Analyse thermodifférentielle
L'analyse thermique diffĂ©rentielle (ATD), en anglais Differential Thermal Analysis (DTA), est une technique d'analyse thermique qui consiste Ă suivre lâĂ©volution de la diffĂ©rence de tempĂ©rature entre lâĂ©chantillon Ă©tudiĂ© et un corps tĂ©moin inerte, câest-Ă -dire dĂ©pourvu dâeffets thermiques dans le domaine de tempĂ©rature Ă©tudiĂ©.
Histoire
En 1887, Henry Le Chatelier dĂ©couvre la technique dâanalyse thermique diffĂ©rentielle. Douze ans plus tard, Roberts Austen dĂ©crit la mĂ©thode et les composantes de tous les appareils que lâon utilise de nos jours[1]. Depuis, de nombreux chercheurs ont fait des avancĂ©es dans ce domaine, comme Carpenter et Keeling, Burgess, Fenner, Saladin[2].
Principe de base
L'ATD est une technique qui utilise le chauffage (ou le refroidissement) dâune substance Ă analyser et dâune substance inerte (rĂ©fĂ©rence) afin dâenregistrer la diffĂ©rence de tempĂ©rature (âT) entre les deux. Le graphique obtenu est la « courbe thermique diffĂ©rentielle », qui provient du changement de composition chimique et de la structure cristalline de lâĂ©chantillon[3]. Quand la tempĂ©rature de l'Ă©chantillon augmente plus vite que celle de la rĂ©fĂ©rence, une rĂ©action exothermique a lieu. Au contraire, si la tempĂ©rature de l'Ă©chantillon prend plus de temps Ă augmenter en comparaison avec la rĂ©fĂ©rence, il y a absorption de tempĂ©rature et le pic est endothermique[1].
Quatre composantes importantes de l'appareil
Porte-Ă©chantillon
Le matĂ©riau de construction du porte-Ă©chantillon est choisi en fonction de lâintervalle de tempĂ©rature dĂ©sirĂ©. On utilise habituellement le nickel, l'inconel (mĂ©lange de plusieurs mĂ©taux) et lâacier inoxydable pour des tempĂ©ratures infĂ©rieures Ă 1 000 °C. Pour une tempĂ©rature maximum de 1 750 °C, on utilise le platine. Vers 2 800 °C, il faut utiliser des matĂ©riaux rĂ©fractaires[3].
Les portes-Ă©chantillons ont deux Ă trois cavitĂ©s pour dĂ©poser les Ă©chantillons et la rĂ©fĂ©rence. Ces compartiments ont une profondeur dâenviron 12 mm. Ils sont divisĂ©s dans lâespace de façon stratĂ©gique et calculĂ©s pour que la tempĂ©rature soit uniforme dans tout le compartiment[3]. Sous chacune des cavitĂ©s se trouve un thermocouple qui sert Ă analyser les variations de tempĂ©rature. La tempĂ©rature de la rĂ©fĂ©rence permet de calculer les variations de tempĂ©rature des Ă©chantillons. Les thermocouples sont gĂ©nĂ©ralement de type K, dont les fils faits en Chromel (alliage de 90 % de nickel et 10 % de chrome) et d'Alumel (alliage de 95 % de nickel, 2 % manganĂšse, 2 % aluminium et 1 % silicium) et sont utilisĂ©s pour dĂ©terminer des tempĂ©ratures infĂ©rieures Ă 1 000 °C. Pour des tempĂ©ratures supĂ©rieures, on utilise un fils composĂ© dâautres mĂ©taux plus rĂ©sistants comme le platine[4].
Enfin, les contenants Ă Ă©chantillon, aussi appelĂ©s lids, assurent lâuniformitĂ© de la tempĂ©rature. Les matĂ©riaux de construction de ces contenants sont inertes[3].
Source de chaleur
Deux méthodes sont considérées pour la source, la température au-dessus et en dessous de la température ambiante :
- pour la section au-dessus de la tempĂ©rature ambiante, on utilise un four Ă©lectronique de puissance satisfaisante ; premiĂšrement, pour augmenter la tempĂ©rature assez rapidement dans le porte-Ă©chantillon et ainsi atteindre la tempĂ©rature voulue, deuxiĂšmement, pour que dans le four la tempĂ©rature soit uniforme, afin que lâĂ©chantillon et la rĂ©fĂ©rence soient chauffĂ©s de la mĂȘme façon[3] ;
- pour atteindre la section en dessous de la tempĂ©rature ambiante, on utilise de lâazote liquide Ă â195 °C. Il se situe dans un rĂ©cipient proche et, quand on en a besoin, on rend le fluide gazeux pour refroidir le four. Le gaz se trouve dans un compartiment autour du porte-Ă©chantillon et est toujours en mouvement[3].
SystÚme de régularisation de la température
Le systÚme de régularisation de la température sert à ajuster la température désirée et à assurer une transmission convenable de la température dans le porte-échantillon. Pour cela, cinq parties sont nécessaires[1] :
- il doit possĂ©der un programme qui ajuste la vitesse de chauffage ou de refroidissement. Il doit ĂȘtre capable de diminuer ou dâaugmenter la tempĂ©rature de 1 Ă 20 °C/min. On utilise gĂ©nĂ©ralement 10 °C/min comme vitesse de chauffage ou refroidissement ;
- il doit pouvoir refroidir rapidement. Toutefois, dans le cas de four trĂšs grand, il peut ĂȘtre difficile de descendre rapidement la tempĂ©rature en dessous de 500 °C, car retourner Ă la tempĂ©rature ambiante prend beaucoup de temps ;
- il doit avoir un contrÎle isothermique pour avoir une température uniforme dans le porte-échantillon ;
- il est prĂ©fĂ©rable quâil y ait un systĂšme de contrĂŽle de la tempĂ©rature pour empĂȘcher de dĂ©passer la tempĂ©rature dĂ©sirĂ©e, ce qui est plus problĂ©matique dans les grands fours ;
- le four ne doit pas gĂ©nĂ©rer des interfĂ©rences Ă©lectriques pour ne pas fausser les rĂ©sultats de ÎT.
SystÚme de traitement de données
Le systĂšme de traitement de donnĂ©es comprend quatre parties : lâamplificateur, lâenregistreur potentiomĂ©trique, lâindicateur galvanomĂ©trique et le logiciel de traitement de donnĂ©es[1].
GĂ©nĂ©ralement, les forces Ă©lectromotrices (f.Ă©.m.) ne sont pas assez Ă©levĂ©es pour ĂȘtre dĂ©tectĂ©es ; il faut donc un amplificateur. Dans les Ă©quipements qui peuvent utiliser de grandes masses dâĂ©chantillon (environ 5 g) et munis de thermocouples en chromel-alumel, lâamplificateur nâest pas nĂ©cessaire. La diffĂ©rence de voltage qui est dĂ©tectable varie entre 25 et 500 ”V[1].
Les caractéristiques de l'enregistreur potentiométrique peuvent varier selon les modÚles, mais les quatre caractéristiques suivantes sont importantes[1] :
- double canal dâenregistrement (plume) : plutĂŽt qu'un relevĂ© sur un unique canal dâenregistrement (une plume), qui requiert de relever alternativement la tempĂ©rature et la diffĂ©rence de tempĂ©rature Ă des temps prĂ©dĂ©terminĂ©s, le double canal (deux plumes) permet d'Ă©valuer la diffĂ©rence de tempĂ©rature en mĂȘme temps que la tempĂ©rature dans le temps ;
- sensibilitĂ© adĂ©quate : la plupart des appareils qui enregistrent le courant le font Ă 1 ou 10 mV. Dans certains cas, il est avantageux dâavoir la possibilitĂ© dâĂ©tendre lâĂ©cart de sensibilitĂ© sans ajuster lâamplificateur ;
- vitesse multiple : pour un taux de chauffage de 10 °C/min, une vitesse dâenregistrement de donnĂ©es (Ă©criture du graphique) de 30 cm de graphe par heure est satisfaisante. Aussi, une variation dans le taux de chauffage peut apporter certaines informations complĂ©mentaires ;
- une rĂ©ponse rapide de la plume : la vitesse de rĂ©ponse de la plume doit ĂȘtre au moins une seconde pour une charte de 10 cm de large.
Utiliser lâindicateur galvanomĂ©trique est une mĂ©thode trĂšs facile pour trouver le signal de ÎT. Il faut un centre galvanomĂ©trique de zĂ©ro connectĂ© aux bornes des jonctions de ÎT et un opĂ©rateur enregistre la dĂ©viation galvanomĂ©trique en fonction de la tempĂ©rature. Le coĂ»t de lâĂ©quipement est faible mais le travail est long, donc cette mĂ©thode est rarement utilisĂ©e en industrie.
Un logiciel de traitement de donnĂ©es permet ensuite de calculer lâaire sous les pics, la puretĂ© de lâĂ©chantillon, etc.[1]
Application
L'ATD permet lâanalyse de produits organiques, inorganiques, etc. Pour chaque catĂ©gorie de composĂ©s, certaines parties de lâappareillage sont spĂ©cifiques. Par exemple, pour les mĂ©taux et les alliages, lâappareil doit possĂ©der des thermocouples en cĂ©ramique spĂ©ciale chimiquement inactive pour ne pas interfĂ©rer avec lâanalyse si les tempĂ©ratures sont trĂšs Ă©levĂ©es. Il faut aussi que le porte-Ă©chantillon soit fait dâun matĂ©riau spĂ©cial pour empĂȘcher que la tempĂ©rature et la pression Ă©levĂ©es faussent les rĂ©sultats[3].
Notes et références
- M. I. Pope et M. D. Judd, Differential Thermal Analysis: A guide to the technique and its applications, Heyden & Son, Spectrum House, Hillview Gardens, Londres, 1977.
- H. Laamari, Ătude thermodynamique des matĂ©riaux de rĂ©fĂ©rence et leurs applications dans les techniques d'analyse thermique et de calorimĂ©trie, UniversitĂ© de Batna, Batna, AlgĂ©rie, 2007.
- R.C. Mackenzie, Differential Thermal Analysis, Academic Press, New York, Ătats-Unis, 1970.
- W. J. Smothers, Y. Chiang, Handbook of Differential Thermal Analysis, New York, Ătats-Unis, Chemical publishing company, 1966.