Énergie en Tchéquie
Le secteur de l'énergie en Tchéquie, comme celui de presque tous les pays européens, est dominé par l'utilisation de combustibles fossiles importés, à l'exception du charbon, dont la production locale est constituée à 86 % de lignite.
La part de l'électricité dans la consommation finale d'énergie s'élevait à 18,6 % en 2019. Elle était produite en 2020 surtout par des centrales brûlant du lignite (40 %) et du gaz naturel (8,4 %), mais la part des centrales nucléaires atteint 37 % et celle des énergies renouvelables 14 %.
Les émissions de CO2 liées à l'énergie s'élevaient en 2019 à 8,84 tonnes par habitant, supérieures de 101 % à la moyenne mondiale, de 103 % à celle de la France et de 14 % à celle de l'Allemagne.
Production de combustibles fossiles
Malgré une baisse constante de la production, le pays reste un producteur non négligeable de charbon sur la scène européenne, avec une production de 0,57 EJ (exajoules) en 2019, au 4e rang européen, en baisse de 8,2 % en 2019 et de 34 % depuis 2009. Les réserves sont estimées à 2 927 Mt fin 2019, soit 71 années de production au rythme de 2019[1].
La production de charbon est en grande majorité constituée de lignite : 366,4 PJ en 2020, soit 86 % du total[2].
Les mines sont essentiellement souterraines[3]. Le pays était un petit exportateur net de charbon, fournissant ses voisins ; mais en 2019, sa consommation de charbon de 0,60 EJ dépasse sa production[1].
La société tchèque EPH a une présence internationale dans le secteur, ayant racheté des actifs charbonniers à des groupes se désengageant du charbon, pour cette raison des ONG écologistes ont appelé à boycotter le capital d'EPH[4]
La production de pétrole est limitée à quelques milliers de barils/jours, avec quelques puits dans le sud-est du pays[5]. Il en va de même pour le gaz naturel : le pays subvient à environ 2-3 % de ses besoins pour ces deux combustibles.
Importations et transformations de combustibles fossiles
La Tchéquie importe du charbon : 119 PJ et en exporte : 48,6 PJ en 2020 ; le solde importateur net de 70,4 GJ représente 13,8 % de la consommation intérieure de charbon, qui en 2019 était surtout consacrée aux centrales de cogénération (24 %) et aux centrales électriques (48 %). La consommation finale (15 %) se répartit pour l'essentiel entre l'industrie et le secteur résidentiel[6].
Unipetrol est la principale entreprise pétrolière du pays[5]. Le pays importe principalement du pétrole russe, azéri et kazakh par le biais de la branche sud de l'oléoduc Droujba, mais il dispose d'une autre voie d'importations possible avec l'oléoduc Ingolstadt-Kralupy-Litvínov qui permet d'importer du pétrole via le port de Trieste (il se rattache à l'oléoduc Transalpin)[7].
Le pays consomme un peu moins de 200 000 barils/jours de produits pétroliers. Deux tiers environ sont destinés au secteur des transports, et le diesel est très employé[7]. La République tchèque dispose d'une petite réserve stratégique de pétrole à Nelahozeves au nord-ouest de Prague.
Secteur électrique
La part de l'électricité dans la consommation finale d'énergie s'élevait à 18,6 % en 2019[6].
Les centrales électriques tchèques ont produit 81,4 TWh en 2020, dont 48,5 % à partir de combustibles fossiles (lignite : 40,1 %, gaz naturel : 8,4 %), 36,9 % de l'énergie nucléaire et 14,2 % des énergies renouvelables (biomasse : 6,3 %, hydroélectricité : 4,2 %, solaire : 2,7 %, éolien : 0,9 %)[8].
Le réseau électrique est très fortement interconnecté avec les voisins, et le pays est le 3e exportateur net d'électricité de l'Union Européenne, après la France et l'Allemagne[5]. Comme partout en Europe, le réseau fonctionne à une fréquence de 50 Hz et la tension domestique est 220 V.
Centrales thermiques
- Centrale thermique de Prunéřov (1 490 MW, lignite), 2007
- Centrale au lignite de Mělník (1 072 MW) à Horní Počaply, 2014.
- Centrale thermique de Tušimice (800 MW, lignite), 2019.
- Centrale au lignite de Chvaletice (800 MW), 2011.
Les centrales à charbon (plus précisément : lignite) sont l'épine dorsale du système électrique tchèque, produisant 60 % de l'électricité du pays[5]. Elles sont pour la plupart situées à proximité des gisements. La plus puissante, avec environ 1 500 MW, est la centrale thermique de Prunéřov tout près de la frontière allemande. Les centrales au gaz naturel jouent un rôle secondaire, mais appelé à s'étendre selon l'AIE[5].
Centrales existantes
Deux centrales nucléaires existent :
- à Dukovany, quatre réacteurs VVER de 440 MW chacun.
- à Temelín, deux réacteurs de la même filière, mais de 900 MW chacun.
Ces six réacteurs ont produit 30,2 TWh en 2019, soit 34,7 % de l'électricité du pays[9].
Les besoins en uranium des centrales nucléaires tchèques ont été de 582 tU en 2015 et 566 tU en 2016. La production d'uranium du pays s'est élevée à 152 tU en 2015 et 138 tU en 2016[10].
En avril 2022, ČEZ signe avec Westinghouse et Framatome des contrats d'approvisionnement en combustible nucléaire pour sa centrale de Temelin, sur 15 ans à partir de 2024. Temelin s'approvisionnait jusqu-là auprès du russe TVEL, mais avait déjà testé six assemblages de Westinghouse depuis 2018[11].
Nouveaux réacteurs en projet
La politique énergétique de la République tchèque approuvée par le gouvernement en prévoit la création d'une nouvelle unité à Dukovany et éventuellement de trois autres sur les sites de Dukovany et de Temelín. Le gouvernement a autorisé le la société Elektrárna Dukovany II, filiale de l'entreprise de services publics ČEZ, détenue à 70 % par l'État, à lancer la construction d'un réacteur supplémentaire sur le site de Dukovany, avec garanties pour l'aider à réduire les coûts du financement de la construction ; les fournisseurs seront choisis d’ici à 2024. Ce nouveau réacteur d’au moins 1 200 MW sera connecté au réseau électrique à l'horizon 2035 afin de remplacer les quatre unités en exploitation dont l’arrêt est prévu entre 2035 et 2037. La politique énergétique de l'État prévoit de porter la part de l'énergie nucléaire dans la production d'électricité d'environ 30 % aujourd'hui, à 46 %, puis à 58 %[12].
Le , les représentants de l'État tchèque et les acteurs du secteur nucléaire, dont CEZ, conviennent d'un schéma financier articulé autour d’un prêt garanti par l’État pour le renouvellement de la centrale nucléaire de Dukovany, dont le coût estimé du prochain réacteur est de l’ordre de 6,50 milliards de dollars, soit 5,80 milliards d’euros. L'accord prévoit un prix plancher de rachat de l’électricité de 50 à 60 €/MWh. Un appel d'offres doit avoir lieu fin 2020, l’examen des offres devrait intervenir en 2021 et aboutir à la sélection du prochain fournisseur de technologie en 2022 pour permettre le début de la phase préparatoire des travaux en 2023[13].
En novembre 2020, EDF propose à ČEZ un EPR de 1 200 MWe adapté aux besoins tchèques. Selon le Premier ministre Andrej Babiš, le constructeur de Dukovany-5 devra être sélectionné d’ici fin 2022, pour un début de construction en 2029 et une connexion au réseau en 2036[14].
Le 24 novembre 2020, le premier ministre tchèque, Andrej Babiš annonce le report de l'appel d'offres à 2022, après les élections législatives et les consultations avec la Commission européenne. Le ministre des Affaires Étrangères tchèque, Tomáš Petříček, recommande d'exclure de cet appel d’offres l’entreprise d’État russe Rosatom et le chinois China General Nuclear Power, pour des raisons de souveraineté. Les autres principaux favoris pour l’obtention de ce contrat sont le coréen KHNP, l’américain Westinghouse et une seule société de l’Union Européenne, le français EDF.
Le 17 mars 2022, le gouvernement tchèque annonce le lancement d'un appel d'offres pour la construction d'une nouvelle unité à la centrale nucléaire de Dukovany. Le français EDF, le sud-coréen KHNP et l'américain Westinghouse ont manifesté leur intérêt pour cet appel d'offres. En 2021, Prague avait fermé la course aux groupes chinois et russes intéressés, invoquant des problèmes de sécurité. Selon le Premier ministre Petr Fiala, la construction débutera en 2029 et la production en 2036[15].
ČEZ annonce en décembre 2022 que les trois candidats EDF, KHNP et Westinghouse Electric ont remis leurs premières offres techniques et commerciales. Les offres définitives seront remises fin septembre 2023. La technologie de réacteur proposée par EDF est l’EPR, celle proposée par KHNP est l’APR-1400 et celle proposée par Westinghouse est l’AP1000[16]. EDF propose une adaptation de puissance du modèle EPR : l’EPR 1200. Au-delà de l’unité 5 de Dukovany, c’est le renouvellement du parc nucléaire tchèque qui est en jeu[17].
Énergies renouvelables
- Centrale hydroélectrique (5,7 MW) de style art nouveau construite en 1913-14 sur la Vltava à Holešovice en amont de Prague, 2016.
- Petite centrale hydroélectrique de Hučák, de style art nouveau, construite en 1909-12 sur l'Elbe à Hradec Králové.
- Centrale solaire de Bušanovice, 2007.
La part des énergies renouvelables dans la production d'électricité atteint 11,4 % en 2019, dont 2,3 % d'hydroélectricité[9] et 9,1 % d'autres EnR : solaire 2,6 %, éolien 0,8 %, autres 5,6 % (biomasse, déchets renouvelables)[1].
La Tchéquie se classe au 21e rang européen par sa puissance installée hydroélectrique : 2 268 MW, dont 1 171 MW de pompage-turbinage ; sa production hydroélectrique s'est élevée à 3,15 TWh en 2019[18].
L'énergie éolienne est peu développée dans le pays, avec seulement 280 MW installés fin 2015[19]. En revanche, l'énergie photovoltaïque a connu un développement très rapide : inexistant en 2005, le parc atteint 2 078 MW fin 2018, mais ce développement s'est arrêté depuis 2014.
La production photovoltaïque de la Tchéquie atteignait 2 153 GWh en 2021, soit 2,5 % de la production d'électricité du pays, contre 2 287 GWh en 2020, en recul de 6 %[20].
Selon EurObserv'ER, la Tchéquie a produit 2 614 GWh en 2022, en progression de 13 %, se classant au 12e rang des producteurs photovoltaïques de l'Union européenne (UE) avec 1,3 % de la production de l'UE, loin derrière l'Allemagne (29,6 %), l'Espagne (14,4 %), l'Italie (13,7 %), la France (10,0 %), les Pays-Bas (8,6 %) et la Pologne (3,9 %)[21].
L'Agence internationale de l'énergie estime la pénétration théorique du solaire photovoltaïque tchèque à 3,5 % de la production totale d'électricité du pays fin 2022 (moyenne mondiale : 6,2 % ; moyenne de l'UE : 8,7 %) ; cette estimation est basée sur la puissance installée au 31/12/2022, donc supérieure à la production réelle de l'année. La Tchéquie est au 28e rang mondial, loin derrière l'Espagne, au 1er rang avec 19,1 %, la Grèce (17,5 %) et les Pays-Bas (15,9 %) ; l'Allemagne (12,4 %) est au 7e rang et la France (4,6 %) au 24e rang[22].
En 2022, la Tchéquie a installé 289 MWc, loin derrière l'Allemagne (7 304 MWc), la Pologne (4 774 MWc), les Pays-Bas (3 938 MWc), l'Espagne (3 480 MWc), l'Italie (2 490 MWc) et la France (2 385 MWc). La puissance installée du parc photovoltaïque tchèque atteint 2 535 MWc, en progression de 13 % en un an, au 13e rang européen, loin derrière l'Allemagne (67 399 MWc), l'Italie (25 060 MWc), les Pays-Bas (18 849 MWc), l'Espagne (17 195 MWc) et la France (17 169 MWc). La puissance installée par habitant en Tchéquie atteignait 241 Wc fin 2022, inférieure de 45 % à la moyenne de l'Union européenne (437,4 Wc) et au 4e rang européen, derrière les Pays-Bas (1 071,5 Wc), l'Allemagne (809,7 Wc), la Belgique (558,6 Wc), etc[21].
Émissions de CO2
En 2019, les émissions de CO2 liées à l'énergie par habitant atteignaient 8,84 tonnes, supérieures de 101 % à la moyenne mondiale : 4,39 tonnes, de 103 % à celles de la France : 4,36 tonnes et de 14 % à celles de l'Allemagne : 7,75 tonnes[23].
Notes et références
- (en) BP Statistical Review of World Energy 2020 - 69th edition, BP, [PDF].
- (en) Data and statistics - Czech Republic : Coal 2020, Agence internationale de l’énergie, octobre 2021.
- (en) International Business Publications USA, Czech Republic Mining Laws and Regulations Handbook : Strategic Information and Basic Laws, , 300 p. (ISBN 978-1-4330-7727-2 et 1-4330-7727-2, lire en ligne)
- « Charbon: des ONG appellent à cesser de financer la société tchèque EPH », sur Connaissance des Énergies (consulté le )
- (en) collégial, Energy Policies of IEA Countries : Czech Republic, Paris, international energy agency, , 152 p. (ISBN 978-92-64-09470-3, lire en ligne)
- (en) Data and statistics - Czech Republic : Balances 2020, Agence internationale de l'énergie, octobre 2021.
- « ENERGY SUPPLY SECURITY 2014 » [PDF] (consulté le )
- (en) Data and statistics : Czech Republic Electricity 2020, Agence internationale de l'énergie, octobre 2021.
- (en) Statistical Review of world energy - all data, BP, [xls].
- Données sur l’énergie nucléaire 2017 (pages 27 et 28), OCDE-NEA (Agence pour l'énergie nucléaire), 2017.
- (en) Framatome and Westinghouse to supply fuel to Temelín, World nuclear news, 13 avril 2022.
- L'État tchèque soutient de nouvelles unités nucléaires, SFEN, Revue générale nucléaire, 11 juillet 2019.
- République tchèque, le financement assuré pour l’extension de la centrale nucléaire de Dukovany, SFEN, 2 juin 2020.
- Un EPR-1200 en République tchèque ?, SFEN, 1er décembre 2020.
- République tchèque : un appel d'offres pour une nouvelle unité nucléaire, Le Figaro, 17 mars 2022.
- République tchèque: trois offres pour Dukovany II, nuklearforum.ch, 6 décembre 2022.
- République tchèque : début du processus concurrentiel pour Dukovany 5, SFEN, 2 décembre 2022.
- (en) 2020 Hydropower Status Report (pages 29 et 45), International Hydropower Association (IHA), 2020.
- Selon les statistiques de l'AWEA
- (en) « Energy Statistics Data Browser : Czech Republic - Electricity 2021 », sur AIE,
- [PDF] Baromètre Photovoltaïque 2023, EurObserv'ER, 4 mai 2023.
- (en) Snapshot of Global PV Markets 2023 [PDF], Agence internationale de l'énergie-Photovoltaic Power Systems Programme (PVPS), avril 2023.
- (en) Agence internationale de l'énergie (AIE - en anglais : International Energy Agency - IEA), Key World Energy Statistics 2021, septembre 2021, [PDF].