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Affaire Dunand

L'affaire Dunand ou affaire du tortionnaire d'Appoigny[1] est une affaire criminelle française qui s'est déroulée à Appoigny dans l'Yonne. Dans les années 1980, Claude Dunand, avec son épouse Monique, organisent un réseau sadomasochiste où ils proposent à des clients de torturer des personnes contre rémunération[2] dans la cave de leur pavillon[1].

Contexte

Claude Dunand et son épouse Monique (née Michaud) se sont rencontrés à Paris. Ils vont vivre quatre ans au Sénégal où Claude Dunand officie comme cadre commercial. Le couple retourne à Paris où il fréquente des clubs échangistes, avant de tenir un bar à proximité de Seurre (Côte-d'Or) rapidement fréquenté par des prostituées rabattues par Monique Dunand selon son mari. Le couple s'installe en Normandie où Claude Dunand travaille chez un concessionnaire de camions[3].

C'est en 1979 que le couple s'installe dans l'Yonne, tout d'abord rue Joubert à Auxerre, puis à Migennes un an plus tard, pour ensuite acquérir en 1982 le pavillon à Appoigny, sis au 12 allée des Violettes. Le pavillon est situé au fond de l'allée, à moins d'une centaine de mètres de la départementale 606, ce qui permettait aux clients de venir facilement en étant déposé en voiture ou en taxi le long de la route avant de rejoindre le pavillon des Dunand à pied[4].

Monique Dunand se prostitue sous la protection du gérant - un ancien proxénète- du restaurant Le Saint-Fiacre, situé à deux pas de leur pavillon; et fréquenté par des médecins[5].

Claude, quant à lui, commence comme chauffeur de car, tout comme un certain Émile Louis, puis travaille pour une entreprise de surgelés (VRP ou chauffeur-livreur selon les sources).

Les faits

Le couple Dunand, « sans histoire »[6], organise au début des années 1980 des séances de « divertissements […] sadiques »[6] sur des jeunes femmes issues de la Direction départementale des Affaires sanitaires et sociales (DASS)[1] dont la disparition inquiète peu. La cave du pavillon est transformée en salle de torture[6].

Une première, Huguette, est piégée et séquestrée à partir du 12 octobre 1983, en répondant à une annonce publiée deux jours plus tôt dans l'Yonne Républicaine. Une deuxième victime, Mickaëlla, est piégée début janvier 1984. Les deux jeunes femmes subissent de la part des clients du couple diverses tortures et violences sexuelles extrêmes. Une troisième victime, Isabelle, une prostituée, est piégée avant Huguette et Mickaëlla, puis est libérée par les Dunand grâce à l'intervention d'un de leurs clients, Christian Grima, qui les menace d'alerter la police. Lors du procès, un autre client évoque une quatrième victime, dont Claude Dunand se serait débarrassé.

L'enquĂŞte

Une des victimes, Huguette, séquestrée depuis plusieurs mois[2], parvient à s'enfuir le 20 janvier 1984 du pavillon des Dunand et elle donne l'alerte[1]. Dans sa fuite, elle récupère des photographies et des carnets d'adresses des clients[1].

Étrangement, la police n'intervient que le 23 janvier 1984. C'est une équipe du SRPJ de Versailles, qui arrête les Dunand, et non pas la police locale ou encore la Gendarmerie.

Aux policiers, Huguette précise le type de tortures pratiquées : brûlures de cigarettes, brûlures au chalumeau, viols[1] ou encore éventrations[2].

Mickaëlla est sauvée du pavillon par les policiers lors de l'intervention qui suit[2]. Le nombre de victimes n'est pas connu mais il est supposé que plusieurs d'entre elles sont mortes dans l'anonymat[2].

Les carnets saisis révèlent une cinquantaine de clients, dont quatre sont identifiés.

L'un d'eux, Paul Lefort, décède quelques mois plus tard en juin 1984 d'une crise cardiaque. Un autre, Georges Ethievant, décède également d'une crise cardiaque en février 1990. Le troisième client, Christian Grima, qui avait permis la libération d'Isabelle, est arrêté.

Le dernier client identifié, pseudonyme "Monsieur Joseph", n'est pas inquiété, ses amis ayant donné des alibis aux enquêteurs.

Si la recherche d'un réseau n'est jamais étudiée, le profil de Claude Dunand et son épouse montre qu'ils déménageaient souvent à la recherche de pavillons isolés[2]. Les Dunand auraient ainsi déménagés quinze fois.

Claude Dunand explique également aux policiers qu'il pratiquait ses activités criminelles depuis quinze ans[7].

Après six ans de détention préventive, Claude Dunand recouvre la liberté grâce à un vice de procédure ainsi qu'à l'aide d'un certain Georges Fritsch, visiteur de prison et membre de la Fraternité Notre Dame, une association de réinsertion des détenus. En décembre 1989, ce dernier écrit directement au garde des Sceaux Pierre Arpaillange, et Dunand est libéré l'année suivante le 6 janvier 1990[3].

La condamnation

Claude et Monique Dunand sont condamnés le 31 octobre 1991 pour « commerce, proxénétisme, sadomasochisme et actes de barbaries »[1].

Le premier à la réclusion criminelle à perpétuité[2] mais sans période de sûreté ce qui permet sa remise en semi-liberté dix ans plus tard ; la seconde à cinq ans de prison[1].

L'un des clients identifiés, Christian Grima, est condamné à six mois de prison ferme[1]. Les autres clients du réseau ne seront pas inquiétés, les Dunand ne révélant jamais leurs noms et les carnets d'adresses ayant « étrangement » disparu[1] - [2] - [8].

Plusieurs décès vont frapper les accusés et les victimes.

Tout d'abord, Monique Dunand décède accidentellement en faisant une chute dans les escaliers en 1997.

Ensuite, la troisième victime, Isabelle, décède en octobre 1998, apparemment empoisonnée. Elle n'avait pu se rendre au procès d'octobre 1991 à la suite d'un étrange accident de voiture[4].

Christian Grima tue sa femme avant de se suicider en 2001[7].

Claude Dunand est finalement relâché en juin 2001.

Les différentes sources indiquent que Dunand aurait été l'homme de main d'un réseau criminel qu'il appelait l'Organisation dont certains membres et clients appartenaient à un milieu social aisé. Dans l'interview qu'il donne le 30 avril 2002[3] , Dunand évoque des chefs d'entreprise, et même un « homme politique nationalement connu » parmi ses clients.

Il meurt Ă  Mulhouse le Ă  l'âge de 87 ans[6].

Bibliographie

  • DELORME, GĂ©rard, Je n'ai rien Ă  voir avec Émile Louis, article paru dans l'Yonne RĂ©publicaine, Ă©dition du 30 avril 2002 (entretien avec Claude Dunand).
  • RAYNAUD, Éric, Les rĂ©seaux cachĂ©s des pervers sexuels, Monaco, Éditions du Rocher, 2004.
  • VIGOUREUX, Elsa, Le vrai roman noir des disparues de l'Yonne, article paru dans le Nouvel Observateur, n°1955 (Ă©dition du 25 avril au 1er mai 2002).

Filmographie

  • Auxerre et ses affaires: l'Ă©trange asphyxie de la justice, 50 minutes, documentaire rĂ©alisĂ© en 2004 par Thierry Fournet pour Lundi Investigations (Canal +).
  • La Conspiration du silence, sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e rĂ©alisĂ©e en 2022 par Thierry Fournet et Vincent HĂ©rissĂ© pour France 3 Bourgogne-Franche ComtĂ©.

Voir aussi

À la même période, le département de l'Yonne est marqué par d'autres disparitions inquiétantes de femmes issues de la Direction départementale des Affaires sanitaires et sociales (DASS)[2]. L'affaire se révèlera être les crimes du tueur en série Émile Louis. Le gendarme Christian Jambert travailla sur les deux affaires.

Notes et références

  1. https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/affaire-du-tortionnaire-d-appoigny-claude-dunand-emporte-avec-lui-ses-secrets-1633423282
  2. https://www.liberation.fr/evenement/2001/02/10/un-sinistre-pavillon-a-appoigny_354184/
  3. Gérard Delorme, « Je n'ai rien à voir avec Émile Louis », L'Yonne Républicaine,‎
  4. Auxerre et ses affaires : l'étrange asphyxie de la justice, 50 minutes, (2004), réalisé par Thierry Fournet et Patrick Schmitt pour Lundi Investigation (Canal +).
  5. Elsa Vigoureux, « Le vrai roman noir des disparues de l'Yonne », Le Nouvel Observateur,‎
  6. https://www.lyonne.fr/auxerre-89000/faits-divers/claude-dunand-le-tortionnaire-dappoigny-est-decede_14023448/
  7. Éric Raynaud, Les réseaux cachés des pervers sexuels, Monaco, Éditions du Rocher, (ISBN 9-782268-052199)
  8. Jean-Marc Ducos, « Cette affaire a été sabotée », sur Le Parisien,

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