Quelques critères d'élimination des quantificateurs
Critère 1
Soit
une L-theorie.
Supposons que pour toute L-formule
sans quantificateur il existe une L-formule sans quantificateur
telle que
.
Alors, T admet l'élimination des quantificateurs.
Preuve
Soit
une L-formule. On montre par l'induction sur la complexité de
qu'il existe une L-formule
sans quantificateur telle que
.
Si
alors posons
. Supposons que la propriété est vraie pour toutes les formules de complexité strictement plus petite que
. Si
, il y a trois cas : soit
, alors par hypothèse d'induction il existe
sans quantificateur telle que
est équivalente à
, il suffit de poser
; soit
, alors par hypothèse d'induction il existe
et
sans quantificateur telles que
et
, et on pose
; soit
, par hypothèse de l'induction il existe
sans quantificateur telle que
, et par hypothèse, il existe
sans quantificateur telle que
, on pose
.
Exemple: DLO
On montre que
(Dense Linear Ordering) admet l’élimination des quantificateurs en vérifiant la condition du critère 1. Autrement dit, soit
une formule sans quantificateur, cherchons une formule
sans quantificateur telle que
.
est sans quantificateur, donc
est équivalente à une formule sous forme disjonctive
où les
sont des formules atomiques (ou leur négation) du langage de
. Comme
si et seulement si
pour un certain
,
est équivalente à une formule de la forme
où les
sont des formules atomiques (ou leur négation) du langage de
.
Comme
,
,
,
et
, on peut supposer que les
sont de la forme :
, ou 
S'il existe
tel que
alors
, donc
convient. Supposons que
pour tout
.
S'il existe
tel que
alors
convient. Donc on peut supposer que
n'est pas de la forme
pour tout
.
Donc les
sont de la forme :
, ou
.
Ainsi
où les
sont de la forme
ou
, et les
sont de la forme
ou
.
On a que
. Donc on a deux cas :
- Si
, alors
convient.
- Sinon si
ou
, alors
convient car l'ordre est sans extrémités.
- Sinon
car l'ordre est dense, donc
convient.
Critère 2
Soit
une L−théorie.
Supposons que pour toute L-formule sans quantificateur
, si
et
sont deux modèles de
,
est une sous-structure commune de
et
,
des éléments de l’ensemble de base de
, et il existe
tel que
, alors il existe
dans le domaine de
tel que
.
Alors,
admet l’élimination des quantificateurs.
Preuve
Montrons la réciproque (la preuve directe est plus délicate). Soit
une L-formule sans quantificateur. Soient
,
deux modèles de
,
une sous-structure commune de
et
, et
des éléments de
. Supposons que
. Alors par élimination des quantificateurs, il existe une L-formule sans quantificateur
telle que
, et
. Or, comme
est une sous-structure de
et
est sans quantificateur,
équivaut à
, équivalant, de même, à
, d'où enfin
.
Exemple: DAG
On montre que la théorie de groupe abélien divisible sans torsion (
) admet l’élimination des quantificateurs en montrant qu'elle vérifie la condition du critère 2.
Soit
une formule sans quantificateur. Soient
,
deux groupes abélians divisibles sans torsion,
un sous-groupe commun de
et
,
tels que
. On montre d'abord qu'il existe un sous-groupe commun
de
et
tel que
est un sous-groupe de
, et puis on montre que
avant de conclure.
Montrons qu'il existe un sous-groupe commun
de
et
tel que
est une sous-groupe de
:
Posons
. On définit une relation d'équivalence
sur
par
si et seulement si
. Posons
. Notons
la
-classe de
. On définit
en posant
.
est bien définie: Soient
On a que
Comme 
est un groupe: Soient
On a
;
;

est sans torsion: Soit
On a donc
Donc
Ainsi
car
est sans torsion.
est divisible: Soit 
est abélian: Soient 
Monstrons que
définie par
est une homomorphisme injectif:
;
soient
alors
;
soient
si et seulement si 
Montrons que
définie par
bien défini et est un homomorphisme injectif:
est bien défini: Soient
alors
. Donc 
est un homomorphisme injectif:
;
soient
, 
soient
, si
, alors
, donc
, donc
; si
, alors 
De même, il existe aussi un homomorphisme injective de
dans
. Ainsi on peut identifier
avec un sous-groupe commun conenant
de
et
.
Montrons que
:
est une formule sans quantificateur, donc elle est équivalente à une formule sous forme disjonctive:
où les
sont des formules atomiques ou des négations de formules atomique du langage.
Quand
est satisfait, il existe
tel que
est satisfait.
Comme dans le langage, le seul symbole de prédicat est le symbole
et le seul symbole de fonction est
, une formule atomique dans ce langage est de la forme
où les
. Ainsi 
S'il existe
tel que
, alors comme
,
car G est un groupe disivisble. Donc
.
Sinon,
Comme H est sans torsion, donc
est infini, car sinon pour tout
. Comme pour tout
est fini, il existe un élément dans
qui satisfait 
Comment
est une sous groupe de
, il existe un élément de
satisfait
, par conséquent, 
Critère 3
Soit
une L−théorie telle que
1. Pour toute
, il existe une
et un monomorphisme
tels que pour tout
et monomorphisme
, il existe
tel que
.
2. Si
sont deux modèles de
et
est sous-structure de
alors pour toute L-formule
et tout
dans la domaine de
, s'il existe
dans la domaine de
tel que
est satisfaite dans
, alors elle l'est aussi dans
.
Alors,
admet l'élimination des quantificateurs.
Preuve
Soit
une L-formule sans quantificateur. Supposons que
soient deux modèles de
,
une sous-structure commune de
et
,
des éléments dans
et
un élément de
tels que
. Montrons qu'il existe
dans
tel que
et puis conclure par le critère 1:
Comme
et que
est une sous-structure de
, on a que
. Par hypothèse 1) il existe
telle que pour toute
qui est extension de
,
est une sous-structure de
. Par conséquent,
est sous-structure de
et de
.
Comme
est une formule sans quantificateur,
est une sous-structure de
et que les formules sans quantificateurs sont préservées par la sous-structure, on a que
. De même
.
Ainsi on conclut par le critère 2 que
admet l'élimination des quantificateurs.
Exemple: Corps algébriquement clos
On note
pour la théorie des corps algébriquement clos. Pour démontrer que
admet l'élimination des quantificateurs, on montre d'abord l'ensemble
des conséquences universelles de la théorie des corps algébriquement clos est la théorie des anneaux intègres. Et puis, on montre que
vérifie les conditions du critère 3 pour conclure.
Montrons que
est la théorie des anneaux intègres:
Soit
un anneau intègre. Soit
corps-extension algébrique du corps de fraction de
. On a que
est un modèle de
. Comme il existe un homomorphisme injectif de
dans le corps de fraction de
, et qu'il existe un homomorphisme injective du corps de fraction de
dans
, on déduit que
est un sous-anneau de
. Donc
. Soit
. En particulier,
. Comme de plus tous les axiomes de la théorie d'anneaux sont dans
,
est un anneau intègre.
Montrons que
vérifie la première condition du critère 3:
Soit
un modèle de
.
est un anneau intègre. Soit
le corps-extension algébrique du corps de fraction de
. Soit
un modèle de
tel que
est un sous-anneau de
. Comme
est un corps contenant
, donc
contenant le corps de fraction de
. Et comme
est algébriquement clos,
contient, par définition,
le corps-extension algébrique de
.
Montrons que
vérifie la deuxième condition du critère 3:
Soient
tels que
est une sous-structure de
,
une L-formule sans quantificateur,
éléments de la domaine de
. Supposons qu'il existe
élément de la domaine de
tel que
. Montrons qu'il existe
élément de la domaine de
tel que
.
est une formule sans quantificateur donc elle est équivalente à une formule sous forme disjonctive
où les
sont des formules atomiques ou des négations de formules atomiques.
si et seulement si
pour un certain
. On peut donc supposer, sans perte de généralité, que F est une formule de la forme
où les
sont des formules atomiques ou des négations de formules atomiques. Et le langage de ACF est le langage d'anneau, une formule atomique
est de la forme
où P est une polynôme de
.
est un polynôme de
. Donc il existe
dans
tels que
. On a deux cas:
S'il existe un polynôme
non nul, alors comme on a
pour tout
, on a en particulier
. Comme M est un sous-corps algébriquement clos de N et b est un élément de la domaine de N, on a que b est un élément de la domaine de M.
Sinon, alors
. Soient
l'ensemble de racines de
pour tout
. On sait que
est fini pour tout
et que
est infini donc il existe
dans
tel que
. Donc il existe
dans la domaine de M tel que
.