Ɠuvre fait preuve d'une unitĂ© plus profonde. Ainsi, selon Shang Wei, l'absence d'intrigue ou de personnages principaux a en elle-mĂȘme un sens : aucun de ces personnages de faible envergure ne saurait soutenir une action qui soit Ă  l'image des hauts faits relatĂ©s par les histoires officielles du passĂ©. Dans ce prĂ©sent dĂ©considĂ©rĂ©, la vie des lettrĂ©s relĂšve de l'anecdote[5].

L'ouvrage est en outre structuré par trois grandes parties sous-jacentes. Une premiÚre partie (chapitres 2-30) expose les défauts des lettrés. Ces derniers appartiennent à deux catégories : ceux qui s'échinent à passer les examens, et ceux qui, poÚtes autoproclamés, dédaignent les carriÚres officielles, encore plus hypocrites que les précédents dans leur poursuite de la renommée[6]. Une deuxiÚme partie expose le véritable confucianisme, enfin une troisiÚme montre l'écroulement de cet univers[3].

L'histoire racontĂ©e dans le roman commence en 1487, sous le rĂšgne de Chenghua, et s'achĂšve en 1595 (chap. 55) ou en 1615 (chap. 56) sous le rĂšgne de Wanli. On y trouve de nombreuses rĂ©fĂ©rences Ă  des personnages ou Ă©vĂ©nements de la dynastie Ming. L'ouvrage n'est cependant pas un roman historique. Les situations passĂ©es peuvent tout aussi bien faire allusion Ă  des rĂ©alitĂ©s de la dynastie Qing et ĂȘtre une façon voilĂ©e d'en faire la critique[7] - [8].

Certains aspects du roman sont autobiographiques. Wu Jingzi avait quittĂ© sa rĂ©gion natale pour se dĂ©gager de ses obligations familiales. Il avait aussi renoncĂ© Ă  passer les examens impĂ©riaux et Ă  faire une carriĂšre officielle. L'un des personnages du roman, Du Shaoqing (Tou Chao-k'ing), alter ego de l'auteur, a la mĂȘme attitude. À l'inverse, les personnages qui se conforment aux obligations des lettrĂ©s ont une existence faite de renoncement et d'insatisfaction[9]. Cheng Tingzuo (zh) (1691-1767), penseur opposĂ© Ă  l'orthodoxie nĂ©oconfucĂ©enne et ami de l'auteur, est sans doute le modĂšle de Zhuang Shaoguang (Tchouang Chao-kouang, chapitres 34, 35 49)[10]. Certains critiques ont d'ailleurs voulu lire la Chronique indiscrĂšte des mandarins comme un roman Ă  clĂ©. Pour AndrĂ© LĂ©vy toutefois, « s'il y a galerie de portraits des contemporains, elle sert une vision satirique du monde des lettrĂ©s ; l'inverse ne saurait retenir notre intĂ©rĂȘt »[4].

Références

  1. André Lévy, introduction à Wou King-tseu 1976, p. vii
  2. André Lévy, introduction à Wou King-tseu 1976, p. xii
  3. Jacques Dars, dans LĂ©vy 2000, p. 325-329
  4. André Lévy, introduction à Wou King-tseu 1976, p. xiii
  5. Shang Wei, dans Chang et Owen 2010, p. 275-276
  6. Shang Wei, dans Chang et Owen 2010, p. 276-277
  7. Shang Wei, dans Chang et Owen 2010, p. 274
  8. André Lévy, introduction à Wou King-tseu 1976, p. xiv-xv
  9. Shang Wei, dans Chang et Owen 2010, p. 275
  10. André Lévy, introduction à Wou King-tseu 1976, p. x

Traductions

Bibliographie

  • (en) Kang-I Sun Chang (dir.) et Stephen Owen (dir.), The Cambridge History of Chinese Literature : From 1375, vol. II, Cambridge University Press, , 793 p. (ISBN 978-0-521-85559-4, lire en ligne)
  • AndrĂ© LĂ©vy (dir.), Dictionnaire de littĂ©rature chinoise, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », (1re Ă©d. 1994), 429 p. (ISBN 2-13-050438-8)
  • Paul S. Ropp, Dissent in Early Modern China : Ju-Lin Wai-Shih and Ch'ing Social Criticism, Ann Arbor, University of Michigan Press, 1981.
  • Shang Wei, “Rulin waishi” and Cultural Transformation in Late Imperial China, Cambridge, Harvard University Press, « Harvard-Yenching Institute Monograph Series », 2003.

Voir aussi

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