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Mysophobie

La mysophobie[1] (du grec ancien : ÎŒÏÏƒÎżÏ‚ / mĂșsos « crime, souillure, impuretĂ© » et φόÎČÎżÏ‚ / phĂłbos « peur, phobie ») est une peur maladive et irrationnelle d'ĂȘtre en contact avec la saletĂ© ou d'ĂȘtre contaminĂ© par des microbes et des parasites. On parle aussi de germophobie[1], peur des germes.

Elle se manifeste par une rĂ©action obsessionnelle qui se traduit par le besoin de se laver les mains (se dĂ©sinfecter en gĂ©nĂ©ral) par crainte d’ĂȘtre touchĂ© d’une quelconque maladie infectieuse (exemple avec le Covid-19 rĂ©cemment). La mysophobie impacte la personne par de l’anxiĂ©tĂ© au quotidien.

Elle est diagnostiquée comme étant un TOC (Trouble Obsessionnel Compulsif) figurant dans le DSM IV (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) pour son caractÚre phobique.

Historique

Le terme de mysophobie a Ă©tĂ© utilisĂ© pour la premiĂšre fois par William A. Hammond en 1879 pour dĂ©crire plusieurs de ses patients souffrant d’un trouble obsessionnel compulsif qui les conduisait Ă  se laver les mains de façon compulsive. En particulier, William A. Hammond prĂ©sente le cas d’une patiente indiquant avoir dĂ©veloppĂ© ce trouble aprĂšs avoir lu un article relatif Ă  un homme qui aurait contractĂ© la variole aprĂšs avoir manipulĂ© des billets de banque qui auraient prĂ©cĂ©demment dans la possession d’une personne malade[2].

Le terme de mysophobie apparaĂźt Ă  nouveau quelques annĂ©es plus tard dans un texte de Sigmund Freud de 1895 « Obsessions et phobies, leur mĂ©canisme psychique et leur Ă©tiologie ». Sigmund Freud l’utilise pour dĂ©crire une femme « qui se lavait les mains cent fois par jour et ne touchait les loquets des portes que du coude »[3]

Symptomatologie[4]

Plusieurs signes peuvent ĂȘtre pris en compte. Il y a les symptĂŽmes communs Ă  d’autres phobies tels que de l’anxiĂ©tĂ©, des attaques de panique, des tremblements, des palpitations cardiaques, des pleurs, de la transpiration, un Ă©vitement conscient, 
 face Ă  la situation ou Ă  l’objet de la phobie. Des tensions, des attitudes de surcompensation, d’apprĂ©hension, des comportements contraphobiques ou de dĂ©fis vont faire place Ă  de l’anticipation anxieuse. Un isolement du sujet peut apparaĂźtre. L’évitement des situations entraĂźne des rĂ©percussions physiques, sociales, financiĂšres et mĂ©dicales importantes comme la dĂ©pression.

La mysophobie est Ă©troitement liĂ©e Ă  la nosophobie et selon l’intensitĂ© de la mysophobie,  il y aura des signes alarmants comme le lavage des mains rĂ©pĂ©titifs, plusieurs douches sur la journĂ©e, pas de partage nourriture, ni des toilettes publiques, 
 Le refus de partager des effets personnels est trĂšs prĂ©sent.

Voici un rĂ©sumĂ© de la symptomatologie de l’état obsessionnel :

  • Obsessions idĂ©atives phobiques impulsives.
  • Compulsions (actes contraints Ă  exĂ©cuter).
  • Rituels et vĂ©rifications. Ceux-ci contrĂŽlent l’emprise des obsessions ou des compulsions de valeur rĂ©paratrice ayant parfois un impact sur l’entourage.

Traitement/Prise en charge[5]

La mysophobie peut ĂȘtre associĂ©e Ă  des TOC pour la plupart des cas. C’est pourquoi, afin que les troubles ne s’aggravent, il est important d’ĂȘtre suivi pluridisciplinairement. DiffĂ©rentes prises en charge peuvent s’effectuer en fonction du degrĂ© d’atteinte:

  • L’approche cognitivo - comportementalisme

Le meilleur traitement est la combinaison de différentes thérapies:

    • La thĂ©rapie comportementale :. Cette  thĂ©rapie permet de comprendre le problĂšme plus que de traiter la phobie. Nous allons donc nous pencher sur la thĂ©rapie comportementale spĂ©cifique. Cette derniĂšre vise Ă  confronter dĂ©libĂ©rĂ©ment et volontairement Ă  l’idĂ©e redoutĂ©e. En parallĂšle, le patient est encouragĂ© Ă  ne pas reproduire ses rituels. Par la suite, la progression s’effectue par Ă©tape. Ici, l’un des rituels envahissants est le fait de se laver les mains. La procĂ©dure sera de toucher un objet sale et de ne pas se laver les mains pendant plusieurs heures. L’anxiĂ©tĂ© provoquĂ©e va diminuer progressivement. Étape par Ă©tape, guidĂ© par la capacitĂ© du patient Ă  supporter l’anxiĂ©tĂ© et Ă  contrĂŽler le rituel. Le but est de diminuer l’anxiĂ©tĂ© due aux pensĂ©es obsĂ©dantes et Ă  pouvoir rĂ©sister aux pulsions compulsives. Pour que cela fonctionne, il faut que le patient soit volontaire, motivĂ©, dĂ©terminĂ© et positif! La relation avec le thĂ©rapeute joue un rĂŽle considĂ©rable. Une fois le traitement terminĂ©, les effets positifs sont toujours prĂ©sents.
    • ThĂ©rapie cognitive : le but est d’amĂ©liorer les symptĂŽmes et d’aider le patient Ă  apprendre des mĂ©thodes pour faire face aux difficultĂ©s. La thĂ©rapie s’axe sur les problĂšmes psycho-internes et situationnels. Le nombre de sĂ©ances dĂ©pendra de l’anciennetĂ© du trouble. Lors des consultations, le thĂ©rapeute explique la dĂ©marche pour diminuer l’anxiĂ©tĂ©. Il est directif et didactique au cours des entretiens afin de faciliter la dĂ©finition et la rĂ©solution du problĂšme par des questions inductives. Au fur et Ă  mesure, le patient est exposĂ© Ă  des situations anxiogĂšnes. Le thĂ©rapeute travaille Ă©galement Ă  la prĂ©vention de rĂ©ponse afin de montrer que ritualiser n'entraĂźne aucune consĂ©quence mais augmente l’angoisse que le patient doit apprendre Ă  gĂ©rer. La thĂ©rapie cognitive aide la thĂ©rapie comportementale en prĂ©parant le terrain.


La combinaison de ces deux thĂ©rapies permet de  se libĂ©rer doucement de la mysophobie. L’objectif est de mieux gĂ©rer le passĂ©, l’environnement matĂ©riel et social, les projets, les anticipations, 
 du patient par des variables psychologiques (respiration, 
) et par des processus cognitifs (identifier et nĂ©gocier le schĂ©ma de la pensĂ©e dysfonctionnelle). Ce travail permettra l’apprentissage de nouveaux modes d’action (cognitifs, physiologiques et affectifs liĂ©s Ă  la mysophobie). DiffĂ©rentes mĂ©thodes seront utilisĂ©es telles que la sophrologie, la visualisation mentale , 
.

  • La psychothĂ©rapie

Longue et décevante, la psychothérapie humaniste (analyse transactionnelle par exemple) stimule au niveau des pulsions. Le thérapeute agit progressivement pour ensuite lever les barriÚres de défenses obsessionnelles contenant un noyau psychotique. Le patient sera exposé peu à peu au stimuli habituel et à une dissuasion de compulser.

  • La pharmacologie

Toute mĂ©dicamentation qui affecte le systĂšme neurotransmetteur et les antidĂ©presseurs sĂ©rotoninergiques rĂ©duisent fortement les symptĂŽmes. Ils permettent de rĂ©duire la frĂ©quence et la gravitĂ© des obsessions.Un arrĂȘt du traitement entraĂźne une rechute. Ce type de traitement est dans la majoritĂ© des cas Ă  prendre indĂ©finiment mais avec une posologie plus faible.

Ce traitement consiste Ă  de la chimiothĂ©rapie et s’effectue sous la prise d'antidĂ©presseurs basiques comme la Clomipramine et par des antidĂ©presseurs de seconde gĂ©nĂ©ration tels que les sĂ©rotoninergiques.

  • L’hospitalisation

L’hospitalisation est nĂ©cessaire si un constat d'aggravation des symptĂŽmes (par exemple, passer une demi-journĂ©e Ă  faire sa toilette) ou une rĂ©gression avec des pensĂ©es suicidaires.

  • Stimulation cĂ©rĂ©brale profonde

Pour les cas sĂ©vĂšres et rĂ©sistants, cette technique consiste Ă  placer des Ă©lectrodes au niveau du cerveau. Ces Ă©lectrodes sont reliĂ©es Ă  un boĂźtier situĂ© sous la peau. Ce systĂšme envoie un courant Ă©lectrique de faible intensitĂ©. Cela va provoquer diffĂ©rentes actions au niveau de la perception. Les sites stimulĂ©s varient cependant suivant l’indicateur.

La crise sanitaire / Covid

Les germes du Covid19 se transmettent facilement et chacun souhaite se protĂ©ger comme il peut, au moyen d’un masque et en se lavant les mains.  Le fait de se laver frĂ©quemment les mains avec de l’eau et du savon fait partie des mesures les plus Ă©conomiques, les plus faciles et les plus importantes pour prĂ©venir la propagation du virus. Toutefois, quand on est sujet Ă  la phobie des germes, appelĂ©e mysophobie , la pandĂ©mie du coronavirus est plus difficile Ă  vivre.

Au moment du dĂ©confinement, nous avons observĂ© ce qui a Ă©tĂ© appelĂ© le Syndrome de la cabane ou d’un phĂ©nomĂšne semblable aux Hikikomori[6], qui implique un enfermement et un isolement ou syndrome de l’escargot[7], poussant les personnes Ă  ne pas changer leurs habitudes, notamment de peur d’ĂȘtre confrontĂ© Ă  une contamination, qui bien que vaccinĂ©s, restait encore possible.

Il est Ă©vident que la pandĂ©mie a fait Ă©merger des comportements pathologiques, et notamment a trouvĂ© un terrain favorable aux personnes dĂ©jĂ  atteintes de mysophobie. Certains tĂ©moignages peuvent l’attester: TOCs de propretĂ© et Covid-19: « Ça exacerbe quelque chose qui Ă©tait dĂ©jĂ  prĂ©sent » - URBANIA FR[8]

Il a été également remarqué que les ventes de savons ont explosé dans un premier temps[9] - [10] :

Cette peur de la contamination en gĂ©nĂ©ral a poussĂ© des personnes atteintes de cette pathologie Ă  se laver les mains de façon obsessionnelle, parfois pendant des heures mais non pas pour rĂ©duire le risque de contamination Ă  cause de mains sales, mais bien pour se rĂ©conforter, en suivant un rituel prĂ©cis, face Ă  une peur irrationnelle, qui elle a trouvĂ© son impulsion dans l’épidĂ©mie.

Cependant, la  question de savoir si la pandĂ©mie a augmentĂ© le nombre de cas de mysophobie, les psychologues semblent s’accorder sur le fait que le coronavirus n’a fait que mettre en valeur des comportements qui peuvent engager une pathologie dans le cas de personnalitĂ©s prĂ©disposĂ©es : un TOC ne se dĂ©clare pas du jour au lendemain. Il s’agit d’une action qui devient rituel, dans le but unique de trouver une rĂ©ponse Ă  une peur.

Notes et références

  1. « mysophobie », Grand Dictionnaire terminologique, Office québécois de la langue française (consulté le ).
  2. Bonnie Ellen Blustein, Hammond, William Alexander (1828-1900), neurologist, Oxford University Press, coll. « American National Biography Online », (lire en ligne)
  3. « Revenant de la mémoire Freud et Shakespeare »
  4. Delbrouck, Michel, auteur., Psychopathologie (ISBN 978-2-8073-1340-8 et 2-8073-1340-X, OCLC 1126281629, lire en ligne)
  5. LeclÚre, Maryvonne., Tocs et Phobies : Comprendre pour mieux en guérir., Larousse, (ISBN 978-2-03-585865-8 et 2-03-585865-8, OCLC 1015622374, lire en ligne)
  6. Chapitre 14. Le phénomÚne Hikikomori | Cairn.info
  7. « Covid-19 : ces personnes qui choisissent de rester confinĂ©es, des Hikikomori ? Discussion avec Sara SAIDI, journaliste – RĂ©silience PSY » (consultĂ© le )
  8. Nicolas Sidoroff, « Faire quelque chose avec ça que je voudrais tant penser », Agencements, vol. N° 1, no 1,‎ , p. 41–72 (ISSN 2608-5739, DOI 10.3917/agen.001.0041, lire en ligne, consultĂ© le )
  9. « Coronavirus : les ventes de savon explosent », sur Franceinfo, (consulté le )
  10. « Savon de Marseille »

Voir aussi

Articles connexes

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