Accueil🇫🇷Chercher

Histoires Perfides

Histoires perfides est un recueil de Pierre Boulle paru en 1976. Les nouvelles sont insĂ©rĂ©es dans un rĂ©cit comportant deux personnages. Le narrateur principal (peut-ĂŞtre un Ă©crivain) est Ă  la recherche d’un « sujet original Â», qu’il trouve chez le second personnage, un vieillard natif du Shandong, royaume asiatique imaginaire.

Histoires perfides
Auteur Pierre Boulle
Pays France
Genre Nouvelles
Éditeur Flammarion
Date de parution 1976
Nombre de pages 223
ISBN 2-08-060909-2

Se présentant comme prêtre de la religion du Doute, c’est ce vieillard qui sera, à six reprises, le véritable conteur d’histoires censées s’être déroulées à différentes époques de sa vie au Shandong.

À l’intérieur de chaque histoire, des bribes de dialogue entre les protagonistes rappellent cette situation, manifestent les réactions de l’auditeur, ménageant ainsi des pauses propices au suspense.


La grâce royale

Le vieillard, alors jeune avocat, dĂ©fend un jeune homme condamnĂ© Ă  mort ; des doutes sur la culpabilitĂ© et l’existence de nombreuses circonstances attĂ©nuantes n’ont pas Ă©tĂ© pris en compte par le tribunal. La nouvelle reine du Shandong, « sage et aimĂ©e de son peuple Â», accepte de recevoir l’avocat venu prĂ©senter une demande de grâce royale ; celui-ci dĂ©veloppe longuement ses arguments et l’attitude de la reine lui laissent penser qu’il va obtenir gain de cause, quand un coup de tĂ©lĂ©phone d’un « Docteur Â» interrompt l’entretien, qui change alors de nature : la reine demande des prĂ©cisions sur la santĂ© du condamnĂ©, de ses parents et de ses grands-parents, et l’avocat insiste « follement Â» sur l’excellente santĂ© physique et morale de toute la famille, rĂ©ponses qui satisfont la souveraine.

Le lendemain il apprend par la secrĂ©taire de la reine que le recours est rejetĂ© ; celle-ci lui rĂ©vèle que le fils de la reine a besoin en urgence d’une greffe du cĹ“ur et que seul un « fait nouveau Â» pourrait infirmer cette dĂ©cision. Quelques heures plus tard la mère du condamnĂ© dĂ©couvre (?) le corps d’un jeune sportif sans famille, la gorge tranchĂ©e et le torse intact. Et la grâce royale est obtenue.


Le palais merveilleux de la petite ville

Le ministre de la Statistique du royaume de Shandong s’attend Ă  une augmentation phĂ©nomĂ©nale du nombre des assassinats dans les annĂ©es Ă  venir. Il dĂ©cide de construire un vaste Ă©tablissement, « centralisĂ© et modernisĂ© Â», oĂą tous les condamnĂ©s Ă  mort seraient reçus dans le confort puis exĂ©cutĂ©s avec dignitĂ©.

Il s’attelle à cette tâche avec le concours enthousiaste de plusieurs autres ministres, mobilisant entrepreneurs, juristes et homme d’affaires. L’établissement tirera son nom du site où il sera construit, un terrain de la capitale dénommé la petite ville.

Une visite est organisĂ©e avant l’inauguration officielle. L’avocat y participe. On y dĂ©couvre une « chaĂ®ne Â» de bâtiments (« stations Â» par lesquelles chacun des dĂ©tenus passera successivement) :

chambre individuelle d’un grand confort, salon de toilette raffinĂ©, Hall des derniers dĂ©sirs (bibliothèque gigantesque, mets et alcools de qualitĂ©, salles de théâtre et de cinĂ©ma, « crĂ©atures de rĂŞve Â», drogues...), cathĂ©drale universelle (une sĂ©rie de sections permettant l’exercice de chaque religion), Étape de la libĂ©ration (disposant d’une variĂ©tĂ© de modes luxueux d’exĂ©cution) et enfin Étape de la rĂ©cupĂ©ration (prĂ©lèvements d’organes sains destinĂ©s Ă  des greffes).

Mais l’inauguration n’aura pas lieu.

À quelques jours de cet événement le jeune roi abolit la peine de mort.

Les lois

Sinar, danseuse Ă©toile du ballet royal de Shandong est belle et vertueuse ; elle respecte la chastetĂ© Ă  laquelle sa fonction l’oblige. L’avocat, dans son rĂ´le de visiteur de prison, est donc stupĂ©fait de la voir dans une cellule de condamnĂ© Ă  mort.

Sinar s’est retrouvĂ©e enceinte après avoir Ă©tĂ© violĂ©e par un des plus nobles princes du royaume ; avoir cet enfant l’exposerait Ă  un scandale qui la ferait exclure du ballet et la rĂ©duirait Ă  la misère ; elle dĂ©cide donc, malgrĂ© sa rĂ©pugnance, de ne pas avoir cet enfant . Or au royaume de Shandong, pour des raisons dĂ©mographiques et non morales, l’avortement est passible de la peine capitale, et l’une de ses condisciples fait connaĂ®tre l’interruption de grossesse qu’elle avait pourtant pratiquĂ©e en secret. Le tribunal ne croit pas au viol et la condamne.

Lors de sa première visite de l’avocat, Sinar s’offre Ă  lui sans vergogne, avances qui le surprennent et qu’il refuse : ce refus semble la terrifier. Lors d’une visite suivante il la voit pratiquer de mĂŞme avec son geĂ´lier, brute Ă©paisse physiquement monstrueuse, qui la repousse violemment. Ă€ l’avocat qui lui reproche son comportement avec vĂ©hĂ©mence elle rĂ©pond que c’est sa seule chance de salut. En effet, les lois ne permettent pas l’exĂ©cution d’une femme enceinte.

Trois mois après le prince, tombĂ© mortellement malade, avoue, avant de mourir, le viol. L’avocat, qui ne l’avait pas revue, apporte Ă  Sinar l’annonce de sa grâce : Le choc causĂ© par cette nouvelle lui est fatal, et l'avocat entend ses derniers mots, profĂ©rĂ©s avec rage ; « Inutile, inutile, inutile! Â» Sinar venait de demander la veille la visite d’un mĂ©decin : elle Ă©tait enceinte, et l’avocat comprend que le père Ă©tait l’horrible geĂ´lier.

Les limites de l'endurance

La femme d’un baron est atteinte d’une maladie très douloureuse. Paralysée des membres inférieurs, sourde et muette, elle souffre en silence des pires douleurs. Les trois meilleurs médecins du royaume sont impuissants à la guérir ou à soulager ses douleurs.

Le prêtre de la religion du Doute est invité à la visiter. Le professeur qui lui a appris le langage des signes sert d’interprète. Mais quels que soient les propos du prêtre, la baronne demande sans cesse qu’on mette un terme à ses souffrances. Le prêtre est d’avis qu’on accède à cette requête, mais le baron ne peut s’y résoudre, bien que les médecins pronostiquent une issue fatale dans les deux mois.

La baronne survit pourtant au-delà de ce délai. Son mari fait alors appel à un médecin étranger qui a la réputation d’obtenir des guérisons miraculeuses. Celui-ci parvient à lui restituer l’usage de la parole. Elle est maintenant en proie à des crises de hurlements insupportables, et le baron se réfugie de plus en plus souvent au fond du jardin, parfois en compagnie de sa vieille servante, pour ne plus l’entendre.

Désormais tout l’entourage du baron, y compris les médecins sont d’avis d’appliquer l’euthanasie réclamée à grands cris par la malade, mais le mari s’y refuse à nouveau. Quelques jours plus tard la patiente décède, ce que tout le monde considère d’abord comme l’œuvre de la maladie.

Après les funĂ©railles le baron invite le prĂŞtre pour soulager sa conscience, dit-il. Il a laissĂ© le flacon de cachets Ă  portĂ©e de main de sa femme. Le prĂŞtre s’étonne toutefois d’un revirement si soudain. Le baron avoue alors qu’il a Ă  nouveau consultĂ© le mĂ©decin Ă©tranger, lequel a prescrit d’aĂ©rer la chambre en permanence : dès lors, les fenĂŞtres grand ouvertes, il n’y avait plus un endroit dans la propriĂ©tĂ© oĂą se rĂ©fugier dans le silence.

Service Compassion

Le conteur est Ă  l’époque un jeune avocat gagnant difficilement sa vie. Sous le coup de plusieurs dĂ©ceptions sentimentales il s’apprĂŞte Ă  se suicider lorsque son regard tombe sur une petite annonce de journal : Service Compassion. Il tĂ©lĂ©phone au numĂ©ro indiquĂ©.

Tous les jours, pendant une semaine, il renouvelle l’appel, demandant Ă  parler Ă  Â«  Monsieur Vincent Â», son premier interlocuteur. La voix de celui-ci, plus que encore ses propos, l’apaise un bon moment.

Devant le dĂ©couragement toutefois persistant de l’avocat, Monsieur Vincent lui propose de le rencontrer dans les locaux du service. L’avocat s’y rend et peut alors visiter les bureaux, amĂ©nagĂ©s de façon confortable et apaisante. Monsieur Vincent lui fait essayer son fauteuil, puis s’absente quelque temps ; comme le tĂ©lĂ©phone sonne, l’avocat rĂ©pond, aidant et consolant son interlocuteur.

L’avocat est maintenant membre à part entière du service. Cette situation lui procure le calme et la quiétude qui lui faisaient défaut.

Un jour, un cas plus difficile se prĂ©sente Ă  l’avocat. Une femme l’appelle rĂ©gulièrement pour se plaindre de la cruautĂ© de son mari, de son indiffĂ©rence, de ses longues absences, de ses marques de mĂ©pris. L’avocat demande l’aide de Monsieur Vincent, qui prend l’écoute en mĂŞme temps que lui. Mais Monsieur Vincent ne sera d’aucune aide Ă  son collègue : il a reconnu la voix de sa propre femme.



Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.