Dekopon

不知火 Shiranui est le nom d'usage de la variété dont la culture a débuté à Shiranuhi (不知火町Shiranuhi-machi), ville du district de Uto, préfecture de Kumamoto. Shiranui a été cultivée (1972) avant la mise en œuvre du système japonais d'enregistrement des variétés institué par la loi sur les semences et les semis, et par la suite la variété n'a pas été enregistrée[1]. À l'origine le nom retenu était Kiyomi x Ponkan 32.

Dekopon n'est pas une variété agricole enregistrée au Japon pour l'agriculture, la sylviculture ou les variétés[2]. Néanmoins, Dekopon est une marque déposée par la préfecture de Kumamoto sous le n^o 2495156 le 29 janvier 1993, et ne peuvent la porter qu'une fraction de la production de shiranui qui répond à des critères de qualité et, à l'origine, de provenance. Himepon était une autre marque de la préfecture d'Ehime, Hiropon de la préfecture de Hiroshima[3]. On trouve encore Kiyopon, Ramiporin, Fujipon, Amapon, Pondarin... Dékotangor デコタンゴール[4]. Dékopon est progressivement devenu par antonomase un nom commun pour l'ensemble des shiranui ou shiranuhi[5] - [6]produits au Japon[7]. Le nom est le issu de deko (凸, デコ, « convexe ») en référence à sa protubérance et de pon dans ponkan (ポンカン, un des fruits duquel il est dérivé) créant ainsi デコ ポン[7].

La marque Dékopon étant protégée à l'époque, les pays à forte diaspora japonaise qui l'on introduit ont choisi des marques nouvelles: Kinsei 金星 (Vénus[8]) au Brésil, Hallabong 한라봉 (car cultivé sur l'ile de Jeju dont le centre est occupé par le mont Halla 한라산) en Corée[9] et en Azerbaïdjan où les coréens l'ont implanté[10], Sumo (Sumo Citrus™[11] est une marque enregistrée par Suntreat qui négocie des licences en Australie, en Espagne, au Pérou et en Afrique du Sud[12]) aux États-Unis où il est cultivé en Californie depuis 2011[13] après régénération et élimination des virus de quarantaine en 2005[3]. De là, après quarantaine en 2003, il a été mis en culture sous licence en 2011 en Australie par Pacific Fresh citrus packing group[14]. En 2021, l'Institut Valencien de Recherches Agraires (IVIA) espagnol a entrepris sa régénération et l'élimination des agents pathogènes, avec un projet de mise en culture pour 2023 ; la même année, l'Unité de quarantaine de l'ANSES a certifié un cultivar américain introduit en Europe[15].

En Chine les tangors Ugli et Shiranui ont le même nom : 丑橘 orange laide

En Chine où sa plantation a commencé dans le Sichuan en 2000, il est nommé 丑橘 (chǒu jú) orange moche, les fruits peuvent atteindre 400 g et 17° Brix[16]. Le choix de ce nom amène des confusions avec le tangor Ugli lui aussi produit en Chine dans le Yunnan sous le même nom[16].

En 1972 le laboratoire de recherche agricole de Minamishimabara obtient des hybrides de Kiyomi x Nakano N^o 3 Ponkan[17] dont des semis sont mis en culture à Shiranuhimachi, préfecture de Kumamoto. Pour mémoire, Kiyomi est le premier Tangor obtenu au Japon en 1949 depuis une mandarine Satsuma Miyakawa Hayao pollinisée par une orange douce Trogita[18]. Kiyomi a une abondante descendance de première génération parmi lesquels Akemi, Amaka, Harumi, Nishinokaori (voir kanpei), Setomi, Shiranui, Tamami, Tsunokaori, Youkou (issus du même croisement avec Nakano N^o 3), qui seront eux-mêmes réhybridés. Nakano N^o 3 ponkan est un cultivar de mandarine asiatique (Citrus reticulata Blanco)[19].

Il est apparu pour la première fois sur le marché de Kumamoto le 1^er mars 1991. Cette date est devenue le Jour du dékopon デコポンの日 fêté au Japon depuis 2006[20] - [21].

Dékopon sur l'arbre

D'importantes recherches ont été nécessaires pour éviter l'asséchement durant le stockage (qui se fait à 12 °C et permet d'approvisionner le marché jusqu'à juillet[22]), maitriser la culture sous serre (chauffage, éclaircissage), faire la sélection du cultivar Hito no Yu pour sa qualité, et rédiger des manuels de culture à destination des horticulteurs[23]. Le succès du dékopon au Japon est impressionnant. Il tient à la qualité du fruit, à la volonté d'innovation variétale et à l'organisation des producteurs tournée vers la qualité du produit. Il est cultivé dans de nombreuses préfectures du sud : Shizuoka, Mie, Wakayama, Hiroshima, Tokushima, Ehime, Saga, Kumamoto, Oita, Miyazaki et Kagoshima. En 2017, il est en tête des surfaces cultivées (2 793 ha) devant Yuzu (2 244 ha), Iyokan (2 223 ha), Ponkan (1 701 ha)[24]. En termes de tonnage il dépasse la mandarine Ponkan - largement majoritaire au XX^e siècle - en 2013 avec 47 000 t[25]. En 2015, le dékopon représente 25% des agrumes produits au Japon[26].

cultivar à cou marqué

Le fruit est lourd 200 à 280 g et peut approcher 400 g, son diamètre de 7 à 8,8 cm est proche de sa hauteur, cou compris[27]. La teneur en sucre est de 13° Brix ; stocké pendant 7 à 20 jours après récolte, l'acidité relative faiblit à 1 % maximum[28], ce qui donne un fruit doux mais non insipide[26]. Un dékopon avec 210 g de pulpe contient 100 mg de vitamine C, soit l'apport journalier recommandé (AJR)[27].

Une singularité du dékopon est son cou bien marqué : d'autres agrumes ont des renflements sommitaux par exemple Yuge Hyokan de l'île d'Iwagi 弓削瓢柑[29], Sambokan, tous deux confidentiels, ou encore le tangor Ortanique peut avoir un joli cou[30], mais celui du dékopon est beaucoup plus gros et imposant. Sa couleur est oranger saturé. Il est asperme (pas de graines), les cloisons des quartiers sont fines, insensibles sous la dent, les loges très juteuses n'éclatent pas sous les doigts mais donne une texture mi-croquante mi-fondante dans la bouche, le gout fin est celui d'un tangor[28].

Le dékopon est un fruit cher, on a longtemps parlé d'un fruit à 1 000 ¥ (7,5 € ou 8,5 $), en 2021 on observe un prix moyen d'environ 4,5 € ou 5 $ (10 000 ¥ la boite de 15 à 20 fruits)[31]. Aux États-Unis où il est vendu en vrac, en 2021 le fruit est à 1,7 $[32] et il existe une production labellisée bio[33].

Sumo citrus vendu en vrac aux États-Unis (Seattle)

Le dekopon se cultive habituellement greffé sur Poncirus Trifoliata porte-greffe qui améliore la qualité du fruit, réduit la vigueur, réduit la hauteur. La végétation spontanée d'un franc de semis est très vigoureux et ne donne pas des bons fruits[34]. Des essais de greffe sur Citrumelo Swingle ont montré une végétation vigoureuse et une bonne qualité de fruit[35]. En Chine, le choix d'un porte greffe vigoureux ou d'un bigaradier est recommandé[16].

Comme tous les mandariniers et tangors, l'arbre a une végétation souvent dense ; la taille est importante, elle vise à maintenir l'intérieur de l'arbre à la lumière (il se cultive au soleil) ce qui limite les attaques de cochenilles[36]. La densité de plantation est modérée de 2,5 m × 3 m entre les rangées[16].

Les gourmands (branches vigoureuses verticales souvent épineuses) doivent être régulièrement supprimés[37]. L'arbre peut atteindre 2,5 à 3 m de haut[37]. La fructification commence au bout de quatre ans, la récolte se fait en mars à avril au Japon[38].

L'éclaircissage des fruits surnuméraires se fait selon la méthode japonaise 1 fruit pour 80 à 100 feuilles, il évite l'alternance et donne des fruits de belle dimension année après année[37]. L'éclaircissage se fait mi juillet avec un second éclaircissage en août-septembre pour éliminer les fruits mal formés ou fissurés[16].

Les tangors supportent mal le gel, les jardiniers amateurs qui les cultivent en zone froide doivent protéger leurs arbres du gel et du vent[39]. Les fruits sont généralement cultivés dans de grandes serres pour être maintenus à une température tempérée, certaines serres sont chauffées.

en vente à Tokyo par deux (2019)

Le succès populaire du dékopon a engendré une foule de produits dérivés, des gelées[40] - [41], des jus, sirops[42] et boissons[43], des conserves[44], des fruits séchés[45], des pâtisseries[46], des confiseries en bonbons et barres[47], des jouets et figurines[48], etc.

La recherche de cultivars issus du dékopon ou des méthodes de culture nouvelles ont apporté le dékopon récolté 330 jours après l'anthèse à Oita, très sucré, nommé déko 330 (デコ330) ou celui affiné sur l'arbre à Aichi sous la marque Kijuku Dekopon[26]. Des cultivars ont été obtenus par partir d'embryons nucellaires de semis des rares graines (Aki no Kagayaki, Hito no Yutaka, Saga Fruit Test No. 34 et Manabe Deco) ou de mutation de bourgeon (Yo no Kaori et Ai no Kaori)[49]. La recherche japonaise sur les nouvelles variétés d'agrumes procède par hybridation à partir de l'acquis. Ainsi, les nouvelles variétés ont souvent un gout, une texture, une présentation dans la continuité des succès commerciaux mais sont plus précoces (c'est le cas de Kanpei, avec une production en janvier-février, enregistré en 2007)[50] ou présentent des nutriments fonctionnels intéressants (comme Seinan no Hikari 西南のひかり - 2009)[51].

Cette huile essentielle n'est pas commercialisée.

Des publications coréennes portant sur l'huile essentielle de fleur de dekopon (2013) extraite par hydro-distillation - le rendement est très faible 0,034 % - donnent la composition suivante : sabinène (34,75 %), linalol (14,77 %), β-ocimène (11,07 % ; à noter qu'il est aussi présent dans l'H.E. du tangor kanpei), 4-terpinéol (9,63 %), l-limonène (5,88 %) et γ-terpinène (4,67 %)[54]. Une autre étude (2006) fournit un tableau comparatif des compositions des huiles essentielles du zeste (pression mécanique à froid) entre les variétés coréenne et japonaise : du côté de aromatiques caractéristiques, l'acétate de citronellal est plus abondant dans le fruit japonais alors qu'il en va inversement pour le citronellal[55].