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Approches tiers-mondistes du droit international

Les approches tiers-mondistes du droit international sont un courant de critique du droit international qui considĂšre que ce dernier perpĂ©tue les inĂ©galitĂ©s consĂ©cutives Ă  la colonisation[1]. Elles dĂ©noncent l’impĂ©rialisme postcolonial qui sous-tend le droit international, et plaident en faveur d’une approche juridique plus juste et Ă©quitable pour les pays et les peuples en voie de dĂ©veloppement.

On distingue gĂ©nĂ©ralement deux gĂ©nĂ©rations d’approches tiers-mondistes : d’une part les anciennes thĂ©ories, correspondant Ă  la premiĂšre gĂ©nĂ©ration du mouvement (en anglais : Third World Theories) ; et d’autre part les approches actuelles, correspondant Ă  la seconde gĂ©nĂ©ration du mouvement. Cette seconde gĂ©nĂ©ration englobe non seulement la pĂ©riode postcoloniale, mais Ă©galement les pĂ©riodes consĂ©cutives Ă  la guerre froide et Ă  la mondialisation[2].

Dans la littĂ©rature anglophone, les approches tiers-mondistes de la seconde gĂ©nĂ©ration sont dĂ©nommĂ©es « TWAIL », acronyme de l’expression « Third World Approaches to International Law » et « TWAIL-ers » est utilisĂ© pour dĂ©signer les partisans. Il n’existe actuellement pas encore de terminologie fixe dans la langue française pour dĂ©nommer ces approches.

Historique

Les thĂ©ories tiers-mondistes du droit international s’inscrivent dans une longue tradition de « critical internationalism »[3] et ne sont donc pas un phĂ©nomĂšne rĂ©cent[4]. Dans la mesure oĂč ces approches revendiquent elles-mĂȘmes leur caractĂšre hĂ©tĂ©rogĂšne et dĂ©centralisĂ©[5], il n’est pas aisĂ© d’en retracer un historique prĂ©cis. NĂ©anmoins, on s’accorde gĂ©nĂ©ralement Ă  distinguer les approches tiers-mondistes de la premiĂšre gĂ©nĂ©ration qui se sont dĂ©veloppĂ©es aprĂšs la Seconde Guerre mondiale et celles de la deuxiĂšme gĂ©nĂ©ration, connues sous l’appellation « Third World Approach to International Law » (TWAIL), qui sont nĂ©es Ă  la Harvard Law School durant les annĂ©es 1990.

Les approches tiers-mondistes de la premiÚre génération

Les premiĂšres thĂ©ories tiers-mondistes ont vu le jour aprĂšs la Seconde Guerre mondiale durant la pĂ©riode de la guerre froide et au lendemain de la dĂ©colonisation[6]. Une majoritĂ© d’auteurs situe la naissance de ces approches lors de la confĂ©rence de Bandung en 1955[4], d’autres considĂšrent la dĂ©claration de la Havane de Fidel Castro en 1979 comme Ă©tant une date clĂ©[7].

Ces thĂ©ories Ă©taient Ă©galement Ă©troitement liĂ©es au Groupe des 77 aux Nations unies - un groupement crĂ©Ă© en 1964, rassemblant les pays en dĂ©veloppement et visant Ă  promouvoir leurs intĂ©rĂȘts[8].

Les principaux objectifs poursuivis par les analyses tiers-mondistes de la premiĂšre gĂ©nĂ©ration touchaient Ă  « l’indĂ©pendance nationale, au droit des peuples Ă  disposer d’eux-mĂȘmes, Ă  l’intĂ©gration dans l’ordre juridique international et Ă  l’établissement de correctifs interĂ©tatiques dans le champ du commerce international »[6]. L’État Ă©tait vu comme permettant l’émancipation des peuples et les Nations unies considĂ©rĂ©es comme une institution Ă  mĂȘme de veiller Ă  l’établissement d’un nouvel ordre Ă©conomique international[9].

On vit ainsi des auteurs tels que Baxi, Bedjaoui, M’Baye, Weeramantry[3], Olawale, Chimni, Gutto, etc.[10] contribuer Ă  la production d’une littĂ©rature consĂ©quente qui constituait une critique acerbe du droit international.

TrÚs vite cependant, les théories tiers-mondistes firent face à un effort constant de discréditation de la part de la doctrine dominante, qui contestait le caractÚre scientifique de leurs travaux[11].

Les approches tiers-mondistes de la deuxiÚme génération (TWAIL)

C’est une confĂ©rence donnĂ©e en Ă  l’universitĂ© de Harvard et consacrĂ©e aux approches tiers-mondistes du droit international qui marqua le point de dĂ©part des thĂ©ories tiers-mondistes de la deuxiĂšme gĂ©nĂ©ration, les TWAIL. Il s’agit, plus prĂ©cisĂ©ment, d’un groupe crĂ©Ă© en 1996 et composĂ© de sept chercheurs (Ă  savoir Celestine Nyamu, Balakrishnan Rajagopal, Hani Sayed, Vasuki Nesiah, Elchi Nowrojee, Bhupinder Chimni) qui fut Ă  l’initiative de cette confĂ©rence. Ce groupe s’était donnĂ© pour mission de s’interroger d’une part sur la possibilitĂ© de dĂ©velopper une nouvelle approche tiers-mondiste du droit international et d’autre part sur les domaines de recherches qu’investirait une telle approche[12].

Cette premiĂšre confĂ©rence a Ă©tĂ© suivie de nombreuses autres : une deuxiĂšme confĂ©rence s’est tenue Ă  l'Osgoode Hall Law School en 2001 (TWAIL II), une troisiĂšme Ă  l'Albany Law School (en) en 2007 (TWAIL III), une autre Ă  l’universitĂ© de Columbia en 2008 (TWAIL IV), une cinquiĂšme Ă  la Oregon Law School en 2011 (TWAIL V)[13] et enfin une derniĂšre confĂ©rence a eu lieu Ă  l’universitĂ© du Caire en 2015[14]. Un sĂ©minaire a Ă©galement Ă©tĂ© organisĂ© Ă  la Sorbonne en 2010. Celui-ci visait Ă  rassembler et les acadĂ©miques anglophones qui ont fondĂ© le mouvement TWAIL et des internationalistes francophones[15].

Ces approches ont rapidement gagnĂ© en importance comme en tĂ©moigne la croissance rapide du nombre d’ouvrages, articles, thĂšses rĂ©digĂ©s sur le sujet[16]. De nombreux cours s’y rapportant sont en outre donnĂ©s dans des facultĂ©s de droit du monde entier[17].

Si les TWAIL-ers s’inscrivent dans la lignĂ©e des thĂ©ories tiers-mondistes de la premiĂšre gĂ©nĂ©ration, ils ont aussi Ă©tĂ© considĂ©rablement influencĂ©s par d’autres Ă©coles critiques du droit international telles que les Critical Legal Studies (CLS), les New Approaches to International Law (NAIL), l’approche fĂ©ministe, l’approche marxiste, l’approche post-structuraliste, etc[18].

Par ailleurs, le contexte dans lequel cette deuxiĂšme gĂ©nĂ©ration a vu le jour doit ĂȘtre distinguĂ© de celui des approches de la premiĂšre gĂ©nĂ©ration. En effet, d’une part, le processus de dĂ©colonisation Ă©tait pratiquement terminĂ© de telle sorte que la quasi-totalitĂ© des États avaient acquis leur indĂ©pendance. D’autre part, avait dĂ©butĂ© une pĂ©riode aprĂšs-guerre froide qualifiĂ©e de « mondialisation » oĂč un certain nombre de concepts apparemment universels tels l’économie de marchĂ© ou le principe des Ă©lections libres Ă©taient dĂ©sormais prĂ©sentĂ©s comme unanimement acceptĂ©s. Ce nouveau consensus Ă©tait supposĂ© traduire la reconnaissance dĂ©finitive de certaines valeurs communes et relĂ©guer au second plan, selon de nombreux auteurs, les rapports de domination Nord/Sud[19]. C’est contre ce discours que se dĂ©veloppĂšrent les TWAIL.

Ainsi, la critique proposĂ©e par les TWAIL-ers se dĂ©marqua sensiblement de celle des premiĂšres approches tiers-mondistes. En effet, contrairement Ă  ces derniĂšres, les TWAIL-ers attaquĂšrent frontalement le concept mĂȘme d’État souverain et son aspect Ă  la fois violent et autoritaire[20]. De plus, vu le constat d’échec de l’Ordre Ă©conomique international, ils estimaient qu’il Ă©tait indispensable de repenser l’histoire du droit international et de s’atteler Ă  une dĂ©construction des « narratifs eurocentrĂ©s de l’émergence et du dĂ©veloppement du droit international »[21].

Bien que les TWAIL-ers se revendiquent comme faisant partie d’un mĂȘme mouvement et partagent une mĂ©thodologie et un projet commun, ils ne constituent pas pour autant un groupe structurĂ© et hiĂ©rarchisĂ©[22]. Il existe de nombreuses divergences en son sein : certains d’entre eux se dĂ©clarent socialistes, d’autres s’assument fĂ©ministes ou d’autres encore post-structuralistes[23]. Il s’agit davantage, selon l’expression de Mickelson, d’un « chorus de voix » qui tente de faire entendre un ensemble de prĂ©occupations communes[24].

ThĂšmes centraux et objectifs actuels

Les Ă©crits individuels ou collectifs des auteurs qui se revendiquent aujourd’hui de la seconde gĂ©nĂ©ration de ces mouvements tiers-mondistes sont parcourus par plusieurs thĂ©matiques majeures et aspirations communes, qui constituent le rĂ©sultat de diverses rĂ©unions puis confĂ©rences acadĂ©miques Ă  travers le monde.

MalgrĂ© la prĂ©sence transversale de ces prĂ©occupations, les analyses tiers-mondistes actuelles sont diverses et ne peuvent ĂȘtre rassemblĂ©es en un seul corps doctrinal.

Un courant critique et dialectique

Les approches tiers-mondistes font partie intĂ©grante des approches critiques du droit international classique et se caractĂ©risent par un point de vue Ă©pistĂ©mologique rĂ©solument subversif[25]. Cette dimension critique se retrouve de façon substantielle dans plusieurs de leurs thĂšmes communs. Elles intĂšgrent Ă©galement des mĂ©thodes sociologiques qui, appliquĂ©es Ă  l’échelle du globe, sont supposĂ©es faire ressortir les phĂ©nomĂšnes sociaux qui contribuent Ă  l’évolution du droit international.

Les acadĂ©miques de la seconde gĂ©nĂ©ration pointent les limites du droit international et ne se satisfont plus des garanties formelles accordĂ©es unilatĂ©ralement par l’Occident lors du vaste mouvement de dĂ©colonisation[26]. D’une part, l’égalitĂ© souveraine des États et leur droit Ă  l’autodĂ©termination demeurent des concepts abstraits tant que les inĂ©galitĂ©s dans les processus de formation et de mise en Ɠuvre du droit international ne seront pas corrigĂ©es. Est dĂ©noncĂ©e, d’autre part, la « chronolĂątrie juridique » qui fige les rĂšgles anciennes en les consacrant comme fondements intangibles de l’ordre juridique international[27].

L’accent est ainsi mis sur les contradictions qui traversent la sociĂ©tĂ© internationale entre les pays anciennement colonisĂ©s dits du « tiers monde » et les anciens États coloniaux occidentaux[4]. Le droit international actuel est dĂ©construit comme le produit des conflits passĂ©s : les sujets de l’ordre juridique international le façonnent en profondeur en essayant d’imposer leurs positions idĂ©ologiques, leurs intĂ©rĂȘts Ă©conomiques et politiques ou en tentant de rĂ©sister Ă  cette imposition.

La solidification des contradictions sous forme de normes juridiques internationales, consensuelles ou coutumiĂšres, constitue une tentative de conciliation mais ne met pas fin, le plus souvent, Ă  l’antagonisme initial, qui refera surface lorsqu’il sera question d’interprĂ©ter le droit international.

L’importance de la conscience historique

Les approches tiers-mondistes actuelles rejettent aussi bien les perspectives des auteurs qui, Ă  la suite de Francis Fukuyama[28], ont proclamĂ© depuis plusieurs dĂ©cennies la fin de l’histoire et des grands conflits idĂ©ologiques face au consensualisme apportĂ© par la mondialisation[29] que les thĂ©ories de la « table rase », selon lesquelles les difficultĂ©s du tiers monde seraient spĂ©cifiques Ă  la conjoncture actuelle[30]. Ils reposent en effet sur le double postulat que non seulement le passĂ© colonial constitue un fait historique indĂ©niable, mais aussi qu’il continue Ă  exercer une influence centrale sur la sociĂ©tĂ© internationale actuelle[31]. Dissocier le monde prĂ©sent de l’ancienne hĂ©gĂ©monie occidentale revient Ă  dissimuler, sciemment ou non, sa reproduction sous couvert de formes nouvelles de domination.

Caractéristiques principales

HĂ©ritiĂšres du marxisme, les approches tiers-mondistes reposent sur l’idĂ©e que le droit est une question de pouvoir et que ce pouvoir se manifeste sous forme de privilĂšges maintenus moyennant des schĂ©mas de domination[32]. Les approches tiers-mondistes dĂ©noncent la lĂ©gitimation par les instances dĂ©cisionnelles et les milieux doctrinaux dominants du processus de marginalisation des populations du tiers-monde[33]. Il n’existe pas de communautĂ© internationale mais une sociĂ©tĂ© internationale en conflit perpĂ©tuel et le droit est en rĂ©alitĂ© structurellement illĂ©gitime en tant qu’instrument du pouvoir pour justifier la perpĂ©tuation partielle de l’ancien ordre colonial avec ses inĂ©galitĂ©s et son optique d’exploitation.

Si certains auteurs soulignent que l’idĂ©e d’un « tiers-monde » identifiable peut Ă  premiĂšre vue paraĂźtre assez artificielle[34], d'autres prĂ©cisent que c'est cette dynamique de la diffĂ©rence par rapport aux pays occidentaux qui permet aux pays du tiers-monde de se construire une identitĂ© commune[35]. En dĂ©pit de leur hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© gĂ©ographique et politique, ils se caractĂ©risent par leur passĂ© colonial ainsi que leur mise Ă  l’écart des processus dĂ©cisionnels au niveau international[36]. Il serait toutefois trop rapide de rĂ©duire le concept-mĂȘme de tiers-monde Ă  cette simple opposition. Dans la majoritĂ© des cas, d’autres rapprochements peuvent ĂȘtre effectuĂ©s tels la pauvretĂ© de la population, la faiblesse des institutions centrales ou les situations de conflit interne.

Il ressort des approches tiers-mondistes une dĂ©fiance vis-Ă -vis du recours Ă  la force en gĂ©nĂ©ral et des interventions dites humanitaires en particulier. Celles-ci sont en effet perçues comme une perpĂ©tuation des ingĂ©rences des anciennes puissances coloniales dans les affaires intĂ©rieures des pays du tiers-monde. Dans le mĂȘme ordre d’idĂ©es, la lutte internationale contre le terrorisme est reçue de façon trĂšs critique[37]. Selon ce courant doctrinal, alors que la « guerre contre le terrorisme » est prĂ©sentĂ©e par les pays occidentaux comme une mesure d’autodĂ©fense lĂ©gitime, prĂ©texte Ă  toutes violations du droit humanitaire, ils occultent la rĂ©alitĂ© du terrorisme d’État que subit le tiers-monde depuis la guerre froide[38].

Les TWAIL-ers s'attaquent ainsi Ă  tout un pan du vocabulaire international qui revalorise les agissements et les privilĂšges de l'Occident. Le « droit Ă  l'ingĂ©rence humanitaire » est vu comme une reformulation du devoir d'apporter la civilisation au reste du monde, de mĂȘme que la notion de « dĂ©veloppement » recouvre l'ancien idĂ©al de progrĂšs. Plus gĂ©nĂ©ralement, la distinction entre « pays dĂ©veloppĂ©s » et « pays en dĂ©veloppement » (ou PEE) maintient jusque dans la terminologie l'Ă©cart de situation entre les États, « avec la mĂȘme idĂ©e persistante d'un passage possible de celui qui est en retard vers l'Ă©tat de celui qui est en avance et qui sert de modĂšle au premier »[39].

Par opposition aux approches classiques, un intĂ©rĂȘt particulier est accordĂ© Ă  l’évolution dans les rapports extra-juridiques, plus particuliĂšrement les relations commerciales et le systĂšme financier. La conscience historique permet en effet de dĂ©passer le clivage entre droit public et droit privĂ©, si bien qu’il est permis de parler d’un vĂ©ritable droit public Ă©conomique. Le rĂŽle essentiel du commerce global dans l’expansion coloniale et par consĂ©quent dans la genĂšse du droit international public est soulignĂ© : le formalisme positiviste a relĂ©guĂ© au rang de simples aspects techniques des intĂ©rĂȘts particuliers considĂ©rables fondĂ©s sur le droit de propriĂ©tĂ© et les relations contractuelles entre divers acteurs privĂ©s[40]. Les recours actuels Ă  la notion de « dĂ©veloppement » et sa mise en Ɠuvre sous forme d’accords de coopĂ©ration Ă©conomique sont fortement critiquĂ©s comme inadaptĂ©s ou Ă  tout le moins insuffisants[41]. La sĂ©paration des sphĂšres publiques et privĂ©es constitue selon ces auteurs un pilier de l’idĂ©ologie nĂ©olibĂ©rale, les phĂ©nomĂšnes socio-Ă©conomiques Ă©tant perçus comme n’ayant aucun impact sur la vie publique[42].

Dans la mĂȘme optique, les approches tiers-mondistes se caractĂ©risent par une remise en question de la souverainetĂ© formelle et de l’État nation. A la suite de Foucault, elles partent du constat que la gouvernementalitĂ© s’est gĂ©nĂ©ralisĂ©e comme unique mode de contrĂŽle de la population et d’organisation de la sociĂ©tĂ©[43]. Le droit international public s’est construit sur l’histoire de l’État alors que celui-ci n’a jamais Ă©tĂ© et n’est certainement pas aujourd’hui le meilleur cadre pour apprĂ©hender les progrĂšs sociaux ou la conjecture internationale. Il faut donc sortir de la logique Ă©tatique et de l’idĂ©al de la rĂ©alisation de l’État souverain afin de recentrer l’étude du droit international sur la pluralitĂ© des acteurs et des corps de rĂšgles[44].

Les approches tiers-mondistes entretiennent avec la question des droits de l’homme des liens complexes. D’une part, le rejet de l’idĂ©e d’une « communautĂ© internationale », la reprivatisation des rapports politiques et le scepticisme quant au caractĂšre Ă©mancipateur du droit font songer Ă  une posture rĂ©aliste, voire matĂ©rialiste, qui s’opposerait Ă  toute forme d’idĂ©alisme. D’autre part, les valeurs humanitaires universelles ont Ă©tĂ© promues par l’Occident et sont considĂ©rĂ©es par beaucoup d’auteurs comme eurocentrĂ©es et source d’ingĂ©rence[45]. Cela n’empĂȘche pas une grande partie de la doctrine tiers-mondiste d’affirmer son attachement aux idĂ©aux dĂ©mocratiques et Ă  l’organisation de la sociĂ©tĂ© autour de valeurs partagĂ©es rĂ©ellement multiculturelles.

L’adhĂ©sion au mouvement tiers-mondiste constitue un engagement Ă  participer Ă  la proposition d’un modĂšle alternatif au niveau global. Toutes ces approches aboutissent en effet Ă  une dĂ©nonciation de l’ordre juridique international et Ă  une tentative de le rĂ©former afin de donner au tiers-monde la place qui lui revient et d’éradiquer les inĂ©galitĂ©s entre pays. Cette rupture passe par la dĂ©mocratisation des organisations internationales, la crĂ©ation de nouvelles opportunitĂ©s permettant la participation du tiers-monde aux processus dĂ©cisionnels internationaux et la rĂ©novation des milieux acadĂ©miques et politiques dans les pays du tiers-monde. La sociĂ©tĂ© civile pluraliste occupe Ă©galement une place essentielle car elle doit jouer un rĂŽle central dans la critique de l’État comme seule structure de gouvernement.

Un réseau hétérogÚne en perpétuelle transition

C’est par rapport aux rĂ©ponses Ă  apporter au « constat tiers-mondiste » que les auteurs se divisent, allant jusqu’à l’irrĂ©conciliabilitĂ©[46]. Cet Ă©clatement est inĂ©vitable en raison de la variĂ©tĂ© des cultures et des idĂ©ologies Ă  travers le monde. « L’unitĂ© des TWAIL se situe ainsi essentiellement dans leur opposition commune Ă  l’ordre international existant ainsi que dans l’adoption d’une mĂ©thode d’analyse du droit, qui prenne appui sur l’histoire du colonialisme et des rĂ©sistances. »[47]

A l’opposĂ© de mouvements plus organisĂ©s, les approches tiers-mondistes actuelles se caractĂ©risent par leur disparitĂ© et leur dĂ©centralisation – ou plutĂŽt leur polycentrisme[48]. Le mouvement doit cependant ĂȘtre dĂ©fini comme une cause commune plutĂŽt qu’en des termes gĂ©ographiques. Certaines critiques tiers-mondistes de la scĂšne internationale actuelle peuvent se retrouver dans de nombreux ouvrages et discours, notamment chez des auteurs non Ă©tiquetĂ©s comme tiers-mondistes.

Les études tiers-mondistes sont ouvertes, par essence, aux autres approches critiques du droit international, notamment marxiste, féministe et environnementale[49].

Critiques adressées aux TWAIL

Les approches tiers-mondistes du droit international, et plus particuliùrement les TWAIL, ont fait l’objet de nombreuses critiques.

Les critiques les plus souvent formulĂ©es Ă  l’égard des TWAIL sont le paradoxe qui sous-tend le mouvement, leur non-dissociation de la mĂ©thodologie occidentale, leur nihilisme et leur non-prise en considĂ©ration des approches marxistes du droit international.

Le paradoxe intrinsĂšque au mouvement

Selon certains auteurs, les TWAIL sont sous-tendues par un paradoxe relatif Ă  leur conception du droit international. Ce mouvement s’insurge contre le droit international, en ce qu’il s’est dĂ©veloppĂ© sur base du colonialisme et de la subordination du tiers-monde Ă  l’Occident, et en ce qu’il perpĂ©tue cette expĂ©rience coloniale[50].

Cependant, dans le mĂȘme temps, les TWAIL-ers considĂšrent le droit international comme un vecteur d’émancipation pour les peuples. Leur projet est donc de rĂ©soudre les problĂšmes inhĂ©rents au droit international tout en conservant les structures institutionnelles actuelles, ce que certains auteurs dĂ©noncent comme un paradoxe[50].

L'utilisation de la méthodologie occidentale

Certains auteurs reprochent aux TWAIL-ers de tenter de renverser l’idĂ©ologie capitaliste europĂ©enne prĂ©dominante dans le droit international tout en suivant la logique disciplinaire de cette idĂ©ologie[51].

En effet, les TWAIL-ers mettent en Ă©vidence les diffĂ©rences entre les promesses du systĂšme actuel du droit international, mais utilisent pour ce faire les outils mĂ©thodologiques utilisĂ©s par ce systĂšme qu’ils contestent.

Selon certains auteurs comme John D. Haskell, les TWAIL offrent des propositions intéressantes, mais leur logique argumentative et leurs préoccupations théoriques trahissent leur critique fondamentale du caractÚre impérialiste du droit international.

Cet auteur estime qu’il serait prĂ©fĂ©rable que les TWAIL dĂ©veloppent de nouveaux outils conceptuels et politiques pour faire face aux lacunes du droit international, plutĂŽt que d’essayer d’amĂ©liorer ce systĂšme sur base de la mĂ©thodologie limitĂ©e et biaisĂ©e qui le sous-tend. Ce mode d’analyse utilisĂ©e par les TWAIL en fait, selon Haskell, un mouvement conservateur, aussi acerbe que soit sa critique du droit international[51].

Le nihilisme

Les TWAIL sont Ă©galement accusĂ©es de nihilisme. Il leur est reprochĂ© de ne pas avoir d’agenda positif proposant des actions ou des rĂ©formes du droit international[52], c’est-Ă -dire de critiquer le droit international sans donner de pistes sur les maniĂšres dont il pourrait ĂȘtre amĂ©liorĂ©.

Selon David P. Fidler, la principale difficultĂ© pour les TWAIL-ers est de parvenir Ă  proposer des rĂ©formes sans tomber dans les extrĂȘmes que sont l’utopisme et la realpolitik[53]. Fidler estime que les TWAIL ne devraient pas tenter de dĂ©stabiliser le systĂšme international en remettant en cause l’hĂ©gĂ©monie militaire, politique et Ă©conomique de l’Occident.

La solution, selon lui, serait de dĂ©velopper un « nouveau solidarisme » d’unitĂ© dans la diversitĂ© et un « nouveau pluralisme » dĂ©finissant cette diversitĂ© d’une maniĂšre substantiellement crĂ©dible[53]. C’est en dĂ©veloppant ce solidarisme et ce pluralisme que les TWAIL parviendront Ă  construire une civilisation globalisĂ©e basĂ©e sur « universalisation authentique ». Il est donc impĂ©ratif, d'aprĂšs Fidler, de crĂ©er intellectuellement et d’implĂ©menter dans la pratique ces nouveaux concepts[54].

D’autres auteurs, tels que John D. Haskell, reprochent aux TWAIL de ne rien apporter de nouveau. En effet, selon lui, la production intellectuelle europĂ©enne s’intĂ©ressait dĂ©jĂ  aux idĂ©es non-europĂ©ennes bien avant l’arrivĂ©e des TWAIL-ers[55]. De plus, il estime que la majoritĂ© des rĂ©formes proposĂ©es par les TWAIL sont trĂšs semblables Ă  celles proposĂ©es par les europĂ©ens : le mouvement est donc intĂ©ressant en ce qu’il propose une analyse historique pertinente, mais une fois passĂ©e cette analyse, les TWAIL n’offrent plus aucune nouveautĂ©[56].

Haskell souligne en outre que le retour vers l’espace local n’est pas uniquement suggĂ©rĂ© par les TWAIL, mais est au contraire Ă©galement prĂŽnĂ© par la classe capitaliste transnationale. Selon lui, il ne s’agit donc lĂ  que d’une nouvelle tactique impĂ©rialiste de management, et non d’une ouverture vers l’émancipation[57].

Le silence sur les approches marxistes du droit international

John D. Haskell reproche Ă©galement aux TWAIL de ne pas s’appuyer sur les analyses marxistes du droit international. Selon lui, ces approches sont gĂ©nĂ©ralement simplifiĂ©es Ă  outrance (voire caricaturĂ©es) par la doctrine, ou sont totalement ignorĂ©es, de sorte que la doctrine marxiste est absente de la littĂ©rature tiers-mondiste[58].

Pourtant, les approches tiers-mondistes et marxistes partagent plusieurs points communs. PremiĂšrement, elles dĂ©noncent l’impĂ©rialisme en tant que dynamique centrale dans le dĂ©veloppement historique et actuel du droit international. DeuxiĂšmement, elles accusent cet impĂ©rialisme de s’ĂȘtre mutĂ© en une forme de coercition Ă©conomique qui reconnaĂźt la souverainetĂ© politique formelle des anciens peuples colonisĂ©s mais les soumet Ă  une sĂ©rie d’impĂ©ratifs financiers et institutionnels qui les prive de leurs ressources naturelles et de leur libertĂ© Ă©conomique, maintenant ainsi le dĂ©veloppement inĂ©gal Ă©tabli prĂ©cĂ©demment au cours de l’expĂ©rience coloniale[59].

Le rĂŽle de la culture et le phĂ©nomĂšne impĂ©rialiste sont donc des Ă©lĂ©ments prĂ©dominants, tant dans les approches marxistes que dans les TWAIL. Cependant, les TWAIL-ers ne mentionnent que trĂšs rarement les analyses marxistes. Haskell regrette cet oubli, car il estime que celui-ci explique leur retour systĂ©matique Ă  l’idĂ©ologie libĂ©rale du droit international et qu’un recours aux grilles d’analyse marxistes leur permettrait d’éviter cet Ă©cueil dans lequel ils tombent actuellement[60].

En effet, selon Haskell, la perspective marxiste montre que le problĂšme que prĂ©sentent les analyses tiers-mondistes du droit international est qu’elles projettent l’échec du droit international dans des termes trop « naturalistes », sans incorporer aucune Ă©valuation de sa forme historique spĂ©cifique. Ainsi, par exemple, l’impĂ©rialisme doit amener la question suivante : s’il s’agit de la quĂȘte de pouvoir sur les autres, pourquoi cette recherche s’est-elle spĂ©cifiquement axĂ©e sur la forme rĂ©gulatrice du droit international ?

L’emphase que les TWAIL mettent sur le contenu plutĂŽt que sur la forme, et sur la prĂ©existence des volontĂ©s et des sujets, les rend incapables d’expliquer les raisons historiques spĂ©cifiques de l’existence du droit international[61].

Les TWAIL font donc l’objet d’un certain nombre de critiques substantielles, bien qu’elles Ă©manent souvent d’auteurs se disant favorables aux critiques Ă©noncĂ©es par le mouvement. Selon Gathii, le dĂ©veloppement de ces critiques est peut-ĂȘtre une preuve que jusque rĂ©cemment, les approches non tiers-mondistes du droit international Ă©taient dominantes[62].

Notes et références

  1. J. T. Gathii, « TWAIL: A brief history of its origins, its decentralized network, and a tentative bibliography », Trade, law and development, 2011, vol. 3 (1), pp. 27 et 28.
  2. J. T. Gathii, « TWAIL: A brief history of its origins, its decentralized network, and a tentative bibliography », Trade, law and development, 2011, vol. 3 (1), pp. 28 à 32.
  3. O. Okafor, “Newness, Imperialism, and International Legal Reform in Our Time: A TWAIL Perspective”, Osgoode Hall Law Journal, vol. 43, 2005, p. 177.
  4. M. Mutua, “What is TWAIL?”, Proceedings of the 94th Annual Meeting of the American Society of International Law, 2000, p. 31.
  5. J. T. Gathii, “TWAIL: A Brief History of its Origins, its Decentralized Network and a Tentative Bibliography”, Trade, Law and Development, vol. 3, 2000, p. 34.
  6. M. Gallié, « Les théories tiers-mondistes du droit international (TWAIL) : Un renouvellement ? », vol. 39, n. 1, 2008, p. 19.
  7. W. Zoungrana, « Au-delĂ  de la critique
 Approches tiers-mondistes et scĂšnes internationales d’exercice du droit pĂ©nal », Champ pĂ©nal/Penal field, Vol. XIII, 2016, mis en ligne le 12 fĂ©vrier 2016, consultĂ© le 19 avril 2018, http://champpenal.revues.org/9294 ; DOI : 10.4000/champpenal.9294.
  8. K.Mickelson, « Rhetoric and Rage. Third World Voices in International Legal Discourse », Wisconsin International Law Journal, vol. 16, 1997/1998, p. 362.
  9. M. Gallié, « Les théories tiers-mondistes du droit international (TWAIL) : Un renouvellement ? », vol. 39, n. 1, 2008, p. 19. Sur la notion de Nouvel ordre économique international, voy. la Declaration for the Establishment of a New International Economic Order Document A/RES/S-6/3201 du 1er mai 1974 disponible sur http://www.un-documents.net/s6r3201.htm.
  10. J. T. Gathii, “TWAIL: A Brief History of its Origins, its Decentralized Network and a Tentative Bibliography”, Trade, Law and Development, vol. 3, 2000, p. 46.
  11. M. Gallié, « Les théories tiers-mondistes du droit international (TWAIL) : Un renouvellement ? », vol. 39, n. 1, 2008, p. 21.
  12. J. T. Gathii, “TWAIL: A Brief History of its Origins, its Decentralized Network and a Tentative Bibliography”, Trade, Law and Development, vol. 3, 2000, p. 28. De nombreux autres chercheurs se sont par la suite greffĂ©s Ă  ce groupe.
  13. J. T. Gathii, “TWAIL: A Brief History of its Origins, its Decentralized Network and a Tentative Bibliography”, Trade, Law and Development, vol. 3, 2000, p. 32.
  14. http://www.uwindsor.ca/twail2015/sites/uwindsor.ca.twail2015/files/cairo_twail_conference_program_mar_2.pdf, consulté le 11 mai 2016.
  15. http://www.univ-paris1.fr/fileadmin/UMRdroitcompare/PROGRAMME_PDF/PROGRAMME_THIRD_ WORLD-vanglaise_27_05_2010.pdf.
  16. V. D. Shetty, “Why TWAIL must not Fail: Origins & Applications of Third World Approaches to International Law”, http://publicinternationallaw.in/node/32. Voyez l’importante bibliographie proposĂ©e par Gathii dans J. T. Gathii, “TWAIL: A Brief History of its Origins, its Decentralized Network and a Tentative Bibliography”, Trade, Law and Development, vol. 3, 2000, p. 49.
  17. V. D. Shetty, “Why TWAIL must not Fail: Origins & Applications of Third World Approaches to International Law”, http://publicinternationallaw.in/node/32.
  18. O. Okafor, “Newness, Imperialism, and International Legal Reform in Our Time: A TWAIL Perspective”, Osgoode Hall Law Journal, vol. 43, 2005, p. 178.
  19. M. Gallié, « Les théories tiers-mondistes du droit international (TWAIL) : Un renouvellement ? », vol. 39, n. 1, 2008, p. 22.
  20. M. Gallié, « Les théories tiers-mondistes du droit international (TWAIL) : Un renouvellement ? », vol. 39, n. 1, 2008, p. 31.
  21. W. Zoungrana, « Au-delĂ  de la critique
 Approches tiers-mondistes et scĂšnes internationales d’exercice du droit pĂ©nal », Champ pĂ©nal/Penal field, Vol. XIII, 2016, mis en ligne le 12 fĂ©vrier 2016, http://champpenal.revues.org/9294 ; DOI : 10.4000/champpenal.9294. Voir le point 2.
  22. Ils le clament, en effet, eux-mĂȘmes. Voy. J. T. Gathii, “TWAIL: A Brief History of its Origins, its Decentralized Network and a Tentative Bibliography”, Trade, Law and Development, vol. 3, 2000, p. 27.
  23. O. Okafor, “Newness, Imperialism, and International Legal Reform in Our Time: A TWAIL Perspective”, Osgoode Hall Law Journal, vol. 43, 2005, p. 176.
  24. K.Mickelson, « Rhetoric and Rage. Third World Voices in International Legal Discourse », Wisconsin International Law Journal, vol. 16, 1997/1998, p. 360.
  25. M. GalliĂ©, « Les thĂ©ories tiers-mondistes du droit international (TWAIL) : Un renouvellement ? », Études internationales, Vol. 39, n°1, 2008, p. 18.
  26. J. T. Gathii, « TWAIL: A Brief History of its Origins, its Decentralized Network, and a Tentative Bibliography », Trade, Law and Development, Eté 2011, Vol. III, n°1, p. 41.
  27. M. Bedjoui, Pour un nouvel ordre Ă©conomique international, UNESCO, Paris, 1979, p. 136.
  28. F. Fukuyama, La fin de l’histoire et le dernier homme, Paris, Flammarion, 1992, p. 81.
  29. E. Jouannet, « Universalisme du droit international et impĂ©rialisme. Le vrai faux paradoxe du droit international ? », in Emmanuelle Jouannet et HĂ©lĂšne Ruis Fabri (dir.), « ImpĂ©rialisme et droit international en Europe et aux États-Unis », SociĂ©tĂ©Ì de lĂ©gislation comparĂ©e, 2007, p. 32.
  30. A titre d’illustration, voir le discours officiel de Nicolas Sarkozy Ă  Dakar le 26 juillet 2007, notamment rapportĂ© par P. Berbard et C. Jakubyszyn, « À Dakar, Nicolas Sarkozy appelle l’Afrique Ă  renaĂźtre et Ă  s’élancer vers l’avenir », Le Monde, 27 juillet 2007, repĂ©rĂ© sur : https://www.lemonde.fr/afrique/article/2007/07/27/a-dakar-m-sarkozy-appelle-l-afrique-a-renaitre-et-a-s-elancer-vers-l-avenir_939604_3212.html
  31. J. T. Gathii, « Alternative and Critical. The Contribution of Research and Scholarship on Developing Countries to International Legal Theory », International Law Journal, vol. 41, 2000, pp. 274-275, disponible sur : www.albanylaw.edu/twail/twail_vision_statement.php.
  32. B. Chimni, « An Outline of a Marxist Course on Public International Law », Leiden Journal of International Law, vol. 17, 2004, p. 11.
  33. M. GalliĂ©, « Les thĂ©ories tiers-mondistes du droit international (TWAIL) : Un renouvellement ? », Études internationales, Vol. 39, n°1, 2008, p. 23.
  34. A. A. Shalakany, « Arbitration and the Third World : A Plea for Reassessing Bias Under the Specter of Neoliberalism », Harvard Journal of International Law, Vol. 41, N°2, Eté 2000, Introduction, p. 422.
  35. M. Mutua, “What is TWAIL?”, Proceedings of the 94th Annual Meeting of the American Society of International Law, 2000, p. 35.
  36. J. T. Gathii, « Rejoinder. Twailing International Law », Michigan Law Review, vol. 98, no 6, 2000, pp. 2066-2071.
  37. A. Anghie, « The War on Terror and Iraq in Historical Perspective », Osgoode Hall Law Journal, vol. 43, nos 1-2, 2005, pp. 45-66.
  38. M. GalliĂ©, « Les thĂ©ories tiers-mondistes du droit international (TWAIL) : Un renouvellement ? », Études internationales, Vol. 39, n°1, 2008, p. 28.
  39. E. Tourne-Jouannet, Le Droit international, Paris, PUF, 2013, p. 97.
  40. M. Koskenniemi, « Expanding Histories of International », American Journal of Legal History, 2016, p. 110.
  41. B.S. Chimni, “Third World Approaches to international Law: Manifesto”, International Community Law Review 8, 2006, p. 4.
  42. A. A. Shalakany, « Arbitration and the Public/private Distinction », Harvard Journal of International Law, Vol. 41, N°2, Eté 2000, Introduction, p. 454.
  43. M. Foucault, Sécurité, territoire, population, éditions du Seuil, Paris, 2004, p. 111.
  44. M. Koskenniemi, « Expanding Histories of International », American Journal of Legal History, 2016, p. 109.
  45. C. Nyamu, « How Should Human Rights and Development Respond to Cultural Hierarchy in Developing Countries ? », Harvard International Law Journal, vol. 41, no 2, 2000, pp. 381-419.
  46. B. Chimni, « An Outline of a Marxist Course on Public International Law », Leiden Journal of International Law, vol. 17, 2004, pp. 11-13.
  47. M. GalliĂ©, « Les thĂ©ories tiers-mondistes du droit international (TWAIL) : Un renouvellement ? », Études internationales, Vol. 39, n°1, 2008, p. 25.
  48. J. T. Gathii, « TWAIL: A Brief History of its Origins, its Decentralized Network, and a Tentative Bibliography », Trade, Law and Development, Eté 2011, Vol. III, n°1, p. 37.
  49. J. T. Gathii, « TWAIL: A Brief History of its Origins, its Decentralized Network, and a Tentative Bibliography », Trade, Law and Development, Eté 2011, Vol. III, n°1, p. 45.
  50. J. D. Haskell, « TRAIL-ing TWAIL: Arguments and Blind Spots in Third World Approaches to International Law », Canadian journal of law and jurisprudence, 2014, vol. 27, p. 383.
  51. J. D. Haskell, « TRAIL-ing TWAIL: Arguments and Blind Spots in Third World Approaches to International Law », Canadian journal of law and jurisprudence, 2014, vol. 27, p. 386.
  52. J. T. GathiiI, « TWAIL: A brief history of its origins, its decentralized network, and a tentative bibliography », Trade, law and development, 2011, vol. 3 (1), p. 42.
  53. D. P. Fidler, « Revolt Against or From Within the West? TWAIL, the Developing World, and the Future Direction of International Law », Chinese journal of international law, 2003, vol. 2, p. 74.
  54. D. P. Fidler, « Revolt Against or From Within the West? TWAIL, the Developing World, and the Future Direction of International Law », Chinese journal of international law, 2003, vol. 2, p. 75.
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  59. J. D. Haskell, « TRAIL-ing TWAIL: Arguments and Blind Spots in Third World Approaches to International Law », Canadian journal of law and jurisprudence, 2014, vol. 27, p. 409.
  60. J. D. Haskell, « TRAIL-ing TWAIL: Arguments and Blind Spots in Third World Approaches to International Law », Canadian journal of law and jurisprudence, 2014, vol. 27, p. 410.
  61. J. D. Haskell, « TRAIL-ing TWAIL: Arguments and Blind Spots in Third World Approaches to International Law », Canadian journal of law and jurisprudence, 2014, vol. 27, p. 412.
  62. J. T. Gathii, « TWAIL: A brief history of its origins, its decentralized network, and a tentative bibliography », Trade, law and development, 2011, vol. 3 (1), p. 43.
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