Schéma actantiel
En narratologie, le schéma actantiel[1], appelé aussi modÚle actantiel, rassemble l'ensemble des rÎles (les actants) et des relations qui ont pour fonction la narration d'un récit (un acte au théùtre). Il a été créé par Algirdas Julien Greimas en 1966[2].
Un personnage, le hĂ©ros, poursuit la quĂȘte d'un objet.
Les personnages, Ă©vĂ©nements, ou objets positifs qui l'aident dans sa quĂȘte sont nommĂ©s « adjuvants ». Les personnages, Ă©vĂ©nements ou objets nĂ©gatifs qui cherchent Ă empĂȘcher sa quĂȘte sont nommĂ©s « opposants ».
La quĂȘte est commanditĂ©e par un Ă©metteur (ou destinateur, ou Ă©nonciateur â voir l'article Ă©nonciation), au bĂ©nĂ©fice d'un destinataire. D'une façon gĂ©nĂ©rale, tous les personnages qui tirent profit de la quĂȘte sont les bĂ©nĂ©ficiaires.
Dans le schĂ©ma actantiel de Greimas, les rĂŽles actantiels, c'est-Ă -dire, Ă proprement parler, les « actants », ne doivent en aucun cas ĂȘtre confondus avec des « acteurs ». Les actants sont des positions au sein d'une structure ; ils se dĂ©finissent par leurs relations. Les acteurs d'une histoire, d'un conte, d'un roman⊠se dĂ©placent d'une position Ă l'autre et voyagent au sein de cette structure. De plus, les actants sont situĂ©s par Greimas sur 3 axes qui les relient de maniĂšre significative :
- le sujet et l'objet sont situĂ©s sur l'axe du dĂ©sir (ou de la quĂȘte) ;
- le destinateur et le destinataire sont situés sur l'axe de la communication ;
- les adjuvants et les opposants sont situés sur l'axe du pouvoir (pouvoir positif dans le cas des adjuvants, négatif dans le cas des opposants).
Le schĂ©ma actantiel doit ĂȘtre complĂ©tĂ© par la thĂ©orie des trois Ă©preuves, ou Ă©tapes formelles, de tout rĂ©cit (sur un axe temporel) :
- l'Ă©preuve qualifiante ;
- l'Ă©preuve principale ;
- l'Ă©preuve glorifiante.
Le destinateur est le plus souvent l'actant qui constitue la ou les valeurs au nom desquelles agit le sujet ; en effet, le sujet fait ou agit, tandis que le destinateur fait faire ou fait agir le sujet. En fin de rĂ©cit, c'est aussi le destinateur qui « sanctionne » la rĂ©ussite ou l'Ă©chec de la quĂȘte du sujet, c'est-Ă -dire l'obtention ou non de l'objet convoitĂ©.
Plusieurs rĂŽles peuvent ĂȘtre cumulĂ©s par un personnage, un objet ou un Ă©vĂ©nement ; ou ils peuvent ĂȘtre rĂ©partis entre plusieurs personnages, objets ou Ă©vĂ©nements.
Il peut y avoir plusieurs schĂ©mas actantiels dans un mĂȘme rĂ©cit, pour son ensemble â deux quĂȘtes ou plus sont menĂ©es conjointement par un ou plusieurs hĂ©ros â ou au cours du rĂ©cit, le hĂ©ros devant rĂ©aliser plusieurs quĂȘtes successives (rĂ©cits oĂč le hĂ©ros subit plusieurs Ă©preuves) ou une quĂȘte incidente prenant place dans l'histoire (rĂ©cits enchĂąssĂ©s).
Par exemple :
- Un roi (émetteur) demande à un chevalier (héros) d'aller chercher une fleur magique (objets), et la lui remettre (l'émetteur est ici le destinataire). Sur son chemin, le chevalier devra se protéger d'un orage (opposant) dans une grotte (adjuvant), puis combattre un dragon (opposant) qu'il tuera grùce à une épée magique (adjuvant) donnée par un lutin (adjuvant).
- Un vieil homme (émetteur et récepteur) demande à son petit-fils (héros) de lui voler un lama (objet) du cirque. Le petit garçon, dans son épopée, devra vaincre le terrible lion du cirque (opposant), mais sera aidé par son pÚre (adjuvant).
- Plus moderne : les commissaires Dupont et Dupond (Ă©metteurs) chargent de l'enquĂȘte notre hĂ©ros Tintin (hĂ©ros), afin de dĂ©couvrir le meurtrier de Tournesol (objet). Milou et le Capitaine Hadock (adjuvants) fourniront des indices, des preuves seront trouvĂ©es, un suspect (opposant) se croyant inculpĂ© tentera de tuer Tintin. Le coupable (opposant) sera confondu, s'ensuivra une course-poursuite et des Ă©changes de coups de feu avant l'arrestation et la remise du coupable au juge d'instruction (destinataire).
Par ailleurs, le schéma narratif canonique, proposé par Greimas, remplace en principe le modÚle actantiel[3].
Notes et références
- orthographe courante construite étymologiquement sur « actant », parfois écrit schéma actanciel (orthographe des dictionnaires usuels, construite avec le suffixe -ciel de "logiciel, didacticiel", mais non validé par le service du dictionnaire de l'Académie française
- Algirdas Julien Greimas, SĂ©mantique structurale, recherche et mĂ©thode, Ădition Larousse,
- Louis HĂ©bert (dir.), « Le schĂ©ma narratif canonique », Signo, Rimouski (QuĂ©bec),â (lire en ligne). Voir aussi Joseph CourtĂ©s, Analyse sĂ©miotique du discours : De l'Ă©noncĂ© Ă l'Ă©nonciation, Paris, Hachette, , p. 98-136, pour plus de dĂ©tails.
Articles connexes
Liens externes
- Louis Hébert (2006), Le ModÚle actantiel, Université du Québec à Rimouski (UQà R)
- Louis Hébert (2006), Le schéma narratif canonique, Université du Québec à Rimouski (UQà R)
- A.J. Greimas, « ĂlĂ©ments pour une thĂ©orie de l'interprĂ©tation du rĂ©cit mythique », Communications, vol. 8, no 8,â , p. 28-59 (lire en ligne).