Bhrikuti
Bhrikuti ou Bhrikuti Devi (tibĂ©tain : àœàœŁàŒàœàœŒàŒàœàœàœ àŒàœàŸČàœČàŒàœàœàœŽàœàŒ, Wylie : bal mo bza' khri btsun, THL : balmo za tritsĂŒn VIIe siĂšcle) est, selon les traditions nĂ©palaise et tibĂ©taine, une princesse du royaume de Licchavi (NĂ©pal), fille du roi Amsuvarma, et lâune des deux Ă©pouses les plus connues du roi du Tibet Songsten Gampo, avec la princesse chinoise Wencheng. La tradition tibĂ©taine attribue lâintroduction du bouddhisme et la fondation du temple de Jokhang Ă ces deux reines, considĂ©rĂ©es comme deux incarnations du bodhisattva Tara. Elle est aussi appelĂ©e en tibĂ©tain Trisun, Belsa (reine nĂ©palaise), et en chinois princesse Chizun (chinois : ć°șć°ć Źäž»). Son nom sanscrit, qui est Ă lâorigine celui dâune dĂ©itĂ©, signifie "celle qui fronce les sourcils"[1].
Histoire
D'aprÚs les récits historiques, la princesse Bhrikuti se serait marié avec l'Empereur tibétain en 633, et la princes Wencheng en 641[2]. Le Népal soumis au Tibet aurait envoyé 12 000 cavaliers pour accompagner 700 mercenaires tibétain lors d'une bataille entre Wang Xuance, diplomate de la dynastie Tang et un usurpateur de l'empereur indien Harshavardhana, vers 648, l'usurpateur ayant tué une grande partie d'une précédente mission diplomatique qui avait pour but de rencontrer Harshavardhana[3].
La raretĂ© des sources historiques fiables datant de cette Ă©poque, aussi bien du cĂŽtĂ© tibĂ©tain que nĂ©palais, fait que les faits de sa vie doivent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme lĂ©gendaires, et il a mĂȘme Ă©tĂ© suggĂ©rĂ© quâil pourrait sâagir dâun personnage fictif. Min Bahadur Shakya estime nĂ©anmoins que lâalliance de Songsten Gampo avec une princesse nĂ©palaise est vraisemblable. On nâa d'ailleurs aucune information personnelle non plus sur la princesse chinoise dont lâexistence est pourtant certaine, son mariage Ă©tant enregistrĂ© dans les annales des Tang. NĂ©anmoins, Bhrikuti nâĂ©tait pas forcĂ©ment la fille dâAmsuvarma, usurpateur ayant renversĂ© Udayadeva. Narendradeva, fils de ce dernier, reprit son trĂŽne par la force vers 641, et il semble quâil soit pour cela allĂ© chercher de lâaide au Tibet. La reine nĂ©palaise pourrait donc ĂȘtre une de ses parentes. Toutes les traditions sâaccordent pour situer lâarrivĂ©e de Bhrikuti au Tibet avant celle de Wencheng.
LĂ©gende
Selon une tradition nĂ©palaise, Songtsen Gampo, ayant demandĂ© la main dâune fille dâAmsuvarma, aurait essuyĂ© un refus. Il aurait alors attaquĂ© Licchavi, et obtenu ainsi Bhrikuti et un Jowo. Les Tamang du NĂ©pal prĂ©tendent descendre des tamaks, cavaliers tibĂ©tains menĂ©s par Songtsen Gampo[4]. Selon la tradition tibĂ©taine entourant Mgar stong-btsan yul-srung, premier ministre de Songtsen Gampo, câest par son entremise en tant quâambassadeur que le roi du NĂ©pal aurait acceptĂ© dâenvoyer une princesse. Fort de son succĂšs, le ministre se serait rendu lâannĂ©e suivante (640) en Chine pour obtenir une princesse chinoise. Son ambassade Ă Chang'an est attestĂ©e par des documents historiques.
On attribue Ă Bhrikuti, en association avec Wencheng, lâintroduction du bouddhisme au Tibet et parfois mĂȘme la conversion du roi. Câest peu vraisemblable car, selon M. B. Shakya, lâinfluence du bouddhisme nĂ©palais avait commencĂ© de sâexercer dĂšs avant ce mariage. Par ailleurs, le premier souverain tibĂ©tain Ă promouvoir officiellement le bouddhisme sera, un siĂšcle plus tard, Trisong Detsen. Bhrikuti aurait apportĂ© avec elle des reprĂ©sentations de Tara, Avalokiteshvara et Akshobhya, cette derniĂšre en fait peut-ĂȘtre une statue du Bouddha ĂągĂ© de 8 ans, appelĂ©e Ă©galement Jowo Mikyoe Dorje, vĂ©nĂ©rĂ©e tout d'abord au Jokhang, puis au temple de RamochĂ©. La reine chinoise aurait Ă©galement apportĂ© un Jowo dans sa dot, actuellement au Jokhang. Une certaine rivalitĂ© ethnique transparaĂźt en effet dans la façon dont la lĂ©gende des deux reines est rapportĂ©e. Ainsi, le premier bĂątiment du Potala fut Ă©difiĂ© par le roi pour lâune ou lâautre Ă©pouse, selon que la lĂ©gende est nĂ©palaise ou chinoise. En ce qui concerne le temple de Jokhang, la version retenue le plus souvent est celle d'une collaboration, Wencheng choisissant lâemplacement grĂące Ă sa connaissance du fengshui et Bhrikuti fournissant les fonds. La reine nĂ©palaise aurait Ă©galement fondĂ© Thangdul, Yangdul Runon et de nombreux temples au Bhoutan.
Notes et références
- Alexander Berzin
- Sen 2003, p. 24.
- Sen 2003, p. 22-24.
- Association Culturelle Franco-NĂ©palaise - le NĂ©pal
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- Min Bahadur Shakya Princess Bhrikuti Devi, Book Faith India, 1997. (ISBN 8173030642)
- Cynthia B. Josayma (Traduction) Gyalsa Belsa, Library of Tibetan Works & Archives (ISBN 81-85102-80-5) (lâhistoire des deux reines selon un opĂ©ra populaire tibĂ©tain)
- Sen Tansen, Buddhism, Diplomacy, and Trade: The Realignment of Sino-Indian Relations, 600-1400, University of Hawaii Press, , 24 p. (ISBN 978-0-8248-2593-5, lire en ligne).