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Tripartite (Luxembourg)

La tripartite est une institution Ă©conomique et sociopolitique au Luxembourg qui est considĂ©rĂ©e comme fondamentale dans le soi-disant « modèle luxembourgeois »[1]. La tripartite repose sur un dialogue institutionnalisĂ© et continu entre le gouvernement, les employeurs et les syndicats sur des questions Ă©conomiques et sociales importantes afin de parvenir Ă  un consensus.

Histoire

À la suite de la grave crise sidérurgique qui risque de secouer profondément la société luxembourgeoise, le « modèle luxembourgeois » précité a été mis en œuvre dans les années 1970.

La loi du autorise le gouvernement à prendre des mesures visant à empêcher les licenciements temporaires et à garantir l'emploi. Dans le même temps, il est créé un Comité de conjoncture à composition « tripartite » chargée de suivre de près l'évolution de la situation économique et de faire rapport au gouvernement une fois par mois.

En 1977, en raison de la détérioration de l'industrie sidérurgique, le gouvernement convoque une « conférence tripartite sidérurgie » et rédige un plan d'action pour maintenir la croissance économique et le plein emploi.

La loi du institutionnalise le Comité de coordination tripartite, qui s'est réuni lorsque la situation économique et sociale s'est détériorée. La fonction du comité est de parvenir à un consensus sur des questions socio-économiques importantes. Plus d'un an plus tard, en , le comité de coordination tripartite est parvenu au premier accord sur l'ajustement structurel et la modernisation de l'industrie sidérurgique. Le premier effort tripartite pour éviter le licenciement de milliers de sidérurgistes a sans aucun doute réussi[2].

Après la diversification économique vigoureusement promue par le gouvernement luxembourgeois, des tripartites sectorielles ont émergé. Par conséquent, la recherche de solutions consensuelles est devenue courante.

Le marque la date de la plus récente réunion tripartite entre le gouvernement, la direction ArcelorMittal et les différents représentants des syndicats. Ils ont trouvé un accord sur la préservation de tous les emplois dans le secteur de la sidérurgie jusqu’au 2025[3]. 536 postes étaient en danger sur les sites Differdange, Esch-Belval, Rodange, Luxembourg, Esch-sur-Alzette, Bissen ainsi que l'atelier mécanique de Dommeldange[4].

« Le modèle luxembourgeois » : le rôle des syndicats

Il est important de noter qu’il est au gouvernement luxembourgeois de prendre l’initiative d’initier des nĂ©gociations d’une tripartite, en invitant le patronat et le syndicat Ă  se rĂ©unir,  afin de trouver un consensus sur des questions Ă©conomiques et sociales au Luxembourg[5]. Depuis la crĂ©ation de ce dialogue entre ces trois partis, dans les annĂ©es 1970, les organisations syndicales y jouent un rĂ´le crucial. Depuis lors, trois syndicats assurent essentiellement la reprĂ©sentation des employĂ©s et des travailleurs, luxembourgeois et non-luxembourgeois : l’OGBL, le LCGB et la CGFP[6].

L’OGBL, le Onofhängene Gewerkschaftsbond LĂ«tzebuerg, fondĂ© en 1979[7] est un syndicat d’importance, puisqu’il a très vite gagnĂ© d’influence et a pu, Ă  partir de sa fondation, rassembler une grande partie de membres et militants. En 2018, le OGBL compte plus de 70.000 membres[8], faisant de lui le syndicat avec les plus d’adhĂ©rents au Luxembourg. Le OGBL se dit indĂ©pendant, mais il faut prĂ©ciser que pendant  toute son histoire, il est en lien Ă©troit avec le Parti ouvrier socialiste luxembourgeois, le LSAP[9].Le OGBL peut donc ĂŞtre considĂ©rĂ© comme un  syndicat de gauche.

Le LCGB, le Lëtzebuerger Chrëschtleche Gewerkschaftsbond, est un syndicat chrétien fondé en 1921[10]. Le syndicat n’a d’ailleurs jamais pu atteindre le nombre des membres que compte le OGBL. En raison de sa longue histoire et du fait que le Luxembourg a été gouverné pendant des décennies par un gouvernement guidé par le CSV[11], le parti chrétien, le LCGB reste un acteur incontournable lors des réunions de la tripartite.

La dernière grande organisation syndicale qui influence le dialogue social au Luxembourg est la CGFP, syndicat fondĂ© en 1909[12], qui reprĂ©sente majoritairement les employĂ©s et fonctionnaires publiques. La Staatsbeamtengewerkschaft joue un rĂ´le crucial dans les discussions de la tripartite : ses adhĂ©rents sont essentiellement  des salariĂ©s et fonctionnaires de nationalitĂ© luxembourgeoise, et donc des personnes ayant le droit de vote au Luxembourg. Ceci n’est pas le cas pour les deux autres syndicats, qui reprĂ©sentent essentiellement les employĂ©s et travailleurs du secteur privĂ©, dont une grande partie des personnes n’ayant pas la nationalitĂ© luxembourgeoise[13].

Ce sont donc historiquement ces trois syndicats qui reprĂ©sentent les intĂ©rĂŞts de leurs adhĂ©rents, les salariĂ©s. Du fait que les trois syndicats ont parfois des intĂ©rĂŞts et points de vue diffĂ©rents, il n’a pas toujours Ă©tĂ© Ă©vident, dans l’histoire des rĂ©unions de la tripartite, de se rĂ©unir et se prĂ©senter uni, pour discuter les intĂ©rĂŞts des salariĂ©s et dialoguer avec le patronat et avec le gouvernement. Mais durant l’histoire de la tripartite, les diffĂ©rents syndicats se sont toujours mis ensemble avant les discussions pour travailler et discuter les dossiers et les sujets, afin de trouver un consensus et se prĂ©senter comme groupe uni.  

Le rêve d’un syndicat unique, d’une Eeenheetsgewergschaft, représentant et défendant les causes de tous les salariés et travailleurs lors des réunions de la tripartite, existe déjà avant l’instauration du « modèle luxembourgeois », dans les années 1970[14]. Le OGBL y est favorable : en 2018, durant les célébrations du 40e anniversaire du syndicat, le président de l’époque André Roeltgen évoque que « ce serait une erreur historique de ne pas réussir à dépasser l’éparpillement du mouvement syndical »[15], afin de bien pouvoir représenter les droits des salariés lors des réunions de la tripartite. Mais les deux autres syndicats, la CGFP et le LCGP n’y sont pas trop favorables[16].


Composition

Cinq institutions assurent en permanence le dialogue social :

Comité de conjoncture

Le comité a été créé en 1975. Sa tâche principale est d'assurer le maintien de l'emploi et d'éviter les licenciements dus à des raisons conjoncturelles. Le comité se réunit une fois par mois et est composé de représentants des organisations salariales et patronales et de divers ministères et administrations[17].

Conseil Ă©conomique et social

Le Conseil économique et social (CES) est composé de représentants des employeurs, des salariés et du gouvernement. Cet organe consultatif apporte un soutien au dialogue social national et étudie les questions économiques, sociales et financières qui touchent plusieurs secteurs économiques ou l'ensemble de l'économie nationale. Il donne des avis sur toute mesure législative ou réglementaire et rédige des rapports sur le développement économique, social et financier du pays au cours du premier trimestre de chaque année[18].

Comité de coordination tripartite

Depuis 1977, le Comité de coordination tripartite réunit des représentants du gouvernement, des employeurs et des employés. Sa fonction est de parvenir à un consensus sur des questions économiques et sociales importantes[19].

Conférence tripartite de la sidérurgie

La naissance de la Conférence tripartite de la sidérurgie est due à la crise de la sidérurgie, principal pilier de l'économie luxembourgeoise jusqu'à la fin des années 80. Elle n'a impliqué que la sidérurgie. Les négociations lors de cette réunion, entre autres, ont le potentiel d'éviter d'importants problèmes de licenciement[2].

Comité permanent du travail et de l'emploi

Le Comité permanent du travail et de l'emploi a été créé par la loi le et est composé de représentants des syndicats, des entreprises et du gouvernement. Il tient des réunions au besoin, au moins trois par an, pour examiner l’emploi et le chômage des travailleurs, les conditions de travail et la sécurité et la santé des travailleurs[20].

Notes et références

  1. « Visiblement, les querelleurs de la tripartite sont d’accord sur un point: le modèle luxembourgeois se porte à merveille. » (Raymond Klein: Tournant dangereux. Woxx, 23. Dezember 2011)
  2. « La Tripartite: Le Modèle Social Du Luxembourg », sur luxembourg.public.lu, .
  3. Communiqué de presse.TRIPARTITE SIDÉRURGIE: UN ACCORD DE PRINCIPE A ÉTÉ TROUVÉ ET LE PLAN SOCIAL EST ÉCARTÉ, Download.Rtl.Lu, 2020, https://download.rtl.lu/2020/12/15/aa608c78c02e0b4d43b7f9c495ce9eec.pdf. Accessed 31 Dec 2020.
  4. Patrick Jacquemot, « Soulagement après la tripartite sidérurgie », Luxemburger Wort,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  5. « La tripartite: le modèle social du Luxembourg », sur luxembourg.public.lu (consulté le )
  6. CLEMENT, Franz, Le dialogue social au Luxembourg. Acteurs, institutions et procédures, Luxembourg, , p.40
  7. Krier, Frédéric, Die Gründung des OGBL 1979, dans : 100 Joer fräi Gewerkschaften. 1916-2016, (ed. Krier, Frédéric, Maas, Jacques, Scuto, Denis (et.al.), Esch-sur-Alzette, 2016, p.271-316.
  8. (de) « 40 Jahre OGBL: Vom Traum der Einheitsgewerkschaft », sur Luxemburger Wort, (consulté le )
  9. « "Je n'ai pas peur de la confrontation" », sur gouvernement.lu, (consulté le )
  10. Zenner, Roby, 75 Joer Lëtzebuerger Chrëschtleche Gewerkschaftsbond (LCGB), dans : Letzeburger Sonndesblad (4/129), p.10-11, ici : p.10.
  11. Cet ouvrage nous donne un bon aperçu sur la composition les différentes compositions des gouvernements au Luxembourg, depuis 1848, jusqu’à 2011 : Thewes, Guy, Les gouvernements du Grand-Duché de Luxembourg depuis 1848, Luxembourg, 2011. Téléchargeable gratuitement sur le site internet du gouvernement : https://sip.gouvernement.lu/fr/publications/minist-etat/sip/livre/gouvernements_depuis_1848_-_version_2011.html
  12. CGFP (ed.), 1909-2009. Cent ans de mouvement syndical dans la fonction publique, Luxembourg, 2010, p.23.
  13. Clement, Le dialogue social au Luxembourg, p.40.
  14. Scuto, Denis, Introduction, dans : 100 Joer fräi Gewerkschaften. 1916-2016, (ed. Krier, Frédéric, Maas, Jacques, Scuto, Denis (et.al.), Esch-sur-Alzette, 2016, p.9-14, ici : p.11.
  15. « L’OGBL fête ses 40 ans | OGBL » (consulté le )
  16. (de) Robert Schneider, « Kommentar / Drei wollen das Gleiche: OGBL, LCGB und CGFP ziehen an einem Strang », sur www.tageblatt.lu (consulté le )
  17. "Comité De Conjoncture // Le Gouvernement Luxembourgeois". Gouvernement.Lu, 2020, http://www.gouvernement.lu/cdc. Accessed 31 Dec 2020.
  18. "Conseil Économique Et Social". Ces.Public.Lu, 2020, https://ces.public.lu/fr/ces.html. Accessed 31 Dec 2020.
  19. « Règlement grand-ducal du 25 octobre 1989 portant modification du règlement grand-ducal du 26 janvier 1978 déterminant le fonctionnement du comité de coordination tripartite », sur http://legilux.public.lu/, (consulté le ).
  20. "- Legilux". Legilux.Public.Lu, 2020, http://legilux.public.lu/eli/etat/leg/loi/2007/12/21/n16/jo. Accessed 31 Dec 2020.

Voir aussi

  • Franz ClĂ©ment (prĂ©f. Dan Kersch), Le dialogue sociale au Luxembourg : acteurs, institutions et procĂ©dures, Luxembourg, Larcier, coll. « Vademecum », , 188 p. (ISBN 978-2-87998-450-6 et 2-87998-450-5, OCLC 1200315797, lire en ligne).
  • (de) Mario Hirsch, « Organisierte Interessen, Kammern und „Tripartite“ », dans Wolfgang H. Lorig, Das politische System Luxemburgs : eine EinfĂĽhrung, Wiesbaden, VS Verlag fĂĽr Sozialwissenschaften, , 385 p. (OCLC 7331147619, lire en ligne), p. 190–207.
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