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Alexander v. Yale

Aux États-Unis, Alexander v. Yale (631 F.2d 178, 2d Cir. 1980[1]) est, en 1980, la premiĂšre affaire judiciaire s'appuyant sur le Titre IX afin de poursuivre un Ă©tablissement universitaire pour harcĂšlement sexuel[2]. Le tribunal conclut que le harcĂšlement sexuel des Ă©tudiants constitue une discrimination et qu'il est donc illĂ©gal.

Plaignants

Les plaignantes sont Ronni Alexander, Margery Reifler, Pamela Price, Lisa E. Stone et Ann Olivarius (en). Toutes ont été inscrites au Yale College entre 1973 et 1980.

Alexander et Reifler dĂ©clarent avoir subi un harcĂšlement sexuel et/ou une agression sexuelle de la part d'un professeur de musique (Keith Brion (en)) et d'un entraĂźneur de hockey ; elles dĂ©clarent que Yale ne propose aucune procĂ©dure pour recueillir leurs plaintes. Pamela Price a annoncĂ© avoir subi ce qui, aujourd'hui, constitue un cas classique de harcĂšlement sexuel, Ă  savoir que son enseignant a proposĂ© de lui dĂ©cerner la note maximale si elle se pliait Ă  ses dĂ©sirs sexuels. Lisa Stone dit que son professeur d'anglais, Michael George Cooke (en), lui a fait des avances pendant ses heures de travail et lui a posĂ© la main sur le genou. Ann Olivarius soutient que l'absence de toute procĂ©dure pour signaler les problĂšmes de harcĂšlement sexuel l'ont obligĂ©e Ă  prendre sur son temps et ses deniers personnels pour aider ses amies Ă©tudiantes victimes de ce harcĂšlement sexuel ; en outre, dans le cadre de ses efforts pour les aider, elle a reçu des menaces de la part des hommes visĂ©s par l'enquĂȘte ; elle estime que Yale a manquĂ© Ă  son obligation de la protĂ©ger contre ces individus.

Au niveau de la cour du district, John Winkler, membre de l'équipe pédagogique et directeur de mémoire de Lisa Stone, annonce que l'ambiance toxique issue du harcÚlement sexuel lui interdit désormais d'avoir une relation saine avec ses étudiants[3]. Toutefois, il ne se joint pas aux plaignantes en appel.

Les plaignantes ne réclament pas de compensation financiÚre de la part de Yale. Elles demandent que le tribunal ordonne à l'établissement de prévoir une procédure permettant aux étudiants de signaler un problÚme de harcÚlement sexuel.

DĂ©cision judiciaire

Les plaignants sont conseillĂ©es par Catharine MacKinnon, fraĂźchement diplĂŽmĂ©e de la Yale Law School[4]. À cette Ă©poque, MacKinnon travaille sur son ouvrage, Sexual Harassment of Working Women, et en distribue des exemplaires en prĂ©-publication au Women’s Rights Litigation Clinic de la Rutgers Law School, qui reprĂ©sente Alexander et les autres plaignants[5]. Alexander v. Yale reprĂ©sente l'une des premiĂšres applications de la thĂšse de MacKinnon, selon laquelle le harcĂšlement sexuel constitue une discrimination fondĂ©e sur le genre[6].

Les plaignants soutiennent que le harcÚlement sexuel est une discrimination sexuelle ; ainsi, l'université Yale contrevient au Titre IX, qui interdit aux institutions d'enseignement financées par le gouvernement fédéral de commettre des discriminations fondées sur le genre. Cette stratégie de plaidoirie, appuyée sur le Titre IX, est développée par MacKinnon, Olivarius et Anne E. Simon[7]. La cour de district valide leur argumentation et, dans son jugement, elle précise : « Il est tout fait raisonnable de soutenir que, si la progression à l'université est conditionnée à l'acceptation de demandes sexuelles, alors il s'agit d'une discrimination fondée sur le genre dans l'enseignement ». La cour conclut néanmoins que Price n'a pas reçu d'avances sexuelles en échange de meilleures notes. Les autres plaignants sont déboutés car soit leurs déclarations sont contestées puisqu'elles ont obtenu leur diplÎmes, soit elles sont impossibles à étayer[8].

Les femmes interjettent appel. L'Equal Rights Advocates (en) et les Women Organized Against Sexual Harassment ont déposé un mémoire à titre bénévole lors de l'appel de Alexander v. Yale[9]. L'ACLU et d'autres déposent aussi un mémoire[10]. La Cour of Appeals reconnaßt le jugement en premiÚre instance et déclare en outre que les réclamations ne sont plus valables, car Yale a instauré une procédure pour traiter les plaintes[11].

Conséquences

MĂȘme si aucune des plaignantes n'a obtenu gain de cause, elles sont parvenues Ă  leur objectif : Yale a Ă©tabli une procĂ©dure pour accueillir les plaintes et le tribunal a statuĂ© que le harcĂšlement sexuel constitue une discrimination[11]. AprĂšs l'affaire, la plupart des universitĂ©s amĂ©ricaines crĂ©ent des procĂ©dures pour les faits de harcĂšlement sexuel[12].

L'affaire est suivie par plusieurs médias nationaux comme The New York Times[13], Time magazine[14] et The Nation[15], qui ont concouru à la notion, alors émergente, de harcÚlement sexuel[16].

En 1986, la Cour suprĂȘme des États-Unis, dans l'arrĂȘt Meritor Savings Bank v. Vinson (en), dĂ©clare qu'un environnement hostile au travail constitue une discrimination sexuelle, ce qui confĂšre une lĂ©gitimitĂ© accrue au jugement Alexander v. Yale.

Références

  1. « Alexander v. Yale », (consulté le )
  2. « Archived copy » [archive du ] (consulté le )
  3. Allen, Nicole. “To Break the Silence or Be Broken by It: A Genealogy of Women Who Have Refused to Shut Up About Harassment at Yale.” An unpublished Allen WC Senior Project, Yale University, April 27, 2009, excerpted at https://web.archive.org/web/20110714063453/http://www.mcolaw.com/docs/ao_tobreakthesilence_speech.pdf.
  4. « cddc.vt.edu/feminism/mackinnon
 »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?).
  5. Frances Olsen, Feminist Theory in Grand Style, 89 Colum. L. Rev. 1147, 1147 & n.4 (1989) (citing Conversation with Professor Nadine Taub (en), attorney with Rutgers Law School Women's Rights Litigation Clinic who litigated early sexual harassment cases (July 1985))
  6. Frances Hoffmann, « Sexual Harassment in Academia: Feminist Theory and Institutional Practice », Harvard Educational Review, vol. 56, no 2,‎ , p. 105–122 (ISSN 0017-8055, DOI 10.17763/haer.56.2.y11m78k58t4052x2, lire en ligne)
  7. For Simon's account of the case, see “Alexander v. Yale University: An Informal History,” Directions in Sexual Harassment Law, Catherine A. MacKinnon and Reva B. Siegel, eds, 2007, Yale University Press, pp. 51-59.
  8. « Alexander v. Yale | Civil Rights Litigation Clearinghouse », sur www.clearinghouse.net (consulté le )
  9. Carrie N. Baker (en), The women’s movement against sexual harassment, 92.
  10. « ALEXANDER v. YALE UNIVERS | 631 F.2d 178 (1980) | 1f2d1781757 | Leagle.com », sur Leagle (consulté le )
  11. Alexander v. Yale, 631 F.2d 178 (2nd Cir. 1980) II. 4
  12. Catharine MacKinnon and Reva Siegel, eds. Directions in Sexual Harassment Law.
  13. Diane Henry ‘Yale Faculty Members Charged With Sexual Harassment in Suit’ The New York Times, August 22, 1977.
  14. ‘The Law: Man and Bod at Yale’ Time, August 8, 1977. ‘Sexes: Fighting Lechery on Campus’ Time, February 4, 1980.
  15. Anne Nelson ‘Sexual Harassment at Yale’ The Nation, January 7, 1978.
  16. Carrie N. Baker The women’s movement against sexual harassment, 104.

Annexes

Articles connexes

  • HarcĂšlement sexuel dans l'enseignement (en)

Liens externes

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