Cipango
Cipango (en mandarin standard 日本国 / rìběnguó) est le nom chinois du Japon rapporté par Marco Polo dans le Devisement du monde. C’est un archipel d’îles riches en or, perles, pierres précieuses, métaux et épices :
« Les habitants [de Cipango] sont blancs et d’assez belle stature, adonnés au service des idoles : ils reconnaissent un seul roi en leur pays et ne sont tributaires à aucun autre pays. En cette île, il y a de l’or en grande abondance, toutefois le roi ne permet pas facilement de le transporter hors du pays : ce qui est cause que bien peu de marchands fréquentent et trafiquent en cette province. Le roi a un palais somptueux et magnifique duquel la couverture est entièrement de lames d’or, [et] les grandes maisons seigneuriales sont couvertes de plomb ou de cuivre. Semblablement, les planchers des salles et chambres de ce palais sont lambrissés et couverts de lames d’or (dit-on). On trouve en cette île une grande quantité de perles fort excellentes et singulières, tant en grosseur que rotondité, et de couleur rouge, qui sont [beaucoup plus prisées] que ne sont les blanches. En outre, on y trouve plusieurs pierres précieuses, lesquelles avec l’abondance de l’or rendent l’île surtout riche et opulente[1]. »
Le phénomène de la mousson en Mer de Chine réduit le trafic maritime et renforce l’isolement de l’île :
« Aux alentours de l’île de Zipangri, se trouvent plusieurs autres petites îles, que les pilotes estiment être au nombre de 7 448[2], la plus grande part desquelles est habitée et cultivée : et n’y en a aucune où ne croissent et viennent de grands arbres et petits bocages fort odoriférents : aussi on y trouve des épices en grande abondance : toutefois les marchands étrangers n’y fréquentent point, sinon les habitants de la province de Mangi[3], qui en hiver y vont trafiquer [commercer], puis s’en retournent en été : car en ce détroit, il y a seulement deux vents lesquels soufflent à l’opposite l’un de l’autre, à savoir l’un a son cours en été et l’autre en hiver[1]. »
La richesse de l’archipel attise la convoitise de Kubilai Khan : « Le grand Cham Cublai étant averti de l’opulence et des grandes richesses qui étaient dans l’île de Zipangri, mit en délibération de la subjuguer et de la réduire à sa puissance[1]. » Marco Polo décrit les tentatives d'invasions mongoles du Japon de façon factuelle jusqu’à la défaite de la flotte mongole.
De la chronique de Marco Polo à la découverte des Amériques
Le cartographe florentin Paolo Toscanelli, dans une carte de 1463, représente Cipango bien plus proche de l'Europe que dans la réalité. Cette carte, que Christophe Colomb a pu tenir entre ses mains, l'a peut-être influencé pour organiser sa traversée de l'océan Atlantique.
En tout état de cause, c’est Cipango et ses richesses que Christophe Colomb cherche à atteindre en partant de Séville le en prenant cap vers l'ouest. C'est d’une île de l’archipel de Cipango que croit s’emparer Colomb le de la même année, en débarquant à San Salvador, trop petite et trop arriérée pour être le mythique pays oriental. Dès le lendemain de l’accostage à San Salvador, Colomb désire atteindre Cipango : « de là provient l’or qu’ils ont au nez. Il ne faut pas perdre de temps pour aller à Cipango[4]. » Il fait du cabotage d’île en île dans les Caraïbes, entrant en contact avec les « Indiens » et décide, le de « partir pour l’île de Cuba que je crois être Cipango, selon les signes que donnent les [indigènes] de sa grandeur et de sa richesse. Je ne vais pas rester ici[4]. » Cuba est atteinte quelques jours plus tard mais le palais au toit d’or du roi de Cipango reste introuvable. Le , ayant atteint Hispaniola, il note : « [Les Indiens] affirment qu'il y a une grande quantité d'or à Cipango, qu'ils appellent Cibao […] mais qui est beaucoup plus à l'est[4]. » Il repart, le sans avoir trouvé Cipango, et pour cause…
En 1543, soit 50 ans plus tard, le Cipango réel, le Japon, est accosté par les premiers Européens (peut-être Fernão Mendes Pinto), à Tanegashima.
Références
- Orthographe modernisée, Marco Polo, Le Devisement du monde, vol. III, chap. II à XVIII.
- 6 852 îles selon les géographes modernes.
- La Chine « chinoise », par opposition à Cathay ou Chine « mongole » ; voir la carte ci-dessous.
- (es) Christophe Colomb, Diario de a bordo del primer viaje de CristĂłbal ColĂłn,
Voir aussi
- Noms du Japon
- Cibao
- Les conquérants ; Les Trophées ; José-Maria de Heredia, 1893