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Julien-Marie Lehuërou

Julien-Marie Lehuërou, né le à Kernigoual et mort le à Nantes, est un historien français.

Julien-Marie Lehuërou
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  36 ans)
Nantes
Nationalité
Formation
Activité

Biographie

D’une famille de propriétaires-cultivateurs riches et considérés, Lehuërou perdit sa mère à six ans et son père à neuf ans. Sa vocation s’annonça de bonne heure. Enfant, il préférait la lecture aux jeux bruyants de son âge, dévorant les livres à dix ans. Frappé de ses dispositions précoces, l’abbé Le Luyer, qui lui avait donné les premiers éléments de l’instruction primaire, avait fortement engagé la famille à les faire cultiver. En 1819, il entra en pension au collège de Tréguier, où il trompait la surveillance de ses maitres en allumant une chandelle au milieu de la nuit pour reprendre la lecture de ses livres. De Tréguier, il passa par le collège de Saint-Brieuc, et de là au collège de Rennes, pour terminer ses études, en 1825, à dix-huit ans. À la fin de ses études, il choisit l’enseignement et entra à l’École préparatoire, à la section des lettres.

À l’École préparatoire (promotion 1826)[1], sa vocation pour l’histoire fut éveillée par Michelet[Note 1], qui venait d’y entrer comme professeur. Ayant passé l’agrégation des lettres en 1828, il reçut le même titre pour l’histoire et la géographie, en 1835. D’abord attaché au collège Bourbon (classe élémentaire), il fut ensuite appelé à l’enseignement de l’histoire au collège Saint-Louis (1830).

En 1832, il retourna en Bretagne pour professer l’histoire au collège de Nantes. Trois ans après, il passa avec les mĂŞmes fonctions au collège de Rennes et espĂ©ra mĂŞme un instant obtenir la chaire d’histoire, lors de la crĂ©ation de la FacultĂ© des lettres de Rennes en 1838, mais sans succès. En 1838, il produisit la thèse De l’établissement des Francs dans la Gaule, et du gouvernement des premiers mĂ©rovingiens jusqu’à la mort de Brunehaut Ă  l’universitĂ© de Caen, et continua par des travaux d’érudition sur les origines historiques et linguistiques de la Gaule. Alphonse Marteville publia ses Origines celtiques comme une sorte de frontispice Ă  son Ă©dition du Dictionnaire historique et gĂ©ographique de la province de Bretagne d’OgĂ©e. Les Origines celtiques fortifient la thèse des orientalistes qui font venir les Celtes du nord de l’Inde et du plateau central de l’Asie, Ă©tablis dans les plaines voisines du TanaĂŻs, chassĂ©s par les Scythes vers l’Europe centrale, pendant qu’une de leurs bandes va ravager l’Asie Mineure, et se faire exterminer par les Mèdes. Le rameau principal, arrivĂ© en Occident, couvre la Germanie, les Gaules, les iles Bretonnes, se rĂ©pand en Italie et dans les bassins mĂ©ridionaux du Danube. Cette partie est passablement hasardĂ©e, LehuĂ«rou, sĂ©duit par certains rapprochements Ă©tymologiques, celticise beaucoup trop les populations slaves et illyriques du centre de l’Europe et ne tient pas compte des nationalitĂ©s diverses qui se dessinaient dĂ©jĂ . LehuĂ«rou mit Ă  profit les nombreux travaux que l’Écosse et surtout l’Irlande avaient produits depuis plus d’un demi-siècle pour dĂ©brouiller les obscures migrations des Celtes dans les grandes iles bretonnes, qu’il connaissait parfaitement, comme le prouve le catalogue bibliographique, un peu confus du reste, qui termine les Origines. Ce travail n’était que l’embryon de divers ouvrages plus importants. LehuĂ«rou songeait spĂ©cialement Ă  une histoire de la Bretagne, surtout au point de vue de ses institutions ducales. Il s’occupait, en outre, d’une sorte de philologie historique du monde celtique dont le but Ă©tait « de restituer au vieux celtique sa vĂ©ritable place dans les langues indo-germaniques, en me tenant aussi loin que possible des sottes exagĂ©rations que ce pauvre celtique a inspirĂ©es Ă  tant de gens estimables Â».

En 1838, il fut nommĂ© correspondant du comitĂ© historique des chartes. Courant 1839, il est nommĂ© professeur de littĂ©rature Ă©trangère Ă  la FacultĂ© des lettres de Rennes, en supplĂ©ance du scandinaviste Xavier Marmier, reparti pour le pĂ´le Nord, et professa quelque temps un cours de littĂ©rature anglaise. En 1840, il fut nommĂ© agrĂ©gĂ© d’histoire près la FacultĂ©, et, peu de temps après, supplĂ©ant de la chaire d’histoire. L’annĂ©e suivante, il fait paraitre ses Institutions mĂ©rovingiennes, analysant l’histoire et les institutions de cette dynastie, qui connurent un grand retentissement dans le monde Ă©rudit. Le comte de Peyronnet, dĂ©clara Ă  ce sujet que « Montesquieu, Dubos et Boulainvilliers, avaient essayĂ© de tourner la question : LehuĂ«rou l’a abordĂ©e de front et rĂ©solue. Â» L’AcadĂ©mie des sciences morales le proclama, deux ans plus tard, « la dernière et brillante expression de la critique historique. »

La gloire venait ainsi Ă  l’écrivain, et aussi un peu, mais bien peu, l’avancement universitaire, qui Ă©tait devenu son idĂ©e fixe. L’arrivĂ©e de Villemain au ministère de l’instruction publique lui sembla, Ă  tort ou Ă  raison, de mauvais augure pour son avenir. Ă€ la suite d’un brillant concours pour l’agrĂ©gation, il parait que Villemain avait donnĂ© au jeune professeur des conseils pour le choix d’une section spĂ©ciale, conseils que LehuĂ«rou n’avait pas voulu regarder comme des ordres, ce qui avait froissĂ© l’illustre littĂ©rateur. Quoi qu’il en soit, le sentiment de sa valeur rĂ©elle et les dĂ©ceptions qui l’accablaient depuis des annĂ©es, avaient surexcitĂ© en lui une faiblesse qu’il poussait jusqu’à la monomanie, et qu’il confessait volontiers dans l’intimitĂ©. Dès 1839, il se plaignait d’être « brisĂ© au milieu de sa carrière Â», avouait « qu’il avait failli perdre la raison Â», et ajoutait : « Il y a des intĂ©rĂŞts beaucoup plus chers que ceux de la fortune, ce sont ceux d’un amour-propre trop longtemps et trop profondĂ©ment blessĂ©, et c’est surtout cet intĂ©rĂŞt-lĂ  qui me fait souffrir. Â» Cette dĂ©pression le reprit en 1842, quand il lui fallut quitter sa supplĂ©ance, bientĂ´t remplacĂ©e cependant par une seconde supplĂ©ance Ă  la chaire de littĂ©rature anglaise, oĂą il professa durant toute l’annĂ©e universitaire 1843, un cours sur Shakespeare et son temps, pendant qu’il prĂ©parait son importante Histoire des Institutions carolingiennes et du gouvernement des Carolingiens, suite nĂ©cessaire de son premier ouvrage, et qui parut vers la fin de septembre de la mĂŞme annĂ©e. Le plan de cet ouvrage Ă©tait Ă  peu près le mĂŞme que celui du prĂ©cĂ©dent. On suivait, dans la partie historique, les nationalitĂ©s diverses de l’empire carolingien dans leur rĂ©sistance Ă  l’incorporation franque, rĂ©sistance Ă  la fin victorieuse, et qui amena la dissolution de ce grand État.

LehuĂ«rou destinait son ouvrage au concours pour le prix Gobert. Il se rendit Ă  Paris, dans le courant de septembre, pour solliciter quelques amĂ©liorations dans sa position de professeur et prĂ©senter son Histoire au concours. Il y Ă©prouva des lenteurs et des difficultĂ©s qui ravivèrent les premiers accès de cette manie de la persĂ©cution si commune aux gens de sa province. Il laissait Ă©chapper, dans l’intimitĂ©, des rĂ©criminations assez vives contre le ministre, contre quelques hommes par lesquels il se croyait persĂ©cutĂ© ; mais nul, Ă  cette Ă©poque, ne prĂ©voyait en lui une exaspĂ©ration poussĂ©e jusqu’au suicide. Les maximes de philosophie stoĂŻque qu’il aimait Ă  dĂ©velopper semblaient Ă©carter l’idĂ©e d’une telle dĂ©faillance, mais son âme, dans ses derniers temps, Ă©tait fermĂ©e Ă  tous, mĂŞme Ă  sa famille qu’il adorait : sa tĂŞte s’égarait. Le , il Ă©tait Ă  AngoulĂŞme auprès d’amis dĂ©vouĂ©s ; le , il repartait pour la Bretagne. Le 9 au matin, son cadavre fut trouvĂ© suspendu Ă  un arbre d’une des promenades de Nantes, près du fleuve. On trouva près de lui un morceau de papier sur lequel il avait Ă©crit : « Je demande pardon Ă  Dieu et Ă  ma famille de l’action que je vais commettre. Â» L’émotion gĂ©nĂ©rale que produisit cette catastrophe trouva des Ă©chos Ă©loquents dans la presse bretonne, scientifique, universitaire. Une sĂ©ance solennelle de rentrĂ©e des FacultĂ©s fut l’occasion des tĂ©moignages officiels de la douleur publique. « On a criĂ© anathème au suicide, disait M. Varin, doyen de la FacultĂ© des lettres : Nous, Messieurs, nous dirons : PitiĂ© pour la folie !… Â» Trois semaines après sa mort, Charles Giraud dĂ©clara Ă  l’AcadĂ©mie des sciences morales et politiques : « LehuĂ«rou se place au premier rang des Ă©crivains qui consacrent leurs veilles Ă  la recherche de nos antiquitĂ©s nationales... Son Ĺ“uvre restera comme un monument honorable des travaux de notre gĂ©nĂ©ration. Â»

Notes

  1. Dans ses Origines celtiques, il déclare, sans hésiter, que nul n’a porté aussi loin que Michelet la lumière dans le monde obscur de la vieille Gaule.

Publications

  • De l’établissement des Francs dans la Gaule, et du gouvernement des premiers mĂ©rovingiens jusqu’à la mort de Brunehaut, Rennes, Vatar, 1838, in-8°.
  • De la famille et de la propriĂ©tĂ© germaniques : origines fĂ©odales, Rennes, s. n., 1842.
  • Histoire des institutions mĂ©rovingiennes et du gouvernement des MĂ©rovingiens jusqu’à l’édit de 615, Paris, Joubert, 1842, in-8° ;
  • Histoire des institutions carolingiennes et du gouvernement des Carolingiens, Paris, Joubert, 1843, in-8° ;
  • Recherches sur les origines celtiques et sur la première colonisation de la Gaule, de la Bretagne, de l’Irlande et de l’Écosse, in-4° de 37 pages, très-rare.

Sources

Liens externes

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