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Tarification progressive de l'Ă©nergie

La tarification progressive de l'énergie consiste en une différenciation du prix du kWh selon le niveau de consommation, de telle façon que ce prix augmente avec la consommation : plus on consomme, plus on paye cher ses kWh, le prix augmentant par paliers.

Fonctionnement

Les paliers seront adaptĂ©s selon trois critères : le nombre de personnes occupant le logement, la zone climatique et le mode de chauffage. Les donnĂ©es seront collectĂ©es sur les feuilles d'impĂ´ts et transmises aux fournisseurs. Le tarif le plus bas sera 3 Ă  10 % moins cher que les tarifs actuels (au ). En passant au palier supĂ©rieur du tarif de base, on obtiendra dĂ©jĂ  un « malus » de l'ordre de quelques dizaines d'euros. Les personnes en situation de malus seront contactĂ©es afin d'ĂŞtres conseillĂ©es sur leur consommation. Pour les habitations considĂ©rĂ©es comme des « passoires Ă©nergĂ©tiques », une partie du malus sera dĂ©duite du paiement du loyer, incitant ainsi les propriĂ©taires Ă  effectuer des travaux d'isolation.

Utilisation dans le monde

La tarification progressive de l'électricité est utilisée par environ 90 pays à travers le monde (voir la liste des pays sur le blog : tarification-progressive-de-lenergie.com). Son application pour le gaz n'est pas connue mais est plus répandue que pour le pétrole où elle est en vigueur dans un très faible nombre de pays.

Histoire

Ce modèle tarifaire est apparu à la suite des premiers chocs pétroliers lors desquels les nations importatrices, fortement dépendantes des ressources extérieures, ont mis en place des politiques de maîtrise de la demande énergétique. La Commission européenne[1] a étudié cette mesure de réduction des consommations énergétiques dans le secteur résidentiel mais peu de pays européen l’ont adopté immédiatement. Seule l’Italie l’a mise en place dès 1975, faisant suite à la démarche du Japon en 1974. La Californie a également mis en œuvre cette mesure en 1976 mais pour des raisons environnementales, sous la pression des mouvements de protection de l’environnement[2]. En 2010, la Commission nationale des réformes et du développement chinoise a annoncé le déploiement de la tarification progressive de l'électricité à l'ensemble du territoire après une expérimentation de plusieurs années dans deux provinces[3]. La même année, la Belgique a également conduit une étude approfondie de « faisabilité de l'instauration d'une tarification progressive »[4]. Le texte de loi est toujours d’actualité mais confronté à des conflits de compétences entre les régions qui composent la Belgique et l’État fédéral. Récemment, la France[5] et l'Espagne[6] ont indiqué vouloir mettre en place une tarification progressive pour l'électricité pour les consommateurs résidentiels.

Objectifs

La tarification progressive de l'énergie poursuit un double objectif : limiter les consommations jugées non essentielles et réduire la facture énergétique des ménages à faible revenu.

  • Premièrement, le caractère progressif du modèle tarifaire incite aux Ă©conomies d'Ă©nergie puisque plus la consommation augmente, plus le prix du dernier kWh est Ă©levĂ©. Les gros consommateurs sont incitĂ©s Ă  rĂ©duire leur consommation sous peine de voir leur facture augmenter fortement. Ce modèle contraste avec le modèle français actuellement en vigueur puisque la tarification duale, de l’abonnement et de l’énergie consommĂ©e, rĂ©sulte en un prix du kWh dĂ©croissant Ă  mesure que la consommation augmente. L’introduction de la tarification progressive en France devrait donc faire Ă©voluer les comportements de consommation des usagers. Les Ă©tudes estiment Ă  6 % les Ă©conomies d’énergie rĂ©alisĂ©es Ă  court termes et 18 % Ă  long terme[7]. Les rĂ©ductions de court terme correspondent aux ajustements de comportement d’usage des consommateurs alors que celles de long terme intègrent Ă©galement les investissements dans l’efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique (isolation des logements, appareils plus efficaces…).
  • Deuxièmement, la tarification progressive de l’énergie poursuit Ă©galement un objectif de redistribution en rĂ©duisant la facture des petits consommateurs. Les enquĂŞtes sur la consommation des mĂ©nages montrent que les dĂ©penses en Ă©nergies dans le logement sont corrĂ©lĂ©es avec les revenus, c'est-Ă -dire que plus les revenus des mĂ©nages sont Ă©levĂ©s, plus leurs consommations/dĂ©penses sont importantes[8]. Globalement, les mĂ©nages Ă  faible revenus sont les des petits consommateurs d’énergie, et inversement. Cela s’explique notamment par les principaux dĂ©terminants de la consommation d’énergie dans le logement que sont la qualitĂ© de l’isolation, la surface, la tempĂ©rature ambiante, le taux d’occupation, le taux d’équipement en appareils Ă©lectronique. Puisque les mĂ©nages aux revenus modestes sont les moins consommateurs, l’introduction de la tarification progressive leur permet de rĂ©duire leur facture car ils paient les tarifs des premières tranches de consommation qui sont les moins chers. Une Ă©tude du système californien a ainsi montrĂ© que les tarifs progressifs permettaient une rĂ©duction de 17 % des factures des mĂ©nages Ă  revenus modestes, compensĂ©e par une augmentation de 15 % de celles des plus aisĂ©s[9].

Les avantages

  • Les mĂ©nages Ă  faible revenu bĂ©nĂ©ficient de facture rĂ©duite puisqu’ils sont ceux qui consomment le moins comparativement Ă  l’ensemble des mĂ©nages. Ils ne paient donc que les tarifs des tranches basses qui sont les moins chers.
  • Les tarifs bas pour les volumes de consommation qui correspondent aux usages essentiels sont financĂ©s par les tarifs des tranches de consommation « superflu ». Sur une pĂ©riode de temps longue, cela permet de stabiliser le tarif de base en les compensant par des augmentations des tarifs de confort et superflu. C’est comme cela que la Californie a rĂ©ussi Ă  maintenir bas le tarif de base, correspondant aux usages essentiels[10].
  • L’augmentation attendue des factures d’électricitĂ© des mĂ©nages les plus fortunĂ©s, qui sont ceux qui ont le plus facilement accès aux crĂ©dits bancaires, doit les inciter Ă  investir dans l’efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique ce qui boostera le marchĂ© de la rĂ©novation thermique des bâtiments.
  • Moins de consommation Ă©lectrique signifie une moindre sollicitation du rĂ©seau donc moins d’investissement donc un coĂ»t de l’électricitĂ© rĂ©duit.

Les inconvénients

  • L’application de la tarification progressive de l’énergie aux seules Ă©nergies en rĂ©seaux (Ă©lectricitĂ©, gaz) risque d’inciter les mĂ©nages Ă  choisir des modes de chauffage au fioul ou au bois qui sont des Ă©nergies qui ne sont pas rĂ©gulĂ©es par ce modèle tarifaire.
  • Le conflit d’intĂ©rĂŞt entre les locataires de logements, qui souhaitent rĂ©duire leur facture Ă©nergĂ©tique, et les propriĂ©taires, qui ne veulent pas investir dans l’amĂ©lioration de l’isolation de leur bien immobilier, risque d’être accentuĂ© dans le cas des logements dĂ©crits comme Ă©tant des passoires Ă©nergĂ©tiques.
  • L’information des clients doit ĂŞtre amĂ©liorĂ©e de façon qu’ils puissent connaitre plus prĂ©cisĂ©ment leur niveau de consommation afin d’adapter leurs comportements et prendre les dĂ©cisions d’investissement appropriĂ©es.
  • La tarification progressive de l’électricitĂ© ne rĂ©pond pas directement Ă  l’objectif de rĂ©duction de la pointe de consommation qui nĂ©cessite le recours Ă  des modes de production très pollueurs.

Proposition de loi française

La proposition de loi (« loi Brottes ») instaurant la tarification progressive de l'énergie a été déposée le à l'Assemblée nationale par le député M. François Brottes. Cette loi, qui aurait pu être adoptée avant la fin de l'année 2012, l'a finalement été en 2013, après de nombreux amendements[11] - [12].

Cette proposition de loi concernant la « tarification progressive » de l'électricité et du gaz naturel[13] a été déposée par discutée par les parlementaires dès le début du mois d'[14]. Elle a finalement été adoptée en lecture définitive à l'Assemblée nationale dans la nuit du 11 au [15].

Une grille des tarifs en trois paliers était prévue avec un prix au kWh spécifique à chaque tranche de consommation : tarif de base, tarif confort, tarif superflu[16] - [17].

Plus la consommation est importante et plus le prix est élevé. Les paliers seraient adaptés selon une démarche unique selon trois critères : le nombre de personnes occupant le logement, la zone climatique et le mode de chauffage.

Les données auraient été collectées sur les feuilles d'impôts et transmises aux fournisseurs.

Le tarif le plus bas aurait été 3 à 10 % moins cher que les tarifs actuels (au ). En passant au palier au-dessus du tarif de base, on aurait obtenu déjà un « malus » de l'ordre de quelques dizaines d'euros. Les personnes en situation de malus auraient été contactées afin d'êtres conseillées sur leur consommation. Pour les habitations considérées comme des « passoires énergétiques », une partie du malus aurait été déduite du paiement du loyer, incitant ainsi les propriétaires à effectuer des travaux d'isolation.

Anticipant l'entrée en vigueur prévue de la loi vers la fin de l'année 2013 ou début 2014, un élargissement des tarifs sociaux de l'énergie a été mis en place, par décret.

Les tarifs sociaux de l'électricité et du gaz naturel ont été attribués à tous les bénéficiaires des minima sociaux en situation de précarité énergétique (4 millions de ménages en France en ). Par ailleurs, la loi a également mis en place une trêve hivernale de l'énergie[18], interdisant de couper l'électricité en hiver.

Le « bonus-malus Â» aurait Ă©tĂ© gĂ©rĂ© par la Caisse des dĂ©pĂ´ts sur un compte spĂ©cifique ; Il se serait Ă©quilibrĂ© et aurait Ă©tĂ© neutre pour les opĂ©rateurs d'Ă©nergie, et n'aurait rien coĂ»tĂ© Ă  l'État.

Le champ d'application de cette loi aurait Ă©tĂ© progressivement Ă©tendu Ă  d'autres Ă©nergies dites « hors rĂ©seaux » comme le fioul domestique[19], le GPL et le bois de chauffage, ainsi qu'Ă  l'eau potable.

Il était également prévu que les compétences du Médiateur national de l'énergie soient élargies aux petites entreprises, aux litiges avec les distributeurs et à ceux portant sur la formation des contrats.

Cependant, le , le Conseil constitutionnel déclare contraire à la Constitution les articles 1 à 6 de la proposition de loi, qui instaurait la tarification progressive de l'énergie, vidant l'essentiel de la loi de son contenu[20].

Articles connexes

Notes et références

  1. Commission of the European Communities, Energy Savings - Short Term Targets, COM (75) 22 final, 31 January 1975, page 6, http://aei.pitt.edu/1517/
  2. Chistian Dehmel, “Progressive electricity tariffs in Italiy and California – prospects and limitations on electricity savings of domestic customers”, ECEEE 2011 Summer study, 2011, http://proceedings.eceee.org/visabstrakt.php?event=1&doc=2-275-11
  3. « La Chine va introduire des tarifs progressifs pour l'électricité », Le Quotidien du Peuple en ligne, http://french.peopledaily.com.cn/Economie/7843874.html
  4. "faisabilité de l'instauration d'une tarification progressive", CREG, 2010, http://www.creg.info/pdf/Etudes/F972FR.pdf
  5. « La tarification progressive du gaz, de l'électricité et de l'eau arrive dans les tuyaux », Le Moniteur, 30 août 2012, http://www.lemoniteur.fr/137-energie/article/actualite/18925163-la-tarification-progressive-du-gaz-de-l-electricite-et-de-l-eau-arrive-dans-les-tuyaux
  6. "Consumo y ubicación condicionarán la subida del recibo eléctrico", Reuters, 17 juillet 2012, https://reuters.com/article/topNews/idESMAE86G03U20120717
  7. Faruqui, « Inclining Toward Efficiency » Public Utilities Fortnightly, August 2008, http://www.soprisfoundation.org/PDFs/PUF_IncliningTowardEfficiency.pdf
  8. EnquĂŞte Budget de famille 2006, INSEE, http://www.insee.fr/fr/themes/detail.asp?ref_id=ir-bdf06
  9. “The redistributional impact of non-linear electricity pricing”, Borenstein, avril 2011, University of California Energy Institute, http://ei.haas.berkeley.edu/pdf/working_papers/WP204.pdf
  10. "Protéger les consommateurs vulnérables, blog: tarification-progressive-de-lenergie.com, http://tarification-progressive-de-lenergie.com/prix-energie-electricite-gaz-tarif-economie-consommation-progressif-bonus-malus-renouvelable-non-lineaire-eolien-pv-photovoltaique-objectifs/social-redistributif-redistribution-precarite-proteger-consommateurs-vulnerables/
  11. [http://www.lepoint.fr/societe/energie-le-tarif-progressif-sera-precede-d-une-extension-des-tarifs-sociaux-05-09-2012-1502760_23.phpe%20député%20de%20l'Isère%20sur%20RMC
  12. « Je pense que fin octobre, mi-novembre ce texte pourra être voté » avait déclaré sur RMC le député de l'Isère M. Brottes, également président de la Commission des Affaires économiques.
  13. « N° 150 - Proposition de loi de M. François Brottes instaurant une tarification… », sur assemblee-nationale.fr (consultĂ© le ).
  14. Tarification progressive du gaz, de l'eau et de l'électricité: le texte au Parlement d'ici octobre
  15. La lente progression de la loi sur la tarification progressive
  16. tarif de base, tarif confort, tarif superflu sur le parisien.fr
  17. Voir dépêche de l'AFP sur le site Romandie.com
  18. trĂŞve hivernale de l'Ă©nergie
  19. Ma tribune, le fioul
  20. Les "Sages" censurent le bonus-malus sur les tarifs de l'Ă©nergie

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