Variante Polougaïevski
La variante Polougaïevski est une ouverture du jeu d'échecs, plus précisément une sous-variante de la variante Najdorf.
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Son code ECO est B96. Elle est caractérisée par les coups :
- 1. e4 c5 (défense sicilienne)
- 2. Cf3 d6
- 3. d4 cxd4
- 4. Cxd4 Cf6
- 5. Cc3 a6 (variante Najdorf)
- 6. Fg5 e6
- 7. f4 b5 (sous-variante Polougaïevski).
Lev Polougaïevski est un grand maître soviétique qui a contribué à l'analyse et au développement de cette variante dans les années 1960 et 1970.
Historique
La variante 6. Fg5 e6 7. f4 b5 (cf diagramme) fut jouée pour la première fois par les maîtres Kroguious et Shaposhnikov, ainsi que des maîtres roumains, vers 1957-1958, mais elle prit rapidement le nom de Lev Polougaïevski, qui à partir de 1958 jusqu'à sa mort en 1995 analysa et pratiqua assidûment cette variante, jusqu'à en écrire l'essentiel de la théorie moderne[1]. Ces expériences théoriques et pratiques furent rapportées dans la deuxième partie de son livre Les Secrets d'un Grand-Maître, sous la forme d'une monographie entièrement consacrée à 7... b5 : Naissance d'une variante[1].
Analyse
Le coup 7... b5 est peut-être la plus intransigeante de toutes les réponses noires. Grâce à une ressource tactique, les noirs ignorent la menace e4-e5 et initient immédiatement leur contre-jeu à l'aile-dame; le pion e4 est directement menacé après b4 et Fb7. Parce que cette réponse est extrêmement ambitieuse, les blancs sont quasiment forcés d'accepter le défi et de se jeter dans les complications de 8. e5; sur des coups de développement normaux, les noirs n'ont que peu de problèmes, par exemple 8. Df3 Fb7 9. Fd3 Cbd7 10. 0-0-0 avec un bon jeu (10... Tc8, 10... Fe7, et 10... Db6, Kupper - Tal, Zürich 1959[2], sont possibles).
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Après 8. e5, les noirs évitent la perte d'une pièce par la manœuvre 8... dxe5 9. fxe5 Dc7 10. exf6 De5+ 11. Fe2 Dxg5 (cf diagramme). On peut dresser un bilan de cette position critique. Les noirs possèdent un certain nombre d'avantages structurels : ils possèdent la paire de fous, et parfois capturent le pion avancé jusqu'en f6. De plus, leurs pièces sont capables de s'activer très rapidement et efficacement, par Ta7-d7, Fb7, Fc5+, ou Fxg7 (après fxg7). En contrepartie, les colonnes centrales sont ouvertes, les noirs accusent un retard de développement considérable, leur roi est encore au centre, et si leur dame est très active, elle est aussi très exposée aux attaques blanches.
À travers l'analyse concrète des possibilités, la théorie s'est donc attachée à déterminer si l'initiative des blancs est suffisante pour être convertie en un avantage plus permanent. Le statut de la variante introduite par David Bronstein, 12. Dd3, n'est pas encore tout à fait clair, notamment concernant la ligne jouée dans la partie Hellers - Polougaïevski, Haninge 1989[3] - [4] - [5]; si les blancs obtiennent une énorme avance de développement après 12. Dd3 Dxf6 13. Tf1 De5, ils se trouvent empêchés d'exécuter le grand-roque dans des conditions favorables pour des raisons tactiques[6]. La théorie moderne considère en revanche que les blancs obtiennent un avantage tangible dans la variante 12. 0-0 De5, aussi bien après 13. Rh1 (avec les idées De1-g3 et Tad1) qu'après 13. Cf3 Fc5+ 14. Rh1 Dxf6 15. Ce4 De7 16. Ce5[7]. C'est au tour des noirs de trouver des ressources et les nouvelles recherches s'orientent vers un réexamen à l'aide des ordinateurs d'anciennes suites négligées ou condamnées par Polougaïevski dans Naissance d'une Variante, telles que 12. 0-0 De5 13. Cf3 De3+ (partie Lékó - Ivantchouk, Monaco 2001[8]), ou encore 12. 0-0 Ta7 13. Dd3 Td7 14. Ce4 De5 15. Cf3 et là 15... Dc7 ou 15... Dxb2 (partie Lékó - Ghaem Maghami, Erevan 2001[9]), ou enfin les autres douzièmes coups noirs plausibles comme 12... gxf6.
Outre 10. exf6, les blancs disposent d'autres options intéressantes : 10. Cf3, 10. Fxb5+!? (nouveauté due à Alvis Vītoliņš, partie Tal - Polougaïevski, Alma-Ata 1980[10]), et surtout la continuation de Simaguine 10. De2, où les noirs peuvent choisir entre les énormes complications de la variante 10... Cfd7 11. 0-0-0 Fb7[11], et le coup plus solide réintroduit plus tard par Polougaïevski, 11... Cc6[12]. Dans ces conditions, il n'est donc pas étonnant que la variante Polougaïevski ait fortement décliné en popularité; Garry Kasparov, nageant à contre-courant de l'opinion d'une majorité d'auteurs modernes donnant la variante comme pratiquement réfutée, a cependant affirmé que la variante méritait mieux et que de nombreux secrets restaient encore à découvrir[13].
Notes et références
- (fr) Lev Polougaïevski, Les Secrets d'un Grand-Maître (1994), Armand Colin, p.25
- (en) Mikhail Tal, The Life and Games of Mikhail Tal, EveryMan Chess, p.143
- (en) Hellers - Polougaïevski, Haninge 1989 sur ChessGames.com
- (fr) Lev Polougaïevski, Naissance d'une variante in Les Secrets d'un grand-maître (1994), éditions Armand Colin, p.133-135
- (en) Tom Wedberg & Ľubomír Ftáčnik, analyse dans ChessBase Magazine 13
- Nunn, The Complete Najdorf 6. Bg5 (1996), Editions Batsford, p. 255-261
- (en) Thomas Luther, "The Najdorf" in Experts Vs the Sicilian (2004), éditions Quality Chess, p.20-23
- (en) Lékó - Ivantchouk, tournoi Amber 2001 sur ChessGames.com
- (en) Lékó - Ghaem Maghami, Erevan 2001 sur ChessGames.com
- (en) Tal - Polougaïevski, Alma-Ata, candidats (2) 1980 sur ChessGames.com
- (en) Nunn, The Complete Najdorf 6. Bg5 (1996), Éditions Batsford, chapitre 11
- (fr) Lev Polougaïevski, Naissance d'une variante in Les Secrets d'un grand-maître (1994), éditions Armand Colin, p.122-127
- (en) Kasparov, How to play the Najdorf, volume 2
Bibliographie
- (fr) Lev Polougaïevski, Les secrets d'un grand maître, Armand Colin, 1994