Cycle monnaie-marchandise-monnaie
Le cycle monnaie-marchandise-monnaie (ou argent-marchandise-argent, ou encore cycle du capital productif) est un schéma de l'utilisation du capital dans une économie capitaliste selon lequel l'objectif du capitaliste est de générer de la richesse par la création d'une production. Originellement sous forme de monnaie, le capital est utilisé pour produire des biens, qui eux-mêmes sont payés en monnaie. Il s'agit d'un concept majeur du marxisme.
Concept
Karl Marx s'inspire de Georg Wilhelm Friedrich Hegel pour comprendre l'apparition phénoménale de la monnaie dans le système économique, et son maintien[1].
Dans le Capital (livre II), il présente un schéma de l'économie capitaliste : G-W-G (Geld-Ware-Geld), soit argent-marchandise-argent, ou monnaie-marchandise-monnaie[2]. En d'autres termes, le capital est d'abord investi sous forme de monnaie, ce qui permet de produire un bien, qui est vendu contre de la monnaie[3]. Pour qu'il y ait un profit, il faut que la monnaie finale soit supérieure à la monnaie de départ ; pour souligner cela, on note souvent le cycle A-M-A' (argent-marchandise-argent prime), où A' > A[4].
Dans ce cycle, la monnaie joue un rôle de médiation. Elle n'a pas une utilité de stockage, mais bien d'équivalent de la valeur du bien ; elle est donc un « équivalent universel »[5]. Marx écrit ainsi que « une marchandise est échangée contre une marchandise, sous réserve simplement que cet échange est un échange médiatisé »[6]. Toutefois, elle n'est pas uniquement un objet de médiation : la monnaie est la fin du cycle car, dans un système capitaliste, la monnaie est une fin en soi[7].
Pour Marx, le processus de circulation est inverse à l'origine[8]. S'inspirant d'Aristote, il écrit que les économies précapitalistes avaient un cycle (marchandise-monnaie-marchandise, où la monnaie n'était bien qu'une médiation[9] - [10]. Il finit nécessairement par la marchandise, et non par la monnaie, car ce n'est que dans une société capitaliste que l'accumulation de capital devient la fin en soi[6].
Le cycle A-M-A' permet à Marx de créer un début de réfutation de la loi de Say, selon laquelle l'offre crée sa propre demande. En effet, cette loi de l'économie n'est pas validée dans le cas où la vente M-A n'implique pas un achat futur A-M'. Dans ce cas, l'offre de marchandises peut être plus grande que la demande[5].
Applications
Explication des crises économiques
Pour Marx, ce schéma explicite l'origine des crises économiques. Pour lui, une crise dans un système capitaliste est nécessairement une crise de surproduction. En effet, le vendeur d'un bien n'est jamais certain de trouver la contrepartie monétaire. M est alors supérieur à A'[6].
Notes et références
- Henri Denis, Hegel, penseur politique, L'AGE D'HOMME, (ISBN 978-2-89035-158-5, lire en ligne)
- Henri Bartoli, La doctrine économique et sociale de Karl Marx, Éditions du Seuil, (lire en ligne)
- Leon Trotsky, Marx, Buchet/Chastel, (ISBN 978-2-283-03297-8, lire en ligne)
- Denis Collin, Le cauchemar de Karl Marx: Le capitalisme est-il une histoire sans fin ? - Essais - documents, Max Milo, (ISBN 978-2-315-00204-7, lire en ligne)
- Delphine Pouchain, Lou Dumez, Matthias Knol et Fabrice Tricou, Monnaie et financement de l'économie, dl 2019 (ISBN 978-2-35030-634-6 et 2-35030-634-8, OCLC 1134989408, lire en ligne)
- Henri Denis, L'Économie de Marx, Presses Universitaires de France, (ISBN 978-2-13-036500-6, DOI 10.3917/puf.denis.1980.01, lire en ligne)
- Ghislain Deleplace, Histoire de la pensée économique, Dunod, (ISBN 978-2-10-074541-8, DOI 10.3917/dunod.delep.2018.01, lire en ligne)
- Joël Martine, L'or, la parole, l'État : critique marxiste des fétiches, FeniXX réédition numérique, (ISBN 978-2-402-15321-8, lire en ligne)
- Daniel Villey, Petite histoire des grandes doctrines économiques, Librairie de Médicis, (lire en ligne)
- Paul Clavier, Par ici la monnaie ! Petite métaphysique du fric, Editions du Cerf, (ISBN 978-2-204-13968-7, lire en ligne)