Teach for America
Teach for America (TFA) est une organisation à but non lucratif américaine de type 501c fondée par Wendy Kopp en 1989 et qui se présente comme « un réseau varié de chefs qui affrontent les inégalités en matière d'éducation en enseignant pendant au moins deux ans et en travaillant ensuite avec un dévouement sans faille, dans tous les secteurs de la société, pour créer une nation libérée de cette injustice »[1]. L'association sélectionne et recrute de jeunes diplômés qu'elle forme durant une école d'été de quelques semaines avant de les envoyer enseigner dans des écoles défavorisées pour des contrats à durée déterminée de deux ans. L'association connaît une forte expansion dans les années 1990-2010. Elle fait l'objet de critiques croissantes au cours de la même période, en particulier à partir de 2013.
Forme juridique | association Ă but non lucratif de type 501c |
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But | Ă©ducation |
Surnom | TFA |
Zone d’influence | États-Unis |
Fondation | 1989 |
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Fondateur | Wendy Kopp |
Siège | New York |
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Personnages clés | Wendy Kopp |
Président | Elisa Villanueva Beard |
Affiliation internationale | Teach for All |
Financement | Financements privés variés, famille Walton |
Site web | www.teachforamerica.org |
Histoire
Teach for America est fondée en 1989 par Wendy Kopp. Elle recrute 100 étudiants à temps partiel issus de 100 universités pour la première session de recrutement de l'association[2]. Les premiers enseignants recrutés, au nombre de 489, sont formés à l'été 1990 et commencent en septembre dans plusieurs États, à New York, Los Angeles, l'Est de la Caroline du Nord, le sud de la Louisiane, et les zones rurales de la Géorgie[2]. L'association devient membre du programme AmeriCorps à son lancement en 1993 sous la présidence de Bill Clinton[2]. En 1994, l'association dit avoir formé 45 000 étudiants[2]. L'association se dote en 1995 d'un conseil d'administration à l'échelle nationale dont Susan Lehmann est la première présidente[2]. L'an 2000 voit Teach for America lancer un plan d'expansion visant à doubler sa taille et à s'étendre dans 20 nouvelles régions[2].
En 2007, Wendy Kopp fonde l'association Teach for All, organisme-cadre destiné à superviser des associations nationales dans d'autres pays que les États-Unis et à coordonner leurs actions[2].
Les années suivant la crise financière de 2008 voient le recrutement de Teach for America augmenter significativement, l'association attirant de nombreux jeunes diplômés des secteurs des affaires et de la finance qui peinent plus qu'avant à obtenir un emploi[3].
Wendy Kopp, fondatrice de l'association, quitte le rĂ´le de PDG en 2013 pour prendre la tĂŞte de Teach for All. Matthew Kramer et Elisa Villanueva Beard se partagent alors le rĂ´le de co-PDG jusqu'en 2015 oĂą Elisa Villanueva Beard reste seule PDG de Teach for America[2].
En 2014, l'association indique qu'environ 1 000 anciens enseignants de Teach for America ont obtenu des postes à responsabilité dans les sphères de l'éducation, en tant que directeurs, principaux ou proviseurs ou dans l'administration du système éducatif[2].
En 2014 et 2015, après 15 ans de recrutement à la hausse, le nombre de diplômés recruté commence à baisser ; cette baisse est d'environ 10% en 2015. Deux sites d'entraînement de l'association sont fermés, à New York et Los Angeles[4].
Activités
Teach for America recrute de jeunes diplômés en vue de les former à l'enseignement au cours d'une école d'été, puis de les envoyer enseigner dans des établissements de régions défavorisées, pendant une durée minimale de deux ans. La procédure de recrutement est sélective. Le taux d'acceptation était de 15% en 2008[5], 12% en 2010[6], 11% en 2011[7].
Financement
En 2012, Nate Snow, directeur exécutif de Teach for America, indique que l'organisation est financée « par le milieu des affaires, par des personnes privés et par d'autres contributeurs qui soutiennent sa mission »[8].
La famille Walton est donatrice régulière depuis 1993 et a annoncé un investissement de 50 millions de dollars dans l'association par le biais de la Walton Family Foundation le , avec pour but de former environ 4000 membres au cours de la période 2015-2018[9]. Arthur et Toni Rembe Rock figurent également parmi les mécènes de longue date de l'association avec un montant total de dons d'environ 5 millions de dollars entre la création de l'association et l'année 2015[10].
Un fonds de dotation (endownment fund) est démarré en 2011 avec pour premier mécène la Eli and Edythe Broad Foundation, fondation dirigée par le milliardaire américain Eli Broad. La fondation fait un don de 25 millions de dollars et émet un appel à dons, invitant d'autres mécènes à imiter et à égaler son don. Trois autres mécènes, la Laura and John Arnold Foundation, la Robertson Foundation et Steve Mandel, donnent chacun 25 autres millions de dollars, pour un fonds de dotation total de 100 millions de dollars[11].
En 2015, Teach for America reçoit de l'argent de sponsors privés comme la Wells Fargo, Comcast et NBCUniversal, des dons de donateurs habitués des associations caritatives comme la famille Walton, et de fondations dirigées par des milliardaires comme John D. Arnold et Eli Broad. Ses revenus pour 2015 s'élèvent à 196,2 millions de dollars américains[4].
En , le site de l'association indique qu'environ 71% de ses ressources financières proviennent de sources privées et 29% de fonds publics[12].
Accueil et critiques
Le travail de Teach for America a suscité des réactions de plus en plus contrastées au fil du temps.
Éloges
Du côté des avis favorables, certains chefs d'administration d'écoles publiques américaines reconnaissent une dette envers l'association pour endiguer les difficultés de recrutement des enseignants dans les régions pauvres. En 2015, dans le comté de Warren en Caroline du Nord, une région très défavorisée, un enseignant sur cinq provient de Teach for America. Le surintendant des écoles du comté, Ray Spain, indique : « Si nous ne les avions pas, nous aurions réellement de très sérieux problèmes »[4] - [13].
Controverses autour du principe et de son efficacité
Parmi les critiques de l'association, beaucoup portent sur son principe même : envoyer de jeunes diplômés d'une vingtaine d'années dans des classes difficiles après à peine quelques semaines de formation. Des syndicats d'enseignants, des écoles de formation d'enseignants et des décideurs ont argué que cela ne suffisait pas à faire une différence[4]. Plusieurs anciens membres de Teach for America ont adressé la même critique à l'association. Dans The Crimson en 2005, Henry Seton, tout en reconnaissant au programme des qualités par ailleurs, lui fait principalement ce reproche[14]. Emma Lind, en , est du même avis[15]. Dans une tribune publiée en , Olivia Blanchard, ancienne enseignante formée par TFA, indique que les cinq semaines de formation en école d'été fournies par l'association restaient largement insuffisantes pour la préparer à faire face à une classe de 20 élèves turbulents et en grande difficulté, le tout avec un salaire de débutante[16]. Dans un article publié la même année, Sandra Korn rapporte que parmi les étudiants d'Harvard, dont elle provient, l'avis qui prévaut est que l'association prépare très insuffisamment les futurs enseignants[17]. Un article du Harvard Magazine à la fin de la même année rapportait que l'association avait des partisans et des adversaires, les uns et les autres farouches, au sein du campus d'Harvard, et que son principe y était très discuté[18].
Une étude publiée dans Mathematica Policy Research en ne trouve aucune différence significative dans les résultats aux contrôles des élèves ayant bénéficié de l'enseignement de professeurs formés par Teach for America et dans ceux des élèves n'en ayant pas bénéficié. L'étude révèle également que les enseignants de Teach for America montrent une plus grande souffrance au travail[19] - [20].
Critiques des effets négatifs sur le système éducatif public
Teach for America a également été accusé d'œuvrer à la destruction du système éducatif public américain. Kenzo Shibata, en 2013, analyse les actions de l'association à Chicago et observe qu'en raison des coupes budgétaires sévères subies par le secteur de l'éducation, la ville est passée d'une situation de manque d'enseignants à une situation de surplus d'enseignants par rapport au nombre de postes disponibles. En théorie, cela rendait inutile tout recours à Teach for America, mais dans les faits les contrats avec TFA se sont multipliés, remplaçant des enseignants expérimentés qui se retrouvaient au chômage par de jeunes diplômés inexpérimentés. L'auteur remarque : « Teach for America voulait aider à endiguer un manque d'enseignants. Alors pourquoi des milliers d'éducateurs expérimentés sont-ils en train d'être remplacés par des centaines d'étudiants diplômés néophytes ? »[21] - [22]. Sandra Korn, dans un article paru en , déclare que l'association « sabote le système éducatif public américain dans ses fondements mêmes en l'incitant à remplacer des professeurs expérimentés ayant fait carrière par un modèle néolibéral d'éducateurs interchangeables et de contrôle standardisé. Si TFA avait l'intention de placer des étudiants dans des écoles qui souffrent d'un nombre insuffisant d'enseignants, l'association a dévié très loin de son objectif originel »[23]. En , lors du colloque annuel sur l'éducation à Chicago Free Minds/Free People, un groupe d'enseignants et d'anciens membres de l'association organise un sommet intitulé « Organiser la résistance à Teach form America et à son rôle dans la privatisation » (« Organizing Resistance Against Teach for America and its Role in Privatization »)[24].
Critiques d'anciens membres
D'anciens membres de Teach for America publient en 2015 un volume de témoignages, Teach For America Counter-Narratives : Alumni Speak Up and Speak Out, qui regroupe des récits d'anciens membres couvrant les 25 premières années d'activité de l'association et formulent des critiques classées en trois grandes parties portant sur la procédure de recrutement, l'approche de la diversité adoptée par l'association et ses réactions aux critiques[25] - [26] - [27] - [28].
Polémique à Oakland en 2019
L'association est au centre d'une polémique en : dans un contexte de possible grève des enseignants à Oakland, Teach for America exerce des pressions sur ses jeunes enseignants en les menaçant d'exercer des rétentions sur leurs salaires à hauteur de plusieurs milliers de dollars (entre 2000 et 10 000 dollars) s'ils prennent part à la grève. En réponse, plus de 300 anciens membres adressent à la direction de TFA une lettre ouverte de protestation pour dénoncer cette entorse à l'éthique et aux valeurs affichées par l'organisation, puisque la direction forçait ses membres à prendre une décision politique. Jack Hardy, porte-parole de Teach for America, évoque un malentendu[29] - [30].
Notes et références
- « Teach For America is a diverse network of leaders who confront educational inequity by teaching for at least two years and then working with unwavering commitment from every sector of society to create a nation free from this injustice. ». Page « What We Do » du site de Teach for America. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Page History sur le site de Teach for America. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Deferring Six Figures on Wall Street for Teacher’s Salary, article de Scott Eidler dans The New York Times le 2 janvier 2013. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Fewer Top Graduates Want to Join Teach for America, article de Motoko Rich dans le New York Times le 6 février 2015. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Teach for America Announces Record Number of Teachers in 2008, page sur le site de Teach for America en 2011. Page conservée sur l'Internet Archive dans son état du 8 mars 2016, consultée le 5 juillet 2019.
- Teach for America Anounces the Schools Contributing Most Graduates to 2010 Corps, article dans le Washington Post le 14 juillet 2010.
- Teach for America 2011 acceptance rate: 11 percent, article de Jenna Johnson dans 'le 'Washington Post le 3 août 2011. Page consultée le 5 juillet 2019.
- « Nate Snow, executive director for Teach For America — Connecticut, said as a nonprofit organization, Teach For America’s work is fueled by investments from the business community, private individuals and others who support its mission. » Businesses investing in Teach For America, article de Kathryn M. Roy dans le Hartford Business le 26 mars 2012. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Walton Family Foundation to Invest $50 Million in Teach For America, page sur le site de la Walton Family Foundation le 4 novembre 2015. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Arthur Rock: How One of America's First Venture Capitalists Does His Philanthropy, article d'Ade Adeniji sur Inside Philanthropy le 7 décembre 2015. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Eli Broad, others pledge $100 million to Teach for America endowment, article dans le blog du Los Angeles Times L.A. NOW le 27 janvier 2011. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Page Supporting TFA sur le site de Teach for America. Page consultée le 5 juillet 2019.
- « If we didn’t have them, we would really have some very serious problems. »
- Conditional Love. Why Teach for America ain’t enough, article de Henry Seton dans The Crimson le 15 décembre 2005. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Rethink TFA, article d'Emma Lind dans The Crimson le 11 février 2013. Page consultée le 5 juillet 2019.
- I Quit Teach for America, article d'Olivia Blanchard dans The Atlantic le 23 septembre 2013. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Why I Said No to Teach for America, and Why You Should Too, article de Sandra Korn dans The Huffington Post le 23 octobre 2013, mis à jour le 23 janvier 2014. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Is Teach for America Good for America?, article de Michael Zuckermann dans The Harvard Magazine le 18 décembre 2013. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Clark, Isenberg, Liu, Makowsky et Zukiewicz (2015).
- « Facts & Figures: Bad News For Teach for America », par les éditeurs, billet du blog Taking Notes. The Editorial Page Editor's Notes, blog du New york Times, le 9 mars 2015. Page consultée le 5 juillet 2019. [lire en ligne]
- Teach for America’s Mission in Chicago
- « Teach for America wanted to help stem a teacher shortage. Why then are thousands of experienced educators being replaced by hundreds of new college graduates? »
- « It undermines the American public education system from the very foundation by urging the replacement of experienced career teachers with a neoliberal model of interchangeable educators and standardized testing. If TFA intended to place students in schools with insufficient numbers of teachers, it has strayed far from its original goal. »
- Teach For America's Civil War, article de James Cerconsky dans Prospect le 9 juillet 2013. Page consultée le 5 juillet 2019.
- T. Jameson Brewer and Kathleen deMarrais (Ă©d.), Teach For America Counter-Narratives: Alumni Speak Up and Speak Out, Peter Lang, 2015. (ISBN 1433128764)
- 2 Teach For America Alums Say TFA Has Big Problems When It Comes To Race, article de Leah Donnella sur le site de la National Public Radio le 14 octobre 2015. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Calling Out Teach for America’s Myths, article de Jameson Brewer dans le Huffington Post le 10 juillet 2019. Page consultée le 5 juillet 2019.
- 'Good Intentions Gone Bad' — Excerpts from New Book About Teach for America, article dans The Washington Post le 10 juillet 2015. Page consultée le 5 juillet 2019.
- APNewsBreak: Teach for America slammed over Oakland strike, article de Sally Ho dans AP News le 13 février 2019. Page consultée le 5 juillet 2019.
- Did Teach for America Pressure Members to Break Oakland Teacher Strike?, article de Ruth McCambridge dans le Non Profit Quarterly le 13 février 2019. Page consultée le 5 juillet 2019.
Bibliographie
- (en) Melissa A. Clark, Eric Isenberg, Albert Y. Liu, Libby Makowsky, Marykate Zukiewicz, « Impact of the Teach for America Investing in Innovation Scale-Up », Mathematica Policy Research. Revised final report, (première publication en ), 108 pages. [lire en ligne]
Liens externes
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- (en) Site de Teach for America