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Art invisuel

L’art invisuel est un art qui existe autrement que sous la forme d’œuvre d’art, matérielle ou immatérielle[1].

Définition et interprétations

Il s’agit d’un art dont les propriĂ©tĂ©s n’obĂ©issent pas aux caractĂ©ristiques et aux critères de l’art visuel[2]. Il ne s’agit pas d’un mouvement artistique mais plutĂ´t d’un genre d’art au sein duquel il peut y avoir diffĂ©rents formats et langages et qui inclut une très grande diversitĂ© de pratiques. Le changement de paradigme opĂ©rĂ© par l’art invisuel dans l’art implique que l’œuvre d’art n’est qu’un format parmi d’autres[3].

Les dĂ©marches qui peuvent ĂŞtre considĂ©rĂ©es comme invisuelles s’affranchissent de l’œuvre et sont inscrites dans le rĂ©el au point qu’on ne peut pas toujours les distinguer de ce qui les entoure. Cet art se dispense de l’œuvre d’art, de l’exposition et du marchĂ© de l’art[4]

Dans son article, Kévin Bideau cite Corina Mila Chutaux selon laquelle les pratiques invisuelles sont des « pratiques artistiques hétérogènes qui ont pour point commun le refus de production d’objets d’art »[5]. Corina Mila Chutaux aborde les « arts invisuels », une « catégorie d’art qui se construit en opposition avec l’art visuel »[6].

Origine

La notion d’art invisuel a Ă©tĂ© inventĂ©e en 2004 par l’artiste invisuel Alexandre Gurita[7], qui avait observĂ© Ă  Paris, dans les annĂ©es 1998—2000[8], des attitudes, projets et dĂ©marches artistiques qui existaient autrement que sous forme d’art visuel et notamment d’œuvres d’art, dĂ©signĂ©es alors comme  « performance », « happening », « situations » ou « art conceptuel ». Alors que ces pratiques d’art visuel Ă©taient bien dĂ©finies dans l’histoire de l’art, Gurita comprit alors qu’il fallait trouver un mot adaptĂ© aux pratiques invisuelles.

Institutions fondées sur l’art invisuel

La Biennale de Paris répertorie et valorise des artistes invisuels depuis 2000[9].

L’École nationale d’art de Paris (ENDA) est une Ă©cole basĂ©e sur le concept d’art invisuel et qui consacre Ă  l’art invisuel une ligne de recherche et d’expĂ©rimentation (LDRE) donnant aux contours de l’art un espace plus vaste que celui de l’œuvre d’art.

L’École européenne pour l’intégration des migrants par l’art (EEIMA) est une école basée à Bruxelles basée sur l’art invisuel comme un moyen d’adaptation des migrants en Europe[10].

Le Centre de documentation, de recherche et des applications des offensives (CDRAO)[11] met en exergue le perturbationisme comme le premier mouvement d’art invisuel[12].

Événements

De nombreux événements explorant l’art invisuel ont lieu sous les auspices de la Biennale de Paris :

  • Biennale de Paris Ă  Chypre[9] du 20 au 23 octobre 2010 Ă  Nicosie, Chypre.
  • Biennale de Paris Ă  New York[9] du 24 septembre au 8 octobre 2011 Ă  New York, États-Unis.
  • Colloque « Quelle collection d’art pour le futur II ? »[13] le 6 mars 2015 Ă  Paris, MusĂ©e d’art moderne de la ville de Paris .
  • French Theory : The (In-)visuality Series[14] le 15 octobre 2015 Ă  New York.
  • Biennale de Paris Ă  Beyrouth[15] du 27 juin au 3 juillet 2016 Ă  Beyrouth, Liban.
  • Biennale de Paris au Guatemala[16] du 1er au 11 novembre 2017 Ă  Guatemala, Guatemala.
  • Premier forum mondial des Ă©conomies de l’art (FomĂ©A) du 22 au 24 juin 2018 Ă  l’HĂ´tel de Ville de Paris.
  • Le colloque international sur l’art invisuel le 14 novembre 2022 Ă  Abidjan, CĂ´te d'Ivoire.

Citations et réflexions en rapport avec l’invisuel

  • Alexandre Gurita : « L’œuvre d'art n’est pas une obligation, c’est une option. »[17].
  • Ghislain Mollet-ViĂ©ville : « Pour moi, il y a bien une Ĺ“uvre d’art invisuel globale Ă©difiĂ©e par la Biennale de Paris, c’est celle de tous ceux qui y participent avec en tĂŞte son directeur en tant que mĂ©ta-artiste. Dès lors, force est de constater qu’en attendant l’extermination de l’art conventionnel, les artistes peuvent toujours – avec des impacts ciblĂ©s – le contrecarrer en son sein et Ă©branler ceux qui s’y consacrent. »[18]
  • Sylvain Soussan :« Il est souvent plus efficace de se donner une identitĂ© plus neutre que celle d’un artiste. »[19]
  • Paul Robert : « Le sport est probablement une des activitĂ©s humaines rĂ©sistantes Ă  l’art. Comme on dirait en mĂ©decine d’une bactĂ©rie qu’elle est rĂ©sistante Ă  un antibiotique. »[20]
  • Stephen Wright : « Ă€ la place de l’œuvre d’art, certains privilĂ©gient le processus artistique comme porteur de sens, rĂ©cusant la subordination du faire Ă  toute finalitĂ© extrinsèque. »[21]
  • Ricardo Mbarkho : « Chacun a de l'art ce que l’art a de lui-mĂŞme. »[22]

Pratiques

L’art invisuel peut prendre toute forme dans la pratique :

  • L’artiste Ricardo Mbarkho explore le langage et la communication dans un environnement gĂ©opolitique et socio-politique qu’il utilise comme mĂ©dium dĂ©sesthĂ©tisĂ©[23].
  • Gary Bigot utilise le thermohygrographe comme mĂ©taphore et adopte une pratique basĂ©e sur quatre principes : pas de production, pas de promotion, pas de profit, pas de propriĂ©tĂ©[24].
  • Sylvain Soussan propose des services et des produits courants en intĂ©grant l'Ă©cologie dans sa pratique-mĂŞme dans le musĂ©e des nuages[25].
  • François Deck considère que les dĂ©cisions qui concernent les citoyens relèvent d’une « esthĂ©tique de la dĂ©cision »[26].
  • Liliane Viala travaille avec des employĂ©s d’entreprises pour faire valoir leurs gestes mĂ©caniques et dĂ©pourvus de crĂ©ativitĂ©[27].
  • Jean-Baptiste Farkas utilise le principe du mode d’emploi, des sortes d’instructions Ă©crites Ă  mettre en pratique[28].
  • Bernard Brunon fait de la peinture en bâtiment et affirme qu’apposer de la peinture sur une surface constitue l’acte ultime de la peinture[29].
  • Alexandre Gurita pratique la captation institutionnelle qui consiste Ă  capter des institutions en toute lĂ©galitĂ© et Ă  les transformer en institutions critiques de changement[30].
  • Mariem Memni dĂ©veloppe le chata, un langage qui vise Ă  convertir l’énergie nĂ©gative en Ă©nergie positive au sein d’un groupe[31].
  • Gilbert Coqalane considère la perturbation comme un langage et crĂ©e le perturbationisme, premier mouvement d’art invisuel[12].
  • Elisa Bollazzi se promène dans les lieux d’art et fait des prĂ©lèvements d’œuvres d’art, des tout petits fragments d’œuvres d’art qu’ensuite les publics peuvent regarder au microscope dans des « Cabinets de regard »[32].

Références bibliographiques

Articles

  • Ardenne, P. (2021). Hors de notre vue mais pas de l’esprit du temps. Revue de Paris, N°34.
  • Monsinjon, E. (2021). L’art invisuel, qu’est-ce que c’est ? Revue de Paris, N°5.
  • Monsinjon, E. (2021). L’artiste multimodal. Revue de Paris, â„–20.
  • Gurita, A. (2021). Art visuel versus art invisuel. Revue de Paris, N°22.
  • Legras, B. (2020). Il existe des multitudes de pratiques artistiques de nature invisuelle. Artistik Rezo.
  • Mila Chutaux, C. (2018). Invisual Art. Medium.
  • Franco, F. (2018). Pour un art sans Ĺ“uvre. L’Art Ă  Genève.
  • Cimino, V. (2015). When art becomes « invisual ». World Policy.
  • Moscovici, C. (2012). Shaking Things Up in the Art World: The Biennale de Paris and the Salon des RefusĂ©s. Fineartebooks’s Blog
  • Lapalu, S. (2010). Entretien avec Alexandre Gurita. De l’action Ă  l’exposition.

Ouvrages

  • Mila Chutaux, C. (2021). EsthĂ©tique de l’art invisuel. Éditions du PanthĂ©on.
  • LĂ©tourneau, A. E., & Collet, M. (2019). Art performance, manĹ“uvre, coefficients de visibilitĂ©. Les Presses du RĂ©el.
  • Moineau, J.-C. (2023). Pour un art invisuel, inouĂŻ, inesthĂ©tique, inĹ“uvrĂ©, inidentitaire, pluriel… Biennale de Paris.

Voir aussi

Références

  1. Alexandre Gurita, « Art visuel versus art invisuel », sur Revue de Paris, (consulté le )
  2. « LDRE – ENDA – École nationale d'art de Paris », sur www.enda.fr (consulté le )
  3. Marie Julie, « Les ambitions et les limites des dimensions sociologiques de l’art invisuel et son dépassement », sur Revue de Paris, (consulté le )
  4. Sophie Lapalu, « Alexandre Gurita : stratège dans le secteur de l'art », sur sophielapalu.blogspot.com, (consulté le )
  5. Kévin Bideaux, « Chutaux Mila Corina (2021), Esthétique de l’art invisuel, Paris, Éditions du Panthéon. », sur revue-interrogations.org, (consulté le )
  6. Corina Chutaux Mila, Esthétique de l'art invisuel, Paris, Les Éditions du Panthéon, , 200 p. (ISBN 978-2-7547-5604-4), p. 37
  7. Corina Chutaux Mila, Esthétique de l'art invisuel, Paris, Les Éditions du Panthéon, , 200 p. (ISBN 978-2-7547-5604-4), p. 43-58
  8. Eric Monsinjon, « L’art invisuel, qu’est-ce que c’est ? », sur Revue de Paris, (consulté le )
  9. « Histoire de la Biennale de Paris », sur Biennale de Paris (consulté le )
  10. « Présentation – EEIMA », sur eeima.eu (consulté le )
  11. CDRAO, « Manifeste », sur cdrao.fr (consulté le )
  12. Lysiane Ganousse, « Avec un collectif de 25 personnes, Gilbert Coqalane lance un nouveau mouvement artistique : le perturbationisme. », sur estrepublicain.fr, (consulté le )
  13. « Quelle collection d'art pour le futur II ? », sur Musée d'Art moderne de Paris (consulté le )
  14. « Public Program : French Theory (In-)visuality Series », sur apexart.org (consulté le )
  15. Agenda Culturel, « La Biennale de Paris à Beyrouth pour secouer l’art et l’imagination », sur agendaculturel.com, (consulté le )
  16. « La Biennale de Paris au Guatemala », sur cnap.fr (consulté le )
  17. Fabien Franco, « Alexandre Gurita dans L'Art à Genève », sur artageneve.com, (consulté le )
  18. Ghislain Mollet-Viéville, « Œuvre d’art, œuvre artistique… L’art, est-ce mieux sans ? », sur Revue de Paris, (consulté le )
  19. « Il peut y avoir un art sans objets d’art, un art de l’usage | Revue de Paris », (consulté le )
  20. « Paul Robert, coureur de fond – Les Archives de la Biennale de Paris » (consulté le )
  21. Stephen Wright, « Vert un art sans œuvre, sans auteur et sans spectateur », sur Revue de Paris, (consulté le )
  22. Pierre-Nicolas Ledoux, GMV is there any Ghislain Mollet-Viéville ? information ou fiction ?, les Presses du réel, coll. « De mémoires », (ISBN 978-2-84066-427-7)
  23. « Ricardo Mbarkho – ENDA – École nationale d’art de Paris », sur enda.education (consulté le )
  24. Marie-Anne Lorgé, « Produire n'est pas créer », sur Revue de Paris, (consulté le )
  25. Sylvain Soussan, « Le musée des nuages – un musée de notre 'temps' » (consulté le )
  26. François Deck, « Esthétique de la décision », Espace Temps,‎ , p. 99-108 (lire en ligne)
  27. Liliane Viala, « Pratiques artistiques et sociales dans le monde du travail », sur courantsfaibles.org (consulté le )
  28. Jean-Baptiste Farkas, Des modes d'emploi et des passages à l'acte, Éd. Mix, (ISBN 978-2-914722-89-6)
  29. Bernard Brunon, THAT’S PAINTING Productions, Paris, Paris, , 60 p. (lire en ligne)
  30. Barbara Legras, « Alexandre Gurita : "Il existe des multitudes de pratiques artistiques de nature invisuelle" », sur Artistikrezo, (consulté le )
  31. « Des projets d’anciens praticiens – ENDA – École nationale d’art de Paris », sur enda.fr (consulté le )
  32. Tomasz F. de Rosset, « Décollection », sur Revue de Paris, (consulté le )
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