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Apologie de Hattusili III

L’Apologie de Hattusili III est un texte hittite qui met en scĂšne le roi Hattusili III (1267-1237 av.J.-C[1]) racontant comment, sous la protection bienveillante de la dĂ©esse Shaushga, il s’est hissĂ© jusqu’à la tĂȘte du royaume des Hittites. Il s’agit d’un document d’un intĂ©rĂȘt majeur pour la comprĂ©hension de l’histoire et de l’historiographie de l’Empire hittite au XIIIe siĂšcle av. J.-C.

Apologie de Hattusili III (KUB I 1). Tablette conservée au musée archéologique d'Istanbul.

La singularitĂ© de ce texte, qui est l'un des seuls textes hittites relevant du genre de l’apologĂ©tique royale[2], s’explique par les circonstances exceptionnelles qui ont vu Hattusili arriver au pouvoir. Fils cadet du roi Mursili II, Hattusili n’était pas destinĂ© Ă  devenir le souverain d’un royaume oĂč le pouvoir se transmet du pĂšre au fils aĂźnĂ© ; il aurait dĂ» rester un personnage secondaire de la cour et s’effacer devant son neveu Urhi-Teshub. Ce n’est pourtant pas ce qui s’est passĂ© : aprĂšs une guerre civile, le prĂ©tendant lĂ©gitime, Urhi-Teshub, s’est retrouvĂ© exilĂ©, tandis que Hattusili devenait Grand Roi des Hittites. Cette arrivĂ©e au pouvoir violente avait toutes les chances de passer pour une usurpation ; aussi devait-elle ĂȘtre lĂ©gitimĂ©e et justifiĂ©e. C’est ce Ă  quoi s’est employĂ© le rĂ©dacteur de ce texte que les modernes appellent, Ă  dĂ©faut de titre originel, l’Apologie de Hattusili III.

Le texte est constituĂ© de quatorze paragraphes et s’étend sur deux tablettes[3]. Emmanuel Laroche l’a rĂ©pertoriĂ© comme le 81e texte (CTH 81) de son Catalogue des textes hittites. Les exemplaires qui se trouvent Ă  notre disposition, dans un Ă©tat plus ou moins fragmentaire, ont tous Ă©tĂ© dĂ©couverts dans les magasins est du Grand Temple (Temple 1) d’Hattusa, capitale du royaume hittite (env. XVIIIe – XIIe siĂšcle av. J.-C.)[4]. Le texte est en grande partie Ă©tabli Ă  partir du manuscrit KUB I 1[5].

Résumé

L’Apologie de Hattusili III raconte, par la voix d’Hattusili lui-mĂȘme, comment, sous la protection bienveillante de la dĂ©esse Shaushga, il s’est hissĂ© jusqu’à la tĂȘte du royaume des Hittites, en passant par une sĂ©rie de postes administratifs et militaires[6]. Le texte fournit lui-mĂȘme son meilleur rĂ©sumĂ© :

« DIƠTAR[=ma=mu=kån GAƠAN-YA ilani ilani] namma tiƥkit
nu=za DUMU.LUGAL eĆĄun nu=za G[(AL)] MEĆ EDI kiĆĄáž«aáž«at[
GAL MEĆ EDI=ma=za LUGAL KUR ážȘakp[(iĆĄĆĄ)]=a kiĆĄáž«aáž«at
LUGAL KUR ážȘak[(piĆĄ=ma=za)] LUGAL.GAL namma kiĆĄáž«aáž«[(a)]t[7] »

(Apologie d’Hattusili, §11-12 ; colonne IV, lignes 39-43)

« Shaushga, ma Dame, a continuĂ© Ă  m’élever Ă©chelon aprĂšs Ă©chelon. J’étais prince, je suis devenu Chef de la Garde royale. Chef de la Garde royale, je suis devenu roi d’Hakpis. Roi d’Hakpis, je suis devenu Grand Roi[8]. »

§1-2 : Préambule.

Avant le rĂ©cit proprement dit, qui commence au §3 avec la naissance de Hattusili III, le texte s’ouvre de façon traditionnelle sur une gĂ©nĂ©alogie du roi (§1) et une prĂ©sentation du sujet du texte (§2). La gĂ©nĂ©alogie mentionne les noms du pĂšre de Hattusili, Mursili II (1321-1295), de son grand-pĂšre, Suppiluliuma I (1350-1322) et du fondateur du royaume hittite, Hattusili I (1650-1620). Suit un bref paragraphe (§2) qui introduit le thĂšme du texte, Ă  savoir « le pouvoir divin de Shaushga » ou « la providence divine de Shaushga » (Ć A DIĆ TAR parā áž«andandatar), et appelle les gĂ©nĂ©rations Ă  venir Ă  respecter cette dĂ©esse[9]. Le parcours de Hattusili est ainsi d’emblĂ©e placĂ© sous l’égide de Shaushga.

§3 : PrĂȘtre de Shaushga.

Le premier Ă©pisode se passe pendant l’enfance de Hattusili, dernier des quatre enfants de Mursili II. Malade au point que son entourage doute de sa survie, le jeune Hattusili est confiĂ© par son pĂšre Ă  la dĂ©esse Shaushga. Cette dĂ©cision est prĂ©sentĂ©e comme ayant Ă©tĂ© suggĂ©rĂ©e Ă  Mursili par Shaushga elle-mĂȘme, dans un rĂȘve. Pour Hattusili, cette rencontre avec la dĂ©esse scelle le dĂ©but d’un destin exceptionnel :

« nu=mu DIĆ TAR GAĆ AN-YA Ć U-za IáčąBAT n=aĆĄ=mu=kĂĄn parā áž«andanteĆĄta. »

(Apologie d’Hattusili III, §3 ; colonne I, ligne 20)

« Shaushga, ma Dame, me prit par la main, elle devint mon guide divin[10]. »

§4 : Chef de la Garde royale et gouverneur des Haut-Pays.

À la mort de Mursili II (en 1295 av.J.-C.), le fils aĂźnĂ©, Muwatalli, devient roi tandis que Hattusili devient chef de l’armĂ©e (EN.KARAĆ ) de son frĂšre, Chef de la Garde royale (GAL MEĆ EDI) et gouverneur des Hauts-Pays, succĂ©dant dans cette derniĂšre fonction Ă  Armatarhunta. La bienveillance du roi et de Shaushga Ă  son Ă©gard lui attire les foudres d’Armatarhunta. Ses ennemis, jaloux de son succĂšs, se multiplient. Il doit bientĂŽt affronter un procĂšs, dont il sort finalement innocentĂ© grĂące au soutien de la dĂ©esse Shaushga, qu’il remercie et loue longuement.

§5-11 : Chef de l’infanterie et de la charrerie hittites et roi d’Hakpis.

AprĂšs son procĂšs, Hattusili revient en grĂące auprĂšs de son frĂšre, qui le nomme chef de toute l’infanterie et de la charrerie du royaume (KARAĆ  ANĆ E.KUR.RAMEĆ  Ć A KUR URUážȘatti). À ce poste, il accomplit plusieurs exploits militaires qui ne sont pas dĂ©taillĂ©s ici, mais qui, promet Hattusili, le seront dans un autre texte (§5).

Lorsque Muwatalli dĂ©place la capitale du royaume de Hattusa Ă  Tarhuntassa dans le sud, Hattusili reste au nord oĂč il affronte les Gasgas et l’emporte, malgrĂ© l’infĂ©rioritĂ© numĂ©rique de ses troupes et grĂące Ă  la protection de Shaushga (§6-7). Par la victoire militaire ou par la paix, Hattusili obtient que les intĂ©rĂȘts hittites dans le nord soient toujours assurĂ©s. Il est nommĂ© roi d’Hakpis par son frĂšre Muwatalli (§8).

Lors de la bataille de Qadesh (1274 av.J.-C.), qui oppose l’armĂ©e hittite de Muwatalli Ă  l’armĂ©e Ă©gyptienne de RamsĂšs II, Hattusili joue un rĂŽle important : il envoie des contingents en provenance des pays qu’il a rĂ©intĂ©grĂ©s au royaume hittite et il dirige l’infanterie et la charrerie hittites. Armatarhunta cherche Ă  nouveau Ă  lui nuire en lançant des malĂ©dictions contre lui, mais vainement. AprĂšs la bataille de Qadesh, sur le chemin du retour, Hattusili s’arrĂȘte Ă  Lawazantiya pour honorer Shaushga. C’est lĂ  que, sur les conseils de la dĂ©esse, il Ă©pouse Puduhepa (§9).

Un nouveau procĂšs s’engage opposant Hattusili Ă  Armatarhunta. Ce dernier, accusĂ© de sorcellerie, perd le procĂšs. Cependant, Hattusili fait preuve de clĂ©mence envers Armatarhunta et son fils, Sippaziti, en leur permettant de rĂ©cupĂ©rer la moitiĂ© de leur territoire. Il exile cependant la femme et l’autre fils d’Armatarhunta Ă  Alasiya (Chypre) (§10a).

À la mort du roi Muwatalli (1272 av.J.-C.), Hattusili place un fils de second rang[11] de Muwatalli sur le trĂŽne, Urhi-Teshub. Pendant qu’il accumule encore les succĂšs militaires dans le Nord, notamment en reconstruisant la ville sainte de Nerik qui avait Ă©tĂ© dĂ©truite sous le rĂšgne d’Hantili I (1590-1560 av.J.-C.) et en sĂ©curisant sa pĂ©riphĂ©rie, la jalousie du Grand Roi envers lui grandit. Urhi-Teshub retire Ă  son oncle certains territoires que celui-ci avait conquis. Pendant les sept premiĂšres annĂ©es du rĂšgne de son neveu, Hattusili ne rĂ©agit pas, par respect pour son frĂšre Muwatalli. Mais lorsqu’Urhi-Teshub lui enlĂšve les villes de Nerik et Hakpis, Hattusili dĂ©clare la guerre. Soutenu par Shaushga, il parvient Ă  ranger de son cĂŽtĂ© les Kaska ainsi que tout le royaume hittite. La guerre s’achĂšve sur la capture d’Urhi-Teshub, qui reçoit en compensation plusieurs villes fortifiĂ©es dans la rĂ©gion de Nuhassi. AprĂšs une tentative de complot menĂ©e de concert avec Babylone, Urhi-Teshub finit par ĂȘtre exilĂ© par Hattusili (§10b-§11).

§12 : Grand Roi de l’empire hittite.

Hattusili se dĂ©crit comme un roi respectĂ© de ses amis et victorieux contre ses ennemis, qui a dĂ©passĂ© ses prĂ©dĂ©cesseurs par l’ampleur de ses alliances et de ses victoires. Il se prĂ©sente comme respectueux de son frĂšre Muwatalli et de l’hĂ©ritier de ce dernier, Kuruntiya, qu’il a nommĂ© roi de Tarhuntassa. Il prend plusieurs mesures pour honorer Shaushga, qui l’a conduit jusqu’au sommet de l’Empire : il lui consacre la propriĂ©tĂ© d’Armatarhunta, fait Ă©riger des statues en son honneur et nomme son fils Tudhaliya comme serviteur de la dĂ©esse.

§13-14 : Conclusion.

Le texte s’achĂšve sur un vƓu pour l’avenir, le vƓu que la descendance de Hattusili et Puduhepa ne soient pas dĂ©tournĂ©s du service de Shaushga. Enfin, Hattusili prĂ©dit la malĂ©diction de Shaushga Ă  celui qui osera empĂȘcher sa descendance de rĂ©gner.

La question du genre

Le problĂšme du genre littĂ©raire de l’Apologie de Hattusili III est illustrĂ© par la multiplicitĂ© des titres qui ont Ă©tĂ© proposĂ©s par les modernes pour ce texte : « rapport sur l’accession au trĂŽne » (en allemand : Thronbesteigungsbericht), « autobiographie de Hattusili III », « apologie de Hattusili III ». La derniĂšre de ces dĂ©nominations, suggĂ©rĂ©e par Sturtevant en 1932, a finalement Ă©tĂ© retenue par la plupart des savants[12], qui ont sans doute Ă©tĂ© inspirĂ©s dans ce choix par les exemples antiques d’apologie que sont l’Apologie de Socrate ou l’Apologie des ChrĂ©tiens de Justin : ces rĂ©cits, comme le texte hittite, ne constituent pas un compte-rendu neutre de l’ensemble de la vie d’un homme ou d’une communautĂ© ; ce sont des textes idĂ©ologiquement orientĂ©s, qui visent Ă  dĂ©fendre celui ou ceux qu’ils dĂ©crivent. Il y a pourtant une diffĂ©rence notable entre le texte hittite et ces textes grecs : dans le cas de Platon ou de Justin, l’homme ou la communautĂ© qui se dĂ©fend n’est pas dans une position de pouvoir comme l’est Hattusili. Plus que d’une apologie, il s’agit donc dans le cas du texte hittite d’une justification, d’une entreprise de lĂ©gitimation. Hoffner retient nĂ©anmoins le terme d’apologie, dont il donne une dĂ©finition amĂ©nagĂ©e : « un document composĂ© pour un roi qui a usurpĂ© le trĂŽne, composĂ© dans le but de dĂ©fendre ou justifier son accession au pouvoir par la force »[13]. Il propose comme autre candidat au statut d’apologie l’Édit de TĂ©lĂ©pinu, commandĂ© par le roi hittite Ă©ponyme TĂ©lĂ©pinu (1525-1500). D’autres savants ont proposĂ© des parallĂšles avec d’autres textes du Proche-Orient ancien, Ă©toffant ainsi le corpus des apologies royales : le rĂ©cit de l’accession au pouvoir de David, dans l’Ancien testament (I Sam 15 – II Sam 8), ou certains rĂ©cits de la littĂ©rature assyrienne[14].

La fonction justificative de l’Apologie de Hattusili III est Ă©vidente : le rĂ©dacteur du texte s’emploie Ă  montrer que Hattusili, l’usurpateur, n’a rien Ă  se reprocher. Il Ă©tait aimĂ© des dieux, de Muwatalli et de ses alliĂ©s ; il savait faire preuve de clĂ©mence envers ses ennemis intĂ©rieurs et de courage face aux ennemis extĂ©rieurs ; quand il attaquait, c’était seulement pour se dĂ©fendre, que ce soit contre les Gasgas ou contre son neveu Urhi-Teshub. NĂ©anmoins, la dimension justificative du texte n’en est peut-ĂȘtre pas le dernier mot. L’importance accordĂ©e Ă  Shaushga, de la premiĂšre phrase Ă  la derniĂšre phrase[15], a pu laisser penser que ce texte Ă©tait en fait un dĂ©cret religieux instituant un culte pour cette dĂ©esse, avec les modalitĂ©s traditionnellement citĂ©es : la nomination d’un prĂȘtre - le fils de Hattusili et Puduhepa - et de ses successeurs - la descendance de Hattusili et Puduhepa - et l'exemption d’impĂŽts pour le temple[4].

Notes et références

  1. Voir Bryce 2005, xv. Sur l'Ă©tablissement de la chronologie du royaume hittite, voir Bryce 2005, 375-382
  2. Voir Hoffner 1975 sur le genre de l'apologie royale chez les Hittites
  3. Voir Otten 1981, 58-59 pour une reconstitution du manuscrit principal A, basé en majorité sur KUB I 1
  4. Voir van den Hout 2003, 199
  5. Voir Otten 1981, 32 qui présente l'ensemble des manuscrits et renvoie aux différentes éditions des textes en cunéiforme
  6. Voir Bryce 2005, 246 : « a largely self-laudatory and self-justificatory account of Hattusili’s progress through a succession of administrative and military appointments to his seizure of the Hittite throne. »
  7. Edition Otten 1981, 26
  8. Traduction personnelle de l’utilisateur Edouard d’Erasme
  9. Voir Mouton 2007, 524
  10. Voir Mouton 2007, 526
  11. DUMU EĆ ERTU, littĂ©ralement un « fils de concubine », c’est-Ă -dire un bĂątard, par opposition Ă  ĆĄaáž«Ć«ĆĄáž«uĆĄĆĄuwaliĆĄ DUMU-aĆĄ
  12. Voir Hoffner 1975 ; Otten 1981 ; van den Hout 2003
  13. Voir Hoffner 1975, 49 : « a document composed for a king who had usurped the throne, composed in order to defend or justify his assumption of the kingship by force »
  14. La validité de ces comparaisons a néanmoins été mise en cause, aussi bien du cÎté hittite que du cÎté hébreu. Voir Walton 1994, 126 qui se demande si, étant donné l'absence de caractéristiques formelles communes entre ces textes, on peut vraiment parler d'un genre de l'apologie royale qui se serait diffusé dans le Proche-Orient
  15. AprĂšs la gĂ©nĂ©aologie de Hattusili, le texte commence sur cette phrase : Ć A DIĆ TAR parā áž«andandatar memaáž«áž«i, « Je dĂ©crirai le parā áž«andandatar (pouvoir divin / plan prĂ©Ă©tabli) de Shaushga ». Expression qui constituait peut-ĂȘtre, aux yeux des Hittites, le titre du texte. Le dernier paragraphe s'achĂšve sur la mention de Shaushga, qu'il faut craindre plus que n'importe quel autre dieu

Bibliographie

  • (en) Trevor Bryce, The Kingdom of the Hittites, New York, Oxford University Press,
  • (en) Harry H. Hoffner, « Propaganda and Political Justification in Hittite Historiography », Goedicke, H. & Roberts, J.J.M. (Ă©d.), Unity and Diversity : Essays in the History, Literature, and Religion of the Ancient Near East, Baltimore & London, The Johns Hopkins University Press,‎ , p. 49-62
  • Emmanuel Laroche, Catalogue des textes hittites, Paris, Klincksieck,
  • Alice Mouton, « Sur la diffĂ©renciation entre rĂȘve et parā handandatar dans les textes hittites », Vita. Festschrift in Honor of Belkıs and Ali Dinçol, Istanbul, Ege Yayınları,‎ , p. 523-531
  • (de) Heinrich Otten, Die Apologie Hattusilis III, Wiesbaden, Otto Harrassowitz,
  • (en) Theo van den Hout, « Apology of Hattusili III », William W. Hallo (Ă©d.), The Context of Scripture : Canonical Compositions of the Biblical World, vol. 1, Leiden & Boston, Brill,‎ , p. 199-204
  • (en) John H. Walton, Ancient Israelite Literature in its Cultural Context : A Survey of Parallels Between Biblical and Ancient Near Eastern Texts, Zondervan, (lire en ligne)

Liens externes

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