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Bataille de Megiddo (XVe siècle av. J.-C.)

La bataille de Megiddo, qui se déroula au cours du XVe siècle avant notre ère, opposa l'armée égyptienne commandée par Thoutmôsis III à une coalition syro-cananéenne dirigée par le roi de Qadesh. C'est la première bataille de l'histoire dont les détails, très précis, nous soient connus.

Bataille de Megiddo
Informations générales
Date [1]
Lieu Megiddo, Israël
Casus belli Soulèvement cananéen
Issue Victoire Ă©gyptienne
Commandants
ThoutmĂ´sis IIIRoi de Qadech
Forces en présence
10 000Inconnues, probablement moins que les forces Ă©gyptiennes.
Pertes
Inconnues340 prisonniers, nombre de morts incertain.

Différentes dates ont été proposées : on hésite entre la période de -1450 à -1457, celle de -1480 à -1482 et celle de -1470 à -1479.

La victoire fut égyptienne et l'ennemi se réfugia dans Megiddo, qui se rendit après un siège de sept mois.

Le compte rendu de la bataille, rĂ©digĂ© par le scribe de l'armĂ©e Tjenen, fut consignĂ© dans une longue inscription que le roi fit graver sur les parois du temple d’Amon-RĂŞ Ă  Karnak : un texte de 225 lignes, chacune mesurant 25 mètres de long, que les historiens appellent les Annales de ThoutmĂ´sis III.

Position de Megiddo sur une carte du Levant à l'âge du bronze récent.

La révolte des Asiatiques

À la fin du règne d'Hatchepsout, des princes syro-palestiniens s’étaient coalisés contre l’Égypte :

« Depuis Yeraza[2] jusqu’aux marĂ©cages de la terre[3], on s’était rebellĂ© (litt. « on Ă©tait tombĂ© en rĂ©bellion Â») contre Sa MajestĂ©. »

— K. Sethe, p. 648.

Le puissant roi de Qadesh, cité[4] située sur les bords de l’Oronte, avait pris la tête des coalisés. Ces derniers étaient appuyés par le roi de Mitanni, l'éternel rival de l'Égypte.

La ville de Megiddo, où se déroula la bataille, au débouché des passes du mont Carmel, était au carrefour de plusieurs pistes commerciales et militaires menant vers la côte méditerranéenne et la Mésopotamie. En raison de sa position stratégique de première importance, les coalisés y avaient concentré leurs troupes.

La remontée vers Megiddo

Après la mort d’Hatchepsout, en l’an 22 de son règne nominal, Thoutmôsis III entreprit la première des seize (ou dix-huit) campagnes qu’il dut mener pour soumettre les Asiatiques. Il avait réuni une armée nombreuse de dix mille hommes[5] : chars, archers et fantassins, suivis par les convois de l’intendance.

Vers la mi-juillet, les Égyptiens passèrent la forteresse de Tjaru (Σιλε, Sile, l’actuel El Qantara) dans le delta oriental, et atteignirent neuf jours plus tard la ville de Gaza, qui fut prise d’assaut. Dès le lendemain, ils se remirent en marche pour arriver onze jours plus tard Ă  Yehem, sans doute l’actuelle Yemma sur le flanc sud du mont Carmel, situĂ©e Ă  quelque 110 kilomètres de Gaza. L’objectif Ă©tait la place forte de Megiddo,

« oĂą Ă©tait entrĂ© le mĂ©prisable ennemi de Qadesh en ce moment mĂŞme, rĂ©unissant autour de lui les Grands de tous les pays Ă©trangers qui avaient Ă©tĂ© fidèles Ă  l’Égypte (litt. « sur l’eau de l’Égypte Â»)… leurs chevaux, leurs armĂ©es et leurs gens. »

— K. Sethe, p. 650.

Pharaon envoya des éclaireurs reconnaître les environs. Il y avait trois routes possibles pour atteindre Megiddo depuis Yehem. La route du Nord, par Ziftah (en), et la route du Sud, par Taanakh (en), obligeraient l'armée à avancer en terrain découvert. En revanche, la route du milieu, par Arouna, permettrait éventuellement de surprendre les coalisés ; elle suivait toutefois un défilé étroit où les troupes ne pourraient passer qu'en file indienne : si l'ennemi attendait à la sortie, l'armée n’aurait pas le temps de se déployer.

Les officiers du roi conseillèrent la prudence :

« N’est-il pas vrai que [si on suit ce défilé] un cheval devra marcher derrière un autre cheval, l’armée et les soldats faisant de même ? Est-ce que notre avant-garde devra combattre alors que notre arrière-garde sera [encore] ici à Arouna et qu’elle ne pourra pas combattre ? Il existe des chemins plus larges… »

— K. Sethe, p. 650.

Le roi passa outre à ces objections et l’armée franchit le défilé sans incident.

La bataille et le siège de Megiddo

Thoutmôsis III frappant les ennemis cananéens ; relief à Karnak représentant la bataille de Megiddo

Le lendemain, deux jours après le départ de Yehem, Pharaon chargea les ennemis à la tête de ses troupes.

« Ils fuient vers Megiddo ;… on les hisse et les tire par leurs vĂŞtements par-dessus les murs de la ville, car les gens avaient fermĂ© [prĂ©maturĂ©ment les portes de] la ville. (…) Ah ! si l’armĂ©e de Sa MajestĂ© n’avait pas donnĂ© son cĹ“ur au pillage (litt. « donnĂ© son cĹ“ur Ă  piller les possessions de ces ennemis Â»), elle aurait pris Megiddo sur-le-champ. »

— K. Sethe, p. 658.

ThoutmĂ´sis harangua ses troupes :

« Tous les chefs des pays du Nord sont enfermés à l’intérieur de la place. C’est donc prendre mille villes que de prendre Megiddo. Emparez-vous de la ville vaillamment ! »

— K. Sethe, p. 660.

Les Égyptiens investirent Megiddo ; après un siège de sept mois, la ville se rendit, au mois de février de l’an 23. Après la victoire

« ce lâche ennemi [le roi de Qadesh] et les Grands qui Ă©taient avec lui furent autorisĂ©s Ă  sortir pour venir auprès de Ma MajestĂ©, ainsi que tous leurs enfants ; ils Ă©taient chargĂ©s de nombreux tributs[6] en or et en argent, ils amenaient tous les chevaux en leur possession, leurs chars d’or et d’argent… toutes leurs armes… Ma MajestĂ© fit alors qu’on leur permĂ®t de rentrer (litt. « qu’on leur rendĂ®t le chemin de leurs villes Â»), ils s’en allèrent tous, chevauchant des ânes, car j’avais pris leurs chevaux. »

— K. Sethe, p. 1236.

Le butin

Le scribe Tjenen qui accompagnait l’armée dressa un décompte précis du butin[7] :

« 340 prisonniers (« sḳrw cnḫw Â»), 2 041 juments (« ssmwt Â»), 191 poulains (msywt nywt ssmwt), 6 Ă©talons (jbrw), un char (« wrrt Â») incrustĂ© d’or… ayant appartenu Ă  cet ennemi [de Kadesh], un beau char incrustĂ© d’or ayant appartenu au Grand de Megiddo, 892 chars ayant appartenu Ă  sa mĂ©prisable armĂ©e, 200 armures (« mssw n cḥȝ Â», litt. « tuniques de combat Â»), 502 arcs (« pḏwt Â»), 1 929 bovins (« jwČťw Â»), 2 000 grandes chèvres (« cwt wrwt Â»), 20 500 moutons (« cwt ḥḏt Â»). »

La conclusion de la campagne

Pour s’assurer la loyauté des vaincus, Thoutmôsis emmena en Égypte « les femmes ayant appartenu à ce vil ennemi (i. e. le roi de Qadesh) avec les enfants, de même que les femmes des chefs qui étaient avec lui et tous les enfants[8]. »

Sa victoire sur les Asiatiques, la première d'une longue série, valut un immense prestige au roi. Même les pays qui échappaient à l’hégémonie égyptienne envoyèrent du tribut en hommage : Chypre, le pays des Hattis, l’Assyrie et même la lointaine Babylone.

Notes et références

  1. Selon la tradition. Certaines recherches avancent la date du 16 avril.
  2. Ville au nord de la Judée.
  3. pḥww tȝ, une région probablement contiguë à l’Euphrate.
  4. L'actuel Tell Nebi Mend (en), au sud de Homs.
  5. Ce nombre, qu'on pourrait croire exagéré, est cohérent avec le récit de la bataille – il est donc fort probable que c'était l'effectif historique.
  6. inw, litt. « ce qu’on apporte ».
  7. K. Sethe, p. 663-664.
  8. K. Sethe, p. 185.

Bibliographie

Ouvrages cités dans le texte
  • Kurt Heinrich Sethe, Urkunden des ägyptischen Altertums, vol. IV : Urkunden der XVIII. Dynastie, Hindrich'sche Buchhandlung, 1932-1961.
    Les textes hiéroglyphiques.
Autres ouvrages
  • (en) Richard E. Dupuy et Trevor N. Dupuy, The Encyclopedia of Military History : From 3500 B.C. to the Present, New York, Harper & Row, , 1406 p. (ISBN 978-0-06-011139-7).
  • Claire Lalouette, Thèbes ou La naissance d'un Empire, Flammarion, (ISBN 978-2-08-081328-2).
  • (en) Donald B. Redford, Wars in Syria and Palestine of Thutmose III, Leiden, E. J. Brill, , 272 p. (ISBN 978-90-04-12989-4, prĂ©sentation en ligne).
  • Florence MaruĂ©jol, ThoutmĂ´sis III et la corĂ©gence avec Hatchepsout, Paris, Pygmalion, , 478 p. (ISBN 978-2-85704-894-7).

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