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Bataille de Surabaya (1677)

La bataille de Surabaya a lieu en mai 1677 lors de la révolte de Trunajaya et voit la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (connue sous son acronyme néerlandais VOC) défaire les forces de Trunajaya et prendre la ville de Surabaya pour le compte de son allié, le Sultanat de Mataram.

Bataille de Surabaya
Description de cette image, également commentée ci-après
Carte de l'est de Java, montrant Surabaya et d'autres lieux importants de la campagne.
Informations générales
Date 4–13 mai 1677
Lieu Surabaya (aujourd'hui dans Java oriental en Indonésie)
Issue Victoire de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales
Commandants
Cornelis Speelman (en)Trunajaya
Forces en présence
1 500[1]Inconnues
plus de 120 cannons[2]

Contexte

La rĂ©volte de Trunajaya dĂ©bute en 1674 par des raids des forces rebelles contre les villes du sultanat de Mataram[3]. En 1676, une armĂ©e rebelle de 9 000 hommes envahit la partie orientale de Java depuis leur base de Madura et prennent Surabaya, la principale ville de la rĂ©gion, peu après[4]. Le roi de Mataram Amangkurat Ier envoie une importante armĂ©e dirigĂ©e par le prince hĂ©ritier (plus tard Amangkurat II) pour mettre fin Ă  la rĂ©bellion, mais elle est battue Ă  la bataille de Gegodog au nord-est de Java[4][5]. Les rebelles continuent Ă  engranger les victoires et gagnent du territoire durant les mois suivants, prenant contrĂ´le de la cĂ´te nord de Java jusqu'Ă  Cirebon[5]. Devant le risque d'effondrement de son autoritĂ©, Amangkurat Ier cherche l'aide de la Compagnie nĂ©erlandaise des Indes orientales (VOC) Ă  Batavia[6]. Le , l'amiral Cornelis Speelman (en), rĂ©cemment nommĂ© commandant des forces de la VOC sur la cĂ´te nord de Java, arrive Ă  Jepara pour nĂ©gocier avec Wangsadipara, le gouverneur du Mataram pour la cĂ´te nord[7]. Ils s'accordent sur un contrat en fĂ©vrier, qui est ratifiĂ© par le roi en mars[8].

Arrivée de la VOC au large de Surabaya

Cornelis Speelman (en) dirige les forces de la VOC sur la côte nord de Java et conduit l'attaque sur Surabaya. Le portrait date des années 1680 lorsqu'il est gouverneur-général de la VOC.

La flotte de Speelman quitte Jepara puis jette l'ancre au large de Surabaya au début du mois d'avril et tente d'entamer des négociations avec Trunajaya[8]. Trunajaya est d'abord amical envers la VOC, mais il refuse de rencontrer Speelman à bord d'un navire de la Compagnie[8]. L'avis de la VOC sur Trunajaya se dégrade après qu'il a raté un rendez-vous en eaux neutres et que des émissaires aient rapporté qu'il était un ivrogne[8]. À la fin du mois d'avril, Speelman décide d'attaquer Surabaya et abandonne les négociations[8].

Bataille

Forces et terrain

Speelman dirige une force d'environ 1 500, 400 d'entre-eux venant de Jepara, le reste venant avec lui de Batavia. Les troupes venues de Batavia incluent 600 marins, 310 soldats europĂ©ens et quatre « compagnies » (environ 50 hommes chaque) d'Amboinais, de Malais, de Balinais et de Mardijker (en)[1].

Surabaya, de son cĂ´tĂ©, est dĂ©fendue par des fortifications, de l'artillerie et un nombre « substantiel » d'hommes[9]. Les dĂ©fenseurs ont au moins 120 cannons[2]. Les forces de Trunajaya sont technologiquement Ă  Ă©galitĂ© avec les forces de VOC, ses innovations techniques ayant Ă©tĂ© rapidement adoptĂ©es Ă  Java[10]. Deux fleuves, le Kali Mas (en) et le Kali Pegirian, coulent dans la ville jusqu'au dĂ©troit de Madura au nord[9]. Trunajaya Ă©tablit sa cour dans l'ancienne citadelle royale (Ă  l'emplacement de l'actuel bureau du gouverneur de Java oriental) et dĂ©tourne le Kali Mas pour l'entourer de douves[9]. Ces dernières sont cependant assĂ©chĂ©es pendant la bataille Ă  cause de la saison sèche[9]. Trunajaya Ă©tablit sa principale ligne de dĂ©fense le long de la rivière au nord de la citadelle, Ă©levant des fortifications et des palissades et met en place deux batteries d'artillerie[9]. Le Kali Pegirian, plus oriental, coule dans Ampel (en), un quartier de Surabaya abritant la tombe de Sunan Ngampel-Denta, l'un des Wali Sanga[9]. Contrairement au secteur occidental, ce secteur (le flanc droit de Trunajaya) est faiblement dĂ©fendu ; seules des palissades sont construites sur la rivière[2]. La distance sĂ©parant la cĂ´te des principales dĂ©fenses de Trunajaya, environ 4,5 km, est couverte de terrain marĂ©cageux couvert d'une fruticĂ©e, principalement sous l'eau Ă  marĂ©e haute[2].

Engagement principal

Carte contemporaine néerlandaise montrant Surabaya et la position des deux forces après la prise d'Ampel par la VOC mais avant l'assaut principal.

Les forces de la VOC débarquent le 4-5 mai sur le flanc droit de Trunajaya[2]. Ce dernier ne s'attendant pas à une attaque de ce côté, la position n'est que légèrement défendue[2]. La VOC prend Ampel sans grande resistance[2]. Au cours des jours suivants, la VOC établit sa batterie à Ampel, tout en conduisant des négociations sans but avec Trunajaya[2]. Ce dernier accuse Speelman de manquer de chevalerie en l'attaquant sur son flanc droit plutôt que sur sa position principale[2]. Aussi bien Trunajaya que la VOC avancent leurs troupes jusqu'à ce que leurs artilleries ne soient plus qu'à un tir de pistole l'une de l'autre[2]. Trunajaya construit également un barrage sur la rivière, seule source d'eau douce de la VOC, dont les troupes sont alors réduites à utiliser de l'eau saumâtre, favorisant la propagation de maladies[2].

À ce moment, le temps semble être du côté de Trunajaya ; tout délai lui permet de renforcer ses fortifications et recevoir des renforts, alors que les maladies affaibliront les troupes de la VOC[2]. Speelman décide alors d'attaquer. Les 12-13 mai, la VOC bombarde lourdement les fortifications principales de Trunajaya puis lance un assaut[2]. L'attaque est couronnée de succès après des combats acharnés, et Trunajaya se replie sur l'intérieur des terres pour s'établir à Kediri, l'ancienne capitale du royaume de Kediri[2] - [11]. Pendant la retraite, il abandonne soixante-neufs canons de fer et trente-quatre canons de brozne (dont vingt petits canons de bateau, des « bassen ») et ne parvient à sauver que vingt canons de bronzes[2].

Suites

Les forces de la VOC repoussent alors les forces rebelles des régions entourant Surabaya[11]. Deux détachements (des compagnies indonésiennes conduites par des capitaines néerlandais) sont envoyés vers le nord-ouest, le long de la côte, pour éliminer les rebelles dans les régions entourant Sidayu (en), Tuban et les monts Kendeng[2] - [12]. Speelman envoie également des représentants, dont des marchands indiens, au kraeng de Galesong (en) à Pasuruan[13]. Galesong, ancien allié de Trunajaya, s'est querellé avec ce dernier et est resté neutre lors de la bataille[14]. Cette négociation échoue au début du mois de mai, Galesong refusant de se soumettre même après la défaite de Trunajaya à Surabaya[13] - [2].

La VOC tente également de gagner la loyauté des seigneurs de Madura, l'île d'origine de Trunajaya de l'autre côté du détroit[2]. En mai, Plusieurs d'entre eux se soumettent à l'amiral, en tant que représentant du roi de Mataram, et Speelman tente d'installer l'un d'entre eux, raden Martapati, comme mandataire[2]. Son autorité s'effondre cependant très rapidement face aux soutiens de Trunajaya lorsque son escorte de la VOC quitte Madura, l'obligeant à fuir vers Surabaya[2]. Par la suite, Speelman se rendra en personne à Madura, où il y défait les alliés de Trunajaya et rase sa résidence, Maduretna[2] - [13]. Cependant, à la fin du mois de juin, la cour du Mataram est prise par les forces de Trunajaya, entraînant la fuite du roi[13]. En apprenant la nouvelle, Speelman décide de se rendre immédiatement à son point stratégique de Jepara et rejoindre les forces royales battant en retraite[15].

Conséquences

Speelman projete de profiter de sa victoire pour continuer d'avancer vers l'intérieur des terres de Java, mais sa campagne est interrompue par la nouvelle de la chute de la capitale du Mataram ; il vogue alors à Jepara pour défendre la ville[15]. Par ailleurs, les supérieurs de Speelman à la VOC hésitent à continuer à s'impliquer dans cette guerre. En effet, Batavia elle-même fait face à des menaces venant du sultanat de Banten, à l'ouest de Java, et le poste de la VOC à Malacca est menacé par le sultanat de Johor[15]. Le 6 juillet, la VOC ordonne l'arrêt des opérations de Speelman : « Pas l'un de nos hommes, grand ou petit, doit se rendre au Mataram »[15].

L'historien spécialiste de l'Indonésie M. C. Ricklefs suggère que la victoire de la VOC à Surabaya a probablement accéléré la chute du Mataram[15]. Les forces rebelles défaites se replient en effet dans les terres, se rapprochant ainsi de la capitale du sultanat et déclenchant une attaque précoce sur la cour[15]. De plus, l'alliance entre le roi et la VOC, étrangère et chrétienne, renforce le caractère islamique de la rébellion[15]. Le successeur d'Amangkurat Ier, Amangkurat II, raconte plus tard à la VOC que cette alliance a poussé son cousin pangeran Purbaya à se joindre aux rebelles, les forces de celui-ci comptant finalement parmi les troupes ayant pris la capitale[15] - [16].

La révolte de Trunajaya se poursuit jusqu'en 1680, lorsqu'elle est finalement vaincue par l'alliance Mataram-VOC.

Notes et références

  1. Ricklefs 1993, p. 35.
  2. Ricklefs 1993, p. 39.
  3. Pigeaud 1976, p. 69.
  4. Andaya 1981, p. 214–215.
  5. Pigeaud 1976, p. 70.
  6. Pigeaud 1976, p. 71.
  7. Ricklefs 1993, p. 34–35.
  8. Ricklefs 1993, p. 37.
  9. Ricklefs 1993, p. 38.
  10. Ricklefs 1993, p. 37–38.
  11. Pigeaud 1976, p. 72.
  12. Ricklefs 1993, p. 402.
  13. Pigeaud 1976, p. 73.
  14. Pigeaud 1976, p. 72–73.
  15. Ricklefs 1993, p. 40.
  16. Ricklefs 1993, pp. 273–274 notes 33, 40.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Leonard Y. Andaya, The Heritage of Arung Palakka : A History of South Sulawesi (Celebes) in the Seventeenth Century, La Haye, Martinus Nijhoff, (ISBN 978-90-04-28722-8, DOI 10.1163/9789004287228, lire en ligne)
  • (en) M. C. Ricklefs, War, Culture and Economy in Java, 1677-1726 : Asian and European Imperialism in the Early Kartasura Period, Sydney, Asian Studies Association of Australia, (ISBN 978-1-86373-380-9, lire en ligne)
  • (en) M. C. Ricklefs, A History of Modern Indonesia Since C.1200, Palgrave Macmillan, , 512 p. (ISBN 978-1-137-05201-8, lire en ligne)
  • (en) Theodore Gauthier Thomas Pigeaud, Islamic States in Java 1500–1700 : Eight Dutch Books and Articles by Dr H.J. de Graaf, La Haye, Martinus Nijhoff, , 213 p. (ISBN 90-247-1876-7, lire en ligne)
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