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Makea Takau Ariki

Makea Nui Takau Ariki (1840-1911) est une souveraine des Îles Cook. Elle fut l’Ariki de la dynastie des Makea Nui Ariki, une des trois chefferies de la tribu de Teauotonga, sur l’üle de Rarotonga. Elle succĂ©da Ă  son oncle Makea Abela Ariki en 1871.

Makea Takau Ariki
Titres de noblesse
Ariki
Reine
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs
SĂ©pulture
Nationalité
Activité
MĂšre
Makea Te Vaerua Ariki (en)
Conjoint
Ngamaru Rongotini Ariki (en)

Les parents de Makea Takau

La grande majoritĂ© des sources reconnaissent Makea Nui Davida Ariki, qui fut Ariki de a tribu de 1839 jusqu’à son dĂ©cĂšs en 1845, comme son pĂšre biologique. NĂ©anmoins selon le rĂ©cit Maretu, elle Ă©tait la fille de Makea Te Vaerua, la sƓur de celui-ci[1]. Marjorie Tuainekore Crocombe qui a traduit et publiĂ© ce rĂ©cit en 1983, ajoute en note que Makea te Vaerua serait en rĂ©alitĂ© « la mĂšre classificatoire de Makea Takau »[2]. Makea Takau n’ayant que 5 ans au dĂ©cĂšs de son pĂšre, il est en effet probable, que sa tante l’ait adoptĂ©e (‘angai), comme cela est assez courant dans de telles circonstances en PolynĂ©sie.

Quant Ă  sa mĂšre biologique, il semblerait qu’il rĂšgne lĂ  encore un certain flou. Si de nombreux tĂ©moignages contemporains affirment que celle-ci appartenait Ă  la famille Manarangi, il n’est pas certain qu’elle fut l’épouse lĂ©gitime de Makea Davida. Ce qui pourrait sembler n’ĂȘtre qu’un dĂ©tail fut nĂ©anmoins l’un des arguments utilisĂ©s Ă  plusieurs reprises et jusqu’à aujourd’hui par ceux qui nient aux descendants de Makea Takau le droit de prĂ©tendre au titre de Makea Nui. DĂ©jĂ  en 1905, Walter Edward Gudgeon, RĂ©sident Commissaire nĂ©o-zĂ©landais aux Ăźles Cook Ă©crivait Ă  ce propos dans son journal :

"She is not a Makea at all. She is a mere mission fake. Her mother was a woman of the household of Manarangi
to whom Makea Davida took a fancy 
 the child is the present Makea, elected by the power of Manarangi and the mission over the rightful heirs, for these Jesuists of the South Seas, the LMS, knew the benefit of a woman ariki to the church."[3]

Il est nĂ©cessaire de prĂ©ciser que Gudgeon Ă©tait alors en conflit avec Makea Takau, aprĂšs l’avoir soutenue pendant plusieurs annĂ©es et mĂȘme manipulĂ©e pour qu’elle acceptĂąt l’annexion.

Son mariage

Son Ă©poux, Ngamaru Rongotini Ariki

Makea Takau Ă©pousa dans les annĂ©es 1860 Ngamaru Rongotini Ariki, l’un des trois grand chefs d’Atiu (Ngati Te Akatauira). D’aprĂšs Beatrice Grimshaw qui la visita en 1907, peu de temps aprĂšs le dĂ©cĂšs de Ngamaru, il semble que ce fut un mariage heureux.

"Their married life was a happy one, in spite of the Prince (Ngamaru) violent character, and when he died, the widowed queen took all her splendid robes of velvet, silk, and satin gorgeously trimmed with gold, tore them in fragments, and cast them into his grave, so that he might lie soft, as befitted the prince who had been loved so well by such a queen."[4]

Son rĂšgne (1871-1911)

Le rĂšgne de Makea Takau dura 40 annĂ©es Ă  une pĂ©riode particuliĂšrement cruciale de l’histoire de Rarotonga et des Ăźles Cook. C’est en effet sous son rĂšgne que l’archipel devint en 1888 un protectorat britannique avant d’ĂȘtre annexĂ© par la Nouvelle-ZĂ©lande en 1901.

Les premiÚres années (1871-1888)

C’est en 1871, alors ĂągĂ©e de 31 ans, que Makea Takau succĂ©da Ă  son oncle Makea Abela Ariki. Elle put accĂ©der au titre grĂące en particulier au soutien du RĂ©vĂ©rend James Chalmers, missionnaire de la London Missionary Society, en poste Ă  Rarotonga de 1867 Ă  1877.

D’une taille imposante pour une femme, plus d’1 mĂštre 93, ses sujets Ă©prouvaient Ă  son Ă©gard, Ă  en croire B. Grimshaw un certain respect mĂȘlĂ© de crainte.

" 'Makea, she never rude, because she great chief', said a relation of the royal family to me one day. 'She never say to any one, you go die ! I think. She only saying, some time, 'I wish I never seeing you again !' and then the people he go away, very sorry, and by-n’ by he die - some day, some week, I don’t know - but he dying all right, very quick, you bet !"[5]

Palais et "pavillon d'été" de Makea Takau

Bien qu’elle possĂ©dĂąt une maison de style europĂ©en, le fameux Palais Makea (Para o Tane)[6], situĂ© aujourd’hui en plein centre d’Avarua, elle prĂ©fĂ©rait habiter dans sa case traditionnelle qu’elle s’était amĂ©nagĂ©e juste Ă  cĂŽtĂ© et que Beatrice Grimshaw dĂ©crit pudiquement comme un pavillon d’étĂ©[7].

En 1885, elle se rendit avec son Ă©poux Ă  Auckland, Ă  l’invitation des autoritĂ©s nĂ©o-zĂ©landaises qui avaient des vues sur l’archipel craignant que les Français, dĂ©jĂ  prĂ©sents aux Ăźles de la SociĂ©tĂ©, s’en emparent. Elle y fut reçue en grande pompe et prĂ©sentĂ©e comme la Reine de Rarotonga et son Ă©poux comme le Roi d’Atiu, Mauke et Mitiaro. Bien qu’elle fit savoir qu’elle ne voyait aucun inconvĂ©nient Ă  un rapprochement de son "Royaume" avec le Nouvelle-ZĂ©lande, elle refusa de s’engager plus avant. Durant ce sĂ©jour, elle se rendit Ă©galement Ă  Waikato accompagnĂ©e du Gouverneur Sir George Grey, afin de rencontrer le roi maori Tawhiao I. Ce dernier refusa de rencontrer la dĂ©lĂ©gation, ce qui semble-t-il vexa profondĂ©ment Makea Takau et Ngamaru. Une cĂ©rĂ©monie d'accueil fut tout de mĂȘme organisĂ©e sous l'Ă©gide des deux fils de Tawhio, Mahuta Tawhio qui succĂ©dera Ă  son pĂšre et Ngaho[8]

De retour sur Rarotonga, alors que la menace française se faisait ou Ă©tait ressentie comme de plus en plus pressante[9], elle cosigna avec Tinomana Mereana Ariki, les chefs d’Aitutaki et son Ă©poux, une pĂ©tition demandant la protection de la couronne britannique. En , l'annonce par le Capitaine Elliot, du schooner "Nassau"[10] de l'arrivĂ©e imminente d'un man'o'war (navire de guerre) français prĂ©cipita les Ă©vĂšnements. Le vice-consul britannique en poste Ă  Rarotonga, Richard Exham, proposa alors Ă  Makea Takau de hisser l'Union Jack Ă  Avarua. NĂ©anmoins, celle-ci restait mĂ©fiante craignant que l'on cherche Ă  la tromper par une fausse nouvelle. Elle finit par accepter Ă  condition de dĂ©ployer elle-mĂȘme le drapeau et seulement lorsque le navire apparaĂźtrait.

"The old lady was, however, very wary. She 'um'd and ah'd [sic] about things, but it was only her suspicion that perhaps the whole story might be a fabrication to trick her into unfurling the British Flag and thereby surrender her power in the eyes of the native people. But eventually we were able to satisfy here that our fears were genuine. With her consent it was decided that the British Flag should be hoisted at Avarua, with this stipulation, that she, herself, would do the actual unfurling of the flag but not until the expected warship had put in an appearance."[11]

Deux jours plus tard, le , un navire de guerre français arriva effectivement en vue des cĂŽtes de Rarotonga. Makea Takau dĂ©ploya alors le drapeau qui avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© hissĂ©, faisant de facto passer l'Ăźle sous protectorat britannique. Le HMS Hyacinth du capitaine Edmund Bourke fut dĂ©pĂȘchĂ© en urgence Ă  Rarotonga. ArrivĂ© sur place le , une nouvelle cĂ©rĂ©monie de levĂ©e de drapeau, Ă  laquelle assistait Makea Takau, vint officialiser la proclamation.

Le protectorat (1888-1901)

Frederick Joseph Moss fut nommĂ© RĂ©sident Britannique aux Ăźles Cook. Il arriva Ă  Rarotonga en . TrĂšs vite, il mit en place une organisation fĂ©dĂ©rale avec un Parlement et un gouvernement, le Conseil exĂ©cutif Ă  la tĂȘte duquel fut nommĂ©e Makea Takau. NĂ©anmoins, Moss s’appuyait essentiellement dans la gestion des affaires courantes du pays sur Makea Vakatini Tepou o te Rangi Ariki, l’ariki en titre de la lignĂ©e des Makea Vakatini Ariki. Il lui confia ainsi plusieurs responsabilitĂ©s importantes en le nommant "Chief Judge" et responsable des finances de la FĂ©dĂ©ration. Cela attisa la jalousie de Makea Takau qui estimait que les Vakatini Ariki lui Ă©taient infĂ©rieurs. À cela s’ajoutait l’opposition croissante entre Moss et J.J.K Hutchin, missionnaire de la LMS en poste Ă  Rarotonga, ce dernier ayant une emprise certaine sur Makea Takau. En 1897, il n’eut aucun mal Ă  la convaincre, elle et la plupart des autres Ariki, de signer une pĂ©tition envoyĂ©e au Colonial Office nĂ©o-zĂ©landais demandant le renvoi de Moss. Celui-ci fut finalement remplacĂ© en tant que RĂ©sident britannique par Walter Edward Gudgeon en .

(De gauche Ă  droite) Ngamaru Rongotini Ariki (Atiu), Louisa Jane Seddon, Makea Takau Ariki et Richard Seddon Premier Ministre de Nouvelle-ZĂ©lande lors de son passage Ă  Rarotonga en juin 1900.

Sachant habilement flatter Makea Takau, Gudgeon rĂ©ussit Ă  gagner peu Ă  peu sa confiance et la convaincre de l’utilitĂ© d’une annexion. Toutefois pour Makea Takau, trĂšs admirative de la Reine Victoria qu’elle considĂ©rait comme son Ă©gale, si annexion il devait y avoir, elle devait ĂȘtre le fait du Royaume-Uni et non de la Nouvelle-ZĂ©lande. Ainsi lors du passage Ă  Rarotonga du Premier Ministre nĂ©o-zĂ©landais, Richard Seddon en , elle lui dĂ©clara :

"It is our desire that we should form part of the British Empire and become one with the British people
 We wish his lordship to understand that it is to Great Britain that we wish to be annexed, not to New Zealand" [12]

Gudgeon finit nĂ©anmoins par l’amadouer lui expliquant qu’une annexion par la Nouvelle-ZĂ©lande Ă©tait de toute maniĂšre la mĂȘme chose qu’une annexion britannique, mais lui promettant Ă©galement que son pouvoir en serait renforcĂ© et le mana des Ariki sur les terres, conservĂ©. Le , le Colonial Office reçut une pĂ©tition signĂ©e des Ariki de Rarotonga ainsi que de l’époux de Makea Takau, Ngamaru Rongotini Ariki, demandant l’annexion des Ăźles Cook par la Nouvelle-ZĂ©lande.

Le gouvernement nĂ©o-zĂ©landais dĂ©cida d’envoyer immĂ©diatement sur place, Lord Ranfurly Ă  bord du Mildura. Le navire arriva Ă  Rarotonga le . Le lendemain, Ranfurly lut au Palais Makea en prĂ©sence de tous les Ariki, la dĂ©claration d’annexion. Une mĂȘme cĂ©rĂ©monie eut lieu par la suite dans les autres Ăźles de l’archipel. Ce n’est nĂ©anmoins qu’en , lors du passage du futur George V en Nouvelle-ZĂ©lande que l’annexion fut officialisĂ©e.

Makea Takau de l’annexion Ă  son dĂ©cĂšs (1901-1911)

Les relations entre Makea Takau et Gudgeon continuĂšrent d’ĂȘtre cordiales durant les premiĂšres annĂ©es suivant l’annexion. Elle fut confirmĂ©e comme chef du gouvernement qui conservait une organisation fĂ©dĂ©rale. Gudgeon en tant que Chief Judge du tout nouveau tribunal Foncier, lui reconnut Ă©galement un grand nombre de terres, parfois mĂȘme au dĂ©triment des lĂ©gitimes propriĂ©taires. Leurs rapports se dĂ©tĂ©riorĂšrent nĂ©anmoins peu Ă  peu Ă  partir de 1905. Gudgeon tenta en effet Ă  cette date, d’éroder le pouvoir des Ariki en jouant bien souvent sur leur rivalitĂ©. Il instaura ainsi un nouveau systĂšme de Conseils Insulaires dont les membres Ă©taient cette fois-ci Ă©lus. Il abolit en 1908 les cours de justice de district qui reprĂ©sentaient par les amendes prononcĂ©es, une manne financiĂšre non nĂ©gligeable pour les Ariki (cf. Blue Laws). Il tenta mĂȘme de retirer Ă  Makea Takau sa charge de chef de gouvernement. En vain, le gouvernement nĂ©o-zĂ©landais soucieux de respecter les promesses faites lors de l’annexion s’y opposa. Elle conserva son poste jusqu’à son dĂ©cĂšs en 1911, date Ă  laquelle son fils, Rangi Makea Ariki, lui succĂ©da au titre de Makea Nui Ariki

Voir aussi

Bibliographie

  • Dick Scott, "Years of the Pooh-bah, a Cook Islands history", CITC, Rarotonga. 1991.
  • Beatrice Grimshaw, "In the strange South seas, travel and adventure of an Irish woman in the south Pacific in 1907", 1908.
  • Richard Gilson, "The Cook islands, (1820-1950)", edited by Ron Crocombe, USp, 1980.

Articles connexes

Notes

  1. Maretu, "Cannibals and Converts", p.97.
  2. ibid
  3. CitĂ© par Dick Scott, “Years of the Pooh-Bah”, p.99
  4. In the strange south seas, Beatrice Grimshaw, p. 71
  5. Beatrice Grimwhaw p. 73
  6. Construit dans les années 1830 par Makea Pori, il fut restauré en 1903.
  7. Il semble en effet que la mort de l'un de ses fils dans la demeure, l'avait rendue tabou
  8. Récit de son séjour en Nouvelle-Zélande, Te Korimako n°46, du 16 novembre 1885 et Waikato Times, Volume XXV, Issue 2075, 24 October 1885, Page 2
  9. Depuis le dĂ©but des annĂ©es 1880, un nombre croissant de navires marchands français dĂ©fendant le point de vue auprĂšs de la population d’un rapprochement avec Tahiti, faisait escale dans l’archipel. S’ajoutaient Ă  cela, les ambitions missionnaires de l’évĂȘque catholique de Tahiti, Tepano Jaussen, lesquelles paniquaient les missionnaires de la LMS , George Harris, William Lawrence, John J. K. Hutchin. Il semble toutefois qu’il s’agissait lĂ  d’initiatives personnelles et qu’aucun gouvernement de la TroisiĂšme RĂ©publique, dĂ©jĂ  en butte Ă  des difficultĂ©s aux Ăźles sous le Vent, n’ait envisagĂ© ou n'ait donnĂ© d'instructions officielles de coloniser les Ăźles Cook, appelĂ©es Ă  l'Ă©poque Ăźles Hervey
  10. Le navire appartenait à une firme commerciale allemande basée à Tahiti qui avait l'habitude de faire la traversée entre Rarotonga et Pape'ete
  11. "Narrative of Charles James Ward" , Hoisting of the British Flag at Rarotonga and other Islands
  12. Cité par Dick Scott p. 79.
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