Laura Fredducci
Laura Fredducci (née le à Fréjus, mort le à Paris) est une peintre française post-romantique qui fréquenta les cénacles romantiques parisiens et participa à la Société nationale des beaux-arts. Elle fut, plus encore que Madame du Châtelet en son temps, la figure féminine qui marqua par sa plume, son pinceau et son charme, les arts et les lettres en France au XIXe siècle.
Biographie
Née dans une famille républicaine sous Napoléon 1er, élevée à la lecture de Voltaire et de Diderot, Laura Fredducci se sentira très tôt attirée par le romantisme artistique qui s'élève en France. À 13 ans, à l'école des bonnes-sœurs de Colombey-les-deux-églises, elle compose son tout premier poème d'inspiration pastorale : Le rouet d'Omphale. En 1830, après avoir suivi des cours de peinture et de musique, elle se consacre définitivement à l'œuvre picturale et décide, contre l'avis de ses parents, d'aller à Paris. Elle y rencontre celle qui sera sa "grande amie", Marie Nodier, et participe alors aux cénacles romantiques où se rencontrent des personnalités comme Chopin, Victor Hugo, Lamartine et celui qui la révélera, Delacroix. D'une beauté et d'une intelligence rares, elle deviendra rapidement la muse de nombre de poètes, et on estime par ailleurs que le célèbre sonnet d'Arvers lui était adressé. Son quotidien se partagera dès lors entre l'activité artistique et son amour pour un acteur de la Comédie-Française, Pierre-André Lidlia.
En 1848, elle participe aux révolutions populaires, ce qui l'emmène à s'exiler de France au côté de Victor Hugo lors de la prise de pouvoir de Napoléon III. Elle rejoint la Belgique plusieurs années auprès de sa famille puis décide, à la suite de l'amnistie accordée par l'empereur, de retourner à Paris en . En 1862, en reconnaissance de son œuvre, et contre l'avis de Charles Baudelaire (on présume certaines références à cet évènement dans la dernière édition des Fleurs du mal du vivant de l'auteur), elle participe à la création de la Société nationale des beaux-arts. En 1870, elle s'engage en tant que médecin à la Commune de Paris, ce qui lui vaudra l'aversion des cercles parisiens, à l'exception notable de Victor Hugo (pour qui la Commune de Paris est une "bonne chose mal faite"). Mariée et mère de deux enfants, elle suivra une nouvelle fois Victor Hugo dans la mort en décédant le jour de son quatre-vingt troisième anniversaire (l'écrivain français était né en 1802), le , année également de sa mort. Le peintre Gustave Courbet prononcera en son honneur un éloge funèbre.
Œuvre
Adepte de musique et de poésie, le pinceau de Laura Fredducci se voulait à la fois plume et archet. On trouve dans ses carnets (un premier dit "brun", qui débute en 1835 et se termine en 1848, date des premières révoltes populaires, et un second, dit "bleu", qu'on estime avoir été tenu depuis la mort de Delacroix, c'est-à-dire en 1863) de profondes et longues réflexions sur la "religion cosmique" et le "contenu spirituel" de la peinture. Amatrice de l'estampe japonaise, et notamment des "montagnes célestes" esquissées par Nodytsu (ce qu'on a appelé les Romances sans Paroles asiatiques), elle donnera à son style toute une épreuve cérémonielle et psychologique, conduisant à la création du "geste pur et rempli de souffle", seul à même d'imiter le mouvement de la nature.
Amie de Berlioz et plus tard admiratrice de Liszt, elle a souhaité former un nouveau genre artistique inspiré des Poèmes symphoniques : un poème pictural et symphonique.
Dans cette peinture, Magnitudo Parvi (1853), inspirée par un poème de Victor Hugo, le paysage entier est subordonné au sentiment qui nimbe la lecture du poème (d'où un poème pictural), mais qui doit vivre dans la toile comme serpente et ondule une mélodie dans l'air frais du soir (d'où une peinture symphonique). L'œuvre, qui doit être peinte en un minimum de temps, afin de saisir dans une série de gestes qui se veulent spirituels et ritualisés l'essence supérieure du Verbe de la nature, recèle alors, par-delà le classicisme et le romantisme, une valeur symbolique et, déjà, impressionniste.
Jouissant d'une certaine renommée à son époque, l'œuvre picturale de Laura Fredducci, d'une inexprimable beauté, d'aucuns ont parlé d'un "œcuménisme du trait sacré et du frisson onirique" (Henri Wallon, dans les Lettres de la République du ) s'est aujourd'hui perdue, et avec elle son œuvre écrite théorique, qui n'est pas sans rappeler les écrits de van Gogh. En , une exposition "Laura Fredducci : La dentelle du temps et de l'espace" a eu lieu à l'Espace Monet de Villeneuve-Loubet, accompagnée d'une collection d'aquarelle de Manet.