Abissa
L'Abissa (ou Abyssa) est une fĂȘte traditionnelle du peuple Nzema pour cĂ©lĂ©brer la nouvelle annĂ©e se dĂ©roulant dans la ville de Grand-Bassam en CĂŽte d'Ivoire[1]. Elle se dĂ©roule en octobre et novembre.
Abissa | |
Nobles N'Zima Ă l'Abissa 2015. | |
Type | Festival culturel |
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Création | 1800 |
Pays | CĂŽte d'Ivoire |
Localisation | Grand-Bassam |
CoordonnĂ©es | 5° 12â?nbsp;nord, 3° 44â?nbsp;ouest |
Date | Octobre - Novembre |
Histoire
La fĂȘte traditionnelle Abissa existe depuis les annĂ©es 1800[2]. Ă l'origine l'Abissa Ă©tait le « Koudoum » qui consistait Ă faire des sacrifices mystiques. Elle a pris le nom de « l'AbissadjĂ« » devenu par diminutif Abissa qui signifie « prĂ©vu pour demander aux amis de venir en aide ».
L'Abissa Ă©tait orchestrĂ©e par la famille des N'Zima Kotoko composĂ©e des Ahantans de Takoradi et les Appolos de BĂ©gnry eux-mĂȘmes constituĂ©s des EvawlĂȘ, des DjĂŽmĂŽlĂŽ, des ElĂȘbrĂȘ et des AdjoufoulĂȘ. Elle se fait par rotation et par relais entre les diffĂ©rents sous-groupes Nzema en CĂŽte d'Ivoire et au Ghana.
Les Nzema EvawlĂȘ du Ghana commencent en premier. Lorsqu'ils finissent, ils lancent le flambeau en CĂŽte d'Ivoire et c'est les DjĂŽmĂŽlĂŽ, les ElĂȘbrĂȘ et les Ahantan de Tiapoum qui le reçoivent, puis, le relais est passĂ© aux N'zima AdjoufoulĂȘ de Grand-Bassam. Cette alliance existe entre ces peuples depuis plus de deux siĂšcles[3].
FĂȘte traditionnelle culturelle
Chaque annĂ©e, entre fin aoĂ»t et dĂ©but dĂ©cembre, durant une semaine, les Nzema se retrouvent. Les familles profitent de ces rencontres autour du roi et du tambour « Edo NâgbolĂ© » pour formuler des vĆux afin dâinciter les notables Ă mieux gĂ©rer l'Ă©conomie.
LâAbissa attire chaque annĂ©e des milliers de visiteurs[2] - [4].
DĂ©roulement
La fĂȘte dure actuellement sept jours, du dimanche au dimanche. Les principales Ă©tapes sont les suivantes :
- Jour -7 : Le Siédou ou la retraite de l'Edo N'gbolé (période de recueillement et de préparation)
- Jour 1 (dimanche) : Le Gouazo ou cĂ©rĂ©monie de remise de l'Edo N'gbolĂ© (tambour central) au peuple Nzema par le roi qui se dĂ©roule au palais royal, suivie de l'installation de l'Edo N'gbolĂ© sur la place de l'abissa et une prestation de danse sous le signe de l'instrument GbabakĂȘ
- Jour 2 (lundi) : Journée des jeunes et prestation de danse sous le signe de l'instrument AbÎma, premier tambour femelle de l'Abissa
- Jour 3 (mardi) : Purification de l'Edo N'gbolé et premiÚre sortie du roi, suivie d'une danse de la cohésion entre les familles N'vavilé et Mafolé
- Jour 4 (mercredi) : Journée des femmes suivie de la danse de la cohésion entre les familles Ndjua et Ehozilé sous le signe de l'instrument Tamalé ou Tondoba, deuxiÚme tambour femelle de l'Abissa
- Jour 5 (jeudi) : JournĂ©e des forces vives avec une danse de la paix de la famille AnzawoulĂ© sous le signe de l'instrument EpkassoĂȘ, troisiĂšme tambour femelle de l'Abissa
- Jour 6 (vendredi) : Journée des chefs traditionnels et entrée dans l'Abissa des familles Adawonlin et Alonwomba, sous le signe de l'instrument Elawoulé (grelot mambo)
- Jour 7 (samedi) : Apothéose : entrée du roi et de la reine dans l'Abissa, présentation des sept familles de Grand-Bassam, danse de cohésion entre les familles, cérémonie de procession de clÎture de l'Abissa
- Jour 8 (dimanche) : L'EwoudolĂš (cĂ©rĂ©monie d'au-revoir de l'AfantchĂš, la divinitĂ© du pardon de l'Abissa), et le BouakĂšzo (bain de purification du roi) ; prĂ©sentation des vĆux au roi et message de nouvel an du roi
Cérémonie cultuelle
L'Abissa appelĂ© Koudoum dans son volet cultuel, est une danse sacrĂ©e de purification, qui dure une semaine. Elle est destinĂ©e Ă consolider les liens entre les vivants et les morts, mais Ă©galement Ă renouveler lâalliance du peuple Nzema avec AfantchĂš, gĂ©nie ayant transmis cette danse au peuple[5].
Ătapes
Le Koudoum se déroule en trois étapes: le Siédou, le Gouazo et le Ewudolé.
Siédou
Le SiĂ©dou ou la retraite du tambour « Edo-NâgbolĂ© » reprĂ©sente la premiĂšre Ă©tape de cette manifestation. L'« Edo-NâgbolĂ© », est un tambour sacrĂ©. Cette premiĂšre Ă©tape dĂ©bute avec le respect de tous les interdits. Aucun autre tambour ne doit rĂ©sonner. Tous les fĂ©ticheurs sâabstiennent de toutes pratiques. En cas de dĂ©cĂšs, la famille Ă©plorĂ©e doit sâefforcer de contenir ses larmes. Les funĂ©railles nâauront lieu quâaprĂšs la fĂȘte, aucun enterrement nâĂ©tant autorisĂ© pendant la pĂ©riode. Le non-respect de ces interdits expose les rĂ©calcitrants au chĂątiment du gĂ©nie AfantchĂš[5]. Le SiĂ©dou a lieu une semaine avant la cĂ©rĂ©monie officielle de lancement de lâAbissa.
Gouazo
Le Gouazo a lieu 8 jours aprĂšs le SiĂ©dou. Cette Ă©tape tĂ©moigne de la reconnaissance du droit de propriĂ©tĂ© de lâAbissa Ă la famille NâVavilĂ©, dĂ©positaire de la danse. La famille Nvavile (signifiant « esprit de justesse»[6]), l'une des sept familles composant le peuple Nzema, a la particularitĂ© d'avoir dĂ©couvert la danse Abissa. Les anciens offrent une boisson Ă cette famille afin Nzema sa permission et ses bĂ©nĂ©dictions pour un bon dĂ©roulement de la fĂȘte[5].
Ewoudolé
L'EwoudolĂ© marque lâapothĂ©ose de lâAbissa. Câest lâĂ©tape de la grande rĂ©jouissance carnavalesque oĂč lâon dĂ©couvre des dĂ©guisements de tous genres, notamment des hommes travestis et des personnes masquĂ©es qui dansent tous au rythme de la fanfare. Ces festivitĂ©s annoncent la fin dâune annĂ©e et le dĂ©but dâune autre. Pour le N'Zima, elle doit se faire sans la moindre rancĆur[6]. Quel que soit lâendroit oĂč il se trouve, le Nzema fait mouvement vers Grand-Bassam pour commĂ©morer le nouvel an. Il vient sâabreuver Ă la source et se rĂ©concilier avec les siens[6].
Tradition de pardon
Durant cette pĂ©riode, tout individu issu dâune des sept familles, notamment les NâVavilĂ©, les Mafole, les AllĂŽwoba ou les NâDjaoufo, doit se dĂ©barrasser de toute haine et rancĆur pour se laisser emporter par la gaietĂ©. LâAbissa est une pĂ©riode offerte Ă tous ceux qui ont commis des fautes graves afin de se repentir publiquement et dâobtenir le pardon du peuple. Les bonnes Ćuvres Ă©tant aussi mises Ă nue publiquement, les fils et filles Nzema exemplaires sont honorĂ©s solennellement.
Câest un grand moment de libĂ©ration de la parole sans risque de chĂątiments de la communautĂ©[5]. Des affaires mal tranchĂ©es au problĂšme de leadership politique entre des fils et filles de la rĂ©gion en passant par des difficultĂ©s internes au bon fonctionnement de la communautĂ©, tous les sujets sont abordĂ©s et les fautes sont dĂ©noncĂ©es. Les mis en cause sont nommĂ©ment citĂ©s[6]. Celui qui fait lâobjet de critiques pour des actions blĂąmables et regrettables doit les accepter, se repentir et prĂ©senter ses excuses afin quâil soit pardonnĂ©. Pendant cet exercice, le roi devient un citoyen ordinaire[6], lâAbissa autorise les sujets Ă le critiquer publiquement en chanson[4].
Editions
En 2018, lâAbissa, qui devait ĂȘtre cĂ©lĂ©brĂ©e du dimanche 28 octobre au dimanche 11 novembre, nâavait pu se tenir Ă cause de violences Ă©lectorales dans la ville Ă l'occasion des Ă©lections municipales[4].
En 2021 avait pour thÚme: "L'Abissa, un creuset de valeurs et d'espoir" et s'est déroulée du 24 octobre au 7 novembre.
En 2022 de l'Abissa s'est dĂ©roulĂ©e du dimanche 23 octobre au dimanche 6 novembre. Elle Ă©tait placĂ©e sous le thĂšme : ââLâAbissa au service de la paix et de la cohĂ©sion socialeââ?
Références
- Howard W. French, « Grand-Bassam Journal; In One Unbridled Week, a Town's Moment of Truth », New York Times,â?/span> (lire en ligne, consultĂ© le )
- « Rezo-Ivoire .net | abissa des origines a aujourdhui », sur rezoivoire.net (consulté le )
- Rezoivoire, « bissa : De l'origine à aujourd'hui », sur rezoivoire.net (consulté le )
- « CĂŽte dâIvoire: le peuple NâZima retrouve les cĂ©lĂ©brations de lâAbissa », sur RFI, (consultĂ© le )
- ArsÚne Kanga, « Grand Bassam: L'Abissa ou le Nouvel an pour le peuple N'zima Kotoko » , sur Fratmat.info, (consulté le )
- « LâAbissa, une tradition de pardon dans une CĂŽte dâIvoire en quĂȘte de rĂ©conciliation », Le Monde.fr,â?/span> (lire en ligne, consultĂ© le )