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Le RĂŞve de Dickens

Le Rêve de Dickens, en anglais Dickens’ Dream, est un tableau de Robert William Buss commencé en et laissé inachevé par la mort de l’artiste en . Il est conservé au musée Charles Dickens à Oxford.

Le RĂŞve de Dickens
Artiste
Date
Matériau
aquarelle (d)
Dimensions (H Ă— L)
90,5 Ă— 111 cm
No d’inventaire
DH111
Localisation

Pour célébrer le bicentenaire de la naissance de l’écrivain, Londres présente une exposition dans laquelle la ville quotidienne londonienne tient le premier rôle qui a alimenté l'œuvre de l'écrivain. Le tableau montre Dickens assis dans son bureau, en train de rêver. Une minuscule fillette (La Petite Dorrit) est posée sur ses genoux[1].

Description

Dickens’s Dream est une représentation célèbre de Dickens par Buss[2]. À l’annonce de la mort de Charles Dickens en , Buss a tenté de dépeindre l’écrivain assis dans son étude de Gads Hill Place en train de s’assoupir au milieu des nombreux personnages qu’il avait créés, mais lui aussi est mort avant d’avoir pu terminer cette grande aquarelle. Buss avait déjà tenté de se confronter avec l’œuvre de Dickens. Encore jeune artiste, il avait été choisi pour illustrer la série des Papiers posthumes du Pickwick Club, mais, à sa grande déception, ses essais avaient été jugés insatisfaisants[3].

Dickens n’était pas un sujet facile Ă  peindre, notamment parce que ses traits Ă©taient exceptionnellement mobiles[4]. Comme dans les photographies prises de lui-mĂŞme, il reconnaissait la ressemblance, tout en sentant que quelque chose manquait[4]. L’aquarelle de Buss le dĂ©peint assis, les yeux ouverts, mais ne percevant rien de ce qui est autour de lui : tout entier absorbĂ© par son rĂŞve sur ses personnages, il ne distingue que le spectacle que lui offre son imagination intĂ©rieure[3]. Ce faisant, l’aquarelle inachevĂ©e de Buss dĂ©montre la perception victorienne de Dickens comme celle d’un Ă©crivain douĂ© d’une crĂ©ativitĂ© hallucinatoire[5]. Or cette zone, singulièrement vitale, qu’est la vie intĂ©rieure de l’auteur, dans la mesure oĂą elle fournit la source de l’impulsion crĂ©atrice de leur sujet littĂ©raire, reste essentiellement inaccessible aussi bien au biographe qu’au portraitiste[3]. Toute entreprise biographique demeure donc par essence vouĂ©e Ă  rĂ©vĂ©ler peu de choses sur le monde inconnu de l’intĂ©rieur de l’esprit de l’auteur[3]. Buss rĂ©agit Ă  cette impossibilitĂ© fondamentale, de pouvoir accĂ©der Ă  que l’on voudrait le plus connaitre, par l’évocation de ses personnages[6]. Le romancier est donc dĂ©peint dans son fauteuil dans sa bibliothèque Ă  Gads Hill Place avec la Petite Dorrit sur le genou, Paul Dombey et Little Nell immĂ©diatement Ă  sa droite, et la plupart des autres crĂ©atures de son imagination autour de lui[6]. En ce sens, l’aquarelle de Buss est un montage dont la source est Ă  rechercher dans un certain nombre d’images regroupĂ©es dans une prĂ©sentation unique[7]. Luke Fildes avait, par exemple, publiĂ© un dessin commĂ©moratif de la bibliothèque de Dickens, intitulĂ© The Empty Chair, dans le numĂ©ro de NoĂ«l 1870 du Graphic, qui fut ensuite vendu en masse sous la forme de gravure[4]. C’est sur cette reprĂ©sentation que Buss a reprĂ©sentĂ© le romancier entourĂ© de ses personnages tourbillonnant dans son imagination. De mĂŞme, le portrait de Dickens vient de la photographie prise du romancier en 1861 par John et Charles Watkins. L’univers des personnages dans lesquels Dickens rĂŞve est dĂ», entre autres, Ă  Cruikshank[7]. Dickens devient donc lui-mĂŞme le rĂŞveur crĂ©atif central : la magie de l’art du portrait l’élève au-dessus de la chair pour lui permettre de prendre part aux interactions Ă©ternelles de ses propres crĂ©ations[8]. Lorsque Dickens entre dans le cadre de sa propre personne, il commande simultanĂ©ment Ă  ses personnages et se transfigure Ă  leur contact : l’auteur pĂ©rira, mais son humanitĂ© de rĂŞveur sera, en revanche, transcendĂ©e pour ne faire qu’un avec le personnage. Dans la double dĂ©ification rĂ©alisĂ©e par cette iconographie, Dickens est donc Ă  la fois surnaturellement douĂ© d’un rĂ´le quasi-divin de crĂ©ateur de personnages et implicitement bĂ©atifiĂ© par ses personnages[8].

Notes

  1. Philippe Lançon, « Charles Dickens, homme de Londres », sur http://www.liberation.fr/, Libération,
  2. (en) Dehn Gilmore, The Victorian novel and the space of art : fictional form on display, New York, Cambridge University Press, 2013, ix, 242 p. (ISBN 978-1-10704-422-7), p. 51.
  3. (en) Michael Benton, Literary Biography : An Introduction, Malden, Wiley-Blackwell, 2009, x, xx, 253 p. (ISBN 978-1-40519-446-4), p. 106.
  4. (en) Sally Ledger, Holly Furneaux, Charles Dickens in Context, Cambridge ; New York, Cambridge University Press, 2011, xxi, 405 p. (ISBN 978-0-52188-700-7), p. 155.
  5. (en) Shane McCorristine, Spectres of the self : thinking about ghosts and ghost-seeing in England, 1750-1920, Cambridge ; New York, Cambridge University Press, 2010, x, 275 p. (ISBN 978-0-52176-798-9), p. 63.
  6. (en) Donald Hawes, Who’s Who in Dickens, Hoboken, Taylor & Francis, 2013, (ISBN 978-1-28040-801-4).
  7. (en) Gillian Piggott, Dickens and Benjamin : moments of revelation, fragments of modernity, Burlington, Ashgate, 2012, (ISBN 978-1-40942-202-0).
  8. (en) Nina Auerbach, Woman and the demon : the life of a Victorian myth, Cambridge, Harvard University Press, 1982, xi, 255 p. (ISBN 978-0-67495-406-9), p. 202.

Bibliographie

  • (en) Nina Auerbach, Woman and the demon : the life of a Victorian myth, Cambridge, Harvard University Press, 1982, xi, 255 p. (ISBN 978-0-67495-406-9). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Michael Benton, Literary Biography : An Introduction, Malden, Wiley-Blackwell, 2009, x, xx, 253 p. (ISBN 978-1-40519-446-4). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Dehn Gilmore, The Victorian novel and the space of art : fictional form on display, New York, Cambridge University Press, 2013, ix, 242 p. (ISBN 978-1-10704-422-7). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Donald Hawes, Who’s Who in Dickens, Hoboken, Taylor & Francis, 2013, (ISBN 978-1-28040-801-4). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Sally Ledger, Holly Furneaux, Charles Dickens in Context, Cambridge ; New York, Cambridge University Press, 2011, xxi, 405 p. (ISBN 978-0-52188-700-7). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Shane McCorristine, Spectres of the self : thinking about ghosts and ghost-seeing in England, 1750-1920, Cambridge ; New York, Cambridge University Press, 2010, x, 275 p. (ISBN 978-0-52176-798-9). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Gillian Piggott, Dickens and Benjamin : moments of revelation, fragments of modernity, Burlington, Ashgate, 2012, (ISBN 978-1-40942-202-0). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article

Liens externes

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